Commandante

Elle s’était réveillée en mauvais état, en plein milieu de la forêt.
Les cheveux ébouriffés, des égratignures sur le visage et sur le corps.
Les vêtements en lambeaux.
Elle ouvrit les yeux difficilement.
Ses ailes étaient abîmées, elle avait dû tomber de haut.
Elle ne se souvenait plus de comment elle avait atterri, ou plutôt écrasée là. Sa tête lui lançait.
Elle tenta de se relever, elle réussit à s’appuyer contre un arbre et se mettre debout.
Des bribes de souvenirs lui revinrent.
Des images de torture. De son mari.
Elle voyait son mari se faire maltraiter et battre sous ses yeux. Il était en sang. Il faisait sombre.
Cela la mit hors d’elle.
Elle essayait de marcher, de tituber jusqu’à trouver un moyen de s’orienter.
Si son mari était mort, elle n’avait plus aucune raison de vivre.
Son monde s’écroulait. Elle en voulait au monde entier.
Le mal de tête ne s’estompait pas.
Elle tomba sur des inconnus. Des inconnus qui ne semblaient pas lui vouloir du bien. Ils la reconnurent et s’approchèrent d’elle.
Sa vision n’était pas encore très nette.
Elle ne se laissa pas faire et les repoussa loin d’elle.
Ils se retrouvèrent à terre, inconscients.
Elle continua son chemin, nonchalante, elle avait l’impression de tourner en rond.
Elle ne savait plus quel était son but.
La nuit tomba et différentes silhouettes apparurent sous ses yeux.
Elle ne les reconnaissait pas.
Ils s’approchèrent d’elle et elle ne les laissa pas faire.
Elle se défendit comme elle put, puis elle finit par s’écrouler de fatigue, au sol.

— Mathilde ! Mathilde ? Tu m’entends ? Je suis là maintenant.

Elle ne voyait pas qui c’était, la voix lui était familière, puis elle sombra.
Il était à ses côtés, il la prit dans ses bras, et vérifia qu’elle n’avait pas d’autres blessures.

— Vous allez bien ?
Demanda t-il aux autres personnes.

— Oui… Je crois… Elle n’y est pas allée de main morte…
Soufflait l’un.

— Je ne sais pas ce qu’ils lui ont fait, mais elle est dans un sale état…
— Elle ne nous a même pas reconnus… Ni même toi !

Ils s’approchèrent d’elle et l’observa quelques minutes.

— C’est pas beau à voir, elle nous a mis la misère dans cet état… J’imagine même pas si elle avait été en forme…
— Je préviens la maison qu’on rentre.

Elle avait les lèvres en sang et des cernes tout autour des yeux.
Il la porta et ils rentrèrent tous à leur quartier général.

Elle était allongée sur le dos, les ailes écartées pour qu’on puisse les soigner.
Elle se réveilla en douceur, elle était sous calmants et morphine.
Il était à ses côtés et la salua.

— Comment vas-tu, ma puce ?
Sourit-il.

Sa vue mit un temps à s’adapter puis elle reconnut son époux.
Les larmes coulèrent d’elles-mêmes sur ses joues.

— Je… Mathieu… Je croyais qu’ils t’avaient… que tu étais mort…
Sanglotait-elle, de soulagement.

Il serra sa main dans la sienne et lui essuya ses larmes.

— Tout va bien, on est à la maison. Je suis là maintenant…

Ses souvenirs étaient encore flous mais elle se souvenait de son époux et des sentiments qu’elle éprouvait à son égard.
Il lui embrassa le front et resta auprès d’elle jusqu’à ce qu’elle se rendort.

— Elle semble aller mieux. Elle m’a reconnu. Je pense qu’on peut baisser la dose de calmants.
Dit-il lorsqu’il sorti faire son rapport.

— J’en fais part à l’équipe. Son état s’est stabilisé, elle devrait retrouver sa forme d’ici quelques jours. Cependant, psychologiquement il faut qu’on continue de la surveiller. On ne sait pas ce qu’il lui ont fait, et elle a tout de même attaqué nos troupes.

— Je m’en occupe.

*

— Que s’est-il passé ? Je ne me souviens de rien… Je me suis réveillée au milieu de nulle part…

— Tu as été enlevée il y a quelques semaines, on t’a cherchée partout mais sans succès. J’étais mort d’inquiètude. Par chance, et par hasard, une unité est tombée sur toi dans la forêt mais tu les as attaqués.
Racontait-il assis sur le bord du lit où elle était allongée.

Elle était rétablie mais elle était encore en tenue de patiente, le bracelet au poignet et elle ne pouvait pas quitter sa salle de soin.

— Je… Je suis désolée. Je suis terriblement confuse.
Elle se releva et elle le serra dans ses bras.
— Je sais, ne t’inquiète pas.
— Je ne me souviens de rien d’autre…

De temps à autres, elle se réveillait en pleine nuit en hurlant, elle faisait des cauchemars.
Ces états ne rassuraient pas les équipes médicales.
Il lui arrivait de rester le regard fixe pendant des heures.
Son mari était plus qu’inquiet, il ne pouvait pas être là à chaque fois mais il essayait.

— Aujourd’hui, on va pouvoir sortir un peu.
— C’est vrai… ?
— Oui, peut-être que cela réveillera tes souvenirs.
— J’ai si peur… Je sais que ce n’est pas normal, que mon état n’est pas stable… J’ai des pertes de conscience…
— Je resterai auprès de toi, tu n’as pas à t’inquiéter.

Il lui prit la main et l’emmena se promener en suivant un circuit bien surveillé.
Elle ne reconnaissait rien.

— Ce n’est pas grave. Cela prendra le temps qu’il faudra.

Il lui présenta également ses anciennes connaissances.
Elle ne se souvenait plus d’eux.

— C’est dommage et triste… mais je pense que nous l’avons perdue. Elle ne retrouvera pas son état d’avant… C’était l’un de nos meilleurs éléments. Ils n’ont pas fait ça par hasard…
— Je ne l’abandonnerai pas…
— On ne sait pas ce que l’avenir lui réserve… Au moins, son état s’est stabilisé, elle a moins de pertes de connaissance et semble reprendre sa personnalité.
— Elle pourra bientôt sortir ?
— D’ici quelques jours, le temps de finir la paperasse, oui.
— Merci beaucoup…

Ils tentèrent de reprendre leur vie d’avant.
Elle faisait des cauchemars de temps en temps mais il était là pour elle.
La serrant dans ses bras lorsqu’elle se réveillait en pleine nuit.
Elle reprit également l’entraînement. Elle ne pouvait pas reprendre son ancien poste mais elle réintegra l’équipe en tant que simple combattante.
Elle avait l’habitude de prendre les commandes avec son époux.
La situation changea un peu. Elle n’avait plus les connaissances requises pour reprendre ses fonctions.

*

Elle se précipita pour aider Mathieu qui était en difficultés.
Elle ne pouvait pas le laisser dans cet état, elle savait que c’était une décision débile mais ses sentiments étaient plus fort.

— Tu peux te relever ?
Elle lui tendit la main pour qu’il puisse avoir un point d’appui.
Elle ne vit pas l’attaquant derrière elle, il l’attrapa et l’immobilisa.
Ce n’était pas un simple soldat.
À la vue de ses ailes, c’était au moins un commandant.
Il l’aggripa par la taille et tint son visage près du sien.

— J’aime ça.
Susurra t-il.

Elle tenta de se débattre, sans succès.
Mathieu vira au rouge et chercha à se battre, malgré ses blessures.

— Mathilde !! Cria t-il.

L’homme se tourna vers lui et lui rit au nez.

— Pitoyable ! Si tu approches trop, je risquerai d’écorcher ce magnifique corps.

Il passa son épée le long des vêtements de Mathilde. Puis fit un mouvement brusque jusqu’à arrêter la lame en hauteur, au niveau du coeur de la demoiselle.

— Quel gâchis… N’est-ce pas ?

Elle n’avait pas peur, elle le regardait avec haine et semblait même le défier.

— Je vois qu’on ne se laisse pas faire.

Il rangea son épée dans son fourreau.

— Je vous l’emprunte.
Dit-il avant de s’envoler et disparaître avec Mathilde dans ses bras.

Mathieu ne put rien faire, après ceci des ordes de soldats arrivèrent en renfort et il dut reprendre les commandes, et lui-même se battre.
Ils réussirent à minimiser les pertes mais la bataille était un échec malgré leur défense. Ils avaient tenu tête mais ils avaient perdu une commandante. Il s’en voulut pendant des jours jusqu’à lancer les recherches et se reprendre en main.
Il ne pouvait pas abandonner sa femme.

*

— Si j’avais été plus fort…
— Qu’est-ce que tu dis ?
— Non, rien… Je me parle à moi-même. Je t’aime Mathilde.

Une autre bataille fut déclarée et ils durent s’y rendre.
Elle était confiante, elle s’était entraînée et malgré ses lacunes mémorielles, elle était douée, personne ne pouvait en douter.

Mathieu réussit à retrouver l’ennemi qui avait enlevé sa femme.
Il lui fonça dessus et comptait prendre sa revanche.

— Tu vas payer pour ce que tu lui as fait.

L’ennemi était à terre et semblait avoir perdu, mais sur son visage il était serein.
Au coup fatal, Mathilde apparut et s’interposa.
L’incompréhension était totale.
Elle ne semblait plus entendre raison et son regard était vitreux.
L’ennemi se releva, tranquillement, et embrassa Mathilde sur la bouche sans qu’elle ne réagisse.

— Je l’ai bien éduquée. Regarde.

Il la serra contre lui et elle ne résistait pas.

— … Que lui avez-vous fait ?!

Il ne tenait plus en place.
Elle était hypnotisée.

— Bats-toi pour moi, ma mignonne.

Le combat fut acharné, elle était au meilleur de sa forme et en face, il ne voulait pas la blesser et encore moins la tuer.

— Mathilde, c’est moi, réveille-toi !

Ils croisèrent le fer et ils enchaînèrent leurs échanges.

2016.08.19

Malédiction

Il était une fois une princesse maudite.
Pour sauver leur village, ses parents ont dû sacrifier leur fille en passant un pacte avec un sorcier.
Au lieu de la perdre à jamais, il proposa que sa bonne santé soit sacrifiée au profit de tous.
Tous ceux à quelques kilomètres d’elle qui auraient un mal, seraient guéris. En échange, elle absorberait en elle n’importe quels maux.
Elle ne mourrait pas, mais serait toujours à la limite, à l’agonie.

La décision fut prise lorsqu’elle avait 10 ans.
Ses parents durent se faire une raison, et prendre ce marché comme une chance, vu qu’ils ne perdraient pas leur fille.
Cependant, ils ne s’imaginaient pas ce qu’elle allait devoir subir.

Les premiers instants furent difficiles.
Elle absorba les premiers maux, jusqu’à la limite de son corps.
Il avait été modifiée de sorte qu’elle ne meure pas de blessures ou d’hémorragies, la rendant plus résistante, mais étant encore jeune, elle ne pouvait pas encaisser plus que ce qu’elle pouvait.
La douleur était telle qu’elle perdit connaissance sur le coup.
Le précepteur qui s’occupait de son éducation et de sa sécurite, la prit en charge.
Il comprenait la décision de ses maîtres mais il ne pouvait se résoudre à la voir souffrir à ce point.
Elle avait eu une très bonne éducation et elle essayait de garder le sourire et de ne pas se plaindre en face de ses parents.
Elle était un catalyseur qui assurait la protection de tout le village.

Elle ne pouvait pas mourir de cette malédiction mais si quelqu’un tentait de la tuer, elle restait mortelle et la malédiction ou bénédiction, serait brisée.
C’est pour cette raison qu’elle était protégée et sa sécurité importait avant tout.
Ses libertés furent supprimées. Tout ce qui pouvait être dangereux pour sa vie lui était maintenant interdit.
Le secret sur son existence fut bien gardé, on fit croire au village qu’elle était morte et qu’une statue fut érigée, elle était devenue une sorte de divinité qui protégeait le village. Elle était devenue un symbole.
Bien qu’elle soit toujours en vie.
Enfermée dans une tour, elle ne voyait que son précepteur et ses parents. Son existence avait été effacée.

Elle passait son temps dans cette chambre.
Elle regardait de temps en temps la vie à l’extérieur.
Et lorsqu’elle absorbait des maux, ce qui pouvait arriver à tout moment, elle tentait de rejoindre son lit pour récupérer et ne pas se blesser plus.
Elle aurait souhaité se donner elle-même la mort, malheureusement elle respectait trop ses parents et avait également des principes.

Elle adorait son précepteur, c’était son seul ami et confident.
Il lui arrivait de rester à son chevet pendant plusieurs jours à cause de cette malédiction.
Elle lui donnait autant de respect qu’il en avait pour elle.

2016.08.19

Oeuf

Les bords de la coquille géante s’effritaient de plus en plus, jusqu’à ce qu’elle éclate en petits morceaux, dans une poussière de paillettes.
Une jeune fille en sortit. On vit tout d’abord des plumes. Ses ailes étaient d’un blanc immaculé, et étaient repliées sur le corps, comme s’ils voulaient la préserver de l’air ambiant.
Il était là, debout, il avait suivi et attendait ce moment depuis tellement longtemps.
Elle semblait dotée d’une vie lorsque l’oeuf l’expulsa, puis elle retomba, lentement, en suivant les lois de la gravité.
Il la réceptionna dans ses bras.
Le liquide contenut dans l’oeuf et qui la recouvrait, se déversa dans la pièce, puis s’évapora comme de la vapeur, ne laissant rien sur son passage.

Elle avait les yeux fermés.
Ses longs cils clairs, ses cheveux bruns et lisses tout d’abord collés contre son dos et son visage, finirent par sécher.

Ses paupières s’ouvrirent un instant, doucement.
Elle ne tenait pas encore sur ses jambes.
Elle était dans le plus simple appareil.
Il la porta jusqu’au lit à proximité et la recouvrit d’une couverture.

2016.08.19

Plancher

Elle s’était réveillée en sursaut et jeta un coup d’oeil par la fenêtre.
Il faisait déjà jour depuis un moment.
Elle se jeta hors du lit et se précipita en dehors de sa chambre.
Ses pas sur le plancher résonnaient à l’étage d’en dessous.
On l’entendait parcourir sa chambre et descendre les escaliers pour finalement arriver dans la salle à vivre.

— Maman ! Pourquoi tu ne m’as pas réveillée !?
Demanda t-elle, avant même d’arriver en bas.

Sa mère ainsi que son père étaient assis autour de la table, et ils n’étaient pas seuls.
Elle eut un moment de pause, où elle eut honte de se montrer en robe de nuit devant un invité.
Ils se tournèrent vers elle, et elle découvrit la présence de son ami.
Il était assis à la table, en face de ses parents et sembla aussi gêné qu’elle.
Ils avaient l’air d’avoir une discussion sérieuse et elle venait de les déranger.
Toute rouge, elle ne trouva pas les mots par lesquels commencer.

— Ah- bonjour- je- voulais pas vous déranger-

Elle était sur le point de rebrousser chemin, lorsque son père l’interpela.

— Reste donc, nous parlions justement de toi.

Elle se figea et avança à petits pas jusqu’à prendre place aux côtés de son ami, et amoureux.
Il était presque aussi rouge qu’elle et n’osa pas la regarder dans les yeux.

— Le jeune homme ici, vient de nous demander ta main.
Expliqua tout simplement son père.

— Nous n’avons aucune objection mais le plus important, c’est l’avis de la personne concernée. Qu’en penses-tu ?

Elle rougit jusqu’aux oreilles, et chercha de l’aide dans les yeux de ses parents avant de jeter discrètement un regard vers son ami.
Il était aussi gêné qu’elle mais il avait le regard sûr et attendait une réponse sérieuse.

— Tu as le droit de refuser, nous ne te forcerons pas la main.
Ajouta son père.

Elle savait qu’il préparait sa demande puisqu’il lui en avait déjà parlé, mais maintenant c’était réel et elle était prise au dépourvu.
Elle accepta sans hésiter, ce qui rassura ses parents ainsi que son ami, qui put lâcher un soupir de soulagement.
Il attrapa sa main et la serra dans la sienne.

— Je promets que je prendrai soin de toi.

2016.08.13

Cachette

La respiration saccadée, elle était allongée dans le lit et essayait de récupérer son souffle.
Elle était dans cet état depuis maintenant plusieurs semaines.
Chris était sorti quelques minutes pour faire son rapport.
Elle était seule dans cette chambre.
Elle sentait qu’il se tramait quelque chose et c’est pour cela qu’elle avait éloigné Chris pour le protéger.

— Je sais que vous êtes là. Vous m’observez depuis un moment, que voulez-vous ?

Il sortit de sa cachette et la salua.

2016.08.13

Vigueur

Après son accouchement, son corps était faible, et ses muscles non-entretenus n’étaient plus ce qu’ils étaient.
Elle reprit les exercices petit à petit, prenant soin de son fils mais également d’elle-même.

Gabriel prit lui-même le temps de l’entraîner de temps en temps, et personnellement.

Elle faisait ses échauffements lorsqu’il arriva derrière elle et la prit dans ses bras par surprise.
Elle lui rendit son étreinte et chercha à l’embrasser.
Il ne se laissa pas distraire et continua à l’échauffer, en douceur puis augmenta l’intensité des mouvements sans s’en rendre compte.
À l’époque, elle était à son niveau et pouvait lui tenir tête. Malheureusement, avec sa grossesse, elle n’avait pas encore récupéré sa forme d’antan et elle s’essoufla rapidement. Jusqu’à s’arrêter et perdre l’équilibre. Il la rattrapa facilement, puisqu’ils étaient à portée et il la serra dans ses bras.

— Excuse-moi, j’y suis allé un peu fort.
Lui dit-il en l’embrassant sur le haut de sa tête.

— Ne t’excuse pas, j’ai toujours apprécié que tu ne te retiennes pas.
Répondit-elle en souriant, sachant que ses paroles pouvaient être interprétées à double sens.

Il rougit et elle entendit son coeur s’emballer, puisqu’elle était tout contre son torse.
Elle posa ses mains sur ses hanches, et les massa lentement avant de glisser ses petits doigts sous son t-shirt moulant.
Il était électrisé.

— Alexandra…
— Oui ?
Répondit-elle innocemment.

— Ne fais pas l’innocente… Tu sais bien que je ne vais pas pouvoir résister…

Elle ignora son avertissement et continua à remonter sa main, lentement le long de ses côtes.
Il la plaqua contre le mur et l’embrassa vigoureusement sur la bouche.

2016.08.09

Châle

Les cheveux lisses couleur noisette, les yeux d’un vert clair pur.
Son regard innocent et enfantin, comme si elle n’avait jamais pu profiter de son enfance, ainsi que son sourire candide.
Personne ne se serait douté qu’elle portait une histoire tragique.

Il faisait nuit et elle patientait dehors avec ses collègues, à l’extérieur du bâtiment.
Une alerte avait été donnée et il avait été ordonné d’évacuer le lieu.
Elle cherchait des yeux son amie.

Lorsqu’il l’aperçue, en train de ranger ses cheveux lâchés derrière ses oreilles, dans la brise du soir, son coeur fit un bon.
Il se précipita sur elle et la serra dans ses bras.
Elle fut prise au dépourvu, elle ne s’attendant pas à le trouver ici.
Son coeur battait à toute allure, il avait dû faire un bout de chemin en courant.
Il la serrait dans ses bras et prenait sa tête dans le creu de son épaule.
Le souffle court, il réussit à lui parler.

— Je suis si heureux que tu sois saine et sauve.

Elle ne comprenait pas trop le sens de ses paroles et tenta de le rassurer.

— Je vais bien, tu exagères…
— J’ai eu tellement peur qu’il t’arrive quelque chose…

Elle le calma et réussit à se dégager de ses puissants bras.
Elle était dans un châle, elle avait prit la première chose sous la main pour ne pas attraper froid. Sa robe de chambre était légère et à manches courtes.
Il retira son manteau et le lui posa sur ses frêles épaules.

— N’attrape pas froid…

Il tenait à elle comme à la prunelle de ses yeux.

— Comment as-tu su… ?
— Les nouvelles circulent vite, les habitants en ont parlé dans les ruelles et semblaient inquiets… Je ne me serai jamais pardonné de ne pas te dire ce que je ressens pour toi…
— … Elle baissa la tête et attendait la suite de son discours.

Il était conscient de sa grossesse et souhaitait tout de même rester auprès d’elle, la chérir, elle ainsi que son enfant.

Elle insista pour qu’il ne l’appelle pas « papa » mais qu’il le considère tout de même comme une figure paternelle.

Des années passèrent et le petit garcon qu’elle eut, devint grand.
Il comprit les choses, il appelait toujours Mackléo par son prénom et le considerait comme son parrain et comme son vrai père.
Ils formaient tous les trois une charmante petite famille.
Elle resta un moment traumatisée par sa première expérience avec un homme mais Mackléo fut patient et réussit à la guérir en la ménageant et en y allant avec tendresse.
Son fils fut en âge de comprendre certaines choses et apprit que sa mère avait été agressée par son père biologique. C’est pour cette raison qu’elle ignorait l’identité de son vrai père.

Par chance, son fils tint beaucoup de ses traits.
Le petit Olivier aimait sa mère plus que tout et souhaitait la protéger lorsqu’il serait grand.

Ils vécurent une vie paisible dans la ville où elle travaillait.

2016.08.04

Clinique

Les cheveux ébouriffés, elle errait sans but dans les ruelles. La tête baissée et les vêtements trempés. Il pleuvait des cordes et elle n’y prêtait pas la moindre attention.
Repensant à ce qu’elle venait de vivre.

Emmenée contre son gré dans une voiture, plusieurs hommes ont profité d’elle et l’ont jetée tel un déchet, par dessus bord, après en avoir fini avec elle.
Elle avait beau crier, la voiture roulait et les hommes avaient fini par la baîllonner.
Lorsqu’elle reprit connaissance, elle était dans une ville inconnue, sans rien, sans aucun moyen de rentrer chez elle.
Elle se sentait souillée et perdue.
Personne n’allait l’aider et elle le savait.

Elle avait faim et prit son courage à deux mains pour trouver un emploi qui la nourrirait et la logerait, en échange de son travail.
Une petite auberge modeste en manque de main d’oeuvre pas chère, sauta sur l’occasion pour l’embaucher.
Elle ne se plaignait guère et elle ne se débrouillait pas mal.
Malgré cela, sa santé se dégradait, la nourriture était maigre mais lui permettait de ne pas rien avoir dans l’estomac.
Elle était plutôt de constitution fragile et les efforts qu’elle fournissait l’épuisaient.

Un jour, étant à bout de force, elle avait de la fièvre mais ignora son mal et continua à travailler. Ses employeurs n’étaient pas méchants mais ils ne se préoccupaient pas spécialement d’elle tant qu’elle ne causait pas de souci.
Elle croisa un client dans les escaliers et elle se sentit faillir.
Des taches apparurent devant ses yeux et son souffle était court. Elle se tint à la rampe, et tenta de reprendre ses esprits.
Le client croisa son regard et remarqua immédiatement qu’elle n’était pas en forme.
Il l’interpella et lui demanda si cela allait.
Elle était en haut des marches tandis qu’il était en train de les monter.
Elle entendit la voix de cet homme, au loin.
Puis plus rien.

Elle chuta en avant. Par chance l’homme avait de bons réflexes et la rattrapa à temps.
Il sentit sa fièvre et prévint les employés qui ne savaient pas quoi faire.
Dépassés par la situation, ils étaient embêtés qu’elle ne puisse plus s’occuper des taches.
Tandis que le client demandait de quoi la soigner, ils lui répondirent qu’ils n’en avaient pas les moyens et que cela ne les concernait pas.
Fou de rage, voyant l’état de la jeune fille dans ses bras, il l’emmena dans sa chambre et fit venir un médecin à ses propres frais.
Cela n’eut pas l’air de les déranger. Tant que cela ne leur faisait pas dépenser plus d’argent, le jeune homme pouvait faire ce qu’il voulait.

Le diagnostic était inquiétant. Elle était sous-nourrie et la fièvre ne descendait pas.
Il fallait l’emmener dans une clinique pour qu’ils puissent la soigner.
Il la porta et l’emmena à la clinique la plus proche, qui se trouvait à plusieurs kilomètres de cette ville, dans une métropole un peu plus grande.
Il paya son dû à l’auberge et embarqua la jeune fille, sous les yeux de ses futurs ex-employeurs qui semblaient comme soulagés et qui n’y voyaient aucun inconvénient.

Elle fut confiée à la clinique.
On la soigna et elle fut bien prise en charge.
Une infirmière s’occupa tout particulièrement d’elle.

— Bonjour. Comment te sens-tu ? Tu reviens de loin, ne t’inquiète pas. Tu es entre de bonnes mains ici. Repose-toi. Tu pourras remercier Mackléo lorsque tu seras sur pieds.

Elle apprit que le client s’appelait Mackleo et qu’elle n’était plus dans la ville de l’auberge.
Sa santé était préoccupante parce qu’elle était enceinte de déjà plusieurs mois et qu’elle devait faire attention à son alimentation et sa santé.

L’infirmière lui proposa de la former au métier si cela l’intéressait.
Elle accepta pour les remercier, de plus que la clinique manquait d’effectifs.

Elle ne vit que rarement Mackléo passer à la clinique en coup de vent. Elle n’eut jamais l’occasion de le remercier.
Il voyait qu’elle était occupée et que certains patients en pinçaient pour elle.

2016.08.03

Trois

Elle était dans ses bras, les yeux plongés dans les siens et le sourire radieux.
Il la dévorait des yeux, ses bras musclés autour de sa taille.
Malgré son âge avancé, on ne pouvait douter de sa forme sportive.
Ses cheveux poivre et sel, emportés par le vent.
Quant à elle, ses longs cheveux bruns et ondulés réunis dans un ruban au niveau de sa nuque, quelques cheveux virvoltants autour d’elle.

Cette photo avait été prise par Chris. Elle trônait sur la table du bureau de son patron. Elle était particulièrement belle, en effet, il aimait Alexandra de tout son être et ce cliché ne pouvait mentir.
Il avait également beaucoup de respect pour son employé et ne pouvait qu’être heureux de l’union de ces deux personnes chères à son coeur.

Gabriel était loin d’être aveugle et il préféra se taire que de perturber le quotidien d’Alexandra.
Il réfléchissait déjà à une solution.

Chris ne supportant plus cette situation, finit par avouer de manière un peu forcée ses sentiments.
Il l’embrassa par surprise.
Elle se dégagea et lui donna une bonne giffle.

— Ç-ça va pas ?! Qu’est-ce qui te prend ?!

Elle était à la fois gênée et en colère.

— Je t’aime. Ne ressens-tu rien pour moi ?

Il tentait le tout pour le tout.
Elle était totalement perturbée par cette révélation et ne savait pas quoi répondre. Son baiser ne l’avait pas laissée indifférente, mais elle aimait déjà de tout son coeur Gabriel. Elle ne pouvait et ne savait pas mentir.

— Comment oses-tu me demander ça… ?! N’as-tu aucun respect pour Gabriel ?!

Elle était outrée, mais l’était encore plus à cause de ses propres sentiments. Serait-ce possible qu’elle aime également Chris ? Cela ne devrait pas la déboussoler autant, elle était déjà engagée. Aurait-elle fait le mauvais choix ? Trop de questions se bousculaient dans sa tête.
Elle s’enfuit dans la direction du bureau de son aimé, comme si elle avait besoin de s’assurer de l’amour qu’elle lui portait.
Il l’attendait et savait exactement ce qu’il venait de se passer.
Chris emboita son pas et referma la porte derrière lui.
Elle rejoignit Gabriel et il lui tendit sa main pour la rassurer.

— Chris a franchi le pas ?
Demanda t-il innocemment.

— Oui.
Répondit Chris d’une voix claire.

— Je ne vais pas te renvoyer pour ça, Chris. Rassure-toi. T’as t-elle donné une réponse ?

Elle semblait totalement perdue et ne comprenait pas la conversation des deux hommes. Gabriel était au courant et ne semblait pas fâché ? Était-ce une farce ?
Le silence de Chris en disait long et Gabriel reprit la parole.

— Ne t’inquiète pas Alexandra. Je t’aime toujours autant. Que ressens-tu pour Chris ? Tu peux nous le dire. J’ai réfléchi et si tu ressens quelque chose, ne vous privez pas. Cela ne me dérange pas de partager cet amour. Tant qu’il prend soin de toi et qu’il n’interfère pas avec le temps que je passe avec toi. Je n’ai aucune objection à ce que nous formions un couple à trois.

Le début de la relation avec Chris fut complexe mais ils apprirent à se connaître et à bâtir leur amour.
Elle aimait Gabriel et Chris chacun à leur manière. Ils étaient différents et elle ne se comportait pas pareil.
Les rumeurs étaient perdues, mais cela arrangeait peut-être sa sécurité qu’elle soit vue en couple avec Chris. Elle n’avait pas de statut particulier en sa compagnie, contrairement à son statut de sang royal et noble en compagnie de Gabriel.
Elle vivait comme une simple employée du château aux yeux de tous.

2016.07.27

Fumée

Il attrapa sa fille dans ses bras.
Elle se massait le cou et toussait encore un peu.

— Tu as inhalé de la fumée ?!
— … Un… peu…
Toussota t-elle.

Elle avait des sueurs froides.
Il passa sa main sur son front et observa son état.

— Je t’emmène à l’infirmerie.

Il se retourna vers Chris et l’autre jeune homme.
Chris était à genoux demandant le pardon à son maître de ne pas avoir pu protéger sa fille.
Le camarade d’Alexandra ne comprenait pas la scène et resta debout, à observer ce qui allait se passer.
Le père salua d’un signe de tête l’élève et marcha en direction de Chris.

— Je te laisse t’occuper du reste. J’emmène Alexandra. Nous discuterons plus tard.

Et il se retira en emportant sa fille.

— Est-ce que je peux vous accompagner ?!
Osa demander l’élève.

Le père fut surpris mais lui répondit d’un ton sec.

— Retourne auprès des autres élèves.

*

— Elle a eu de bons réflexes, elle n’a pas respiré assez de fumée pour que ce soit dangereux. Tout va bien.

Le verdict de Chrystal était clair.
Son père lâcha un soupir de soulagement.

— Il faut que je retourne avec mes camarades…
Dit-elle à son père.

— Oui… Je vais t’accompagner.
— Il n’y a plus d’ennemis dans l’enceinte du château ?
— Normalement non. Je vais refaire une ronde pour vérifier ça.
— Ne sois pas fâché contre Chris… C’est moi qui lui ai dit de me laisser en retrait…
— Tais-toi. Cela ne te concerne pas.

Son ton était dur et froid, avec une pointe de colère.
Elle sursauta et ne put s’empêcher de pleurer.
Il soupira et reprit la parole de manière plus posée en se massant le creux des yeux.

— Ne pleure pas… Je ne suis pas fâché… Comprends-moi, je suis juste inquiet…
Je ne punirai pas Chris… mais il est censé assurer ta sécurité. S’il t’arrive quelque chose… Enfin, ne t’en fais pas pour ça…

Il la serra dans ses bras et lui caressa la tête.

— Je suis désolé de m’être emporté…

2016.07.22