Enchantement

Ils étaient en séjour chez Gabriel.
Alexandra s’était laissée convaincre de s’entraîner chez lui, elle progressait beaucoup et elle avait d’énormes lacunes à combler en magie, et Gabriel avait de très bons magiciens qu’il avait désigné comme professeurs pour elle.
Chris l’accompagnait par simple mesure de précaution.
Ils partageaient la même chambre et dormaient ensemble.
Gabriel n’avait fait aucun commentaire à ce sujet.

Un jour, Chris fit un malaise et Alexandra était plus qu’inquiète à son sujet.
Elle le veilla à longueur de temps.

*

Chris était à l’infirmerie, sur un lit allongé, il semblait dormir profondément.
Alexandra, assise à ses côtés, elle lui tenait la main et s’était endormie sur la couverture, à moitié affalée sur Chris.

Chrystal n’avait pas réussi à lui faire entendre raison pour dormir dans un vrai lit.

Gabriel vint vérifier, et Chrystal haussa les épaules, impuissante.

*

Il soupira.
Elle s’était endormie sur son siège, le haut du corps sur le lit, sa main serrant celle de Chris dans la sienne.
Chrystal avait haussé les épaules, elle avait essayé de lui faire entendre raison mais têtue comme elle était, Alexandra n’avait pas voulu quitter Chris.
Gabriel s’accroupit à ses côtés et essaya de la réveiller sans la brusquer.
Ce qui ne fut pas facile, elle dormait profondément. Lorsqu’elle ouvrit enfin les yeux, elle mit un temps pour comprendre ce qu’il se passait.
Il perdit patience, et la força à lâcher la main de Chris, puis l’emmena dans la pièce adjaçante pour lui parler sans déranger l’infirmerie.

— À quoi tu joues ?!
Il était agacé et il ne comprenait pas ce qu’elle faisait.

Alexandra se réveillait à peine et le ton de Gabriel l’effraya. Elle tremblait légèrement, elle n’avait pas mangé depuis que Chris était dans cet état, elle était chamboulée par sa condition et elle était trop inquiète.

— Je…

Elle n’arriva pas à réunir des arguments ni formuler des explications. Elle ne savait pas de quoi il fallait qu’elle se justifie.

— Chris est entre de bonnes mains, c’est stupide de le veiller aux dépends de ta propre santé !

Alexandra était aux bords des larmes.
Elle avait un mauvais pressentiment au sujet de Chris, peut-être à tort, mais elle tenait trop à lui et c’était la première fois qu’il se trouvait dans un état similaire question santé.

— Mais…

Elle n’avait aucun bon argument. Sa peur était irrationnelle. Sa voix s’étrangla.

— Il n’y a pas de « mais » tu vas arrêter de faire ta tête de mule, et aller te reposer. Qu’est-ce que tu veux qu’il croit s’il te retrouve épuisée après sa maladie ? Ca va finir par me retomber dessus.

Elle baissa les yeux. Elle perdait pieds sans Chris.
Gabriel s’approcha d’elle et posa la main sur son épaule.

— Allez, sois raisonnable.

Elle releva les yeux vers lui, ils étaient mouillés.
Ele fondit en larmes, dans les bras de Gabriel.
C’était à son tour d’être désemparé.
Il la serra timidement dans ses bras. Lui tapotant doucement le dos.

— Hé, ça va aller…

Il ne s’attendait pas à ce qu’elle se blottisse ainsi dans ses bras. Il la sentit faillir, elle tremblottait.

— Qu’est-ce que je te disais…

Il la porta, la serrant contre lui et l’emmena.
Il était sur le point de la ramener dans la chambre qu’elle occupait avec Chris,

— Ne… me laisse pas seule…
Supplia t-elle, en s’accrochant à sa chemise.

Il soupira et fit demi-tour pour l’installer dans sa chambre personelle.
Elle n’était pas dans son état habituel, elle était si vulnérable et désemparée.
Elle s’endormit presque aussitôt, après qu’il l’ait installée au fond du lit, elle s’accrocha à son bras encore un instant, de peur qu’il ne s’en aille.
Il dut attendre qu’elle s’endorme profondément pour la quitter: tirant légèrement les rideaux du baldaquin pour lui offrir un semblant d’intimité.

Il quitta la chambre pour s’occuper du problème.
Il inspira un grand coup et se dirigea vers sa destination.
Il savait que la cause de l’alitement de Chris n’était pas naturelle, et il devait s’en occuper rapidement et sans que cela ne s’ébruite.
Voir Alexandra dans cet état l’avait chamboulé.
Il se rendait compte de la relation particulière qu’elle entretenait avec Chris, il savait qu’il aurait du mal à se faire une place dans son coeur, mais il en avait maintenant la preuve.

Cela n’était pas sans risque, lorsqu’il discuta avec la personne responsable du mal, il marchait sur des oeufs. Il devait faire en sorte que Chris soit défait du sort qui l’emprisonnait sans que sa situation n’empire, et cela dépendait de la seule volonté de l’enchanteur.
Il réussit à le convaincre que cela n’était pas pour le mieux, tout en gardant sa composition, il ne laissa rien paraître.

Chris reprit des couleurs et ses esprits dans les heures qui suivirent.
Alexandra se réveilla le lendemain, en panique.
Gabriel était retourné dans sa chambre.
Il n’avait pas osé se coucher dans le même lit.
Elle failli perdre l’équilibre en se levant et en cherchant à sortir.
Gabriel la rattrapa et la forca à se recoucher.

— Du calme, rien ne presse. Tu vas tout d’abord prendre le temps de manger quelque chose, je t’apporte ça.
— C-chris…

— Oui oui, il s’est réveillé.
Annonça t-il avec un sourire sincère.

Il attendait de la voir se réjouir et il ne fut pas déçu.
Elle se détentit et n’opposa plus aucune résistance.

2021.11.17

Fougue [R-18]

Les lèvres contre celles de Chris, elle en avait rêvé.
Elle ne pensait pas aux conséquences de ce qu’elle était en train de faire, cela lui procurait un tel bien-être d’être à nouveau proche de la personne qu’elle avait aimé aussi fort et aussi longtemps.
Ses mains caressant le corps, la moindre parcelle de peau et de muscles de Chris, elle avait l’impression d’être dans un rêve, cela faisait tellement longtemps qu’elle n’avait pas pu le toucher ainsi, et elle saisissait cette chance de pouvoir le faire à nouveau, craignant que ce soit la dernière fois, elle mémorisait la douceur du contact dans son esprit.

Elle avait réussi à briser la glace qu’il avait fait apparaître entre eux, un simple baiser, il avait baissé sa garde et son geste avait fait fondre son bouclier si impénétrable.
Il l’avait suppliée de l’arrêter, de le ramener à la raison, en vain, elle n’attendait que cela.
Elle qui pensait qu’il ne ressentait plus rien pour elle depuis tout ce temps, il l’avait bernée, elle s’était sentie trahie, il lui avait mentit.
Cependant, elle était si soulagée qu’il ressente encore les mêmes sentiments, que cela soit réciproque, même après tout ce temps.

Il était emporté par la fougue.
Il essayait de se restreindre, d’arrêter ce qu’il était en train de faire, il était encore temps, mais elle savait la vérité maintenant, et elle avait balayé ses craintes en lui disant qu’il n’y avait rien de mal. Devait-il la croire ? Lui faire confiance ? Elle n’était pas du genre à mentir mais il doutait. Quoi qu’il en soit, son esprit était ailleurs. C’était tellement bon de pouvoir la sentir si près, si proche de lui à nouveau, il en avait rêvé aussi. Un désir inavouable, elle lui avait manqué, c’était indéniable. La douceur de sa peau contre la sienne, son odeur, ses cheveux, son souffle haletant de plaisir.
Il ne pouvait plus se contrôler, c’était beaucoup trop excitant et ennivrant. Elle le connaissait et il ne pouvait rester insensible à sa manière qu’elle avait de le caresser, de se coller contre lui, de l’étreindre. Tout son corps lui exprimait à quel point elle avait envie de lui.
Il finit par cesser de lutter contre lui-même, et il se laissa porter par l’instant présent. Pour cette fois, il avait baissé sa garde et il lui faisait entièrement confiance vis à vis des conséquences. Il préférait ne pas y penser à ce moment précis.

Le goût de ses lèvres, la manière qu’elle avait de caresser sa langue avec la sienne, sa reprise de souffle, le mordillement de ses lèvres.
Il massait le corps, les formes d’Alexandra avec ses mains légèrement rugueuses par les entraînements et ses déploiements sur le terrain. De ses hanches pour remonter jusqu’à son torse, lentement mais avec force.
Il la serrait tout contre lui, il sentait sa chaleur contre lui et ce contact lui était tellement rassurant.
Il la sentait perdre le contrôle tout autant que lui, elle s’accrochait à lui, murmurant son prénom, lui suppliant de la prendre toute entière et de la consumer.

Elle était vêtue d’une simple robe de chambre à bretelles fines, et elle n’avait rien mis dessous, en connaissance de cause.
Chris avait ralenti et arrêté Alexandra pour prendre des précautions, il ne souhaitait toujours pas la mettre en cloque et il ne voulait pas la blesser.

— Alexandra… attends… je ne veux surtout pas te faire mal…
— Tu ne me feras pas mal…

Elle attrapa sa main pour la mettre entre ses cuisses.
Elle était trempée et bien prête à l’accueillir.
Chris toucha et avec toute sa délicatesse, y inséra un doigt. Lentement.
Alexandra réagit aussitôt en se contractant et se mordant les lèvres.
Souhaitant aussi lui faire du bien, elle déplaca et positionna ses mains sur son érection.
Sa chair était brûlante à cet endroit, et son membre bien droit.
Il laissa échapper un petit souffle coupé, de surprise.

2021.11.15

Aveu [R-18]

Ils étaient arrives dans le château de Gabriel et il n’avait pas prévu qu’elle serait accompagnée.
Il pensait préparer une seconde chambre pour Chris, mais elle insista pour qu’ils partagent la même chambre, parce qu’elle ne voulait pas déranger plus.
Chris ne dit rien de plus et Gabriel ne chercha pas à la contredire.
Il ne savait pas quel genre de relation ils avaient mais sachant qu’il était son garde du corps, il ne se méfia pas plus.

Ils s’installèrent en déchargeant leur peu d’affaires dans la chambre préparée, Chris remarqua les détails et les efforts mis dans cette pièce pour qu’elle soit la plus agréable possible pour Alexandra.
Le lit était largement assez grand pour deux personnes, sans qu’ils ne se gênent.
Il pensait occuper le canapé pour le séjour mais alexandra lui fit remarquer que ce n’était pas la peine et qu’ils pourraient partager le lit.
Il ne chercha pas à la contredire.
Il se maîtrisa et se prépara mentalement à ne pas montrer ses sentiments et son affection plus que nécessaire.

À la nuit tombée, après le dîner la douche et le brossage de dents, Alexandra était en robe de nuit et s’était allongée au fond du matelas et de la couverture, occupant un côté du lit.
Chris dormait avec un simple T-shirt et un short.
Il s’allongea de l’autre côté et se mit sous la couette également.

*

Ils n’avaient pas eu l’occasion de discuter plus amplement de leur relation, et Alexandra pensait à trop de choses pour réussir à s’endormir.
Chris, avait le coeur qui battait plus fort que d’habitude et essayait de penser à autre chose pour que cela ne se remarque pas. Il l’entendait battre jusque dans ses tempes. Fermant les yeux et fronçant les sourcils, il tentait tant bien que mal de se focaliser sur un sujet diver.
La voix d’Alexandra retentit.

— … Tu dors ?
Demanda t-elle.

Chris ne put pas faire semblant.

— Non… pourquoi… ?
Répondit-il, tout simplement.

— … Je t’ai réveillé… ?
— Non. Je n’arrive pas à m’endormir…
— Moi non plus…
— À quoi tu penses ?

Elle se tourna vers lui, et le regarda dans les yeux.

— Je sais que je ne devrais pas… mais j’ai encore des sentiments pour toi… et même si je peux faire semblant de ne plus en avoir… mon corps ne désire qu’une seule chose… te prendre dans mes bras, je…
— N’en dis pas plus…
— Excuse moi…je sais que je dois tourner la page, et puis maintenant que j’ai signé ce contrat avec Gabriel, j’ai réalisé que je devais arrêter de me comporter comme une enfant, il vaut mieux que je grandisse et que je passe à autre chose.

Elle baissa les yeux, et son visage affichait une certaine tristesse. Elle était vulnérable.
Chris ne put s’empêcher de tendre sa main pour lui caresser le visage et tenter de la réconforter.
Surprise, elle le regarda avec stupéfaction et elle força un sourire, les larmes lui montaient aux yeux.

— Pourquoi tu fais ça… ? Pourquoi tu restes si gentil avec moi… ? Ca serait tellement plus simple si tu étais detestable !
— J’ai quelque chose à t’avouer… il n’a jamais été simple pour moi non plus, de me séparer de toi… mais regarde toi aujourd’hui. L’avenir radieux qui t’attend. Si nous étions restés ensemble, jamais tu aurais songé à accepter l’offre de Gabriel. Ne me dis pas le contraire. Je le vois dans tes yeux. Je pense avoir fait le bon choix, même si j’en ai également le coeur meurtri.

— … T’es qu’un idiot, surtout !
S’écria t-elle, outrée, les yeux écarquillés.

Elle prenait cet aveu en pleine face. Elle n’en croyait pas ses oreilles.
Alexandra chercha à lui donner un coup de genoux entre les jambes de Chris mais il l’arrêta d’une main.
Le contact de sa main sur la cuisse d’Alexandra la fit frissonner, même s’il ne faisait que la maintenir, elle glissa sa main sur son bras, ce qui eut pour effet qu’il lâche prise, comme s’il avait pris une décharge électrique.

— À quoi tu joues ?!
S’écriat-il, en s’éloignant d’elle.

Elle était remontée. Comment osait-il lui avouer cela après tout ce temps.
Elle l’attrapa par les épaules et le surplomba, l’enjambant.
Elle sentait quelque chose de dur et bombé sous elle, et elle sourit.

— Est-ce que tu peux m’expliquer ce que je devine… ?
Demanda t-elle, avec un large sourire.

Chris la regardait dans les yeux sans réagir.
En un mouvement, il se libéra et retourna Alexandra sur le lit, elle était allongée sur le dos, avec Chris qui la surplombait à son tour.

— Ne joue pas à ça avec moi.

Il semblait insensible, aucune émotion ne transparaissait sur son visage.
Elle glissa vers le haut de son oreiller pour se rapprocher du visage de Chris.
Elle passa ses mains autour de son visage, et elle approcha ses lèvres pour l’embrasser sur sa bouche, lui donnant un baiser langoureux.

Après avoir fini, elle le regarda un instant pour savoir ce que ça lui avait fait, elle pensait être déçue en voyant qu’il serait resté stoïque, mais elle eut à peine le temps de reprendre son souffle, qu’il passa sa main derrière sa tête pour la maintenir et l’embrasser à son tour, rendant avec passion le baiser qu’elle venait de lui donner.
Elle fut plus que surprise et cela raviva la flamme qu’il avait laissé quelques années auparavant.
Encore plus forte, plus vive.

Chris n’avait pas pu rester insensible au baiser d’Alexandra.
Elle réussit à briser les chaînes qu’il s’était lui-même apposées. Et il laissa ses émotions et ses sentiments s’exprimer, à nouveau.
Il l’embrassa avec passion, il libéra tout l’amour qu’il continuait de lui porter quotidiennement mais secrètement, discrètement. Cette fois-ci, la vanne était ouverte.
Il était en train de lui montrer à quel point il tenait encore à elle.

— Arrête moi, Alexandra…
Sussura t-il entre deux baisers, avec supplication.

— Non… aime-moi…
Réussit-elle à prononcer lorsque ses lèvres n’étaient pas contre les siennes.

Elle l’attrappa, passant ses mains autour de son cou, les baladant sur son corps.
Elle avait rêvé de ce moment pendant tellement longtemps depuis leur séparation.

— Je ne… dois pas…
S’arrêta t-il, torturé par ses propres pensées, ses mains dans sa chevelure.

— C’est trop tard, Chris, tu ne peux plus me mentir…

Elle attrapa une de ses mains et s’approcha de lui pour le convaincre.

— Alexandra, c’est mal… ce que nous faisons…
— Non, ça ne l’est pas… nous sommes deux adultes consentants…
— Tu es… sous contrat… avec Gabriel
— Que sur le papier. Tu le sais. Je n’ai aucune obligation sur ma vie privée. Rien ne m’interdit de faire ce que je veux avec mon corps.

Chris restait silencieux, sa main libre serrait la taille d’Alexandra.

Ils s’embrassèrent de nouveau et elle se laissa porter par le désir de Chris. Il se lâcha et laissa libre court à sa fougue.

Comment oublier la chaleur et la douceur d’Alexandra.
Après avoir enfilé une protection nécessaire, il redécouvrit le plaisir de la chair avec elle, il la pénétra avec toutes les précautions qu’il avait, et la sentir se contracter sur lui, ses mains l’aggriper, resserrer cette étreinte sur sa peau. C’était même meilleur qu’auparavant, toute cette attente accentuait ce qu’il ressentait à présent.
Il était trop tard, beaucoup trop tard, il avait, ils avaient franchi la ligne.

Elle accueillit Chris en elle, son corps semblait se souvenir de lui, elle n’avait pas consommé depuis leur rupture et elle redécouvrit à quel point il était bon de se sentir emplie, pas par n’importe qui mais par lui. Sa douceur habituelle, peut-être légèrement moins doux qu’à son habitude, elle arrivait à percevoir son excitation qu’il essayait de contenir pour ne pas la brusquer.

Cela n’avait pas besoin de durer des heures, ils se donnèrent du plaisir sans que cela ne s’éternise plus que nécessaire et ils surent s’arrêter de maniere raisonnable.

Une dernière contraction, un dernier soupir.
Ils s’allongèrent dans les bras l’un de l’autre.

Alexandra s’endormit avec un sourire serein sur son visage.
Il l’embrassa tendrement sur son front et s’endormit également, un peu plus léger mais surtout avec une pointe de culpabilité.

Le lendemain, Alexandra était de très bonne humeur.
Gabriel ne se doutait de rien, mais Chris était mal à l’aise de savoir qu’il avait couché avec Alexandra la veille. Ils essayèrent de rester extrêmement discret sur leur relation privée. En public chacun faisait comme si rien ne s’était passé.

*

Gabriel remarqua qu’il y avait un changement entre les deux. Elle était moins froide avec Chris et il semblait être un peu plus expressif, mais Chris étant ce qu’il est, n’était pas très démonstratif.

2021.12.04

Respect

Depuis que Chris avait fait tomber son mensonge sur ce qu’il ressentait pour Alexandra, elle était sur un petit nuage.
Elle retombait amoureuse de lui, même si elle devait se comporter comme si de rien n’était, elle profitait de chaque instant qu’elle pouvait passer en privé avec Chris pour le prendre dans ses bras, le coller.
Et ils couchaient ensemble. Régulièrement.
Alexandra était adulte et elle savait ce qu’elle faisait, elle prenait le plaisir de la chair et le partageait avec Chris sans aucun remord.
Ils avaient discuté longuement et elle avait tiré un trait sur leur union de manière officielle.
Chris lui avait fait promettre cette clause si elle voulait continuer à entrenir cette relation avec lui. Il ne voulait surtout pas mettre son avenir en péril.

Gabriel en pâtit de ce changement.
Lui qui commençait à éprouver un attachement pour la jeune femme, il essayait de faire en sorte qu’elle s’intéresse à lui, mais elle n’avait d’yeux que pour Chris. Il le vit et, même s’il ne souhaitait pas s’immiscer dans la vie privée d’autrui, il dut prendre Chris à part pour en parler.
Il le convoqua à son bureau.
Il ne tourna pas autour du pot et posa les questions qui fâchent.

— Si je t’ai convoqué ici aujourd’hui, tu te doutes que ce n’est pas pour te demander comment ça va.

Chris resta silencieux.

— Je ne vais pas y aller par quatre chemins. Je veux que tu sois honnête et sincère avec moi. Qu’elle est la relation que tu entretiens avec Alexandra ? Je ne suis pas aveugle, je vois comment elle te regarde.
— … Je suis son garde du corps…
— Tu n’es pas que ça. Dis moi.
— Et plus. Nous avions eu une relation à une époque et… je crains qu’elle ait encore des sentiments à mon égard.
— Est-ce que ces sentiments sont réciproques ?
— … Je lui ai fait promettre de ne pas rompre votre accord pour moi.
— Là n’est pas ma question. Est-ce que tu l’aimes ?
— Oui.

Gabriel soupira.

— Ne la sanctionnez pas, j’en porte l’entière responsabilité-
— Arrête. Je ne vais rien faire. Il y a des choses qu’on ne peut pas controler et je ne peux pas la forcer à quoi que ce soit.
— Mais votre contrat… ?
— Il ne stipule pas qu’elle soit ma propriété. Elle est libre de faire ce qu’elle veut avec qui elle veut… je suis juste… peiné… parce que je crois ressentir quelque chose pour elle et je vois bien que ce n’est qu’à sens unique.
— Vous-
— Oui, tu m’as entendu. Je ne sais pas comment m’y prendre pour qu’elle me regarde et qu’elle me considère. Tu peux rire de moi.
— Non… je n’oserai pas… je peux peut-être lui en toucher un mot…
— Surtout pas ! Laisse la, elle a l’air tellement heureuse à tes côtés, je ne peux pas lui enlever ça.
— Je… je suis désolé.
— Ne le sois pas. Merci pour tes explcations, je comprends mieux et je ne t’embêterai pas plus.

*

Chris se sentait mal pour Gabriel. Il n’avait, au premier abord, pas une bonne opinion de ce viel homme beaucoup trop sûr de lui, suffisant et hautain, mais le voir aussi vulnérable à cause de ce qu’il ressentait, lui avait fait reconsidérer la chose.
Ce n’était pas un mauvais type et il pensait au bien-être d’Alexandra. Finalement.

*

Colère.
Elle s’était emportée, tabassant un combattant sur le terrain d’entraînement, Chris était intervenu pour empêcher Alexandra d’en faire plus, mais le mal était fait.
L’homme était à terre, à moitié conscient, le nez en sang.
Elle était furieuse, les sourcils froncés, le regard noir.
Elle avait effrayé plus d’une personne aux alentours.
Gabriel avait eu vent de l’évènement et avait demandé des explications
Alexandra ne voulait rien entendre, elle se débattait pour se libérer et finir la personne qui avait manqué de respect.

Gabriel dut intervenir et il dut lui injecter un tranquilisant pour l’immobiliser et l’endormir.
Il demanda à Chris des explications pendant que l’autre homme était emmené à l’infirmerie pour se faire examiner.

— C’est une furie… elle aurait pu me tuer !
Dit-il, en jetant à peine un regard vers Chris.

— Oui, je confirme… c’est ce qu’elle voulait faire.
Répondit-il, sans chercher à vouloir atteindre son interlocuteur

Il l’entendit et un froid glacial parcourut son dos.
L’autre partit, en ruminant et se plaignant un peu de trop de sa blessure au visage.
Ils se rendirent dans le bureau de Gabriel, il allonga Alexandra sur un divan et posa un duvet sur elle.
Il invita Chris à s’asseoir en face de son bureau et l’interrogea.

— Je te fais entièrement confiance, raconte moi ce qui a put la mettre dans cet état.

*

Ils se baladaient dans les couloirs.
Alexandra était de bonne humeur et elle marchait côte à côte avec Chris.
Lorsqu’elle entendit des aboiements derrière elle.
Elle se retourna, et ne comprit pas ce qu’il se passait ni pourquoi des hommes étaient en train de rire.
Elle crut comprendre que les rires étaient adressés dans leur direction.
Elle se tourna vers Chris, l’air de lui demander s’il en savait plus. Il continua son chemin sans relever.
Elle trouva son comportement étrange et le rattrapa en trottant et se positionna devant lui pour qu’il s’arrête.
Il n’avait aucun moyen de fuir.

— Tu me caches quelque chose… ? J’ai l’impression que tu sais…
— Ce n’est pas important.
— J’ai l impression que si.

— On peut y aller ? Je t’expliquerai mais pas ici.
Chris voulait s’éloigner, et il était en train de presser Alexandra.

— Bah alors, qu’est-ce qu’il t’arrive le petit toutou ?
La voix se rapprochait et les interrompit.

Il était accompagné de plusieurs hommes qui roulaient des épaules.
Alexandra fut interpelée et Chris lâcha un énorme soupir.

— Pardon ? C’est à nous que vous vous adressez ?
Demanda t-elle.

— Viens Alexandra, on s’en va…
Chris essaya d’échapper à la situation.

— Non, je crois que j’ai pas bien entendu ce qu’il a dit.
Alexandra s’interposa et s’approcha de cet individu en laissant Chris derrière elle.

— Bien le bonjour mademoiselle Alexandra.
S’inclina t-il, ses acolytes faisant de même. Ils semblaient remarquer sa présence qu’à cet instant.

— Bonjour. Pouvez-vous répéter ce que vous avez dit auparavant ?
— Oh… ce n’est que le surnom affectif qu’on donne à votre garde du corps. Rien de méchant, n’ayez crainte.
— « Petit toutou »… ? Vous vous moquez de moi ?
— Absolument pas, mademoiselle. Votre garde est d’un rang inférieur… n’avez-vous jamais songé à prendre quelqu’un d’un rang plus prestigieux qu’un simple… paysan ? Voyez-vous, je ne suis pas le seul à penser qu’il ne mérite pas d’être à vos côtés. Il n’est que l’ombre d’un chien-

Elle lui asséna une droite qui le fit tomber à terre, et elle ne ne laissa pas se relever.
Ses amis reculèrent d’un pas et songèrent à partir en courant.
Elle avait essayé de contenir ce qu’elle ressentait mais plus son interlocuteur était en train de parler, plus elle sentait sa colère monter, puis elle finit par éclater.

— Ne vous avisez pas de manquer de respect à Chris…

Elle voyait rouge et ce n’était pas que le sang qu’elle était en train de faire couler, c’était également son propre sang parce qu’elle avait frappé tellement fort qu’elle avait esquinté la peau de ses phalanges.
Chris paniqua et l’attrapa, la bloqua pour pas qu’elle fasse plus.

— Alexandra !! Calme toi ! Ca suffit !

Elle ne semblait rien entendre, il l’avait rarement vu comme ça.
Leur grabuge avait finit par attirer l’attention et les rumeurs circulant comme une trainée de poudre au vent, Gabriel arriva relativement rapidement.

*

Gabriel ne savait pas s’il devait en rire ou être consterné.
Il avait dû endormir Alexandra pour qu’elle se calme, elle était dans un sommeil profond à quelques mètres de lui et de Chris. Allongée dans le divan de son bureau.
Il venait d’entendre la version des faits de Chris et il ne la remettait pas en cause.
Il ne savait pas quelle décision prendre concernant ce qui venait de se passer.
Il allait devoir convoquer son employé et remonter les bretelles des deux protagonistes. Alexandra allait être réprimandée, c’était sûr. Même si elle était une invitée de marque sur son domaine. Il ne pouvait pas lui octroyer un privilège aussi grand.

Elle se réveilla, un peu groggy, Gabriel vérifia qu’elle était bien en état de réfléchir et l’entendre calmement.
Elle était trop occupée à se demander ce qui venait de se passer et pourquoi elle était ici, pour se rappeler sa colère. Ce fut Gabriel qui le lui rappela et la prévint qu’elle allait devoir des excuses à son employé. Il avait essayé de lui expliquer de la manière la plus neutre pour qu’elle ne s’emporte pas mais elle boudait.
Chris dut quitter la pièce.
Alexandra était assise devant le bureau de Gabriel avec l’autre personne, qui avait un pansement sur le nez.

— Votre comportement est innaceptable. Alexandra, c’est un avertissement sévère que je vous fais, on ne se bat pas dans un lieu inadapté comme un couloir, et on ne frappe pas gratuitement mes employés.

Elle avait baissé la tête, et la personne à côté d’elle avait gonflé le torse, en prenant une position de supériorité face à elle.
Elle sentait qu’il la narguait mais elle préféra l’ignorer en restant silencieuse.

— Quant à vous, vous avez obligation de donner des excuses à notre invité Chris. Lui comme Alexandra, m’ont sauvé la vie, et je ne tolèrerai aucune quelconque marque d’irrespect à leur égard. Est-ce clair ? Si cela venait à se reproduire, je m’occuperai personnellement de la sanction, et ce que vous avez pu subir ne sera qu’une égratinure en comparaison. Est-ce que je me suis bien fait comprendre ?
— … Oui, monsieur… je… pardonnez moi…
— Ce n’est pas à moi que vous devez vous faire pardonner. Tachez que vos excuses soient adressées à la bonne personne.

Il inclina sa tête et déglutit.

— Sur ce, vous pouvez disposer.

L’employé se leva sans tarder et sortit, laissant Alexandra avec Gabriel.
Il sortit en furie, en tâchant de ne pas trop montrer qu’il était mécontent de la conclusion de cette convocation.
Alexandra ne savait pas si elle devait se réjouir devant Gabriel. Elle ne s’en tirait pas trop mal, finalement mais cela était tout de même un avertissement concernant son comportement.
Elle quitta la pièce en restant neutre et courtoise.
Elle sauta dans les bras de Chris qui l’attendait.

*

Chris ne se sentait pas en forme ce jour là.
Il devinait qu’il avait un début de migraine et sa température corporelle était anormalement élevée.
Il avait la nausée et il préféra sauter le repas du midi.

Alexandra s’inquièta de ne pas le voir à la cantine et elle demanda aux alentours si on ne savait pas où il était. Cela ne lui ressemblait pas de s’éclipser sans la prévenir.
Elle finit son plat et ne le voyant pas arriver, elle alla le chercher. Elle le trouva à l’ombre d’un arbre, assis et perdu dans ses pensées.

— Tu étais donc là ! Qu’est ce que tu fais ? C’est l’heure de manger, je t’ai pas vu à la cantine, qu’est-ce qui t’arrive… ?

Elle voyait qu’il n’était pas dans son état habituel.
Il avait le regard dans le vide et il tremblait légèrement.
Il essaya de se relever, et Alexandra s’approcha aussitôt pour le soutenir.

— Chris… ? Tu vas bien… ?

Il ne donnait pas de réponse et elle s’inquiétait de plus en plus.
Lorsqu’elle entra en contact avec sa peau, elle remarqua qu’il était brûlant.

— Chris… ! Tu… !
— Ca va… je crois que je suis un peu…

Il ne réussit pas à finir sa phrase, la main sur son front pour essayer de faire passer sa migraine qui lui donnait le vertige, inutilement, il perdit contrôle de ses jambes et s’écroula.
Elle le rattrapa dans ses bras et réussit à le refaire s’asseoir, adossé contre l’arbre.
Elle paniqua. Elle avait rarement vu Chris malade et encore moins dans un état comme celui-ci. Elle ne préférait pas penser à la fois où il avait failli mourir à cause d’elle.
Elle l’allongea lentement et partit chercher de l’aide pour le transporter à l’infirmerie.
Le coeur battant à toute allure, elle l’accompagna et resta auprès de lui pendant le diagnostic.
La médecin la rassura et dut la forcer à quitter l’infirmerie.
Malgré ses efforts pour ne pas y repenser, elle craignait de le perdre encore une fois.

Gabriel arriva pour discuter avec Chrystal et après son rapport, il échangea quelques mots avec Alexandra.
C’était la première fois qu’il la voyait aussi émotive et inquiète. Elle était aux bords des larmes et ne savait pas quoi faire.
Chris avait perdu connaissance et ne semblait pas pouvoir se réveiller, pour elle, ce n’était pas bon signe.
Chrystal et Gabriel cherchaient à la rassurer du mieux qu’ils pouvaient mais elle avait un terrible pressentiment.
Elle essayait de leur faire confiance, mais concernant la santé de Chris, elle perdait pieds.

— Ca me fait énormement de peine de te voir ainsi. Chris va aller mieux, il respire, Chrystal va prendre soin de lui et le remettre sur pieds. Tu n’as pas à t’inquièter autant.

*

Il faisait nuit, la lueur de la lune pénétrait dans la pièce à travers des volets fins aux fenêtres.
Alexandra était sur le point de quitter l’infirmerie, elle avait retenu ses larmes mais elle ne pouvait pas le faire indéfiniment. Elle avait veillé Chris aussi longtemps qu’elle le pouvait, et Gabriel était passé voir comment ça allait.

Il la suivit, il voyait à quel point elle était affectée par l’état de santé de Chris. Ce n’était pas un simple garde du corps, il le savait et il avait été prévenu de la relation particulière qu’ils avaient, mais le voir et le constater de ses propres yeux était different. Il ne pensait pas que cela ne le laisserait pas indifférent.
Il ignorait si c’était la tristesse d’Alexandra qui le rendait si émotif ou l’inquiètude qu’elle avait pour Chris. Quoi qu’il en soit, il avait cette présence désagréable au creux de sa poitrine qui ne semblait pas près de disparaître.
Inconsciemment, il rattrapa Alexandra, sans savoir réellement ce qu’il voulait faire, son corps bougea de lui-même, il lui attrapa la main, la forcant à s’arrêter et se retourner dans sa direction.

Les yeux rouges, mouillés, elle le regarda, le suppliant de la laisser libérer ses glandes lacrimales dans un lieu sans aucun témoin.

Son coeur se resserra dans sa poitrine, il ne pouvait pas la laisser seule avec son chagrin.
Pourquoi était-elle aussi inquiète alors que Chris était juste malade ? Sa vie n’était pas en danger. Il ne comprenait pas.

— Alexandra… tu n’as pas à t’isoler. Sache que je suis là, si tu as besoin d’une épaule… Chris va aller mieux, il a juste besoin de repos.
— Je sais… je le sais… c’est idiot de ma part… je ne peux pas m’empêcher de…

Les larmes roulèrent sur ses joues et elle essaya de les essuyer avec sa main libre.
Gabriel la tira vers lui, la serrant dans ses bras et elle ne put se retenir plus, la chaleur et le réconfort de Gabriel la toucha et elle se laissa aller en pleurant sur son torse.

— Je… je suis désolée… je sais que ce n’est pas grave mais… je le vois rarement malade et son état me rappelle la fois où il était gravement blessé… c’est stupide n’est-ce pas ?… Cette fois-là, j’ai cru qu’il allait mourir et c’était ma faute. Il était dans cet état à cause de moi…

*

Chrystal prit Gabriel à part pour parler en privé.
Elle avait osculté Chris et elle savait que son état n’était pas naturel. Elle lui expliqua que cela venait d’un mage de chez eux, et qu’il n’y avait aucun doute là dessus.

Gabriel prit les précautions nécessaires et sans en dire un motà Alexandra, il se rendit voir le coupable.
Le responsable de l’état de Chris n’avait aucun remords et pensait faire cela pour Gabriel, pour son profit et qu’Alexandra s’intéresse enfin à lui.
Il dut rester diplomate et lui expliquer qu’il souhaitait réussir à gagner le coeur d’Alexandraà la loyale.
Sans le vexer, et heureusement, il fut compréhensif
Il proposa de faire mourir Chris d’une mort qui paraîtrait naturelle aux yeux des autres, en ayant pour complice Chrystal et Gabriel mais il refusa catégoriquement.

Chris reprit connaissance dans les heures qui suivirent et Alexandra pleura de joie.
Gabriel les laissa. Il ne voulait pas la voir triste et il était satisfait de son choix. Son bonheur faisait le sien. Il aurait préféré que ces émotions lui soient directement adressées mais il ne pouvait pas forcer les sentiments.

2021.11.03

Formation

Gabriel était serein.
Le contrat était signé et Alexandra était sous sa protection. Il lui montrait les ficelles du métier et les documents importants qu’il allait lui confier.
Elle avait soif d’apprendre et c’était une possibilité qu’elle se plonge dans cet apprentissage pour oublier ce qui la tracassait vraiment.
Il le voyait. Il commençait à s’attacher progressivement.

*

Debout côte à côte avec elle, il lui montrait un livre qui contenait des informations interéssantes, lorsqu’ils entendirent des coups sur la porte. Quelqu’un demandait Gabriel et cela semblait urgent.
Il dut quitter son bureau un instant. Confiant le livre et la pièce à Alexandra.
Il avait une manière douce de lui sourire, de la rassurer.
Ils étaient de plus en plus proches physiquement.
La consultation des dossiers aidait à cette proximité, au tout debut, elle fut un peu en retrait puis, elle finit par s’y habituer. À sa chaleur et sa manière très pédagogue de lui expliquer certains termes.
Cela lui semblait maintenant normal, naturel.
Son avis sur ce bonhomme aigri changeait de jour en jour.
Il était attentionné et affectueux, et il avait été franc avec elle. C’était ce qu’elle appréciait le plus.
Elle avait de la chance, d’une certaine manière. Il était gentil avec elle. À cette pensée, elle se demanda si elle n’était pas en train de baisser sa défense.
Elle devait se concentrer sur ses enseignements. Elle avait fait quelques erreurs lors de son dernier séjour et il l’avait corrigée. Le reste était plutôt simple à intégrer, cela ne différait pas trop de ce que son père faisait.
Le temps commençait à être long.
Elle observa le bureau, et elle se rappela la première fois qu’elle avait été ici. Le fameux enlèvement, sa réaction et quand elle s’était mise à lui jeter ses bibelots. Cela n’allait pas à Gabriel d’être odieux. Il était à des années lumière du personnage qu’il lui avait présenté. Puis, elle avait été jeune, impulsive.
La décoration n’avait pas tellement changé.

La porte qui menait à sa chambre était entrouverte et elle se laissa aller à la visite de cette pièce.
C’était grand. Le lit était immense et elle s’y asseya, pensive. Il était vrai qu’il était grand, Gabriel.
Elle arrivait maintenant, avec un peu plus de facilité, à le tutoyer. Tout compte fait, il n’était pas si intimidant que ça, passé son apparence imposante.
Elle se laissa tomber de tout son long.
Qu’est-ce qu’il était confortable son lit. Elle s’était enfoncée dans l’épaisseur de la couverture, elle avait fermé les yeux, laissant libre court à son imagination.

— Est-ce que tu as besoin de faire une sieste ?
Demanda la voix maintenant familière.

Elle sursauta et ouvrit immédiatement ses paupières.
Elle se releva aussitôt.

— N-non, pardon !

Il rit aux éclats.

— Tu peux, ne t’inquiète pas. Je vais t’avouer un petit secret. Il m’arrive de m’allonger ici pour siester… donc, ne te prive surtout pas.
— Je… c’est juste qu’il est vraiment très confortable…
— Ca oui. Excuse moi de l’attente.
— Non non, c’est à moi de m’excuser…

Elle le rejoignit, et il ne put effacer le sourire sur son visage, à tel point qu’elle le remarqua.

— Est-ce que… j’ai quelque chose sur mon visage… ?
Demanda t-elle, inquiète.

— Non, pas du tout… je te trouve juste adorable-

Il avait prononcé ces mots sans y prêter attention et en se rendant compte, sa voix s’étrangla.
Elle rougit et ne sut pas où se cacher.

*

Elle passait une bonne partie de ses journées aux côtés de Gabriel pour sa formation intensive. Elle ne voulait pas s’éterniser chez lui, ni le déranger plus que nécessaire. Ce fut un moment plutôt agréable. Elle avait besoin de couper et penser à autre chose que Chris, et Gabriel avait été très sympathique envers elle. Sans pour autant être trop présent ou étouffant.
Le midi, elle mangeait dans la cantine avec tous les autres, cela lui faisait un temps rien qu’à elle, même si souvent, quelques personnes venaient s’asseoir à côté d’elle pour lui faire la discussion et se renseigner sur ce qu’elle faisait ici.
Elle expliquait alors qu’elle venait approfondir ses connaissances sans mentir sur la véritable raison de sa présence.
Elle avait sa propre chambre qui était au même étage que celle de Gabriel.

— Bon, alors. Il est moins désagréable que ce que tu pensais, n’est-ce pas ?
Lui demanda la garde qu’elle connaissait bien.

— Ca va…
— Tu reviens ici pour passer du temps avec nous, on te manque ?
— On peut dire ça comme ça…

Alexandra restait vague. Cela la faisait sourire de les voir curieux ainsi, à son sujet.

*

Sa présence suscitait beaucoup d’intérêts et certains avaient des vues sur elle.
Après une soirée arrosée, un groupe d’hommes la cherchait. L’un d’entre eux voulait lui parler et ses amis l’encouragèrent à le faire.

Elle était en train de se balader dans les couloirs lorsqu’ils la virent et l’encerclèrent.
Il était un peu tard et Alexandra fut surprise. Elle remarqua qu’ils n’étaient pas en pleine possession de leurs esprits, et elle essaya de ne pas faire de vagues.
Ils étaient 4 et plutôt forts, de ce qu’elle avait vu, ils savaient se battre.
Elle savait aussi se défendre mais elle ne voulait pas créer d’incident diplomatique, surtout s’ils ne cherchaient pas à lui faire de mal.

Ils étaient joyeux et ils parlaient fort, deux d’entre eux s’étaient positionnés derrière elle, lui bloquant toute échappatoire. Ce n’était peut-être pas leur intention.
Et l’un poussait son ami à lui parler. L’aidant à s’exprimer.

— Hé, ma jolie, ça ne te dit pas de venir t’amuser avec nous ? On sait y faire. On est quatre, rien que pour toi !
— Il y a notre ami là, qui n’a d’yeux que toi depuis que tu es là, ça te dirait pas de passer un peu de temps avec lui, pour faire plus amples connaissances, si tu vois ce que j’veux dire ?!

Ils riaient grassement et elle n’était pas à l’aise.

— Reste pas à rien dire ! Tu fais ta timide ? On va te décoincer si tu veux, t’en fais pas !

— Non merci… je suis occupée…
Essaya t-elle de les repousser, gentiment.

— Oh, mais nous on en a pas fini avec toi, reste un peu…. !

Leurs voix résonnaient dans le couloir et cela finit par attirer l’attention.
Ils réduirent la distance avec elle, la collant et la poussant un peu plus.
Elle fut bousculée dans les bras de celui qui avait le béguin pour elle.

— Oh là, il faut faire attention !

Elle n’appréciait pas du tout, le regard baissé, elle se redressa et repoussa les hommes derrière elle.

— Mais c’est qu’elle ne se laisse pas faire !

— Laissez moi tranquille ou vous allez le regretter.
Prévint-elle.

— Oulà, j’ai peur.
Se moqua t-il.

Elle se tenait en garde pour se dégager de là, et s’il le fallait, elle en frapperait un, ou deux.
Lorsqu’une voix et une ombre s’approcha d’eux.

— Il me semble qu’elle a dit de la laisser tranquille.
Gabriel se tenait devant eux, ce qui les fit lever les yeux puis déglutir, puis rire nerveusement.

— Ah, oui, on allait partir, justement…

Ils s’en allèrent en se pressant.

— Ils seront convoqués dans mon bureau. J’ai quelques mots à leur dire, ceux-là.
Dit Gabriel en les regardant s’éloigner.

Le coeur d’Alexandra battait à tout rompre. L’adrénaline qu’elle avait commencé à produire parce qu’elle s’attendait à devoir se battre, était en train de redescendre.
Elle avait du mal à croire qu’il était là, restant silencieuse, reprenant lentement son souffle.

— Tout va bien ?
Finit-il par demander.

Elle acquiesça sans un mot. Doucement

— Je m’excuse de leur comportement. Sincèrement. Permets moi de te raccompagner jusqu’à ta chambre.

Elle continua d’acquiescer en silence et il s’inquiéta.

— Tu es sure que ça va… ?
Demanda t-il une nouvelle fois, en se baissant.

— Oui… oui oui… ça m’a surpris…

Elle en profita qu’il soit à sa portée pour l’embrasser sur la joue.

— Merci…

Ce fut à son tour de rester muet.

*

Le séjour prit fin.
Le jour de son départ, elle lui prit sa main, le regarda droit dans les yeux.

— Prends soin de toi. Si je dois reprendre tes affaires, que ce soit le plus tard possible. D’accord ?
Dit-elle, les joues un peu roses.

Il sourit comme à son habitude, peut-être encore plus attendri que d’habitude.
Il la rapprocha pour la serrer dans ses bras, et la décoiffer de sa paume.

— T’en fais pas pour moi ! T’es mignonne, prends soin de toi aussi. C’était très agréable de t’avoir comme apprentie pendant cette semaine. Reviens quand tu veux, surtout !
— Je… vais y réfléchir…

Le coeur de Gabriel battait plus vite que d’habitude et il espéra que cela passe inaperçu.

— La prochaine fois, on se fera quelques échauffements sur le terrain, qu’en dis-tu ? Je te dois une revanche, il me semble.
Proposa t-il, comme une excuse pour la revoir bientôt. Il s’en souvenait.

*

Rentrée chez elle, son esprit était encore là-bas.
Son père la prit dans ses bras et lui demanda à plusieurs reprises si Gabriel n’avait rien tenté de déplacé. Elle dut le rassurer.
Le contrat était signé et elle était plus sereine.

— Papa… je suis grande maintenant. Puis, tu ferais quoi s’il avait tenté quelque chose… ?
Demanda t-elle avec un sourire en coin.

— …
— Tu penses que j’aurais pas su me défendre ?
— …
— Ne te tracasse pas pour rien, alors !

*

Elle avait repris son entraînement, de quoi garder la forme. Elle avait en tête le combat qu’elle allait disputer avec Gabriel la prochaine fois qu’ils se verraient. Elle voulait cette revanche, et elle ne voyait pas que ce n’était peut-être pas le combat qu’elle attendait, mais le fait de revoir Gabriel.
Peut-être était-ce sa propre fierté de pouvoir le battre, pour qu’elle ne soit pas inférieure à lui.
Perdue dans ses pensées, elle ne remarqua pas Chris qui arriva derrière elle.
Elle sursauta.

— Chris ! Tu m’as fait peur ! Ca va… ? Tu as besoin de quelque chose ?

La tension entre eux était retombée. Elle arrivait à lui reparler normalement depuis que la pression du contrat était retombée.
Elle n’en avait pas reparlé, c’était qu’une formalité administrative et Chris n’avait pas cherché à en savoir plus.

— Excuse moi, je ne voulais pas t’effrayer. Tu as l’air tellement concentrée. Il s’est passé quelque chose ?
— Oh… non… j’essaye de me maintenir en forme, Gabriel m’a proposé de prendre ma revanche sur un combat que j’avais perdu lorsque j’étais plus jeune. Je veux lui faire mordre la poussière !
— Cela risque d’arriver. Tu as besoin d’un partenaire pour t’entrainer… ?
— Pourquoi pas…

Cela faisait un moment qu’ils n’avaient pas échangés de coups et Alexandra retint sa force pendant les premières minutes.

— Non mais, vas-y comme tout à l’heure, je vais m’adapter. Ne t’en fais pas pour moi.
Dit Chris, un peu vexé.

Elle s’exécuta.
Chris fut surpris, il se mit à défendre pronto.
L’échange était intense, et Chris sourit. Cela lui faisait du bien également, de se dépasser.
À la fin de leur session, il réussit tout de même à briser, à quelques reprises, la défense d’Alexandra.

Elle affichait un large sourire, en sueurs et essoufflée mais elle s’était amusée.
Elle se demanda depuis combien de temps elle n’avait pas passé un moment de complicité simple avec Chris.
Elle embrassa cet instant. C’était de sa faute si elle avait balayé leur relation d’un revers de la main, et elle devait tourner la page. C’était ce qui était en train de se passer.
Elle rit aux éclats, les larmes au coin des yeux. Nerveusement. Elle avait passé un bon moment, elle venait de réaliser son erreur.
Qu’est-ce qu’il était agréable de retrouver cette insouciance avec Chris.

Il la regarda sans trop comprendre.
Elle se redressa et s’avança vers lui, qui restait figé, dans l’incompréhension.

— Tout va bien… ?
Demanda t-il, avant de se faire couper de court.

Elle l’enlaça de toutes ses forces, tendrement.
Elle n’avait pas les bons mots. Elle aurait pu s’excuser de son comportement durant ces dernières années, ou elle aurait pu le remercier d’avoir été aussi patient et compréhensif, mais elle ne savait pas laquelle de ces options était la meilleure.

Il eut l’air de comprendre, parce qu’il ne dit rien et il lui caressa sa chevelure, rendant légèrement son étreinte.
Ils s’étaient retrouvés.

*

Gabriel avait envoyé une nouvelle lettre pour proposer de manière officielle à Alexandra de revenir, pour un petit combat amical.
Il avait attendu une semaine et il demandait à Alexandra ses disponibilités pour repasser un séjour chez lui, cette fois-ci, sans la formation, juste pour y passer du temps.

Lorsqu’elle reçut l’enveloppe et qu’elle en lut le contenu, elle eut un large sourire.
Elle ne s’attendait pas à ce qu’il lui envoit à nouveau une lettre.
Elle en discuta directement avec son père qui haussa les épaules.
Il n’avait pas spécialement besoin d’Alexandra à ses côtés, et il lui fit comprendre qu’elle pouvait y retourner à partir de quand elle le souhaitait.
Maintenant que le contrat avait été signé, il était moins inquiet pour sa sécurité. Gabriel lui avait promis de prendre soin d’elle, même s’il n’avait aucun sentiment pour elle. Il avait encore la crainte qu’il la force à donner un héritier mais connaissant le caractère de sa fille, il lui souhaitait bien du courage.
Quoi qu’il en soit, elle devait juste le prévenir de la période de son absence, et il en tiendrait compte.

Elle décida alors d’une date, lui laissant le temps de s’entraîner encore un peu, et elle prépara ses bagages qui tenaient dans un sac à dos.
Chris l’intercepta et lui demanda s’il pouvait l’accompagner pour assister au combat.
Elle fut surprise mais elle ne refusa pas.

2021.10.13

Blanc

Gabriel avait reçu la lettre d’Alexandra.
Il avait attendu, impatiemment et avec une certaine appréhension qu’elle refuse catégoriquement.
Il s’était senti bizarre, il avait un certain âge mais il n’avait pas le souvenir d’avoir ressenti ce genre d’émotions auparavant, s’il oublait son premier amour, il ressentait à nouveau cette attente, ce sentiment si particulier de bien-être en pensant à une personne en particulier.
Il se trouvait ridicule. Etait-il en train de tomber amoureux ? Impossible. Elle était bien trop jeune, il était beaucoup trop vieux pour plaire, puis il ne pouvait qu’espérer que son souhait de mariage blanc soit accepté.
Sa mort frôlée de peu l’avait fait réaliser une chose. Tous ses biens étaient éphémères, il ne souhaitait pas que tout cela disparaisse dans le néant ou que ce soit éparpillé et pillé par ceux qui voudraient s’enrichir sur ce qui reste. Il avait confiance en ce nouveau allié. Il ne voulait rien regretter.
Il renfloua ses sentiments déplacés pour Alexandra et essaya de se concentrer sur son objectif principal.

Elle avait accepté de le revoir pour discuter de ce sujet.
Compte tenu de la situation encore précaire de Gabriel et de son domaine, il était convenu qu’elle retourne chez lui, seule pour ne pas éveiller de soupçons.
Il avait préparé sa venue au préalable. Tout devait être parfait, au pire au mieux, pour qu’elle se sente à l’aise et qu’elle ne manque de rien pour son séjour.
Cette fois-ci, son arrivée était attendue.
Il avait parlé de l’importance de sa décision et ses employés les plus proches ne pouvaient que le soutenir.

Lorsqu’elle arriva, elle était en cheval et elle confia sa monture. Les cheveux décoiffés par le trajet, elle était en tenue de voyage, un sac sur le dos.
Elle ne ‘attendait pas à ce que Gabriel l’attende à l’entrée du domaine et elle ne cacha pas sa surprise.

— Ah. Euh… bonjour…

Un peu embarrassée de se montrer sous tel jour, elle essaya de ranger maladroitement ses mèches folles derrière les oreilles, et essaya de défroisser ses vêtements en passant ses mains dessus.
Il n’avait rien dit, il avait apprécie la voir au naturel.
Il appréciait ce qu’elle était, la manière qu’elle avait de se comporter. Ce n’était pas une simple princesse.
Il garda cette pensée pour lui, souriant intérieurement.
Il ne pensait pas qu’elle serait aussi surprise de le voir, au point d’en être gênée.

— Bonjour. Tu as fait bon trajet ? Est-ce que tu veux prendre une douche avant quoi que ce soit ? Ou un bain, comme tu préfères ?
— Je… ah oui, le trajet s’est déroulé sans encombre… je ne voudrais pas vous faire attendre en prenant une douche… si cela ne vous dérange pas que je sois dans cet état, on peut commencer…

Elle était intimidée, cette histoire de proposition de mariage l’avait un peu chamboulée et elle considérait cette offre de manière sérieuse. Sa voix n’était plus aussi assurée que la dernèere fois, elle était seule et elle n’osait plus le regarder dans les yeux.

— Tu sais, tu peux me tutoyer. Cela sera plus simple pour la suite, et plus agréable aussi pour toi. Je souhaiterai qu’on soit sur un pied d’égalité, si ça te convient ? Tu peux prendre ton temps, c’est pour que tu sois plus à l’aise, c’est comme tu le sens pour la douche. Je n’ai pas d’urgence.
— Dans ce cas… j’accepte… je veux bien y faire un tour pour me débarbouiller…

Il sourit et lui tendit la main.

— Est-ce que tu as besoin que je te prépare quelque chose ? J’ai des vêtements de rechange, si besoin.
— C’est gentil… ça devrait aller.
— Si tu ne veux pas utiliser la salle d’eau publique, je peux te montrer ma salle de bain privée.
— Je… oui, merci…

Alexandra resta silencieuse une grande partie de la balade.
Elle observa les réparations effectuées et certaines personnes la reconnurent, ils lui firent quelques signes de la main, et des courbettes parce qu’elle était avec Gabriel.
Elle se dépêcha de se débarbouiller et retira son manteau. Elle en profita pour se recoiffer et elle se regarda dans le miroir.
Elle devait se reprendre. Elle ne comprenait pas pourquoi elle était aussi nerveuse.
Son père lui avait fait confiance et elle savait ce qu’elle faisait. Elle devait discuter du sujet.
C’était important parce que ça la concernait et elle décidait de son futur.
Elle se donna des petites claques sur les joues pour se réveiller, qu’elle ait les idées claires, et elle sortit de la pièce, puis de la chambre.

Le bureau était adjaçant et il lui fit signe de le rejoindre. Il était amusé par cette situation, quoique un peu anxieux. Il avait un sourire nerveux. Il la voyait un peu plus tendue et il sentait qu’il était en position de force par sa taille, mais il n’en menait pas large.
Il tenait la porte et l’invitait à entrer.
Ce qu’elle fit, avec une certaine crainte.

— Est-ce que je peux t’offrir quelque chose à boire ?
Proposa t-il.

Sa voix grave et forte la fit sursauter dans le silence de la pièce. La porte fermée, elle emplit le bureau à la décoration chargée qui étouffa tant bien que mal le timbre imposant de Gabriel.
Cela la fit sortir de ses pensées.

— O-oui, de l’eau s’il vo-… te plait…

Elle essayait de garder une posture droite et fière mais ses cordes vocales la trahissaient.
Il l’invita à s’asseoir et prit la carafe d’eau qu’il avait sur sa table pour la déverser dans un des verres retournés qu’il attrapa.
Il en profita pour se servir également, pour montrer que l’eau était potable. Même si elle avait confiance. Après tout, elle était venue toute seule, sans garde.
Il se racla la gorge et s’assit de l’autre côté de la table, en face d’elle.
Il était tellement imposant qu’elle le remercia intérieurement de prendre cette distance.

— Merci d’avoir fait le déplacement.
Dit-il solonellement

— C’était le plus pratique. Puis je préfère être seule ici avec vou-… toi, pour en discuter. Mon père… je veux dire. Cette conversation me concerne personnellement et je préfère prendre une décision par moi-même, sans être influencée par qui que ce soit…

Elle avait encore du mal à le tutoyer et Gabriel ne put cacher un sourire subtil en le remarquant.

— Bien… je t’avoue que j’avais peur de te faire fuir encore une fois, ça me rassure que tu m’accordes ce moment pour que nous puissions en parler.
— J’aurais quelques questions…
— Oui, bien sûr. Pose toutes les questions que tu as.
— Pourquoi… ? Je veux dire… votre offre est beaucoup trop… belle pour moi. J’ai tout à y gagner. Qu’avez-vous vraiment à y gagner ?

Gabriel sourit.
Elle n’arrivait pas à le tutoyer, c’était normal, ils se connaissaient à peine.

— Eh bien, ce que je ne t’ai pas dit dans la lettre, c’est que… je commence à me faire vieux, et je n’ai aucun héritier. J’ai failli y passer il y a quelques temps, et il me sera difficile de choisir un successeur avec aucune certitude de sa capacité à reprendre la boutique… tu m’as fait une excellente impression lorsque tu étais ici et que tu as pris soin de mes affaires. Je sais que c’est très cavalier de ma part de te reproposer une demande en mariage. Cette fois-ci, nous savons de quoi il en retourne. Je ne vais pas te forcer à quoi que ce soit me concernant. Le mariage ne va pas impliquer qu’on fasse semblant d’être un couple, je te rassure, et je ne vais pas te forcer à me donner un héritier.

Il fit une pause pour observer sa réaction.
Elle sembla lâcher un micro soupir de soulagement.
Etait-ce peut-être ce point qui l’inquiétait.

— Ce contrat de mariage m’assure la pérénité de mes affaires si cela te revient.
— Qui vous dit que je vais être à la hauteur de vos attentes… ? Je pourrais tout rater, ou tout vendre pour mes propres intérêts.
— Eh bien, soit. Mes gens ont vu comment tu t’es impliquée pour eux, ils n’y verront pas d’inconvénient si c’était le cas. Tu pourras en faire ce que tu veux. J’ai confiance que tu le feras dans les règles de l’art. Je sens que tu n’es pas une mauvaise personne. Et si j’ai tort, tant pis pour moi, je n’al pas mieux sur ma liste.
— Pardon… je n’arrive pas à te… tutoyer…
— Pas de problème, je peux comprendre. J’ai l’âge de ton père, on se connait à peine. J’aurais préféré qu’on puisse se tutoyer pour que tu ne te sentes pas en position de faiblesse sur cette offre.
— Je vais essayer…
— Tu peux m’appeler par mon prénom, Gabriel, si cela t’arrange.

Elle acquiesça sans un mot.
Elle réfléchissait et Gabriel fut attendri. Elle paraissait tellement sure lorsqu’elle était ici avec son garde, et aujourd’hui elle était si vulnérable. Il avait une envie forte de la protéger. Il ne pouvait pas lui dire ça.
Bien entendu qu’il voulait faire son maximum pour la chérir mais il se demandait si ce n’était pas des émotions très superficielles. Il se faisait peut-être des films sur ce qu’il ressentait et il devait faire attention.
La seule chose dont il était sûr, c’est qu’il l’appréciait. Déjà comme une amie, si elle le voulait bien.

— Alexandra ?
— O-oui ?!
— Ne sois pas aussi tendue. Je ne vais pas te manger.

L’idée, la possibilité de la manger lui traversa l’esprit un très court instant, et il se rappela à l’ordre d’effacer cette image de sa tête.

— D’accord… je… pardon… je ne peux pas m’empêcher de chercher le piège.
— Il n’y en a pas. Je te le promets. C’est une sécurité pour moi, tout simplement. Je sais que cela peut être contraignant pour toi, si tu as envie de te marier à quelqu’un d’autre… peut-être accordes-y tu une certaine importance… ?

— Est-ce qu’on va devoir porter la robe le costume et faire toute la cérémonie… ?
Demanda t-elle, aussitôt.

— Euh… rien ne nous-y oblige. Si tu le souhaites, je peux organiser un banquet-
— Non non, sans tout ça, ça me convient… je veux dire… c’est un contrat sans aucun attachement… du coup, ça me gênerait de faire semblant en public… enfin, si ca vo-… te convient.
— Oui, je suis assez d’accord avec toi. Je ne pensais pas faire une quelconque fête, ça m’enlève une épine du pied de ne pas devoir le faire, à vrai dire.
— Et si… et si… tu changes d’avis, et que tu veux te marier à quelqu’un d’autre ?
— Cela s’applique à toi, aussi. Enfin… Surtout à toi. Je suis vieux, plus personne ne s’intéressera à moi. Peut-être que si, mais juste pour mes biens. Tu ne pourras pas te marier à quelqu’un d’autre tant que tu es lié avec moi. Tu le sais ?
— Oui. Je… à vrai dire, cela m’arrange parce que je n’ai aucune volonté de me marier. Si j’annonce que je le suis déjà, j’arrêterai de recevoir des propositions à tout bout de champ. Ca me soulagera. On peut dire que cela nous tire tous les deux d’affaire.
— Tu es encore jeune, tu ne sais pas ce que l’avenir te réserve. Dans tous les cas, si ça peut te rassurer. Ce contrat est surtout une sécurite pour moi, si je meurs soudainement d’ici les prochaines années. Avec un peu de chance, je mourrai avant que tu désires te marier avec quelqu’un d’autre.
— Je… je ne vous le souhaite pas…

Il sourit.

— Est-ce que ca implique que je dois vivre ici… ?
Ajouta t-elle.

— Hm… qu’est-ce que tu préères ?
— Je… je ne sais pas.
— En toute honnêteté, ça m’arrangerait que tu sois sur place pendant un petit moment. Rien de trop long, même si tu as fait du très bon travail, je dois te montrer et t’apprendre certaines choses sur mes dossiers confidentiels. Ca serait l’histoire d’une petite semaine, si ça ne te dérange pas… ?
— D’accord…
— Ca peut être une autre fois, rien ne t’oblige à signer le contrat maintenant.
— Ah… d’accord…
— Tu as l’air préoccupée… dis moi… ?
— Je pense que ma décision est prise, mais je dois en parler à mon père.
— Tu es en droit de refuser, aussi.
— Je le sais… je vais repartir dans ce cas. Je reviendrai le plus vite possible pour signer le contrat.
— Même si ton père s’y oppose ?
— Il n’aura pas vraiment son mot à dire. Je suis adulte et je prends une décision qui me concerne.
— Tu comptes repartir maintenant ? Ton cheval risque d’être épuisé.
— C’est vrai…
— J’ai quelques scrupulesà te faire faire les trajets. Est-ce que m’entretenir avec ton père le rassurerait ?
— Est-ce qu’il est judicieux de laisser votre domaine pendant quelques heures ? Juste pour un contrat ?
— Ca devrait aller. Je préfère être sûr, mais tu comptes accepter mon offre ?…
— Oui.
— Tu es certaine ?
— Oui. Vous n’avez pas l’air si méchant que ça… puis, je peux avoir confiance en vos mots.
— J’espère que tu pourras rapidement me tutoyer.
— Je…
— Je te taquine. Dans ce cas, si cela te convient, je vais te raccompagner et en discuter avrc ton père aussi.

*

L’arrivée de Gabriel et Alexandra fit son effet au domaine de Sephyl.
Elle ouvrit la marche et Gabriel la suivit sans faire de bruit.
Elle le guida jusqu’au bureau de son père qui se tint sur ses gardes.
Elle les laissa entre eux pendant qu’elle attendit à l’extérieur.

— Bonjour… ? Que me vaut ta visite ?
— Bonjour… futur beau père ?

— N’utilise pas ce mot ici.
Sephyl n’était pas d’humeur à rire.

Gabriel se racla la gorge.

— Je suis ici pour parler de ma proposition faite à ta fille. Je suis sérieux et sincère. Même s’il n’y a pas de sentiments en jeu, je compte prendre soin d’elle et faire en sorte qu’elle ne manque de rien. J’ai pu voir qu’elle était très débrouillarde et je souhaiterai qu’elle soit mon épouse pour faciliter les droits de succession.
— Si tu es ici c’est que sa décision est déjà prise.
— Oui, je le crois. Je voulais juste te rassurer sur ma sincérité et que je ne compte pas profiter d’elle, en mal…
— … Je te remercie d’avoir raccompagné Alexandra. Et je t’assure que nous n’avons pas pour intention de t’assassiner. Même si j’ai proposé cette éventualité à ma fille.
— Cela m’aurait surprit que tu ne le fasses pas.
— Blague à part. Si j’apprends qu’elle souffre par ta faute, je viendrai t’étriper de mes propres mains.
— Le message est bien passé.
— Si tu n’as plus rien à me dire, je souhaiterai parler à Alexandra.

*

— Je crois comprendre que ta décision est prise. Je ne pensais pas que tu accepterais aussi facilement…
— Tu sais ce que ça implique…
— Je me doute. Je respecte ton choix. Je sais que tu as choisi cette offre pour te débarrasser de ton devoir. C’est plutôt une bonne occasion et je ne peux qu’être fier de ce que tu vas construire.
— J’ai besoin de faire un séjour chez lui pour voir comment ça se passe… et pour signer le contrat.
— Tu me tiendras au courant… ?
— Oui papa. C’est juste de l’administratif, appelle-moi si tu as besoin que je rentre… j’ai besoin de couper je pense…
— Est-ce que… ça concerne Chris… ?
— Oui… je ne peux rien te cacher. Je suis désolée d’agir encore en enfant. Je vais essayer de tourner la page, et je pense que ce faux mariage est une bonne opportunité d’assumer mes responsabilités.
— Je te fais confiance, fais attention à toi.
— Toi aussi papa, prends soin de toi, et de Chris…
— Tu ne vas pas lui dire un mot ?
— Non… je ne préfère pas. Je ne pars pas pour toujours. Je pense que je serai de retour d’ici une petite semaine.

Il se leva et prit sa fille dans ses bras.

— Ne t’inquiète pas papa, si je signe, je serai sous la protection de son domaine. Je n’ai pas besoin de Chris. Garde le à tes côtés.

*

Gabriel ressemblait à un videur devant le bureau de Sephyl. Il se faisait dévisager parce qu’il était inconnu et surtout très grand avec sa carrure.
Alexandra le tint au courant de son programme et prépara quelques affaires avant de repartir avec lui.
Elle pria pour ne pas croiser Chris, mais Gabriel le vit et il s’arrêta discuter rapidement avec lui.

— Gabriel… ? Quelle surprise ? Vous attendez quelqu’un ?
Demanda Chris en le voyant à l’entreée du domaine avec son cheval.

— Bonjour Chris. Comment vas-tu ?
— Bien… bien, merci. Est-ce que je peux faire quelque chose pour vous ?
— Non, merci. J’attends Alexandra.
— Ah.

Gabriel préféra ne pas en dire plus, voyant la surprise dans le regard du jeune homme. Il ne savait pas s’il était judicieux de le mettre dans la confidence.
Elle ne tarda pas et elle fut également surprise de voir Chris. Elle lui adressa à peine un regard et elle pressa Gabriel sur le départ.

— Es-tu en froid avec ton garde… ?
— Pourquoi vous dites ça… ?
— Cela s’est ressenti, tu cherches à l’éviter… ?
— En quelque sorte…

*

— Elle a accepté…
Dit Chris dans un soupir.

— Oui.
Répondit Sephyl.

 

2021.10.11

Platre

Après sa discussion, Chris rejoint Alexandra aussitôt.
Elle fit comme si elle n’avait pas remarqué son absence et lorsqu’elle lui parlait, elle ne regardait jamais dans sa direction.
Elle était froide avec lui, elle lui en voulait encore et elle essayait de lui rendre la froideur de son comportement mais il ne laissait rien paraître et c’est ce qui la frustrait encore plus.

Ils prenaient leur repas à la cantine où tout le monde était et Alexandra s’asseyait là où il y avait de la place, au milieu de tout les autres. Sans se soucier de sa sécurité. Chris en intimidait plus d’un, mais il restait là. Près d’elle. Silencieux. Elle n’avait rien de plus à lui dire.
Les autres personnes savaient qui elle était, elle était devenue populaire.

— Tu as vu, c’est Alexandra…
— Celle qui a sauvé Gabriel ?
— Elle aide à la reconstruction aussi, elle cache bien ses pouvoirs…

Les gens parlaient plus ou moins forts, elle ny prêtait pas attention.
Certains n’hésitaient pas à la remercier et la saluer en personne, ce qui la gênait.

— Son garde du corps me fait flipper… il sourit jamais.
— Je le trouve plutôt beau…
— Il la suit partout, il doit être très dévoué.

*

Elle téléphonait régulièrement à son père pour le rassurer et lui tenir au courant de la situation.

— Oui papa, non, je fais attention, je ne me mets pas en danger, je serai prudente ! Et toi, comment ça se passe de ton côté ? Tu as eu un assaut ? Mais ça va… ? D’accord. Ici, on reconstruit progressivement, j’aide un peu et dès que Gabriel se réveillera et sera en état de se lever, on rentre.
Elle avait raccroché en soupirant.

Elle n’avait qu’une hâte, c’était de rentrer mais elle était bloquée ici pour au moins quelques jours encore.

— Tout va bien ?
Demanda Chris.

Ce qui lui valu un second soupir plus prononcé.

— Ouais… comme avait prévu papa, quelqu’un a lancé une attaque chez nous, mais ils ont maitrisé la situation.

Chris avait l’air contrarié et ne dit rien de plus.

— On a encore quelques jours à attendre, dès que Gabriel est sur pieds, on s’en va. Je ne veux pas m’attarder ici trop longtemps.
— Tu es sure pour les travaux… ?
— … On ne va pas rester les bras croisés à juste attendre. J’ai promis à mon père que je ne me mettrai pas en danger, je peux au moins aider à reconstruire le bâtiment, ça ne me coûte pas grand chose.

Chris resta silencieux. Il ne savait pas quoi répondre.
Il était méfiant envers ce Gabriel et tout cet endroit. Ils l’avaient sauvé mais il pensait que ça serait fini et qu’ils rentreraient, mais Alexandra avait décidé de rester au cas où il y aurait une seconde attaque.
Puis elle avait pris en main certaines tâches pour aider à l’organisation et ce n’était pas tout, elle voyait qu’ils avaient besoin d’aide et elle ne s’était pas posée plus de questions. Elle les aidait à reconstruire et déblayer certaines zones.
Il ne pouvait s’empêcher de penser qu’elle ressemblait à son père, elle arrivait à donner des directives, orienter les gens vers des tâches appropriées.
Elle n’était plus la même qu’il avait connu lorsqu’ils étaient ensemble.
Elle avait grandit terriblement vite sans qu’il ne s’en rende compte et il avait un sentiment de respect à son égard.

*

Elle faisait une ronde pour vérifier que tout se passait bien et qu’elle n’avait pas besoin d’intervenir dans certains lieux. Chris la suivait silencieusement comme à son habitude.
Surveillant les alentours, il n’arrivait pas à être serein.
Ils dormaient dans la même pièce, il y avait deux lits simples qu’on avait fait déplacer exprès pour eux, et Alexandra avait éloigné le sien à l’autre bout de la chambre pour ne pas être obligée de supporter sa présence de trop près.

Il ne pouvait oublier leur relation, mais il prenait sur lui pour ne rien laisser paraître.
Cela lui brisa le coeur lorsqu’elle éloigna le lit, mais il devait accepter son choix. Il était convaincu que c’était pour son bien, et la voir le dépasser le confortait dans cette idée.
Il ne contrôlait pas la boule qu’il ressentait dans le creux de sa poitrine. Bien entendu qu’il aurait souhaité la serrer dans ses bras, retourner à leur relation, mais c’était fini et parce que c’était lui qui y avait mis fin.
Il était convaincu qu’il ne la méritait pas. Qu’il n’était pas assez bien pour elle.
Il n’était qu’un orphelin qu’on avait recueilli et on l’avait formé pour être un soldat. Quel avenir pouvait il espérer ? Il ne s’était jamais posé cette question, il n’avait jamais pensé qu’il tomberait amoureux, ce sentiment était nouveau pour lui, et encore moins que cet amour soit réciproque.
Il avait pris peur, il ne savait pas dans quoi il s’engageait et il avait peut-être peur de ne pas être à la hauteur, il s’était peut-être et certainement caché derrière le rang d’Alexandra, c’était qu’une bonne excuse pour qu’il se retire, prétexant que c’était pour son bien. Quoi qu’il en soit, il était maintenant trop tard pour regretter et avoir des remords.
Il ne pouvait même pas en vouloir à Alexandra d’être si froide et de le haïr pour son choix.
Ces pensées l’accompagnèrent avant qu’il ne trouve le sommeil.
Avant tout, il était inquiet dans cet environnement.

*

En se baladant dans les couloirs, ils entendirent soudainement un cri et des appels à l’aide.
Alexandra accourut et Chris la suivit, un groupe de personnes étaient en train de reconstituer et déblayer une partie d’un mur, mais un morceau du plafond fragilisé qui était passé inaperçu, s’était décroché et tombé sur une des personnes, ses amis étaient autour de lui et en train d’essayer de déplacer le bloc qui immobilisait une partie de son corps, heureusement le morceau était tombé sur des gravats autour et il n’avait pas écrasé les os, cependant il était assez lourd pour l’empêcher de se dégager, mais petit à petit, il arrivait à s’extirper avec l’aide des autres autour de lui.
Ils y allaient avec précaution pour éviter que les gravats ne se déplacent et que la pierre ne finisse par lui tomber dessus de tout son poids.
Alexandra arriva au plus vite et elle se positionna pour utiliser sa magie et soulever le bloc problématique.

— Ecartez vous ! Chris, aide-moi, s’il te plaît.

Il était déjà aux côtés du blessé, se positionnant pour déplacer la personne en dessous dès que le bloc sera assez soulevé. Il savait qu’il devait faire vite parce qu’Alexandra faisait de son mieux pour contrôler sa magie et porter ce poids.
Elle y allait avec précaution pour ne pas forcer avec sa magie.
Elle entendit un bruit suspect.
Un autre bout du plafond se mit à se décrocher juste au dessus de Chris et du blessé.
Alexandra eut le temps de réagir et de voir le danger. Elle somma Chris de se dépêcher, elle réussit à retenir les débris qui étaient en train de tomber sur les deux personnes, et Chris dégagea la personne aussitôt qu’il ne put pour se mettre tous les deux loin de l’endroit.
Quelques secondes après, tout s’écroulait en un tas de rochers et de pans de murs.
Alexandra était en sueurs, et se tenait les genoux pour tenter de reprendre son souffle, elle avait eu si peur pour Chris, et aussi l’autre personne. Et la magie qu’elle avait utilisé l’avait épuisée. Elle n’avait pas l’habitude de contrôler des objets aussi conséquents.
La chute des morceaux de plafond fit un bruit ahurissant, et qui laissa place à une onde de choc qui était perceptible, faisant trembler légèrement les murs et le sol.
Quelques poussières tombèrent du plafond et certains lévèrent leurs yeux, inquiets.
Alexandra était trop préoccupée par sa fatigue.
Le coeur battant encore à toute allure, elle ne remarqua pas la poussière qui tomba, ni la mince fissure qui était en train de se créer au dessus d’elle.

Lorsque Chris se tourna vers elle pour s’enquérir de son état, il était encore aux côtés de la personne qu’il avait aidé à sauver. Elle était secoué et essayait de réaliser qu’il était encore en vie.
Il constata avec effroi que la chute du plafond était en train de créer un évènement en chaîne, la fissure était visible et il était trop loin pour pousser Alexandra et la mettre à l’abri.
Il ne pouvait que la prévenir en lui criant de faire attention.
Elle ne comprit pas tout de suite, et en voyant l’expression paniquée de Chris, elle leva enfin les yeux pour constater que les fissures étaient en train de se créer juste au dessus d’elle.
Elle réfléchit un court instant pour analyser vers où les fissures risquaient de s’accentuer pour bouger et se déplacer du côté où elle serait en sécurité.
Finalement, elle choisit de courir vers Chris, mais il était trop tard.
Elle eut le temps de faire quelques mètres avant que plusieurs morceau ne s’écroule sur elle, au niveau de son épaule, ce qui la fit trébucher par surprise, et la douleur. Puis elle se pencha et essaya de continuer sa route, mais d’autres blocs se détachèrent et atterrirent sur son dos, et ses jambes.

Elle tomba au sol, les gravats recouvrant la partie basse de son corps.
Sonnée, elle ne savait pas ce qu’il se passait.
Elle ressentait une douleur au niveau de ses jambes, et un peu partout dans son corps.
Les personnes autour étaient en état de stupeur, Chris était sur le point de se ruer sur Alexandra quand quelqu’un lui dit de ne pas se précipiter.

— Tu ne sais pas s’il va avoir un autre éboulement, c’est super dangereux si tu t’approches… tu n’es pas dôté de pouvoirs pour t’en tirer si jamais…
— Mais… ! Elle a besoin d’aide !
— Nous ne sommes pas assez compétents pour ça… regarde nous.

Celui qui avait été sauvé par Alexandra ne pouvait pas rester les bras croisés et il se dirigea en titubant vers l’infirmerie pour prévenir les personnes capables de faire quoi que ce soit.
Chris pensa qu’il s’enfuyait et préféra ne pas relever que de s’énerver.
Il repoussa celle qui voulait l’empêcher de s’approcher.

— Je prends le risque, mais je dois la sortir de là !

Il y alla tout seul, en restant aux aguets de la moindre secousse. Il réussit à atteindre Alexandra et lui toucha le pouls pour attester de son état, rapidement.

— Alexandra ? Tu m’entends ?
— O-oui…
— Je suis tellement rassuré… ok, je vais te sortir de là, je vais essayer de retirer les gravats.
— Chris… je sais pas si c’est une bonne chose… c’est dangereux, je m’en voudrais si tu te retrouves coincé comme moi, par ma faute…
— Ne t’inquiète pas pour moi, c’est toi la priorité.
— Chris…
— … Oui ?
— Je ne sens plus le bas de mon corps… je sais pas si c’est un bon signe, peut-être parce que je suis immobilisé mais… si jamais… je m’en sors pas…
— Arrête, tu vas t’en sortir, les gens vont appeler les secours, on va venir t’aider.
— Ok, mais si jamais, parce que je sais qu’ils sont débordés et… bref. Je voulais te dire que je suis désolée de t’avoir fait la tête pendant tout ce temps…
— … C’est compréhensible Alexandra, je ne t’en veux pas. C’est de ma faute si on est dans cette situation.
— Enfin, c’est pas de ta faute si j’suis coincée ici.
— Non, c’est vrai, mais c’est pas de ça dont je voulais parler…
— Je sais.

Elle essayait de sourire. Elle avait le sentiment que c’était fini et elle ne voulait pas mourir en laissant Chris avec l’image d’elle qui est froide.

— Tu arrives encore à avoir de l’humour dans cette situation ? Tu me surprendras toujours.

Même avec la force de Chris, il devait faire attention à quels gravats retirer en premier.
S’il faisait une erreur, il pouvait aggraver la situation.

*

Pendant ce temps, à l’infirmerie.
On frappa à peine à la porte et un petit groupe de personnes entrèrent en panique, Chrystal alla à leur encontre pour leur demander ce qui se passait.
Elle n’appréciait pas qu’on entre sans prévénir et surtout avec un tel vacarme.

— Il y a… la fille, l’étrangère.
— Alexandra ?
— Oui ! Il y a eu un éboulement, elle est coincée dessous !
— Quoi !? Vous êtes sûrs que c’est elle ?
— Elle m’a sauvé avec l’autre, à la peau mate, et le plafond est tombé… !

Les explications étaient confuses mais Chrystal était aux aguets, que ce soit Alexandra ou pas, il fallait l’aider.

— Vous avez demandé une équipe ? Ils sont où ?
— Je ne sais pas, ils sont occupés sur une autre zone certainement.
— C’est une urgence, dites leur et que c’est un ordre direct.

Chrystal avait cette importance pendant que Gabriel était en convalescence forcée.
Il entendit la conversation et se leva de son lit.
Chrystal le regarda d’un air mécontent

— C’est une urgence. J’irai plus vite.
— Gabriel… !
— Je ne suis pas mal en point, et je ne vais pas me battre ! Je devrais pouvoir aider un tant soit peu. Surtout si c’est Alexandra, elle nous a tellement aidé. On perd du temps. Emmenez moi où elle est.

Il avait enfilé une chemise à la va-vite, déboutonnée, on voyait les bandages sur son torse, et il avait un pantalon léger sombre.
Des espadrilles aux pieds, il se dépêcha sur les lieux et il analysa tout de suite la situation.
Chris était en train d’essayer de retirer les gravats à la main et il vit Alexandra au sol, ensevelie.
Il ne perdit aucune seconde.
Il cria à Chris de s’écarter, ce qu’il fit sans se poser de questions.
Gabriel utilisa sa magie pour soulever tous les gravats et les maintenir en l’air, laissant un espace d’à peine un mètre au dessus d’Alexandra qui n’osait pas bouger.
Il s’approcha sans se précipiter auprès d’elle, il l’extirpa et la porta avec un de ses bras, puis tout en quittant la zone dangereuse.
Il reposa lentement les gravats sans secousse.

— Je-j-… merci…
Babultia Alexandra maladroitement et gênée.

— Tu es consciente, tant mieux. Je t’emmène à l’infirmerie.

Il l’osculta rapidement mais ne posa pas plus de questions et se dépêcha de retourner à l’infirmerie.
Chris était resté scotché par la facilité d’exécution de Gabriel alors qu’il semblait être encore en convalescence.
Il les suivit silencieusement et en gardant une certaine distance avec Gabriel, il ne le sentait pas.

Elle n’avait pas le souvenir qu’il était si imposant, dans ses bras, elle paraîssait minuscule.
Sa chaleur corporelle était rassurante et atténuait les douleurs qu’elle ressentait dans son corps.
Elle n’arrivait pas à décrire ce qu’elle ressentait, mais elle était juste heureuse d’être en vie. Elle n’avait pas tout compris, mais Gabriel était venu la secourir.
Finalement, il n’était pas qu’un vieux connard.

De retour avec Chrystal, elle étouffa un cri.
Elle prit tout de suite en charge Alexandra qui ne comprenait pas pourquoi tant d’inquiétude.
Elle était en vie. Bon ok. Blessée mais en vie. Elle devrait guérir relativement vite et son père. Mince son père. Est-ce qu’elle tairait ce fâcheux évènement à son père ?

— Comment te sens tu. Alexandra… ?
Demanda Chrystal avec une pointe d’appréhension.

— Relativement bien… ? Pourquoi vous me regardez comme ça… ? Et euh… merci beaucoup Gabriel…
— Si tu pouvais éviter de te mettre en danger cela m’arrangerait… ton père risque de m’arracher les yeux.

Gabriel semblait avoir une migraine.

— Vous n’étiez pas censé être en convalescence… ?
Osa demander Alexandra

— Si. D’ailleurs il va retourner au lit.
Chrystal s’exprima et ordonna avec des gros yeux à Gabriel.

Il leva les mains en guise de défense.

— Je vais beaucoup mieux et c’était une mesure exceptionnelle. Je suis sûr que je pourrais sortir de ma convalescence.
— Je te connais, tu vas forcer et tu ne vas pas bien cicatriser !

— Excusez moi d’être désagréable… mais… Alexandra ? C’est grave ce qu’elle a, non… ?
Demanda Chris qui osa élever la voix, parce qu’il était vraiment inquiet et il voyait l’état du corps.

Ce n’était pas beau à voir et elle ne semblait pas s’en rendre compte.
Ils se tournèrent tous vers lui et Chrystal se racla la gorge.

— Erm… Alexandra. Je vais te manipuler un peu, hésite pas à me dire si tu as mal.

Chrystal commenca à tâter ses membres et les parties basses de son corps, ses cuisses et ses jambes.
Lorsqu’elle arriva à la jambe gauche, les mollets et les chevilles, Alexandra se crispa et eut une larme à l’oeil.

— Ca fait mal ?
— T-terriblement… !
— Ok, c’est un miracle que ta jambe ne soit pas complètement détruite. À vue de nez, ça va être long à réconstituer. Bon, les garçons, vous sortez. Je vais l’osculter partout ailleurs.

Chrystal tira les rideaux et les deux hommes se retrouvèrent penauds.

— Gabriel… je voulaIs vous remercier… d’avoir extirpé Alexandra de cette situation.
Chris s’inclina même pour lui signifier à quel point il était reconnaissant.

— Pas de ça avec moi, Chris, c’est bien ça ? C’est normal, vous m’avez sauvé la vie et c’est naturel que j’en fasse de même. Que ce soit pour elle ou pour n’importe qui d’autre, d’ailleurs.
— Vous êtes en convalescence…
— Chrystal est pire qu’une mère poule concernant ma santé, je ne suis pas, plus, mal en point. Et en grosse partie grâce à vous.
— Quoi qu’il en soit, merci infiniment.
— Le fait qu’elle soit en vie m’arrange également, je souhaiterais entretenir des relations amicales avec vous. Si jamais il lui arrivait quelque chose, j’imagine très bien son père rayer mon domaine de la carte.
— C’est… fort possible…
— Puis… je suis consciens de n’avoir pas commencé de la meilleure des façons… je reconnais avoir mal agi, mais mes voeux de bonne entente sont sincères. Vous êtes des alliés en qui je peux avoir confiance et vous me l’avez prouvé à plusieurs reprises. Je souhaiterais pouvoir en faire de même pour vous.
— Je… ne suis qu’un simple garde du corps, mais j’espère pouvoir également rester en bons termes avec vous.

Chris tendit la main et Gabriel la lui serra avec poigne.

*

— C’est si grave que ça… ? Je pensais que j’allais guérir rapidement et…
— … En sachant ta particularité génétique, tu vas devoir au moins avoir la jambe dans le plâtre pendant un mois entier… l’autre a l’air pas trop fracturée, quelques jours devraient suffire et tu pourras t’appuyer dessus.
— Ne me dites pas que je vais devoir me déplacer en fauteuil roulant…
— Ca ne dépendra que de toi. Si la guérison se passe comme prévu, les béquilles devraient être suffisantes. Tu as quelques blessures superficielles dans le dos et au niveau de tes côtes. Tu ne t’en tires pas trop mal pour un accident de ce genre.
— … Je… je pense que mon père va m’achever lorsque je vais lui dire ça…
— Il ne sera pas content que sa fille soit en vie ?
— Je lui avais promis de ne pas me mettre en danger et voilà que je suis blessée. Il ne me laissera plus jamais sortir…

*

Alexandra dut attendre que l’une de ses jambes soit pratiquement guérie pour pouvoir sortir, et se déplacer, mais elle avait besoin de béquilles.
Elle était têtue et avait refusé le fauteuil roulant.

Lors de sa convalescence, Gabriel avait réussit à négocier avec Chrystal pour quitter l’infirmerie et il avait pu reprendre ses affaires, ses papiers administratifs.
Il se rendit compte à quel point Alexandra avait bien travaillé et il n’hésita pas à lui en toucher quelques mots à ce sujet.

Elle ne fit que le remercier sans y prêter attention, pour elle, ce n’était pas plus dur que de gérer chez elle avec l’aide de son père.
Sa jambe intacte n’était pas complètement guérie, elle marchait tant bien que mal, et forçant trop, elle fléchit et les béquilles ne purent rien y faire, elle perdit l’équilibre et s’écroula par terre, elle s’aida du mur pour se relever mais la douleur était encore présente et elle resta au sol, en essayant de se remettre debout pour ne pas paraître misérable. Les larmes commencèrent à lui monter aux yeux.
Chris n’était pas là, et heureusement, il était aller assister les autres personnes pour restaurer le château. Elle avait décidé de sortir toute seule pour prouver qu’elle s’était remise
Elle avait tort.
Elle était bloquée à cet endroit, sa jambe trop faible pour suporter son poids, et l’autre dans le plâtre.
Les béquilles à portée de main, elle se sentait idiote.

Gabriel passait par là et il la remarqua dépitée et il crut la voir pleurer.

Elle essuya aussitôt ses larmes et il fit mine de n’avoir rien vu.

— Qu’est-ce que tu fais là… ?

— J-j’ai glissé… ahah…
Se forca t-elle à rire et à sourire, en frottant les dernières gouttes du coin de ses yeux avec son bras.

Il ne releva pas et l’aida à se mettre debout, en ramassant les béquilles.
Il la maintenait avec tellement de facilité qu’elle avait l’impression d’être une poupée de chiffons.
Sans trop de surprise, elle ne réussit pas à se tenir sur sa jambe, et elle faillit basculer à nouveau.
Gabriel remarqua sa faiblesse et la rattrapa pour qu’elle puisse garder l’équilibre en s’appuyant sur son bras.
Elle baissait le visage et n’osait pas dire un mot.
Il ne chercha pas à la destabiliser ni se moquer d’elle. Il voyait combien elle était désemparée et heurtée dans son fort intérieur.
Sans poser de question, il la porta, laissant les béquilles posées debout contre le mur.

— Je te ramene à l’infirmerie.

Ils restèrent tous les deux silencieux jusqu’à ce qu’elle retourne sur son lit.
Cet incident ne fut pas ébruité, Chris n’en sut rien.

*

Le jour du départ, Gabriel fit atteler une voiture pour qu’Alexandra puisse rentrer dans de bonnes conditions.
La situation à son château s’était stabilisée.

*

— Je suis confuse, je… merci pour tout.

Alexandra était gênée, elle n’avait servi à rien à la fin de son séjour, et Gabriel avait préparé de quoi la renvoyer alors qu’il était dans une situation délicate.
Ils avaient gardé pour eux ce petit moment gênant où elle était tombée avec ses béquilles.
Depuis lors, elle n’avait plus essayé de contredire l’aide qu’on voulait lui apporter.
Sa jambe avait finit par guérir mais celle blessée était encore dans le plâtre, et elle ravala sa fierté. Quelque chose s’était passé en elle.
Lorsqu’on lui proposait de l’aide, elle acceptait sans rechigner.

Quant à Gabriel, il avait été touché par cette jeune femme. Il ne savait pas comment la remercier, pour le travail qu’elle avait fait lors de sa convalescence.
Il ne voulait pas passer pour quelqu’un de désagréable, et compte tenu de leur première rencontre, il fit de son mieux pour ne pasêtre intrusif et ne pas paraître de la draguer lourdement.

— Excuse moi, je ne peux pas te raccompagner jusque chez vous compte tenu de la situation…
Commença t-il à lui dire, elle était installée dans la voiture et Chris à ses côtés.

— Oh non, c’est déjà beaucoup trop généreux de votre part de nous prêter la voiture… tout ça parce que je ne peux pas monter à cheval…
— C’est la moindre des choses, vous avez fait tellement pour nous.
— Ce n’est vraiment rien. Je pense qu’avec ceci, nous devrions être quittes.
— Largement. Je vous souhaite un bon retour. Prenez soin de vous.
— Vous également.

Alexandra souhaita dans sa tête de n’avoir jamais plus à le revoir.

Gabriel souhaitait pouvoir avoir la chance de la revoir pour lui dire ce qu’il avait sur le coeur. Quelque chose le travaillait depuis qu’elle était là, mais il devait d’abord remettre son domaine en état.

Ils se quittèrent sur ces mots.

*

Gabriel réfléchissait à sa situation. Le fait qu’il ait frôlé la mort le travaillait. Si jamais il n’était plus là, il n’avait personne pour reprendre en main les lieux.
Il n’avait jamais songé à cette possibilité parce qu’il était trop confiant, il ne pensait pas que sa vie était si fragile, et à vrai dire, peut-être qu’il s en fichait.
Il ne voulait pas que tout soit perdu, que tout ce qu’il ait construit soit perdu.
Il aurait voulu être plus démonstratif sur sa reconnaissance envers Alexandra mais il se souvenait de son rejet lorsqu’elle était plus jeune, il reconnaissait ses torts et il ne voulait pas réiterer ce comportement.

Une idée lui occupait l’esprit.
Il souhaitait épouser Alexandra, mais cette fois-ci, ce n’était pas pour servir son propre intérêt, pas directement.
Il voulait assurer ses arrières et faire en sorte que son domaine lui revienne si jamais il venait à mourir.
Il se rendait compte qu’il n’avait personne d’autre sur qui compter et qui serait aussi capable ou presque, de reprendre le flambeau.
Il avait vu comment elle gérait les tâches et il avait une entière confiance. C’était une assurance pour lui.

Il devait encore réfléchir aux détails avant de proposer cette offre à Alexandra et à son père, qui devait approuver également ce contrat blanc, en quelque sorte.
Sachant qu’ils ne se reverraient pas de si tôt, il décida de rédiger deux lettres. Une adressée à Alexandra directement, et l’autre à son père.
L’une remerciait officiellement son père, l’autre décrivait la proposition dans les détails.

Lorsqu’Alexandra reçut cette lettre, elle ne sut pas quoi penser. Elle la relut en se demandant si c’était elle qui n’avait pas compris, puis en se demandant si Gabriel n’avait pas perdu la tête, puis au final, elle douta d’une blague.
Elle en parla à son père, directement.

— C’est incensé, qu’en penses-tu, papa ? C’est pas un piège… ?
— Je ne pense pas… sur le papier, l’offre est aléchante mais cela ne me concerne pas. Qu’en penses-tu ? Toi ?
— C’est idiot… je ne vais pas l’épouser juste pour l’héritage…
— Tu sais que cela se fait beaucoup entre nobles…
— Je sais… mais j’avais l’espoir que cela change.
— Je dois reconnaître que cette proposition est plutôt équitable, et s’il vient à décéder rapidement, tu pourras toujours te remarier.
— Papa ! On ne va pas l’assassiner juste pour ça !
— Non non, je ne disais pas ça pour l’assassinat… Alexandra, voyons !

Alexandra réfléchit au contenu de la lettre.
Son père n’avait pas tort mais elle ne savait pas encore quel réponse donner à Gabriel.
Elle ne ressentait rien pour lui. Ce qui était plutôt une bonne nouvelle pour lui, elle n’avait plus de haine ou d’apriori négatif depuis le temps, cependant cela pouvait rapidement changer s’il venait à dire ou faire quelque chose de travers.
Elle se demandait si son père avait mis Chris au courant.
Elle espérait qu’il réagisse, qu’il ait encore un semblant de sentiments envers elle, mais il ne fit aucune remarque ni ne montra une quelconque émotion.

*

Affalée sur son bureau, le papier à lettre entre ses doigts, elle regardait sans voir les mots manuscrits posés sur ce papier. Elle réfléchissait. Plusieurs pensées lui traversèrent l’esprit. Le papier était de très bonne qualité, il avait dû choisir méticuleusement son support pour lui adresser cette proposition.
En jouant avec la perspective, elle pouvait voir l’encre de la plume briller à la lumiere. Il était vieux jeu, cela lui arracha un sourire.
Elle pouvait deviner l’inclinaison de sa plume grâce à quelques accroches sur les fibres de la feuille.
Elle devait le reconnaître : Il s’était appliqué et son écriture était plus que lisible. Même son père n’écrivait pas aussi bien et pourtant, ses documents manuscrits étaient beaux et soigneusement rédigés.

Elle ne savait toujours pas quel réponse donner.
Que pouvait-elle penser de cette proposition sordide.
Quelle idée avait-il derrière la tête.
Elle ne pouvait penser qu’à un piège, l’offre était trop alléchante. Matérielle mais alléchante.
Elle n’avait pas l’expérience pour rédiger une réponse convenable, elle ne trouvait pas les mots et elle sentait qu’elle devait l’avoir en face à face pour sonder ses intentions profondes.
Son offre tenait et n’avait aucune faille et c’est cela qui la rendait anxieuse.
Il avait evoqué et insisté sur les nombreux points qui étaient intéressants pour elle, mais la contrepartie était trop inégale pour lui. Juste gérer son domaine ? Il ne pouvait pas y avoir que ça.

Une autre pensée trottait dans sa tête. Chris. Les derniers évènements les avaient en quelque sorte réconciliés mais il y avait toujours ce mur invisible et froid entre eux.
Elle espérait qu’il ressente encore quelque chose pour elle. Qu’il soit jaloux et qu’il change d’avis au sujet de cette proposition de mariage qu’elle pourrait accepter.
Il ne lui montra rien de tout ça et ce fut douloureux pour elle.
Comment cela pouvait-il être aussi douloureux ? Elle en avait les larmes aux yeux et elle ne savait pas si c’était dû à la tristesse ou à la colère. Puis, après s’être calmée dans sa chambre, elle en rit. Elle se trouvait ridicule. Elle était adulte maintenant, et elle restait bloquée sur une histoire de coeur d’il y a plusieurs années, alors qu’il avait tourné la page, lui.
C’était puéril de sa part et elle s’en rendait compte.

Elle essuya ses larmes.
Elle devait se comporter comme une adulte et elle réfléchit plus sérieusement à cette offre.
Elle devait tout d’abord répondre par une lettre.
Elle prit son courage à deux mains et rédigea à la plume, une réponse adéquate, l’invitant à bien vouloir la revoir pour en discuter de vive voix.

*

Chris était dans sa chambre et laissa ses émotions s’exprimer sur son visage. Il savait pour la proposition de Gabriel. C’était le père d’Alexandra qui lui avait dit.

— Es-tu sûr de n’avoir rien à regretter… ? Alexandra a encore des sentiments pour toi. Tu le sais.
Avait dit Sephyl.

Chris n’avait pas besoin d’entendre ça mais il savait que son boss disait ça parce qu’il se souciait de Chris.
Il s’en alla pour ne pas avoir à répondre à cette question. Il était certain mais c’était dur aussi pour lui, et il ne souhaitait surtout pas montrer cette faiblesse à quiconque.
Il pensait au bien d’Alexandra. Il feintait de ne rien ressentir mais bien entendu qu’il avait encore de l’affection pour elle.
Oui, c’était la meilleure option. Gabriel était de son rang et elle vivrait une meilleure vie, c’était certain.
Il ressentait un énorme pincement dans sa poitrine, mais il ne devait pas y prêter attention.
Même si elle ne choisissait pas d’accepter, elle aurait d’autres prétendants.

 

2021.10.11

Assistante

Gabriel se réveilla et revit la silouhette qu’il avait aperçu avant de perdre connaissance.
Elle était à côté de lui et semblait le regarder, du moins ce qu’il pouvait deviner, son visage avait l’air d’être tourné vers lui.

— Ah, il est reveillé.
Prononça cette voix étrangement familière.

Sa vision devint un peu plus nette, il reconnut alors la jeune fille qu’il avait accueilli chez lui quelques années auparavant.

— Bouge pas.

Cette fois-ci, ce fut une autre voix féminine autoritaire qu’il entendit, celle de sa médecin.
Elle s’approcha de lui sur la droite et utilisa un stylo lampe sur ses yeux.
Il grogna.

— C’est toujours un plaisir, Chrystal.
— Contente de voir que tu n’as pas perdu ta voix, ni ta bonne humeur, Gabriel.
— Est-ce que je peux savoir ce qu’il se passe… ? J’ai dormi pendant combien de temps… ?
— À peine 2 jours. Tu étais sacrèment amoché, tu te souviens ? Heureusement qu’Alexandra et Chris étaient là.
— 2 jours ?! Et qu’est-ce qu’il s’est passé pendant tout ce temps… ?! Je-

Gabriel voulu se relever.

— Stop. Tu restes là et tu te calmes tout de suite. On s’est occupé des choses urgentes, ne t’en fais pas. Je me suis permis d’autoriser Alexandra d’accéder à ton bureau.

Chrystal plaqua Gabriel sur le lit et appuya sur sa plaie pour le dissuader de recommencer.
Il étouffa un cri et ne bougea plus.

— Je n’ai pas fouiné dans vos dossiers confidentiels, je vous rassure. J’ai juste… fait le tri et pris en main certaines choses pendant votre absence. J’aurais besoin de quelques informations maintenant que vous êtes parmi nous.
Expliqua Alexandra, qui prit la parole pour ne pas qu il y ait de malentendu.

— P-pardon ? Comment… ?
— Je n’avais pas le choix, Gabriel. Alexandra a été vraiment d’une grande aide.
— J’ai fait ce que j’ai pu…
— Non, pas seulement, elle nous a tiré une grande épine du pied, avec Chris, ils se sont occupés de rappatrier les blessés et elle a même reconstruit quelques parties détruites du château.
— Colmaté.. seulement… l’architecture n’est pas mon fort…
— Quoi qu’il en soit, tu n’es pas en état de te lever, pas aujourd’hui. Je te fais apporter de quoi manger et tu dois te reposer. Tu as été empoisonné et la plaie ne commence à peine à cicatriser. Tu viens de loin, alors ménage toi.
— Monsieur Gabriel… si cela ne vous dérange pas, je reviendrai après votre repas pour vous faire part de ce que j’ai fait. J’en profiterai pour vous poser d’autres questions…

Alexandra s’inclina et sortit de la pièce, laissant Chrystal et Gabriel.

— Est-ce que je suis en train de rêver… ? Elle fait quoi ici ? Explique moi, Chrystal, j’ai un mal de tête hallucinant…
S’exprima Gabriel, après le départ d’Alexandra.

— Je ne te le fais pas dire ! Il semblerait qu’ils ait reçu le message que tu as fait envoyer, et elle est venue avec son garde du corps… ? Il la suit partout, Chris. J’ai pas trop compris qui il était, mais quoi qu’il en soit, ils t’ont sauvé. Tu m’as fait une de ces peurs, j’ai cru que c’était fini pour toi. Ils t’ont amené ici, et voilà.
— Je… je crois que je me souviens mais c’est flou. C’est tellement improbable. Elle a battu mon adversaire sans mal…

Gabriel essayait de se rappeler ses derniers souvenirs.

— Et ce n’est pas tout. Elle a géré les gens comme une chef. À se demander si c’est la même personne que nous avons rencontrée auparavant… je ne sais pas ce que nous aurions fait sans leur aide. Je pense qu’on peut leur faire confiance.
— Ou alors elle en a profité pour voler toutes mes dossiers privés et cela va se retourner contre nous…
— C’est aussi une possibilté… mais je n’y crois pas trop.
— J’ai eu trop de déceptions, Chrystal, tu sais ce que c’est.
— Oui… mais cette fois-ci, je pense et j’espère, qu’elle est honnête et sincère.
— Je l’espère aussi… au pire, je suis encore en vie…
— C’est vrai !
— Je vais te poser une question qui fâche… tu sais si j’ai perdu beaucoup de personnes… ?
— … Pas beaucoup. Il y a beaucoup plus de blessés qui se remettent comme ils le peuvent. Ne pense pas à ça tout de suite, d’accord ?

Elle lui donna une petite tape amicale, et elle ferma le rideau pour l’isoler et aller osculter d’autres patients.

*

Après le repas, Alexandra ne tarda pas et il put l’accueillir cette fois-ci, assis.
Il était torse nu avec des bandages sur une grande partie de sa peau.

— Excusez moi de vous-
— Non non, tu n’as pas besoin de t’excuser, c’est plutôt à moi de le faire. Dis moi…

Il essaya de sourire gentiment, mais il ne réussit qu’à faire un sourire crispé. Il ne comprenait pas pourquoi elle l’aidait à ce point et il appréhendait sa trahison ou son chantage.

Elle était venue avec un porte-document et de quoi noter, alors elle s’approcha de lui, et lui montra ce qu’elle avait fait, avec des notes, les comptes rendus, puis toute une série de questions qu’elle souhaitait lui poser pour l’aider à mieux faire ce qu’elle avait déjà commencé.
Gabriel en tombait des nues.

— … Du coup, comme je ne savais pas trop comment vous avez l’habitude de gérer ces situations ici, j’ai fait ça en attendant… je comptais modifier et améliorer ça après votre réveil, si vous pouvez m’éclairer… ? Je peux aussi ne plus y toucher si vous préférez.

Elle attendait une réponse de sa part mais Gabriel semblait perdu dans ses pensées.

— Je… monsieur… ? Tout va bien ? Est-ce qu’il faut que j’appelle Chrystal… ?
— Oui, euh non. Je vais bien. C’est juste que… tu as fait ça toute seule… ?
— Non, bien sûr. Vos gardes m’ont un peu aide en me donnant quelques informations, et je ne suis pas seule. Chris, mon… ami, a également participé aux chantiers.
— Je veux dire… ces notes… elles sont de toi… ?
— Euh… oui. Je suis encore en formation avec mon père… du coup, c’est encore maladroit et fouilli… mais j’espère que je n’ai pas fait trop d’erreurs…

Alexandra avait baissé sa tête et serrait timidement son porte-document.

— Non non, au contraire. Je suis impressionné ! Merci pour ton aide ! Je vais répondre à toutes tes questions. Chrystal m’a interdit de bouger d’ici jusque demain, mais j’espère pouvoir me charger de tout ça le plus tôt possible.

Gabriel ne pouvait nier la tâche colossale qu’elle s’était imposée, même s’il restait méfiant et ne savait pas où elle voulait en venir, ni ce qu’elle souhaitait réellement, il devait lui laisser le bénifice du doute.
Il lui donna les réponses en tâchant d’anonymiser le plus possible, au cas où certaines personnes seraient concernés. Il devait rester prudent au cas où.

Alexandra ne fit pas attention et trouva cela presque normal, elle n’avait pas de mauvaises intentions mais elle comprenait ses craintes, même s’il ne laissait rien paraître.
Elle continuait de le vouvoyer, elle ne se sentait pas proche de lui, c’est juste qu’elle appréciait que les choses soient bien faites, c’est ce que son père lui avait enseigné. Puis elle avait encore son apriori et son jugement du caractère de Gabriel d’il y a quelques années, elle n’arrivait pas à lui faire confiance plus que ça, et elle ne souhaitait pas le connaitre d’avantage par crainte de son comportement.
Elle n’avait pourtant rien à craindre parce qu’elle savait se défendre, mais sa carrure était imposante et rien qu’à l’idée de sa silhouette surplombant et écrasant la sienne, elle préférait éviter cette confrontation si elle le pouvait. Elle s’éloigna dès qu’elle eut fini et s’en alla en s’inclinant légèrement. Ne sachant pas trop comment se comporter avec lui.

*

Les gens du château étaient occupés à aider au rétablissement des blessés, la réorganisation du château et des réparations nécessaires. Répartis entre ceux qui savait utiliser la magie et ceux qui ne le pouvaient pas.
La garde rapprochée de Gabriel était tous plus ou moins blessés, et celle qui était proche d’Alexandra avait un bras en soin.
Lorsqu’elle rencontra Chris, elle fut interpelée et surprise qu’il la suive comme son ombre.
Elle semblait l’ignorer voire même agacée à certains moments. Elle devina assez facilement qu’il était une sorte de garde du corps.

— Hé, Chris, c’est ça ?
Réussit-elle à l’interpeler pour lui parler en aparté.

Il se retourna en gardant un oeil sur Alexandra de temps en temps.
Les cheveux longs, lisses, noirs, attachés en queue de cheval haute, sa peau basanée, ses yeux sombres et profonds.
Son crane était rasé sur les côtés.
Il s’orienta vers la garde et attendit qu’elle formule sa requête ou sa question.

— Erm… je me demandais… t’es qui pour Alexandra… ? Tu es son garde du corps… ?
Demanda t-elle, en le jaugeant de haut en bas et en voyant bien que son attention était rivée sur Alexandra.

— On peut dire ça. Pourquoi ?
— Elle n’a pas l’air d’apprécier que tu la suives partout… tu sais, je pense pas qu’il soit nécessaire de l’avoir à l’oeil à ce point… enfin, je dis ça pour toi…

Chris ne dit rien et ne réagit même pas. Il comprenait ce qu’elle lui disait mais ne savait pas comment réagir.
Il la regarda de haut, parce qu’il était légèrement plus grand et essaya de sonder ce qu’elle avait derrière la tête.
Il n’arrivait pas à faire confiance à ce lieu.

2021.09.24

Retour d’aide

Elle était enfin rentrée chez elle.
Son père la fit tout de même examiner à cause de ses blessures aux mains et aux avant-bras, même si elle dut lui faire promettre de ne pas en vouloir à Gabriel.
L’infirmier l’osculta et confirma que les soins prodigués étaient bons, elle était en cours de cicatrisation et que tout devrait retourner dans l’ordre sans problème.
Après ce contrôle de routine, elle demanda des nouvelles de Chris.
À peine elle eut prononcé son prénom, qu’il franchi la porte de l’infirmerie et fut surpris de croiser Alexandra.

— Que fais-tu là ?! J’avais oublié que tu rentrais aujourd’hui-
— Chris !

Elle se leva et lui sauta dans les bras.

— Du calme, je suis encore en convalescence… moi aussi je suis content de te revoir…

Il lui sourit tendrement et caressa ses longs cheveux.
Il était également là pour un contrôle de routine.
Il s’installa et enleva son haut pour que l’infirmier l’osculte. Il vérifiait qu’il cicatrisait convenablement et que tout allait bien.
Chris lui expliqua que cela faisait une petite semaine qu’il venait de sortir de soin intensif et que pour l’instant il était interdit de faire de grands efforts.
Alexandra dut lui expliquer pour ses mains et il essaya de garder son calme.

— L’important c’est que je sois rentrée. Je ne veux plus entendre parler de ce Gabriel. D’accord ?
Dit-elle pour conclure la discussion à ce sujet.

Chris soupira et acquiesça.
Il lui fit visiter les rénovations et elle lui raconta ses déboires dans le château voisin.

— J’ai hâte de reprendre l’entraînement ! Je veux devenir plus forte et que tu n’aies plus à te sacrifier !
Avait-elle affirmé.

Au fond d’elle, c’était également pour rabattre le clapet à ce satané Gabriel, mais elle avait dit qu’elle ne voulait plus parler de lui. Elle voulait l’oublier et se concentrer sur elle et ses projets.

*

Quand ils purent s’isoler et discuter plus en privé, Chris dut s’excuser et parler de sa déclaration d’amour.
Alexandra ne sut pas comment réagir. Elle avait eut extrêmement peur lorsqu’il était blessé, et elle savait qu’elle tenait à lui.
Il était en train de lui dire qu’elle devrait oublier ces mots, mais quelque chose dans sa poitrine se resserait. Elle ne voulait pas faire comme si de rien n’était. Elle tenait à Chris.
Sans réfléchir aux conséquences, elle s’approcha de lui, et l’embrassa.
Son coeur battait à toutes allures
Elle ne savait pas si cela changerait quelque chose à leur quotidien, mais elle devait essayer, elle écoutait son coeur, qui semblait s’emballer.
Les secondes qui s’écoulèrent après son baiser parurent s’étendre et durer des minutes.
Elle se demandait si elle avait fait une bêtise, si Chris ne pensait pas ce qu’il avait dit.

Il la regarda dans les yeux et se demanda un instant s’il n’était pas en train de rêver.
Puis se rendant compte qu’elle attendait, qu’elle venait de l’embrasser.
Il ne put s’empêcher de lui rendre son baiser, puis un second plus passionnel.
Ils étaient dans une pièce où il y avait peu de passage mais Chris s’arrêta.
Ils ne pouvaient pas se montrer ainsi devant n’importe qui. Ils devaient discuter de manière plus sérieuse et il l’emmena dans sa chambre
Alexandra semblait gênée.

— Chris… je… c’est… que… j’ai jamais fait ça, et-
— Alexandra, ne t’inquiète pas. Je ne t’ai pas amenée ici pour ça… pas tout de suite… tout d’abord, on doit en parler… puis, nous sommes tous les deux en convalescence et je ne veux pas me retrouver à l’infirmerie à devoir m’expliquer si jamais… Cela devra attendre… et je ne sais pas ce que ton père va en penser si on-…
— Chris ! Mon père t’adore… et si on pouvait ne pas penser à mon père pendant…

Elle se cacha dans ses mains.
Attendrit, Chris retira les mains d’Alexandra pour voir son visage, et l’embrassa à nouveau.

— Je… je suis si heureux que mes sentiments soient réciproques… tu ne peux pas savoir à quel point j’ai rêvé de ce moment…

Elle était tout autant émue.

— Par contre… je préfèrerai ne pas être trop expansif sur notre relation en dehors du cadre privé… je reste ton tuteur et cela serait certainement déplacé si nous étions trop proches aux yeux de tous.
— Je… oui. Je comprends, tu as raison…

*

Les jours passèrent et Chris sortit de sa convalescence et put reprendre des entraînements de manière progressive. Alexandra en fit de même.
Et un soir, elle se rendit dans la chambre de Chris, ce qui le surprit.

— Alexandra ! Tu ne devrais pas être ici à cette heure-ci !
— Mais… tu m’as dit que… après notre convalescence… puis… je suis prête…

Chris vira au rouge.

— ‘Xandra… tu… tu n’es pas obligée… ça peut attendre tu sais. Je ne suis pas pressé.
— Oui mais… moi… j’ai envie…

Elle ne savait plus où se mettre et elle se colla à Chris en n’osant pas le regarder dans les yeux.

— … Tu sais… que je t’aime… mais je ne veux pas te forcer la main…

Elle l’embrassa, une fois, puis plusieurs fois, jusqu’à le faire craquer, il lui rendit ses baisers.

*

Le lendemain, Sephyl lui en toucha quelques mots entre deux dossiers à traiter, et Chris crut mourir de honte, il fit tomber les documents qu’il avait dans ses mains.

— Je ne suis pas dupe, Chris, je sais ce qu’il se passe et ça ne me regarde pas. C’est la vie privée de ma famille. Cependant, j’espère que tu es prêt à prendre tes responsabilités si jamais il arrive quelque chose.
— Bien sûr… monsieur… je prends les précautions nécessaires. Soyez sans crainte.

Et ils retournèrentà leur travail sans aucune transition.

Alexandra dut affronter le même discours.

— ‘Xandra… je sais que tu n’es plus une enfant… et je n’ai rien à dire sur tes relations privées… surtout si tu les partages avec Chris. J’espère juste que vous vous protégez. Enfin, je n’ai rien sur le fait que tu me donnes des petits enfants mais il est peut-être un peu tôt-
— Papa !!! Aaaaah !!!
— Qu’est-ce qu’il y a… ? Je m’inquiète, c’est normal.
— Oui, on se protège, c’est tout ce que tu voulais savoir… ?
— Oui.
— Ok, on peut discuter d’autre chose, maintenant… ?
— Bien sûr.

*

Alexandra avait une faim insatiable concernant Chris.
Elle découvrait son corps et ses hormones s’exprimaient avant sa raison, elle avait envie d’en savoir d’avantage et surtout de pratiquer d’avantage.
Lors des entraînements qu’elle prenait très au sérieux, elle n’hésitait pas à jouer avec l’humeur de Chris, qui la rappelait à l’ordre aussitôt.
Il restait maître de lui-même et surtout souhaitait rester professionnel pour prouver à son patron qu’il pouvait continuer à exercer malgré leur relation.
Elle essayait de l’embrasser et Chris dut s’énerver et hausser le ton pour la calmer.

— Arrête ça ! Si tu n’es pas concentée pour l’entraînement, le cours est terminé.

Alexandra bouda et s’excusa, reprenant sans embêter son tuteur.
Cependant, à la toute fin du cours, elle se faufila dans le vestiaire des hommes, sachant qu’il n’y avait pratiquement personne durant leur cours.
Elle posa ses affaires dans un casier qu’elle prit soin de refermer pour ne pas éveiller les soupcons, et devina où se trouvait Chris puisque c’était la seule douche qui était utilisée.
Elle le fit sursauter et il vérifia paniqué, s’il n’y avait personne d’autre dans les vestiaires.

— Mais tu as perdu la tête ?! À quoi tu joues ?!
Chuchota t-il, énervé. En la plaquant au fond de la douche.

Elle ne se laissa pas malmener et elle lui attrapa le bras pour se tirer vers lui et l’embrasser.

— Maintenant que l’entraînement est terminé… on peut faire ça… non ?
— Tu— tu ne penses qu’à ça… ?! Tu sais qu’on risque d’avoir des problèmes si quelqu’un nous voit ici ! C’est de la folie !

— Il n’y a jamais personne… et s’il y a quelqu’un, il suffit juste de ne pas faire de bruit. Facile, non ?
Répondit Alexandra, avec un large sourire.

Elle avait préparé sa réponse.
Chris était exaspéré.

— C’est que… tu me fais tellement de bien…
Supplia t-elle, en le prenant par les sentiments, elle attrapa sa main pour la placer entre ses jambes.

— Je… j’ai tout le temps envie de toi… je ne contrôle pas mon corps…
Murmura t-elle dans son oreille, ce qui eut pour effet de le faire rougir.

Elle l’avait pris au piège.

*

Elle lui sautait dessus à chaque occasion.
Lorsqu’il avait finit une réunion ou une mission, elle l’attendait au tournant et elle n’hésitait pas à l’embarquer dans une pièce inutilisée pour faire leur affaire.

— Alexandra… je t’aime, mais il va falloir que tu ralentisses la cadence… je vais finir par avoir des problèmes avec ton père si ça continue. Je dois rester professionnel et ce que… tu me fais faire est très limite. Tu comprends… ?
— … Oui… pardon… je pensais être assez discrète…
— Je le sais… je serai à toi après mon service, d’accord ? Ca m’embêterait que ton père m’interdise de te voir à cause de mon manque de professionalisme.
— D’accord…

*

Le soir, elle l’attendait patiemment en se préparant et après avoir fini ses propres devoirs, elle se rendait dans la chambre de Chris et à peine qu’il poussait la porte, qu’elle lui sautait dessus et l’embrassait langoureusement.
Dans cette chambre, ils avaient le temps et ils savaient qu’ils pouvait être moins discrets.

*

Leur relation dura un peu plus d’un an, avant que Chris rompe.

— Nous ne sommes pas du même monde, Alexandra… je ne peux pas te protéger tout en étant ton amant… comprends moi.
— Je ne vois pas de quoi tu parles ! De quel monde tu parles ? Si c’est de mon rang, je peux m’en débarrasser, je suis sure que mon père n’aura aucun inconvénient à ce que je sois une simple personne !
— Ce n’est pas aussi facile. Tu es promise à un destin et un futur beaucoup plus radieux. Je n’ai rien à t’apporter. Je ne suis rien, je ne suis qu’un simple garde.
— Je m’en fiche de ça. C’est toi que j’aime, je veux rester avec toi ! Peu importe ce que tu m’apportes…
— Ne rends pas la chose plus difficile…
— C’est toi qui rends tout difficile ! Pourquoi… ? Je ne suis pas assez bien pour toi… ? Tu t’es lassé de moi… ? J’ai fait quelque chose… ?!
— Non, Alexandra. Tu es parfaite, mais nous en avons profité, il faut que je te laisse reprendre ta vie et aspirer à mieux.
— Je comprends pas… Chris… tu ne m’aimes plus… ?

Alexandra était au bord des larmes et les sanglots dans sa voix faisaient vibrer ses mots.
Chris s’en alla sans ajouter un mot, la tête baissée, il quitta la pièce où elle se trouvait.

*

— Es-tu sûr de ta décision ?
— Oui…
— Tu sais que je n’ai jamais été dérangé par votre relation. N’est-ce pas ?
— Oui monsieur… mais je sais qu’elle est en âge de se marier et je vois l’avenir fade qu’elle aura avec moi, peu importe à quel point je l’aime, je ne veux pas la priver de ce qu’elle pourrait avoir avec quelqu’un de son rang.
— C’est gentil de ta part de penser à ça… mais rien ne l’oblige à choisir cette voie. Elle a le droit d’aspirer à une vie paisible avec toi, tu le sais ?
— Oui… elle n’a connu que moi jusqu’à aujourd’hui. Elle doit également découvrir si elle ressent des sentiments pour d’autres personnes.
— Je vois que tu es têtu… et que ta décision est prise… je sens que je vais devoir m’expliquer avec elle…
— Excusez moi.

*

Elle déboula dans le bureau de son père, les larmes aux yeux.

— Qu’est-ce que tu lui as dit ?!
— Si tu parles de Chris. Rien. Absolument rien.
— Alors pourquoi il a dit ces choses là, à propos de mon avenir ou j’sais pas quoi ! C’est stupide !
— C’est ce que je lui ai dit aussi. Tu dois respecter sa décision. C’est difficile pour lui aussi.
— Alors pourquoi… !?

Elle fondit en larmes encore une fois et son père vint la consoler.

— Je ne le comprends pas non plus, je lui ai dit que cela ne me dérangeait pas, que veux-tu… c’est la vie… tu ne peux pas le forcer d’être en couple avec toi, non plus, pas vrai ?
Essaya de blaguer son père.

Alexandra pleura pendant encore un moment avant de se reprendre.

Elle continuait de croiser Chris de temps en temps et ils avaient toujours leurs entraînements ensemble.
Chris se comportait de manière froide et distante et cela brisa encore plus le coeur d’Alexandra.
Elle cherchait dans ses yeux la complicité et la pssion qu’ils partageaient auparavant, mais il ne laissait rien transparaître.
Rapidement, Alexandra se força à penser à autre chose et elle intensifia ses entraînements et se plongea dans ses cours.
En l’espace de plusieurs mois, ses progrès furent fulgurants et elle dépassa le niveau de Chris.
Elle en profita pour lui dire qu’elle n’avait plus rien à apprendre de lui et qu’il n’aurait plus besoin de la tutorer à ce sujet.
À partir de ce jour, elle s’entraîna avec son père.

*

Des propositions de mariage commencèrent par arriver de manière régulière et Alexandra refusa à chaque fois.
Elle rencontrait les prétendants qui faisaient l’effort de venir jusqu’à elle, mais elle ne les trouvait pas intéressants, elle avait l’impression qu’ils étaient trop faibles, et enfantins. Ils étaient censés être plus agés qu’elle.

*

Un jour, son père la convoqua.
Il avait reçu quelques nouvelles et il lui fit part d’une information pour l’impliquer dans les décisions.
Cela faisait maintenant un bon nombre d’années qu’elle apprenait à ses côtés et il était temps qu’il lui fasse confiance et lui demande son avis sur ce sujet particulier.

— Alexandra. Je n’ai pas l’habitude de te demander ton avis sur les sujets que je traite, mais je pense que cela va devenir de plus en plus courant. Tu as fais d’énormes progrès et je vois que tu travailles dur pour suivre mes pas.

Elle était assise dans le fauteuil juste en face du bureau de son père, elle le regardait et l’écoutait religieusement. Ses mots lui faisaient extrêmement plaisir et à la fois, elle craignait tellement de le decevoir. Et si elle n’était pas à la hauteur ?
Alors elle resta silencieuse, en attendant qu’il lui explique ce qu’il en était.

— Pour en venir droit au but… j’ai pensé que le sujet te concernait. Je ne sais pas si tu te souviens de Gabriel… ? Notre voisin le plus proche.

Elle acquiesça sans dire un mot. Elle ne voulait rien ajouter de désagréable.

— Eh bien, j’ai reçu des nouvelles assez urgentes, c’est arrivé il y a moins d’une heure. Il semblerait qu’il est en train de subir un assaut, et il nous a fait parvenir une demande d’aide assez critique. Je ne sais pas encore quoi faire, mais il va falloir prendre une décision rapide. Au vu de la situation et du manque d’information, je ne peux pas non plus lui envoyer beaucoup d’aide. Si c’était un piège et qu’on se faisait envahir également, ça serait terrible. Cependant, s’il est vraiment en danger, je ne peux pas non plus rester les bras croisés. Qu’en penses-tu, Alexandra… ?
— … Si cela est trop voyant et beaucoup trop risqué d’envoyer une véritable équipe, je pense que je peux y aller en éclaireuse. Je ne le porte pas dans mon coeur, mais il nous a aidé la fois ou nous étions dans une situation similaire. Même si ses méthodes étaient… particulières, je m’en voudrais de ne pas l’aider s’il a vraiment besoin de notre aide. Je pense que c’est l’occasion de lui rendre la pareille, sans trop nous mouiller et qu’on soit quitte, et que nous n’ayons pas cette dette invisible au dessus de nous.
— Tu n’as pas tort… mais. Je ne peux pas te laisser y aller seule. Même si je sais que tu t’es améliorée grandement depuis, et que j’ai confiance en tes capacités, je ne peux pas prendre le risque de te perdre si jamais il arrive quelque chose. Tu comprends ?
— Dans ce cas, n’importe qui avec qui je peux faire le chemin. Je peux être prête d’ici 10 minutes. Je te promets de faire attention et d’être prudente. Je ne suis plus une enfant.
— Je sais. Chris est disponible et je serai rassuré si tu partais avec lui.

Elle ne cacha pas sa déception.
Elle aurait voulu contester mais elle savait que le temps était compté et qu’il ne valait mieux pas se disputer avec son père pour lui faire changer de partenaire, pas aujourd’hui, pas maintenant.
Elle soupira et acquiesça à contre-coeur.

— Dans ce cas, je le préviens, je te l’envoie et vous pouvez partir sur le champ. Promets moi d’être prudente. Tiens moi au courant dès que tu en sais d’avantage. D’accord ?
— Oui papa. Prends soin de toi pendant mon absence. Je reviens vite.

Lorsque Chris la rejoignit, elle ne pouvait s’empêcher de lui en vouloir encore, après sa décision, ils étaient en froid, elle le sentait et elle n’arrivait pas à envisager une autre manière de l’appréhender.
Depuis, elle avait tout fait pour l’éviter mais ce n’était pas possible aujourd’hui.
Elle se crispa et elle était de mauvaise humeur.

— Tâche de ne pas me ralentir. On y va, on prend note de la situation, et selon comment ça se passe, on avisera, mais le but c’est de se dépêcher et rentrer.

Elle ne lui adressa presque pas un regard.
Elle pouvait rester professionnelle avec Chris mais pour l’instant, chaque interraction inutile pouvait être évitée et elle le faisait.
Il resta neutre et se tint prêt pour partir.
Lorsqu’ils arrivèrent sur place, l’état des lieux la mit sur ses gardes.
Le bâtiment dont elle se souvenait était en ruines et beaucoup de personnes étaient blessées, certaines devaient être cachées parce que les couloirs étaient presque vides.
Elle crut entendre des armes s’entrechoquer.

— Reste sur tes gardes.
Lui dit Chris, qui se positionna aussitôt et passa en observant les alentours.

— Pas besoin de me le dire.
Répondit-elle sèchement, en prenant les mêmes précautions, elle s’avança et pénétra le château.

Elle se dirigea vers l’endroit où le bruit provenait, et sur le chemin, elle reconnut une jeune femme avec qui elle avait l’habitude de s’entraîner. Elle se pécipita sur elle, elle était adossée à un mur et semblait assomée. Les cheveux et les vêtements abîmés, en broussaille, un peu de sang au coin de sa bouche et le visage amoché.
Alexandra crut qu’elle était morte à première vue, puis en s’approchant d’elle, elle vérifia qu’elle respirait encore et essaya de la réveiller pour lui poser des questions.

— Ah… Alexandra…
— Où est Gabriel ?
— Je n’ai pas réussi… aide le, je t’en supplie…

Elle pointa le lieux où le son devenait plus fort.

— Tu as fait de ton mieux, je fais vite et je reviens, ok ? Tiens bon.

L’autre femme lui sourit doucement et la regarda partir avant de refermer les yeux.

Arrivés dans la salle immense, elle vit qu’il y a avait eu un combat acharné. Les meubles, le sol, tout avait été déplacé et détruit.
Est-ce qu’elle était arrivée trop tard ?
Une explosion eut lieu près d’elle et Chris s’interposa pour la protéger, même si elle était déjà en train de s’éloigner et d’éviter l’impact.
Ce qui eut tendance à l’agacer.

— Tu vas bien… ?
Demanda t-il, la surplombant.

— Oui oui…

Un débris faillit leur tomber dessus, elle le poussa pour le dégager et roula sur le côté pour l’éviter également.

— Occupe toi de toi, plutôt !!
Cria t-elle, avant de se relever en vitesse.

Les coups et échanges d’armes reprenaient et elle put voir Gabriel se battre avec son ennemi.
Elle se souvenait de son physique, il n’avait pas tellement vieilli en quelques années, peut-être qu’à un certain age on ne change plus tellement physiquement, se dit-elle.
Elle se rappelait avec quelle facilité il l’avait battue la fois où elle était chez lui. Et le voir en difficulté ne la laissa pas indifférente.
Elle analysa la situation pour prendre la décision la plus adéquate pour intervenir et lui venir en aide.

Ils étaient trop concentrés sur leur combat pour remarquer la présence d’Alexandra et de Chris.
Elle en profita pour se mettre à couvert et attendre le moment opportun pour participer.
Elle fit signe à Chris d’observer s’il ne voyait personne d’autre et de sécuriser les lieux.
Le moment vint assez rapidement.

Gabriel avait réussi à repousser son adversaire de manière brève et s’était mis à l’écart pour reprendre son souffle.
Elle sauta sur l’occasion et prit par surprise l’ennemi lorsqu’il charga à nouveau sur Gabriel.
Elle l’intercepta, à la surprise des deux, et réussit à le désarmer puis, l’acheva sans même hésiter une seconde de plus.
Elle remarqua un second adversaire qui bondit sur elle, Chris avait maîtrisé un troisième.
Elle le repoussa puis évita ses attaques avant de l’attaquer à son tour.
Les échanges furent assez courts avant qu’elle ne les mette hors d’état de nuire.
Gabriel ne comprit pas tout de suite ce qu’il se passait
Elle regarda autour d’elle et aux alentours pour s’assurer qu’ils ne subiraient pas une autre attaque.
Puis chris lui fit signe qu’elle pouvait baisser sa garde pendant qu’il s’en chargeait.
Elle s’approcha de Gabriel et lui demanda s’il allait bien.

*

Il était à bout de force, il ne se souvenait plus de combien de salves d’attaques et d’assauts il avait subit sur sa personne depuis qu’il avait demandé d’envoyer un messager prévenir qu’il aurait besoin d’aide.
Il savait qu’il était submergé et il n’avait pas le temps de se demander comment allaient ses employés et ses combattants. Il devait leur faire confiance et défendre sa place tant qu’il le pouvait.
Il avait fini par craindre que son messager n’avait pu survivre et qu’il était maintenant livré à lui-même.
Des coups, des explosions, des débris, il essayait de rester concentré sur son ennemi et sa position pour ne pas le perdre de vue.
Il avait baissé sa garde une ou deux fois et il avait été surpris, blessé. Il était tellement pris par l’action qu’il ne pouvait pas faire attention à ses blessures, légères ou graves, il ne savait plus.
Il sentait comme un picotement sur son flanc, certainement l’endroit où la lame de son adversaire avait pénétré dans sa chair, elle n’était pas restée longtemps, mais ça avait suffit et même s’il savait qu’il était plus âgé et qu’il se faisait vieux, sa vue se troublait et la fatigue se faisait ressentir. Il supposait qu’il avait été empoisonné.
Il pouvait deviner la jubilation de son opposant qui faisait durer le combat exprès.
Il n’attendait qu’une chose, que le poison fasse effet et que le corps de Gabriel s’écroule devant lui.

Gabriel avait réussi à le repousser encore une fois, cette fois-ci, avec un peu plus d’insistance, de quoi l’éloigner pendant un instant, même court.
Il avait besoin de reprendre son souffle.
Il posa un genou à terre, il toussa, il cracha du sang, il essuya sa bouche avec le revers de son bras.
Ca y est, il sentait la fin. Il ne pouvait pas tenir indéfiniment. Il s’était battu de son mieux, il avait tout donné, s’il devait mourir ici, il n’aurait aucun regret.

Lorsqu’il se redressa, prêt au combat, il fut surprit de voir une chevelure châtin en face de lui.
Un corps de jeune, plutôt athlétique, des boucles qu’il reconnaissait, il avait le souvenir d’avoir déjà vu ces reflets chauds, mais il n’en était pas sûr. Cela parassait improbable que la personne à laquelle il pensait se trouve aujourd’hui ici.
Les yeux écarquillés, il vit cette silhouette se battre et mettre au sol, son adversaire, avec une telle facilité, puis une seconde personne fonça sur elle, tout se passa très vite.
Quelque chose n’allait pas, il n’avait pas le temps de réagir, tout se passait trop vite autour de lui.
Il aurait voulu prévenir son sauveur, ou sa sauveuse ?
Tout devenait flou et les sons qu’il percevait étaient étouffés.

Elle avait fini, elle se tourna vers lui.
Il la reconnut et il crut rêver.
Etait-ce bien la jeune fille qu’il avait rencontré à l’époque ?
Sa vision devint plus sombre.

— Hé, ça va ?!

La voix féminine s’estompa ainsi que sa silhouette.
Il se sentit chuter au ralenti, il s’attendait à ressentir le sol dur, mais quelqu’un l’attrapa avant qu’il ne touche terre.

*

— Ne le touche pas !
Cria Chris, qui attrapa le corps de Gabriel.

— Il a été empoisonné. Laisse moi m’en occuper.
Ajouta t-il, à voix basse.

Gabriel était beaucoup plus grand, musclé et imposant que Chris. Il eut un peu de mal à le stabiliser.

— Tu es sûr que tu n’as pas besoin de mon aide… ?
Demanda innocemment Alexandra, qui avait de la peine à le voir ainsi.

— Non… ça va… il est juste… encombrant.

Ce qui eut le mérité de faire pouffer Alexandra, avant de la faire racler le fond de sa gorge et faire semblant de tousser.
Chris eut un pincement au coeur.
Il ne se rappelait plus la dernière fois qu’il avait pu apercevoir son sourire.

Elle se souvint à peu près de l’emplacement de l’infirmerie et elle s’y précipita en faisant attention aux croisements dans les couloirs, elle resta sur ses gardes et Chris essayait tant bien que mal de la suivre avec le poids de Gabriel sur ses épaules.
La porte était entrouverte et elle la poussa avec beaucoup de précaution.
Elle vit Chrystal, des scalpels à sa main et sur le point d’en envoyer un dans sa direction.

— Wow, du calme, je suis là en tant qu’amie…

Alexandra leva ses mains.

— Ah… comment tu t’appelles déjà… ? Axelle ?
— Alex… andra…
— Ah oui, c’est ça… qu’est-ce que tu fais ici… ? Ce n’est pas le meilleur moment pour faire du tourisme…

Chrystal était adossée et assise avec la porte en visuel, elle essayait un peu d’humour pour détendre l’atmosphère mais elle était en mauvais point aussi. Des corps jonchaient le sol autour d’elle, des scalpels plantés à des endroits biens stratégiques. Elle avait du recevoir un ou plusieurs coups sur le visage, ses cheveux étaient légèrement décoiffés et ses vêtements avaient été froissés et déchirés par endroit.
Elle se releva avec un peu de mal en s’aidant du mur.

— Je ne viens pas pour les vacances… je t’amène Gabriel. Je crois qu’il a juste perdu connaissance mais Il est certainement empoisonné.

Sur ces paroles, Chris franchit également la porte, avec le corps de Gabriel.
Le visage de Chrystal blêmit, elle se redressa du mieux qu’elle put et, d’un coup de pied, poussa les corps autour d’elle qui semblaient la gêner, puis prépara un lit pour osculter Gabriel.
Elle n’avait pas les mots pour exprimer ce qu’elle ressentait, ni sa panique intérieure.
Gabriel, son maître, était dans cet état.

Alexandra essaya de ne pas déranger et à la réaction de Chrystal, elle ne prenait plus la situation à la légère.
Elle fit signe à Chris de lui amener Gabriel et de l’installer sur une table.
Elle tira un rideau et s’occupa de lui. Elle l’osculta puis elle vit aussitôt la blessure la plus préoccupante. Celle sur le flanc était la plus visible et elle comprit tout de suite que c’était un poison qui l’empêchait de se régénérer.
Elle sortit les outils dont elle aurait besoin pour extraire la substance toxique et l’isoler avec sa magie, puis de quoi recoudre et panser la plaie béante.
Il avait quelques égratinures par ci et par là, mais rien de grave. Il avait juste puisé sur ses forces et son énergie, et son corps était épuisé. Si on mettait de côté le poison, il aurait besoin de repos.
Chrystal fut plutôt rapide et elle ressortit presque aussitôt.

— M-merci de l’avoir amené. Il devrait être tiré d’affaire…
Dit Chrystal, en s’asseyant, essoufflée.

— … Tu es sure que tu vas bien… ?
— Oui oui… C’est juste que je suis aussi en train de taper dans mes réserves… Quelques minutes et je devrais aller mieux. Merci encore pour Gabriel. Si vous n’étiez pas là, il n’aurait pas…
— Il n y a pas de quoi. On a fait ce qu’on devait faire. D’ailleurs, est-ce que tu sais si on peut aider à autre chose, et dans quel ordre… ? C’est vraiment le chaos, je ne peux pas vous laisser comme ça, à vous regarder sans rien faire.
— Je n’en ai aucune idée… d’habitude c’est Gabriel qui donne des ordres et prends en main les actions par priorité…

2021.09.22

Quiproquo

— Ca veut dire… qu’il veut m’épouser sans sentiments… ?
Demanda Alexandra, qui ne semblait pas comprendre ce qu’elle venait d’apprendre.

— C’est ça. Rassure toi, ce n’est pas un pervers pédophile. Je suis même certaine qu’il ferait en sorte que tu ne manques de rien.
Expliqua la jeune femme.

— … C’est… pire !
S’emporta Alexandra.

*

— Tu devrais te sentir privilègiée, tu ne sais pas combien de femmes rêveraient d’être à ta place dans son domaine…
— Je ne vois pas le rapport ! Il n »a aucun sentiment pour moi et moi non plus, sauf qu »il y trouve un intérêt… ! C’est juste absurde ! Je ne vais pas me sentir chanceuse d’être à cette place ! Ca me dégoute, qu’elles me remplacent !
— On a pas toujours ce qu’on veut dans la vie, parfois tu acceptes par dépit un choix, et je trouve qu’épouser Gabriel est plutôt raisonnable. C’est ce que j’essaye de te dire.
— Je veux avoir le choix de me marier, ou pas, avec qui je veux ! C’est quand même important ! Ca décide d’une grosse partie de mon futur quand même ! C’est si égoïste ?!
— Tu ne te rends pas compte de la chance que c’est de se retrouver dans ta situation. Tu as la possibilité d’épouser quelqu’un de riche et puissant. Tu ne comprends pas ?
— Non, je préfère être libre et heureuse que d’être forcée à épouser un homme qui a l’âge de mon père. Je me fiche de sa fortune ou de sa puissance. Lorsque j’aurai quelques années en plus, je ferai en sorte d’être au moins aussi forte et puissante que lui !
— … C’est beau de croire. Je pense que je n’arriverai pas à te convaincre.
— Non. Tu n’as pas besoin. C’est parce que tu es sous ses ordres que tu me dis ça, c’est ça ?
— Non. Pas seulement. Je le pense sérieusement.
— Tu voudrais l’épouser ?
— Je… je ne pense pas être digne de l’imaginer. Il ne s’intéresse pas à moi et… je le respecte trop pour ça…
— Qui te le dit ? Tu n’en sais rien. Ca se trouve il a des sentiments pour toi. Ou déclare toi.
— Non. Je.. je travaille depuis trop longtemps à ses côtés. On a pas ce genre de relation… et même si c’était le cas, cela ferait longtemps qu’il y aurait eu quelque chose…
— … Pardon, je ne savais pas…
— Tu ne pouvais pas savoir. Tu vois, ce n’est pas aussi simple que ça dans la vie. Je me contente de travailler à ses côtés.
— Qu’est ce que tu aimes chez lui… ? Je suis curieuse maintenant.
— Ahah… bon, j’imagine que ça ne me coûte rien de te le dire… je ne suis plus à ça près… il est attentionné… même s’il est discret, il fait en sorte de ne blesser personne. Sensible aussi… il ne le montre pas en public mais certaines choses le touchent vraiment. Il est puissant mais n’abuse pas de sa force. Il n’hésite pas à protéger ses soldats…
— … Je ne vois pas du tout ça. J’ai l’impression que tu me décris un inconnu.
— Ahah, oui je peux comprendre. Tu ne le vois pas sous le même angle, mais je t’assure qu’on parle bien de la même personne. Il faut apprendre à le connaître. Il a grand coeur
— Non merci.

*

Sa partenaire de combat lui avait présenté les bains dans le château.
C’étaient des sortes de thermes avec un bassin aussi grand qu’une piscine, avec la température toujours maintenue aux alentours de 35 et 38 degrés Celcius.
Ils étaient mixtes et il existait des plages horaires pour les femmes et les hommes.
Elle était impressionnée par l’endroit et prenait des notes pour en parler à son père à son retour.
Cétait une expérience géniale.
Les premières fois, sa partenaire avec qui elle avait tissé un certain lien d’amitié, malgré leur divergence d’opinion, l’avait accompagnée pour qu’elle puisse s’y habituer.

*

Elle se fit réveiller un soir, par une servante, qui avait l’air pressée et lui avait dit que sa partenaire l’attendait dans les bains.
Elle n’était pas bien réveilée et se demandait qu’elle heure il pouvait bien être, se frottant les yeux et baillant, elle avait demandé si ça ne pouvait pas attendre demain et pourquoi il fallait que ce soit en plein milieu de la nuit.
La servante n’apporta pas plus d’explication et l’incita à aller voir par elle-même.
Alexandra descendit alors, à contre-coeur et se retrouva dans la salle d’eau immense.
Cherchant des yeux ou pouvait se trouver l’autre femme.
Elle entendit une voix provenant du hammam, alors elle s’y rendit. En ouvrant la porte et en pénétrant dans la pièce, elle n’aperçut pas grand chose à cause de l’humidité ambiante.

— Il y a quelqu’un… ?
Demanda t-elle, incertaine.

Elle s’avança pour voir si son amie était là, elle savait qu’elle avait entendu du bruit ici.
La porte derrière elle se referma aussitôt et elle entendit un bruit.
Elle se retourna et une peur l’envahit soudainement.
Elle essaya d’ouvrir et sortir, mais impossible.
Elle frappa alors sur la porte.
C’était peut-être une erreur.

— Il y a quelqu’un ? Je suis à l’intérieur ! Ouvrez moi !
Cria t-elle, en espérant qu’on puisse l’entendre.

Et les minutes passèrent.
Elle essaya de forcer la porte, sans succès.
Elle arrêta de s’épuiser et fit les cents pas dans la pièce.
Elle était avec ses vêtements de nuit : un haut trop grand qui tombait jusqu’à ses genoux.
Même peu habillée, elle avait chaud à cause de la température et l’humidité imprégnait ses vêtements, et se déposait sur sa peau et dans ses cheveux.
Au bout de plusieurs minutes, elle avait du mal à respirer tellement l’air ambiant était éttoufant.
Elle s’était assise, puis finalement, allongée sur le carrelage pour essayer d’avoir moins chaud et mieux respirer.
Elle n’avait plus qu’à prier et attendre que quelqu’un vienne lui ouvrir.
Pendant tout ce temps, elle réfléchissait.
Est-ce que c’était une erreur ? Où était son amie ? Est-ce qu’elle l’attendait encore quelque part ? Est-ce qu(elle la cherchait ?
Elle n’avait même pas regardé l’heure exacte. Tout ce qu’elle pouvait deviner était une estimation, et elle essayait de calculer dans combien de temps les premières personnes viendraient utiliser la salle d’eau.
Elle avait perdu toute notion du temps et elle sentait qu’elle ne devait pas s’endormir ni perdre connaissance ici. Ce n’était pas bon.
Au bout d’un temps qui lui sembla infini, elle entendit à nouveau le verrou et la porte s’entrouvrit.
Elle utilisa les forces qui lui restaient pour se hisser et sortir de la pièce, en rampant.
Elle put enfin reprendre sa respiration.
À quatre pattes, elle avait l’impression de revivre
Elle sentit la présence de quelqu’un et elle vit les pieds non loin d’elle.

— M-merci… j’ai cru que j’allais y rester… je ne sais pas ce qui s’est passé, j’étais enfermée dedans…
Essaya t-elle d’expliquer, en même temps qu’elle respirait.

— La porte était bloquée.
Une voix froide et qui lui était inconnue lui répondit.

Elle releva son visage pour voir de qui il s’agissait, et son regard s’arrêta sur ce que la personne avait dans sa main : un grand couteau de cuisine affuté.
Alexandra se figea et eut un mouvement de recul. Elle essaya de se relever lentement.

— Ah… comment ça… ?
Demanda t-elle, en espérant gagner un peu de temps et en apprendre plus.

— Être au sol te sied à ravir… pourquoi te relever ?

Sa remarque lui glaça le sang.

— Je… pourquoi… le couteau… ?
Demanda t-elle, la voix tremblotante.

Elle savait qu’elle n’était pas en état de se défendre, elle avait déjà du mal à tenir debout.
La jeune femme qui lui faisait face semblait découvrir ce qu’elle avait dans la main, et le regarda, amusée.

— Oh. Ca ? C’est pour me défendre.
— Je ne compte pas t’attaquer…
— Ah bon ? Pourtant tu n’as pas hésité à assomer une de mes collègues.
— Je… je me suis excusée… je ne voulais pas lui faire de mal…
— Mais tu l’as fait. Sais-tu à quel point tu as manquéde respect ànotre profession ?
— Je… ce n’était pas mon intention…
— Oui, c est ce que tu dis…

Elle s’avanca et Alexandra essaya de reculer pour se mettre à distance et qu’elle n’arrive pas à portée.
Les mains devant elle, en position de défense, elle essayait de se rappeler l’endroit de la sortie et comment faire pour se tirer d’affaire.

— Je suis vraiment désolée… je ne recommencerai pas…
Dit-elle pour calmer le jeu.

— Je n’en doute pas. Je vais faire en sorte que ça ne se reproduise pas.
— Est-ce que tu peux poser ce couteau… ?
— Absolument… pas. Nous manquer de respect est une chose, mais… manquer de respect à notre maître. Comment oses-tu ?! J’ai entendu dire que tu lui parlais sans aucune formule de politesse. Pire. Tu te crois tout permis ? Avoue le, tu es une espionne qui lui fais du chantage. J’en suis certaine.
— Je ne suis pas une espionne !
— Ne crois pas me duper, tout fait sens si tu es une espionne. Je ne comprenais pas pourquoi notre maître te gardait chez nous. En fait, il y est forcé. Je ne sais pas par quels moyens tu as réussi à l’obliger à t’accueillir, mais je vais lui ôter cette épine du pied.

Voyant que son interlocutrice ne semblait pas vouloir l’écouter, elle baissa les bras et chercha une échappatoire. Elle regarda autour d’elle pour savoir par quel passage elle pouvait sortir et s’enfuir, mais elle avait encore la tête qui tournait et les vapeurs d’eau dans l’immense salle formaient une légère brume qui l’empêchait de savoir exactement par où elle pouvait s’échapper.
Elle ne connaissait pas l’endroit assez bien pour foncer tête première dans l’inconnu.
Elle savait que ce n’était pas une bonne idée de lui tourner le dos, alors elle longea lentement en marche arrière, les murs et le carrelage pour se retrouver rapidement acculée par le grand bain de la taille d’une piscine.
Elle jeta un coup d’oeil rapide derrière elle pour voir qu’elle ne pouvait reculer plus, au risque de finir à l’eau.

— Si je te mets hors d’état de nuire ici, cela soulagera notre maître, peut-être qu’il attend ça depuis ton arrivée et je vais l’aider. Il sera fier de moi. Il ne se retrouvera pas impliqué dans ta perte. J’en porterai cette responsabilité et il pourra me féliciter ensuite.

Elle jouait avec son couteau et jubilait d’avance, voyant que sa proie était prise au piège, elle s’avança lentement vers elle, sachant qu’elle ne pouvait pas reculer plus, au risque de tomber à l’eau.

— Je vous en supplie, écoutez moi, je ne suis pas une espionne… je vous le répète.
Dit-elle, en position de défense et en priant qu’elle baisse son arme.

— C’est cela, oui…

Elle ne s’arrêta pas, et donna des coups vifs avec sa lame devant elle.
Alexandra positionna ses mains et et ses bras, ses avant-bras, pour se protéger.
Elle sentit le métal caresser sa peau.

*

Les coups vifs du couteau tranchaient dangereusement l’air devant ses yeux.
Elle leva ses mains et ses avant-bras en guise de seule défense, impuissante, l’esprit encore à demi embrumé, elle espérait que ce ne soit qu’un mauvais cauchemar mais les sensations étaient trop réelles.
Elle reculait à petit pas, sachant que la chute à l’eau était inévitable, priant que son interlocutrice ait pitié d’elle, ou reprenne ses esprits pour se rendre compte de l’horreur de cette situation.
Elle savait que si elle tombait à l’eau, elle serait d’autant plus vulnérable.
Elle sentit le metal caresser sa peau, peut-être que si elle avait pu ne pas voir les dégâts du couteau sur son épiderme, elle ne se serait pas rendue compte de la douleur de ce que devenait sa chair.
La lame avait coupé si facilement, elle vit l’ouverture et le liquide qui s’en échappa, cette substance fluide et rouge qui gicla et coula le long de son coude, jusqu’à goutter sur le carrelage clair de l’endroit.
Elle était restée muette par l’effroi qui l’avait envahie à la vue de ce qui lui arrivait.
Elle aurait voulu crier, mais elle espérait encore que ce ne soit qu’un mauvais rêve duquel elle se réveillerait, peut-être même que ce nétait pas elle qui était à cet endroit.
La douleur qui ne parvint à son cerveau qu’un instant après, la fit douter de la véracité de ce moment pendant quelques minutes.
Malheureusement pour elle, c’était réel, et elle recula encore un peu plus, observant ses mains et ses avant-bras en lambeaux. Elle était presque rassurée que le sang en recouvrait une partie, pour qu’elle ne puisse pas voir la profondeur de ses cicatrices.
Elle recula encore, oubliant qu’elle était au rebord du point d’eau.
Elle tomba à la renverse, c’était trop tard.
Au contact de l’eau, la douleur était encore plus intense, et elle chercha à se sortir au plus vite de cette situation, serrant les dents et avec les larmes aux yeux.
Elle sentit une onde de choc près d’elle, puis une main qui lui attrapa la tête pour la maintenir sous l’eau.
Elle pensait son heure venue, mais au bout de plusieurs secondes, elle put remonter son visage hors de l’eau pour reprendre sa respiration, à peine le temps de prendre une bouchée d’air, que la force la replongeait sous l’eau.
Cela recommença plusieurs fois, elle essaya de caler sa respiration au bon moment, mais au bout du compte, elle finit par abandonner cette lutte.
C’était de la torture, elle aurait préféré qu’on en finisse avec elle de manière plus directe.

Puis, ce manège s’interrompit.
Elle fut amenée en dehors du bassin et elle sentit le carrelage froid et dur au contact de ses os, de sa peau.
Elle avait les yeux fermés, le souffle encore court, elle profitait de pouvoir respirer en ne sachant pas quand on l’en empêcherait à nouveau.
Et elle entrouvit les yeux pour voir de manière floue la surface des carreaux autour d’elle, se teinter d’un rose de plus en plus foncé qui s’écoulait de ses mains.
La vue de sa peau humide fripée qui avait été coupée lui glaça le dos. L’horreur de cette vision fut de trop, l’accumulation de la fatigue et le jeu avec sa respiration lui fit perdre connaissance.
Elle entendit au loin une voix, qui lui semblait familière, deux voix semblaient se répondre.
Encore en cet instant, elle espérait qu’on la réveille d’un long cauchemar.

*

Une servante avait entendu du bruit et s’était approchée dans la salle des bassins.
Restant prudante, elle avait regardé la scène de loin, croyant juste assister à une dispute, lorsqu’elle vit le couteau et le sang teinter le sol, elle sut qu’il se passait quelque chose de pas normal.
Elle paniqua et courut dans le sens inverse pour prévenir quelqu’un qui serait en mesure d’intervenir.
Elle eut un instant d’hésitation, elle craignait de déranger le maître des lieux pour une broutille, et se décida à aller voir une des combattantes en qui elle pouvait avoir confiance.
Elle se précipita devant sa chambre et tambourrina sa porte, avant qu’elle ouvre non-contente.

— Hé ho, ça suffit tout ce boucan ? Vous savez il est quelle heure ?!
— Je- oui, il se passe quelque chose dans la salle des bassins-
— Comment ça… ?
— J’y ai vu du sang ! C’est urgent !
— Q-quoi ?

*

— Pourquoi tu n’es pas directement allée prévenir le maître ?!
Demanda la jeune femme.

Pressée par le temps et l’urgence de la situation, elle soupira et pris les devants.

— Va prévenir le maître, je vais voir ce qu’il se passe en bas. Dis lui que c’est moi qui t’envoie, j’en prends la responsabilité.
Finit-elle par dire, en se précipitant à l’étage inférieur.

Plusieurs questions lui vinrent à l’esprit : quelle heure était-il, et que se passait-il pour qu’il y ait du sang. Elle craignait le pire et essayait d’envisager toutes les éventualités. Etait-ce une querelle qui était en train de mal tourner ?
Peu importe, il fallait qu’elle tire ça au clair et qu’elle intervienne pour limiter l’ampleur des dégâts.
Elle était déà en train de râler intérieurement exaspérée de devoir s’occuper de ce genre de conflits.
Lorsqu’elle arriva sur place, elle se demanda si c’était la mauvaise semaine d’une des filles, mais en voyant les taches de rouge diluées à quelques endroits, son trait d’humour disparut lorsqu’elle reconnut une des deux protagonistes allongée sur le sol.
Elle se figea et observa son adversaire.

— Ah, vous êtes là. Ne me remerciez pas, je me suis occupée d’elle comme il se doit, elle ne vous causera plus aucun problème.

La voix de la personne était beaucoup trop douce et calme pour quelqu’un qui venait de faire ça.
La garde ne sut pas comment réagir. Elle ne comprenait pas ce que les mots voulaient dire et elle comprit assez vite que cela était étrange, qu’elle devait prendre ses précautions.

— Comment ça… ? Qu’avez vous fait… ?
— Et bien. Je l’ai mise hors d’état de nuire. Tout simplement. Je sais que c’est une espionne et qu’elle vous faisait du chantage, vous n’avez pas besoin de me le cacher. Je suis au courant. Comme vous ne pouviez pas intervenir, j’ai pris cette responsabilité. C’est absolument normal et c’était mon devoir, ne soyez pas aussi surprise. Je suis sure que maître Gabriel sera fier de moi et me remerciera comme il se doit. Il me remarquera enfin.
— Qui… ? Qui t’a dit tout ça… ?

Elle s’approcha du corps d’Alexandra et vérifia si elle était encore vivante, elle l’espérait du fond de son coeur, et elle put reprendre sa respiration lorsqu’elle sentit, même faiblement, les battements de son coeur.
Cela ne sembla pas alerter la servante qui continuait à parler, et expliquer fièrement sa démarche.

— Personne, je l’ai deviné ! C’était trop louche que vous l’autorisiez à rester ici, parmi nous, et c’était évident qu’il y avait anguille sous roche ! Je suis une servante mais j’observe ce qui se passe dans le château !

La garde essayait de trouver les bons mots pour ne pas brusquer l’employée et surtout, elle avait senti qu’elle pouvait être dangereuse, et elle n’avait pas de temps à perdre. Alexandra avait besoin de soin, et maintenant.
Comment réagirait son interlocutrice si elle se mettait à porter le corps d’Alexandra pour l’emmener ailleurs ?
Elle tenta quelque chose, de lui expliquer sans briser sa vérité.

— Ecoutez moi… on va avoir des problèmes si elle reste ici…
— Non non, vous n’aurez pas de problème si vous dites que c’est moi qui ai tout fait !
— Ce n’est pas comme cela que ça se passe…

Alors qu’elle essayait de débattre, tout en étant aux côtés d’Alexandra, à vérifier qu’elle respirait encore, Gabriel arriva et s’arrêta à quelques mètres pour observer l’état des lieux et d’Alexandra, inconsciente et baignant en partie dans son sang.
Son regard alla de la combattante à la servante qui lui souriait.

— Monsieur Gabriel… vous êtes venus en personne…
Dit la servante, émue qu’il l’honore de sa présence.

— Il va falloir m’expliquer ce qu’il s’est pasé ici…
Dit-il de sa voix imposante et sans aucune émotion.

Il jeta un regard à sa garde qui lui rendit une expression complice et elle prit délicatement le corps d’Alexandra pour l’emmener au plus vite à l’infirmerie.
La servante ne réagit pas plus, trop obnibulée par l’homme qu’elle respectait.

— Bien sûr, je vais tout vous raconter très cher maître.
Elle s’excécuta avec plaisir et lui conta ses faits et gestes.

Gabriel l’écouta attentivement et l’approcha pour la rendre inconsciente sur le coup. Il comprit qu’elle avait perdu la tête, qu’elle pensait faire le bien mais ce n’était pas le cas.
Il l’emmena en cellule et l’y enferma jusqu’à nouvel ordre.
Il s’en voulait.
C’était de sa faute si elle sétait méprise, c’est parce qu’il n’avait pas voulu ébruiter la vraie identité d’Alexandra et les rumeurs allaient bon train.
Il devait réfléchir au sort de cette servante, mais plus tard. Ce qui l’importait à cet instant était de savoir l’état de son invitée.
Il était en train de se dire que son père allait l’incendier lorsqu’il apprendrait ce qu’il venait de se passer.
Il se dirigea vers l’infirmerie et heureusement que sa médecin en chef était toujours opérationnelle.

Alexandra était allongée sur une table d’opération, son haut trop grand qui lui servait de pyjama était trempé et lui collait à la peau, la garde qui l’avait portée avait également été un peu mouillée.
La médecin avait tiré les rideaux qui étaient autour pour ne pas être dérangée ni exposer aux yeux de tous l’intimité de la patiente, elle avait dû couper le tissu du vêtement pour le retirer et le jeter, et observer si elle n’était pas blessée ailleurs.
Après l’oscultation rapide, elle s’atela à recoudre les plaies béantes, puis nettoyer la peau et appliquer les bandages sur l’ensemble des avant-bras et des mains.
Elle avait mis la jeune enfant sous anesthésie légère et après avoir nettoyé et séché rapidement son corps, elle lui avait enfilé une tenue de patient pour qu’elle ne soit pas nue.
Elle la transporta à un vrai lit et termina l’installation plus précise.

Lorsque Gabriel arriva, Chrystal n’avait pas encore fini et il ne pouvait qu’attendre avec sa garde qui n’en savait pas plus que lui.

— La servante… elle… ?
Demanda timidement la garde, pour faire la conversation.

— Elle a perdu l’esprit… je l’ai mise en cellule en attendant de prendre une décision sur ses actes… Comment va Alexqndra… ?
— Aucune idée… elle respirait encore, mais c’était très faible. Chrystal s’en occupe… qu’est-ce qui va se passer… ?
— Oh, ça… son père va me tuer, je pense… je n’ai pas été assez vigilant… je ne pensais pas que le danger viendrait de ma propre maison… je peux dire adieu aux relations cordiales avec leur famille…

Gabriel essaya de garder le sourire et de blaguer avec ce qui venait de se passer mais la garde voyait bien qu’il avait du mal à maintenir une expression agréable.
La médecin sortit de derrière les rideaux et vint voir Gabriel.
Elle lui expliqua la situation d’Alexandra et le rassura sur le fait qu’elle était en vie et qu’elle ne risquait plus rien.
Il lui expliqua les détails sur ce que la servante avait fait et la médecin acquiesça sans un mot.
Gabriel lui demanda d’installer Alexandra dans sa chambre personnelle pour qu’elle dispose d’une meilleure protection, et qu’elle n’attire pas plus de représailles dans l’infirmerie.

*

Elle avait repris connaissance au fond d’un lit et d’une pièce qu elle ne connaissait pas.
Elle crut tout d’abord qu’elle était morte mais les sensations désagréables dans ses extremités, lui fit prendre conscience qu’elle était encore en vie.
Elle ouvrit péniblement les yeux et elle remarqua qu’on l’avait mise sous respirateur.
Elle tenta de retirer le masque et lorsqu’elle vit les bandages recouvrant ses bras et ses mains, elle se rappela ce qu’elle avait subi.
Elle laissa le masque sur son visage et sa respiration s’accéléra. Elle était en train d’hyperventiler.
Où était-elle maintenant ? Où était la servante ? Etait-elle hors de danger ? Est-ce que quelque chose d’autre l’attendait ?
Elle essaya de se calmer petit à petit.
L’appareil à côté d’elle se mit à produire un bip régulier, et au bout de plusieurs minutes, quelqu’un franchi la porte de la pièce.
On vint la voir.
Une femme blonde avec une blouse l’approcha et vérifia les informations sur l’écran de l’appareil.
Elle lui sourit gentiment et lui posa quelques questions.

— Tu ne crains rien, tu es en sécurité ici. Comment te sens-tu… ?

Alexandra était encore déboussolée et avait encore plus de mal à faire confiance à la médecin.

— Tu devrais cicatriser d’ici quelques jours, si tu te reposes convenablement. Tu te souviens de ce qui s’est passé… ?

Elle acquiesça lentement de la tête. La jeune femme lui sourit aussitôt.

— Je pense que tu n’as plus besoin de l’appareil, je vais te retirer le masque. Ne bouge pas d’ici, le maître ne devrait pas tarder à venir pour t’en parler.

Elle debrancha la prise et retira délicatement le masque et s’en alla en prenant soin de fermer la porte derrière elle.
Après son départ, Alexandra regarda autour d’elle pour observer dans quel genre de chambre elle était.
Le calme était revenu, le bip incessant n’était plus et ses yeux s’arrêtèrent sur les détails de décoration de cette pièce.
La porte s’ouvrit une nouvelle fois, ce qui la fit presque sursauter.
Gabriel la salua brièvement et commença par lui expliquer la situation.

— Chrystal m’a prévenu que tu étais réveillée… je voulais tout d’abord m’excuser pour ce qui t’es arrivée. J’en prends l’entière responsabilité et j’ai aucune excuse. La servante qui t’a agressée est en cellule actuellement, tu n’as rien à craindre ici. Tu es dans ma chambre personnelle, c’est la pièce la plus sécurisée du château. Je sais exactement qui y rentre et seulement les personnes autorisées peuvent y pénétrer. Tu devras rester ici jusqu’à la fin de ton séjour, je le crains. C’est pour ta sécurité. Et j’aurais un autre sujet à aborder avec toi… je souhaiterais que tu oublies ce que je t’ai proposée à ton arrivée. Je me suis rendu compte à quel point il était stupide de ma part de te faire cette proposition absurde. Je te prie de m’excuser et de ne plus y penser. Tu es ici sous ma protection jusqu’à ce que ton père ait fini ce qu’il doit faire. Rien de plus, rien de moins. Si on pouvait rester en bons termes en tant qu’alliés, cela ne serait pas de refus, mais avec ce qui vient de se passer, j’ai bien peur que ton père ne me le pardonne pas.

Alexandra écouta sans oser s’exprimer.
Elle avait eu si peur et elle s’en voulait tellement d’avoir mal jugé ce personnage. Elle avait été bouleversée par l’intervention de la servante et elle voulait juste s’excuser de lui avoir parlé sur un ton désagréable et impoli. Si elle n’avait pas eu cette attitude à son arrivée, peut-être que tout cela ne serait pas arrivé.
Elle se rendit compte à quel point elle était vulnérable.

— Je… je vous demande pardon, de m’être mal comportée… je… je ne sais pas quoi dire de plus… je crois que j’ai de quoi réfléchir dans mon état actuel… je tâcherai de ne pas faire de vagues jusqu’à mon départ…

Elle en avait les larmes aux yeux.

— Ce n’est pas à toi de t’excuser. Je reconnais avoir eu une attitude excécrable et qui ne me ressemble pas. Repartons sur des bases saines, veux-tu ? Il était idiot de ma part de te forcer à m’épouser. Pardonne le vieil homme que je suis.

Ses mots lui arrachèrent un petit sourire, et elle hocha la tête.

— Repose toi bien. J’ai bien peur que tu devras rester dans cette chambre jusqu’à nouvel ordre. Il y a une salle de bain et des toilettes juste à côté, tu ne devrais manquer de rien. On t’apportera tes repas directement jusqu’ici. Je vais te laisser tranquille. N’hésite pas à dire si tu as besoin de quelque chose en particulier, les personnes autorisées à venir te rendre visite s’en occuperont sans problème. Sur ce, je dois y aller.

Il ne l’approcha pas plus, et après un bref signe de la main, il s’en alla.

Le reste du séjour se passa sans encombre.
Le jour du départ. Alexandra était déjà sur pieds, mis à part les bandages sur ses mains.
Elle avait eu le temps d’observer ce qu’il se passait dans le château par la fenêtre de Gabriel.
Elle ne l’avait pas recroisé depuis qu’il était venu lui expliquer la situation. Il l’avait bel et bien laissée tranquille, ce qui la fit réfléchir sur son fond. Il n’était peut-être pas si mauvais comme personne.
On vint la chercher et elle fut amenée auprès de Gabriel qui était en train de recevoir le père d’Alexandra.

— Mais… que t’est-il arrivé aux mains ?!
Demanda son père paniqué.

Elle cacha frénétiquement ses bandages derrière son dos et afficha un sourire crispé à son père.

— Je voulais justement m’excuser-
Commença Gabriel, mais Alexandra lui coupa la parole.

— C’est de ma faute papa… j’ai voulu m’exercer un peu trop sur le terrain d’entraînement… et je me suis blessée comme une idiote.

*

Gabriel s’était excusé et avait renoncé à épouser Alexandra à but politique.
Alexandra avait changé ‘avis sur ce personnage qu’elle trouvait insupportable, et commençait par comprendre pourquoi ses employés lui juraient fidélité.
Pour également se faire pardonner de l’avoir jugé trop vite, elle mentit à son pere et lui cacha l’incident qui avait eu lieu au sujet de l’agression qu’elle avait subi.
Son père ne semblait pas convaincu mais il accepta son explication au sujet de ses blessures.

En arrivant chez eux, Alexandra avoua la vérité à son père, elle lui fit promettre de ne pas se fâcher et de laisser Gabriel en dehors de cela.
Il avait finalement tiré un trait sur leur alliance et son idée de mariage forcé et elle voulait s’en tenir a cela.
Cela ne leur apporterait rien de faire des vagues sur cette agression.
Elle expliqua à son père qu’on prit soin d’elle et qu’au final, elle avait appris beaucoup de choses, et qu’elle avait même pu s’entraîner et progresser un peu au combat.

Elle se jura de devenir plus forte.

*

Elle était sur le terrain et elle échangeait des coups avec sa partenaire lorsque Gabriel passa les voir et s’arrêta pour les observer.
Les autres combattants l’avaient remarqué et s’étaient arrêtés pour attendre des ordres, mais il leur indiqua d’un seul geste de continuer et de faire comme s’il n’était pas là.
Il regardait attentivement Alexandra et la manière dont elle se battait.
Elle ne se débrouillait pas trop mal mais Gabriel remarquait toute son manque d’expérience, cela lui décrocha un rictus.
Il entendait Alexandra rouspéter et cracher sa haine envers lui, elle lui faisait dos et elle ne l’avait pas encore remarqué.
Sa partenaire était terriblement gênée mais continuait de parer les coups d’Alexandra.
Puis Alexandra finit par voir l’expression sur le visage de son amie et se dit que quelque chose n’allait pas.

Elle se retourna et vit Gabriel, les bras croisés, amusé par ce qu’il venait de voir.
Elle fut tout d’abord embarrassée puis la colère l’envahit. Il se moquait d’elle.
Gabriel vit sa réaction et sauta sur l’occasion pour lui donner une petite leçon et des conseils.
C’était une tête brûlée et il se dit que cela ne lui ferait pas de mal de s’amuser un peu en lui rappelant qui était aux commandes.
Il dit à sa garde de s’éloigner et il s’approcha d’Alexandra, la surplombant de sa carrure.
Il se tint en position de combat et la provoqua pour qu’elle vienne l’engager.
Alexandra ne refusa pas cette invitation, elle se tint également en position et s’apprêta à le frapper.
Il évita la plupart des attaques et en parra le reste.
Alexandra bouillonait de rage et commençait à se sentir impuissante.

— C’est tout ce que tu as dans le ventre ? Tu ne voulais pas me faire mordre la poussière ?
Dit-il pour la pousser à bouts.

Elle ne répondit pas et se recula pour reprendre sa respiration et son énergie.

— À mon tour, maintenant.
Dit-il après lui avoir laissé à peine une minute de répit.

Il fonça sur elle en un rien de temps et la frappa sur sa défense.
La différence de force était telle qu’elle avait les bras qui tremblaient, même en position de défense.
Il faisait exprès de la frapper que sur sa garde pour lui montrer qu’ils ne jouaient pas dans la même cour.
Il pouvait lui faire mal s’il se battait à la régulière.
Il l’accula jusqu’à un pillier.
Elle baissa les bras, ils étaient engourdis et elle les massa pour vérifier qu’ils n’étaient pas cassés.
Elle n’osa pas le regarder dans les yeux, le visage baissé.

— Tu n’as même pas le niveau pour te protéger convenablement. Entraine toi sérieusement avant de chercher à me faire mordre la poussière, gamine.

Il s’en alla sans demander son reste, sans la moindre fatigue ni transpiration.

— Ca va… ? Tu ne sais pas la chance que tu as d’avoir pu te mesurer à lui ! Il s’entraîne rarement avec des gens.

Sa partenaire acourut vers elle pour vérifier qu’elle allait bien, mais semblait encore en effervescence d’avoir pu voir Gabriel se battre de manière succincte.

— Ouais ouais…

Alexandra répondit mais remarqua que son interlocutrice ne prêtait pas plus attention à ce qu’elle disait. Son égo venait de prendre un énorme coup et elle essaya de retourner s’entraîner en évitant les regards des autres combattants.
Elle ne savait pas s’ils étaient jaloux d’elle, ou s’ils se moquaient d’elle parce que Gabriel lui avait donné une bonne leçon.

2021.09.16