Provocation [RolePlay]

Chloé avait monté son cheval et galopé dans la direction indiquée par le comte et Flora l’avait suivie.
Sa chevelure longue et sombre au vent, dans une tenue prévue pour le combat. Elle portait une chemise légèrement trop grande sous un corset qui maintenait le tout en place et un pantalon rentré dans des bottines pratiques pour l’équitation.
Elle avait une cape à capuche sur les épaules qui virevoltait derrière elle tout comme ses cheveux.
À sa taille, un petit foureau qui contenait sa précieuse dague.
Flora était similairement habillée pareil.
Seules les couleurs étaient différentes et elle remplissait mieux le décolté.

*

Lorsqu’elles arrivèrent à proximité, Chloé s’arrêta et descendit de sa monture. Elle l’attacha à un point et Flora l’imita.

— Je ressens leur présence. J’imagine que toi aussi ?
— Oui… ils sont nombreux…
— Ne t’inquiète pas. Reste près de moi, tu ne risques rien tant que je suis là. Nous allons rester sur nos gardes et essayer de les neutraliser un par un, sans nous précipiter.
— D’accord…
— Je préfère laisser les chevaux ici en sécurité. En espérant qu’il ne leur arrive rien pendant notre absence.

Et elles virent les individus.
Il y en avait une dizaine et ils se dirigeaient vers un village. Chloé connaissait la géographie proche et cela n’était pas bon signe.
Ils ne firent pas attention à leur présence et continuèrent leur chemin sans les voir. Elles n’étaient pas encore à découvert.
Chloé posa son doigt sur ses lèvres et Flora resta muette.
Ce qui l’inquiétait particulièrement c’était leur nombre. Ils étaient beaucoup trop nombreux.
Elle avait l’habitude de tomber sur des solitaires assoifés, et non un groupe comme celui-ci. C’était beaucoup trop étrange et inhabituel pour qu’elle baisse sa garde.
Ils avaient l’air d’être des nouveaux nés vu leur déplacement et leur regard. Ils semblaient perdus et surtout inexpérimentés.
Et Chloé profita de cela.
Elle utilisa sa magie pour les encercler de feu.
Ils furent surpris et restèrent immobiles ne sachant pas par où aller.

— Il faut leur couper la tete.
Dit-elle à Flora qui avait posé sa main sur sa garde.

Elle hésita un instant puis prit son courage à deux mains.

*

C’était étrange. C’étaient devant elle, en apparence, des humains tout à fait normaux. Elle avait du mal à les attaquer parce que quelque chose en elle, la part d’humanité qu’elle avait et sa raison l’empêchait de tuer d’autres humains. Ils avaient l’air innocents, et certains étaient paniqués de voir les flammes autour d’eux.
Rien ne laissait croire qu’ils étaient de la même race qu’elles.
Chloé avait laissé une ouverture pour qu’elle puisse entrer dans le cercle et les éliminer, mais cela laissait également une sortie.

Lorsque le premier individu s’engouffra dans cette sortie et se jeta sur Flora, les canines bien en évidence mais également ses ongles qui étaient devenues aiguisées, telle une bête qui se jetait sur sa proie. Flora eut un sursaut et réalisa qu’ils n’étaient effectivement pas humains et cela fut l’élement déclencheur qui la débloqua et l’aida à pointer son arme contre eux.
Et la lame pénétra et traversa leur corps beaucoup trop facilement. Il n’y avait presque pas de sang. La tête séparée du corps tombait dans un bruit étouffé sur le sol et le reste suivait.
Parfois elle arrivait à faire une découpe nette au niveau du cou, parfois elle coupait un peu en travers avec un bout d’épaule.
Elle ne ressentait rien. Peut-être un peu de tristesse, de voir comment elle aurait pu finir.
Ces corps étaient vides, elle pouvait voir maintenant qu’elle était à proximité, avant de les éliminer, qu’il n’y avait pas d’étincelle de vie derrière leur pupilles.
Ils réagissaient par instinct, leur instinct de survie.

Lorsqu’elle eut fini, elle sortit du cercle et Chloé rapprocha les flammes sur les morceaux de chair pour les brûler.
Une fumée noire s’en dégagea puis une odeur horrible.
Elle utilisa sa magie pour enterrer et recouvrir tout cela. Après cette tâche, Flora put voir que Chloé était un peu moins en forme. La surface qu’elle avait déplacé n’était pas négligeable et cela avait dû utiliser beaucoup d’énergie.

Puis Flora eut un haut le coeur.
Elle se mit à vomir.
Tout ces corps qui étaient d’apparence humaine, il n’y avait rien qui les différenciait de vrais humains. Puis la boucherie qu’elle venait d’effectuer avec son arme qui était encore recouverte de sang et de morceaux de chair. Elle avait essayé de prendre sur elle mais après avoir fini et que toute l’adrénaline de l’action était tombée, elle ne pouvait pas se contrôler plus. Ses réflexes encore humains reprirent le dessus et elle rendit une partie de son estomac, par terre.

*

Chloé était en train de lui caresser gentiment le dos, compatissante.

— Je suis désolée…
Dit Chloé.

— Non… c’est moi… je…

Flora ne réussit pas à finir sa phrase qu’elle eut un autre haut le coeur et elle rendit à nouveau sur le sol ce qui pouvait rester dans son estomac.

— Prends ton temps… c’est pas une vision super agréable…

*

Elles ressentirent une présence s’approcher de leur position. Une présence plus persistante que ceux qu’elles venaient d’éteindre et Chloé était sur ses gardes plus que jamais.

Elle se redressa et chuchota à sa protégée.

— Tu as ressenti la même chose… ? Reste près de moi. Si jamais il y a le moindre danger… fuis et va prévenir le maître de la situation.

Flora était encore en train d’essayer de se remettre d’avoir vomi, mais elle s’était raidie. Elle avait écouté avec attention les mots de Chloé et même si elle n’approuvait pas, elle savait qu’elle n’avait pas d’autre choix que d’obéir.
Il y avait quelque chose d’étrange à cette présence qui se rapprochait à une vitesse effrayante. Une aura palpable, plus consistente et qui faisait penser à celle de Chloé, de Bréto ou du comte.
Une aura assez unique et à la fois, inconnue qui présageait peut-être un danger.

Chloe n’aimait pas cela.
Alors qu’elle tendait un mouchoir en tissu à Flora pour qu’elle puisse s’essuyer la bouche, elle se retourna et la personne était dans son champ de vision.

Elle avait ralenti sa progression maintenant qu’elles étaient à portée de vue et elle les observait.

Contrairement à Chloé et Flora, cette forme humaine était dans des vêtements abîmés. Abîmé était un faible mot, ils étaient dans un état lamentable. Teintés par le temps et déchirés par l’usure, cela donnait un air fantomatique à cette personne.
Une sorte de cape longue qui trainait en partie au sol, mais cela n’avait pas l’air d’être un problème pour son propriétaire. La traine était rongée par les frottements et il n’en restait pas grand chose.
Une capuche était sur ses épaules, laissant à découvert un visage marqué et des cheveux longs. Extrêmement longs. Une partie tombait dans le fond de cette capuche et l’autre, virevoltait au vent et laissait deviner la vitesse à laquelle se déplaçait cet inconnu.
Etait-ce un homme… ? Une femme ? Les traits étaient fins et l’ampleur de la cape cachait la morphologie du corps.
Difficile de deviner, même lorsque sa voix se fit entendre.

— Ah… c’est vous. C’est donc vous qui avez éliminé mes petites créations.

Le timbre était las. Presque résigné. Il n’y avait pas de colère, pas de tristesse, ça en était presque effrayant tellement il en était détaché.
Le visage était marqué par une certaine fatigue, étrange lorsqu’on regardait Chloé qui était toujours propre sur elle, malgré les années, les décennies qu’elle avait traversé. Il avait comme abandonné toute idée d’avoir une apparence correcte, tel un spectre.
Et sans prévenir, il se lança sur elles.
Cela se passa en un clin d’oeil.
Une épée était dirigée contre elles et Chloé avait eu le temps de sortir sa dague pour contrer cette attaque. La tenant par sa garde et une autre main sur la lame pour la maintenir en face d’elle, tandis que le métal de l’arme adverse venait de s’entrechoquer contre elle, dans un bruit sourd. Un « clang » et un éclat de lumière vif avait fait sursauter Flora et l’avait fait réaliser ce qui se passait sous ses yeux.
Le souffle court, elle voyait Chloé s’interposer, encore une fois, pour la proéger et même si aucune difficulté ne se lisait sur son visage, elle voyait à quel point les muscles de sa protectrice étaient tendus et mis à mal.

— Oh… est-ce ta création… ? Je sens encore un peu de jeunesse dans cette petite rousse…

Le regard s’attarda quelques secondes sur Flora alors que l’arme était toujours dirigée avec ferveur vers elles.
Puis un rictus.

— Comment as-tu fait ?!
De la haine était perceptible maintenant.

Il baissa son arme et recula. Agacé.
Chloé resta aux aguets et vu que Flora était encore sous le choc de la surprise, elle la laissa se remettre de ses émotions et son attention fut dirigée sur leur interlocuteur.

— Pourquoi avez-vous fait ça ?
Demanda t-elle simplement.

Elle était trop polie pour le tutoyer même s’il n’avait pas l’air plus âgé qu’elle physiquement. Puis elle n’avait aucune intention de répondre à ses questions.

— Quoi ? Vous attaquer ? Juste un test.

Il haussa les épaules et leva une de ses mains avec nonchalance. Il n’avait pas l’air concerné par l’impact de son geste. Il lâcha même un râle, agacé.

— Pourquoi avez-vous créé toutes ces choses… ? Quel est votre but ?

Chloé était curieuse mais elle essayait également de gagner du temps pour Flora.

— Ah, ça… j’essaye… Ca fait depuis tellement longtemps que j’essaye… j’ai tant essayé et tant échoué… comment TOI tu as fait ?! Quel est ton secret ?!

Une haine et une rage s’exprimait en lui, et il resserra sa main sur la garde de son arme.

Chloé resta silencieuse.
Elle savait à quel point il était douloureux d’être confronté à son échec et de devoir mettre fin à sa tentative de nouvelle compagnie, de la perpétuité de leur race. Elle ne savait pas quoi lui répondre. Elle n’avait pas de secret, elle avait eu de la chance de tomber sur Flora. Même si elle aurait voulu lui répondre, elle n’avait aucune réponse à lui apporter.
Elle compatissait avec sa peine et elle comprenait sa frustration face à sa réussite, mais elle ne lui pardonnait pas son geste. Elle ne comptait pas lui laisser carte blanche et blesser sa protégée.

En parlant d’elle, Flora s’était remise aussi vite qu’elle le pouvait, en position. Elle se tenait prête et son arme pointée vers l’ennemi.
Mais elle tremblait. Elle était consciente de la différence de niveau. Il avait pu les approcher sans qu’elle ne puisse réagir. Encore une fois de plus, elle était inutile et elle savait que lors de la prochaine attaque, elle ne verrait rien venir, que tout ce qu’elle allait pouvoir faire, c’était se sacrifier pour donner un peu de temps à sa Chloé. Si cela lui permettait de s’échapper et se mettre en sécurité, elle donnerait sa vie et son existence volontiers.
Elle était si impuissante. Elle ne savait plus si elle tremblait de peur ou de rage contre elle-même.

Chloé lui jeta un regard rapide et hôcha la tête de désapprobation. Comme si elle avait deviné le fond de sa pensée.

— Sauve-toi. Tout ira bien pour moi. Rentre et préviens-les. Vite.
Lui chuchota t-elle. D’un souffle.

Cela était inutile parce qu’il avait surement tout entendu, mais elle ne voulait pas s’attarder sur ces mots.
Un sourire pour la rassurer et son attention était de nouveau sur leur adversaire.
Elle se voulait rassurante mais les mots choisis étaient révélateurs. Flora était loin d’être idiote et elle comprit tout de suite le double sens.
Il y avait un danger, du moins pour elle. Chloé était sereine quant à ses capacités pour tenir tête, mais le dernier mot sous entendait qu’elle n’avait aucune idée de l’issue du combat si cela pouvait s’éterniser.
Elle n’avait aucune idée de la force réelle de leur adversaire.

— Pardon…

Les larmes aux yeux, Flora savait qu’elle devait partir et abandonner Chloé. C’était la seule chose qu’elle pouvait faire, et elle ne devait pas perdre une seconde.
Mais c’était un arrache-coeur de savoir qu’elle n’était qu’un fardeau si elle restait à ses côtés en cet instant précis. Elle s’éclipsa, dans la direction oposée et elle ne se retourna pas.
Elle entendit les lames s’entrechoquer encore une fois, puis encore une autre fois.
Puis des éclats de voix.

— Pourquoi TOI tu as réussi et pas MOI ?!

La voix grondait mais aucune réponse ne se fit entendre.

Flora savait que Chloé avait assuré ses arrières pendant qu’elle s’échappait et s’éloignait. Sa vue était troublée et les larmes n’arrêtaient pas de couler le long de ses joues.
Elle serrait les dents, pour empêcher les pleurs qui ne cherchaient qu’à sortir de sa gorge. Elle essuya une nouvelle fois d’un revers de sa manche son visage et tenta de se reprendre. Elle devait monter sur son cheval et retourner au château le plus vite possible.
Cela ne servait à rien de pleurer, Chloé n’était pas encore morte. Non, elle était forte et elle allait certainement avoir besoin d’aide rapidement. Chloé ne pouvait pas mourir. Il n’y avait pas besoin de pleurer pour si peu. Tout allait s’arranger, il fallait juste qu’elle se dépêche de rentrer et prévenir tout le monde.
Rien que ça. Elle devait y croire.

Les échanges du combat s’intensifiaient.
Chloé arrivait à se défendre en déviant la lame dirigée sur elle. Mais elle n’avait pas assez de portée avec sa dague pour lui porter un coup sans se mettre elle-même en danger. Elle était patiente et elle préférait prendre son temps et jauger la vraie force de son adversaire que de se précipiter inconsciemment en cherchant à lui porter un coup.
Maintenant que Flora était partie, elle était plus à l’aise, elle n’avait plus à s’inquiéter pour sa sécurité et elle avait tout le temps pour chercher à comprendre cet individu.
Pourquoi et comment était-il devenu ainsi ?
Pouvait-elle le raisonner ? Les probabilités étaient faibles mais qu’avait t-elle à perdre ?

— Tu me nargues, c’est ça ? Tu ne veux pas me dire comment tu t’y es prise pour réussir ?!

Du désespoir était perceptible dans sa voix, un profond désespoir mélangé à de la colère. Il était persuadé qu’elle le regardait de haut. C’était son attitude qu’il avait du mal à supporter, son regard et son apparence.
Elle n’avait pas l’air plus vieille que lui, même en terme d’existence sur la terre, alors pourquoi était-elle aussi… différente de lui ? Pourquoi elle rayonnait alors que lui, était dans un état déplorable ?

Chloé prit un air surpris. Elle n’avait aucune intention de se moquer de lui, et cela lui fit de la peine qu’il puisse penser cela. Son regard se radoucit légèrement et elle chercha les bons mots pour commencer la conversation avec lui.

— Je n’ai pas de secret… je ne vous nargue pas, au contraire… je comprends votre douleur. Je suis également passée par là, et je crois que.

Elle marqua une pause et secoua la tete.

— Non, j’ai eu de la chance. Enormément de chance de tomber sur la bonne personne. C’est tout. Je n’ai rien fait de plus ou de moins. C’est elle qui s’est donnée les moyens de ne pas sombrer dans les ténèbres.

Elle avait expliqué cela calmement, comme une confession. Il l’écouta religieusement. Il eut un silence et puis.

— TU MENS !

Le déni. Il rejetait en bloc tout ce qu’elle venait de dire.
Cela ne pouvait pas être aussi simple. Juste de la chance ? La bonne personne ? Elle se moquait ouvertement de lui.
Sa voix éclata ainsi que son ressentiment.
Puis il s’exprima à nouveau de manière calme.

— Tu n’as pas l’air plus vieille que moi. Tu ne te défends pas trop mal mais avec cette arme tu n’iras pas loin. Tu n’arriveras pas à me blesser avec ce cure-dent.

Du mépris. Il jeta son épée au sol, et il prépara quelque chose. En quelques secondes, il forma une aura électrique autour de sa main et il la dirigea vers Chloé.
Elle recula immédiatement, elle ramena ses bras en face d’elle et une boule de terre se forma tout autour d’elle pour la protéger et lui servir de bouclier.
Il dura le temps que les arcs électriques se dissipent et elle fit se désagréger cette structure qui tomba en morceaux à ses pieds.

— Pas mal. Tu as certaines bases en magie, à ce que je vois.
Dit-il, à peine impressionné.

Elle hésitait. Est-ce qu’elle devait l’éliminer ? Il était dangereux, et il semblait instable psychologiquement, mais elle avait de la peine pour cette âme perdue. Il faisait partie de leur race et il était conscient. Ils étaient si peu nombreux. N’y avait-il pas un moyen de le raisonner et de le sauver ? Qu’il arrête de nuire aux autres ? Etait-ce possible ? Elle l’espérait, au fond d’elle.
Elle n’avait pas réellement envie de l’attaquer. Depuis le départ elle ne faisait que se défendre mais cela il ne le remarqua pas.

Il l’interpréta d’une autre manière.
C’était de la provocation pour lui.
Tout ce qu’elle essayait de faire pour apaiser la situation, se retournait contre elle.
Il la testait et il la haïssait. Cela paraissait trop simple pour elle. Il voulait la détruire. Quelque chose en lui, lui disait qu’il serait satisfait et heureux si elle mourrait devant ses yeux. Qu’elle fasse tomber son masque de madame parfaite et qu’elle se mette à le supplier et hurler de douleur.
Oui, cette vision l’excitait. C’était ça dont il avait besoin, maintenant.
Et un sourire dément se dessina sur son visage. Ses yeux étaient injectés de sang et il semblait ne plus voir ce qui l’entourait.
Il s’était abreuvé sur tant de corps quelques heures auparavant, qu’il était au meilleur de sa forme.

Et c’est ce dont Chloé avait peur. Du potentiel décuplé qu’il pouvait avoir à cet instant.
Elle espérait lui faire entendre raison. Ce fut sa seule erreur. Elle paria sur le fait qu’il s’épuise et qu’il finisse par se calmer et surtout, qu’il soit prêt à accepter et changer d’avis.
Alors elle encaissa et tenta d’éviter ses attaques, de les repousser.

Sa prochaine attaque utilisait la magie des flammes. Il lança des boules de feu dans sa direction et elle brandit un large bouclier de glace qui se mit à fondre au fur et à mesure que les orbes s’écrasèrent sur la surface gelée. Une flaque d’eau était aux pieds de Chloé et la terre l’absorba presque aussitôt, la rendant boueuse et presque impraticable
Elle s’extirpa du mieux qu’elle put et surtout le plus rapidement possible. Elle savait qu’elle s’exposait et qu’elle risquait d’être en difficultés si ses mouvements étaient ralentis.
Alors qu’elle était en train de pester intérieurement de se retrouver dans cette situation, les vêtements humides à cause de la glace qui avait fondue et de la boue qui entravait ses pieds et le début de ses jambes, elle ne fit pas assez attention à sa prochaine attaque.
Trop concentrée sur l’instant présent.
Et il en profita pour lancer une attaque rapide électrique qui la secoua de plein fouet.
Elle n’eut pas le temps de réagir et se protéger.
Elle se figea et prise de convulsion, elle finit par s’écrouler de tout son corps.
Il n’y était pas allé de main morte et l’eau présente sur elle amplifia la puissance de l’attaque.
Elle était en grave danger et elle devait se dégager du temps en le mettant hors de nuire pendant un moment.
Elle se releva comme elle put, une main au sol pour se soutenir, et elle gela les jambes de l’adversaire, un amas de glace apparut à ses pieds jusqu’à recouvrir ses cuisses et ses mains.
Elle pensait que cela suffirait, et il ne réagit pas plus, bloqué dans cette position.
Elle crut qu’il avait accepté sa défaite et qu’il allait enfin l’écouter.
Elle prit le temps de se relever tout en s’appuyant contre le tronc d’un arbre.
Elle ne se douta pas qu’il pouvait utiliser la télékinésie, ou plutôt, l’idée ne lui traversa pas l’esprit.
Ce n’est que lorsqu’elle sentit la lame de son épée qui était au sol quelques minutes auparavant, la transpercer dans le dos, jusqu’à resortir de l’autre côté de son corps, qu’elle comprit son erreur.
Sa seule erreur, celle qui lui aura coûté la vie.
La douleur fut vive et lorsqu’elle comprit ce qui venait de se passer, de ses dernières forces, elle recouvra le corps entier de son adversaire.
Puis la surface de glace se fissura et le bloc gelé se fendit et se brisa en morceaux. Le corps y comprit.
C’était la dernière chose qu’elle pouvait faire.
Et progressivement, elle s’allongea, faisant attention à la lame et l’épee.
Elle avait eu une certaine chance que son coeur était encore intact mais elle sentait ses poumons touchés se gorger de sang et à la fois, elle se vidait peu à peu de son sang par la plaie.
Elle sentait l’énergie la quitter.

Les cheveux ébouriffés, les vêtements tachés de boue séchée par endroits, à moitié trempée.
Elle arborait une expression neutre, elle savait qu’il ne lui restait plus beaucoup de temps à vivre mais elle n’avait pas peur.
Flora était sauve, c’est tout ce qui lui importait en cet instant et elle vit sa vie défiler.
Elle avait assez vécu, elle avait eu une vie remplie et elle avait pu au moins laisser derrière elle une « descendante », cela n’avait pas été vain.
Elle n’avait aucun regret, alors elle accepta son sort.
La douleur était encore vive et elle n’abandonnait pas pour autant.
Alors elle posa sa main sur la base de sa plaie et elle utilisa le froid pour geler la progression et pour inhiber le mal qu’elle ressentait.
Elle gagnait du temps, au cas où son maître la retrouverait, si jamais elle était sauvée même si elle n’y croyait plus vraiment. Elle savait que son maître lui en aurait voulu si elle n’avait pas fait son maximum pour survivre.
Et elle attendit.

*

Flora était arrivée en panique dans le domaine, sur sa monture.
Frekio avait senti sa présence se rapprocher du château et fut le premier à l’accueillir.
Il fut surpris qu’elle soit seule et lorsqu’il la vit en larmes, mangeant à moitié ses mots, il devina la gravité des évènements.

Le comte était déjà en chemin.
Il prit son cheval et partit dans la direction d’où venait la rousse, sans rien dire.

— Chloé… elle… je…
Entre les sanglots, elle ne savait pas par où commencer.

— Hé, calme-toi… raconte-moi ça depuis le début…
Il essayait de la rassurer, la serrant dans ses bras, alors qu’elle pleurait à chaudes larmes.

Bréto vint les voir et leur expliquer rapidement la situation.

— Le maître va la ramener. Il sera bientôt de retour avec elle. Jusque là, reprenez-vous.

Il essayait de se convaincre lui-même également.
Il garda un ton ferme sans rien laisser paraître mais au fond de lui, il était inquiet. Il avait un mauvais pressentiment.
Il devait faire confiance au maître.
Flora sécha ses larmes du mieux qu’elle put et Frekio la ramena à sa chambre.

— Bréto a raison. Ressaisis-toi. Ca ne sert à rien de te mettre dans cet état…

Il essayait de trouver les mots justes pour ne pas la brusquer.
Elle, assise sur le rebord de son lit, et lui debout, à la regarder, ne sachant pas trop quoi faire pour la consoler sans l’infantiliser.
Il était également proche de Chloé mais la voir aussi désemparée, il occulta son appréhension personnelle.
Flora était inconsolable.

— Je… je l’ai abandonnée… elle m’a dit de partir… et.
Répétait-elle, entre ses sanglots.

— Arrête de ressasser ça. Si elle t’a dit de partir, tu as fait ce qu’il fallait faire. Elle savait les risques qu’elle encourait et tu aurais peut-être été un fardeau pour elle si tu étais restée. Tu ne peux pas savoir, mais tu as eu raison d’obéir. Tu comptes énormement pour Chloé et je pense pas qu’elle ait regretté son choix une seconde. Tu n’as rien à te reprocher, tout ce qu’il te reste à faire c’est te reprendre et relever la tête. Garde la tête haute. On doit attendre le retour du maître, et je suis certain qu’il la ramenera. Il tient à elle autant que toi, si ce n’est plus.

Elle sanglotait toujours mais ses paroles s’étaient tues. Elle ressassait ce que Frekio venait de lui dire.
Cela la dérangeait qu’il parle de Chloé comme si elle n’était déjà plus de ce monde mais il avait raison. C’était une éventualité et autant s’attendre au pire.
Elle essaya de sécher ses larmes.
Elle ne devait pas penser au futur qui l’attendait sans Chloé. Elle devait garder espoir.
C’était étrange à quel point elle était attachée à cette femme qui n’était qu’une inconnue quelques mois auparavant.

*

Le comte était en route.
Il avait ressentit que sa protégée était en danger avant même que Flora ne rentre.
Une intuition qui ne trompait pas, la dague qu’il lui avait offerte était enchantée et l’avait pévenu que Chloé était dans le pétrin.
Une boule d’angoisse dans sa poitrine.
Une once de colère le traversa. Il aurait dû l’accompagner. Puis il devait réagir maintenant.
Elle était encore en vie, il l’espérait.
Ce n’était pas la première fois qu’elle partait s’occuper de ce genre d’ennemis, durant toutes ces années et ces decennies, il ne s’était plus inquiété, parce qu’elle était toujours rentrée saine et sauve.
Aujourd’hui, ce n’était pas le cas. Durant son trajet vers elle, il ressassa tout cela.

Il vit la monture que Chloé avait laissé et continua son chemin jusqu’à l’apercevoir.
Elle était allongée au sol, s’il ne pouvait pas sentir sa présence, il aurait pu croire que c’était trop tard.
Il descendit en hâte de son cheval et accourut près d’elle.

— Chloé ! Je t’interdis de mourir, tu entends ?!
Sa voix grondait mais l’émotion le trahit et elle vibra légèrement à ces mots.

Il vit l’arme qui la transperçait.
Elle ouvrit avec mal ses paupières, pas entièrement, juste assez pour voir la silhouette floue de son maître.
Elle aurait reconnu sa voix et son aura entre mille.
Et un sourire, elle lui sourit doucement et essaya de parler.

— Maître… je… désolée… erreur…

Seuls quelques mots réussirent à sortir de sa gorge.

— Ne parle pas, attention, je vais retirer l’épee…

Il essayait de garder son calme mais au fond de lui, il n’était pas serein. Il craignait que sa vie lui file entre ses doigts mais il ne devait pas se laisser emporter par ses émotions.
Il posa une main sur la lame de l’épée pour l’attraper, et l’autre sur la base de la plaie. Il devait la retirer tout en cautérisant pour éviter qu’elle ne saigne et perde trop de sang.
Elle était déjà très affaiblie mais au toucher il remarqua qu’elle avait tenté de congeler cette partie pour ralentir la perte.
Il commença par faire glisser lentement la lame vers l’extérieur. Et l’autre main envoyait de l’eau d’abord, pour faciliter les frictions et nettoyer la plaie.
Chloé serra les dents et gémit de douleur, mais elle se retint de crier.
Voyant à quel point elle souffrait, il décida de retirer la lame d’un coup sec. Et cautérisa directement la plaie béante.
Elle ne put s’empêcher de laisser échapper un long cri
Il l’allongea sur le dos.

— Chloé… il faut que tu boives…
Lui murmura t-il à l’oreille, il était tout près d’elle, son corps la surplombait et il tendit son cou en face de sa bouche.

Elle réunit ses dernières forces pour sortir ses canines et croquer dans la chair de son maître.
Et elle but. Elle but juste assez pour aider à la cicatrisation de sa plaie et elle s’arrêta. Elle ne voulait pas abuser de sa générosité et elle savait que maintenant, grâce à lui, elle était tirée d’affaire.
Le repos suffirait à ce qu’elle soit de nouveau sur pieds.
Elle ouvrit les yeux, et ses pupilles croisèrent celles de son maître.
Il avait les yeux mouillés, brillants, et les sourcils montrant qu’il était toujours inquiet.

— Ne me refais plus jamais ça…

Cette fois-ci, sa voix ne retint pas son émotion.
Il l’aida à se redresser et l’enlaça dans ses bras.

— Je suis désolée… j’ai commis une erreur… merci d’être venu me chercher…
Dit-elle simplement, en acceptant son entreinte.

Après quelques minutes.

— Tu peux te lever… ?

Elle essaya mais son corps était encore tremblant et il resta près d’elle pour la rattraper dans ses bras.

— Tu aurais dû boire plus !

Elle secoua la tête.

— Ca me suffit. Le temps fera le reste…

Il l’accompagna près de sa monture et l’aida à la chevaucher. Puis monta derrière elle pour la soutenir.
Si la douleur n’était pas présente, elle aurait été comblée de partager ce moment avec son maître.

— Accroche-toi bien.

Elle attrapa les rennes, il l’enveloppa de sa carrure et prit ses mains dans les siennes, et il se remirent en route.
Il détacha la monture de Chloé qui était restée sagement à son point, et le cheval les suivirent jusqu’au retour au château.
Le trajet fut rude pour elle. Les secousses du trot réveillait sa blessure qui finit par se rouvrir à mi-chemin.
Elle ne dit rien et serra les dents. Elle savait qu’il fallait rentrer au plus vite et c’était le seul moyen.
Elle lutta pour rester consciente, mais le soulagement d’être rentrée, elle se laissa un peu partir.

Elle saignait lorsqu’il la fit descendre, peut-être même qu’elle avait fini par perdre connaissance juste avant.
Il vit le filet de sang s’étendre et il cautérisa une nouvelle fois. Cette fois-ci, elle ne cria pas. Un semblant de spasme de douleur et elle ne bougeait plus.
La panique l’envahit.
Il la porta contre lui et se dirigea vers sa chambre.
L’endroit le plus sûr pour elle et pour lui
Il croisa Bréto qui eut du mal à quitter des yeux la jeune femme dans ses bras.

— Elle est juste inconsciente, elle est vivante.
Expliqua t-il sans entrer dans les détails.

Il gardait une certaine image dans son domaine et il devait faire attention.

— Je vous envoie des servantes, maître ?
— Oui, merci. Elle sera dans ma suite.

Il ne perda pas une seconde et l’installa d’abord sur son lit.
Elle devait être déshabillée, nettoyée et sa plaie pansée. Elle allait guérir rapidement mais elle allait avoir besoin d’un bandage au cas où sa plaie se rouvrirait.
Les servantes arrivèrent presque aussitôt et il les laissa faire et en profita pour aller voir Flora.

Lorsqu’il frappa à la porte, ce fut Frekio qui ouvrit et ils furent tous les deux surpris l’espace d’un instant.

— Le comte !

Flora se releva aussitôt et s’approcha de lui pour lui demander au sujet de Chloé.
Il l’arrêta avant même qu’elle n’ouvre la bouche. Son expression neutre ne la rassurait pas mais elle attendit, patiemment qu’il s’exprime.

— Chloé est en vie. Elle est cependant gravement blessée, elle sera dans mes quartiers pour sa guérison.
— Mer…ci… !

Flora éclata en sanglots, de joie et sauta dans les bras du comte qui ne sut pas comment réagir. C’était comme une petite fille et il lui caressa les cheveux tout en l’enlaçant pour la consoler.

— Je suis… désolée… c’est ma faute… !
— Non, tu n’y es pour rien. C’était la décision de Chloé et tu es également précieuse. Ne rejette pas la faute sur toi.
— Et… l’ennemi… ?
— Elle s’en est occupée. Il ne restait pas grand chose de lui lorsque je suis arrivé.

Il jeta un regard à Frekio, qui était interloqué de le voir enlacer et être doux avec quelqu’un, et il lui fit comprendre de l’aider à reprendre Flora.
Ce qui le fit sourire et il attrapa Flora délicatement, telle une enfant.

— Je crois que tu dois lâcher le comte…
Dit Frekio en intervenant, le comte le remerciant silencieusement.

Il inclina légèrement sa tête pour prendre congé et les laissa seuls dans la pièce.
Flora réalisa ce qu’elle venait de faire et, dans les bras de Frekio, elle était maintenant rouge de honte.

— Je… je viens de prendre le maître de Chloé dans mes bras… ?!

— Oui, exactement.
Répondit Frekio, ne cachant pas son air moqueur ni son amusement.

— C’est pas vrai… j’ai fait ça… et il m’a laissé faire… je ne vais plus pouvoir le recroiser sans avoir honte maintenant…
Dit-elle, en se cachant le visage dans ses mains.

Frekio se moqua gentiment de Flora et ils pouvaient maintenant être plus détendus, ils savaient que Chloé était de retour et qu’elle était en vie.
Flora ne se laissa pas aller, elle était plus qu’heureuse d’apprendre cette nouvelle et elle insista plus tard, avec l’aide de Bréto, parce qu’elle n’osa pas aller voir le comte seule, de demander à voir Chloé.

Elle l’avait alors suivi jusqu’à sa suite, et elle avait pu voir Chloé.
Ils étaient restés silencieux, et elle ne s’était pas approchée plus. Juste la voir lui suffisait, elle était immobile au fond du lit, respirant à peine, ce qui était normal pour leur race. On aurait pu croire qu’elle avait quitté leur monde.
Flora avait étouffé un sanglot.

— Laissons-la se reposer sans la déranger…
Avait murmuré le comte, en s’adressant à Flora, qui ne se fit pas prier.

— Elle… est tellement affaiblie…
Avait-elle prononcé dans un souffle.

— Elle l’est, mais elle s’en est sortie. Tu ne dois pas te sentir coupable pour cela.
Avait-il ajoute, avec toute sa compassion.

— Je… je pensais que vous m’en voudriez… que vous me détesteriez pour… pour ma faiblesse…
Avoua t-elle, la peur au ventre.

— Non. Si je dois en vouloir à quelqu’un, c’est à la personne que vous avez affrontée, puis à moi-même de n’avoir pas été à pour la protéger… puis Chloé, d’avoir fait sa tête brûlée et s’être mise en danger.
— … Mais.
— Si tu as quelque chose à te reprocher, fais en sorte que cela ne se reproduise plus. Je ne t’en veux pas alors cesse de te torturer.

Il laissa Flora sans voix. Ses mots furent un soulagement pour elle et elle s’inclina et le remercia avant de prendre congé de lui.

Elle décida qu’elle devait être plus forte, plus forte pour pouvoir protéger Chloé la prochaine fois. Il y avait une prochaine fois, alors elle devait la prendre comme une seconde chance, une chance de se racheter.
Elle courut jusqu’au terrain d’entraînement et elle s’entraina, d’arrache pieds, jour et nuit pendant la convalescence de Chloé.
Frekio était presque inquiet et il dut la pousser à aller se reposer pour que son corps puisse assimiler ce qu’elle venait d’apprendre.

2021.01.26

Présent [RolePlay]

— Pour marquer la fin de tes entraînements… j’ai un petit présent pour toi, Flora.
Elle tendit un objet enveloppé dans un tissu de qualité.

— C’est… pour moi… ? Je… je ne sais pas quoi dire.
— Attends, tu ne sais pas encore ce qu’il y a dedans. Je t’en prie, regarde ce que c’est.

Elle le posa sur la table et déballa son cadeau.

— Mais… c’est magnifique… je…
— Prends-le, essaye pour voir. Il ne doit pas être trop lourd normalement…

— C’est parfait. C’est tellement beau ! Je… merci beaucoup ! Tu peux pas savoir à quel point je suis contente !
Dit-elle tout en le soupesant et en donnant quelques coups dans le vide avec.

C’était une épee courte gravée avec des motifs sur la garde. Discrets et qui ne gênent en rien le maniement de l’arme mais on pouvait deviner un travail d’orfèvre.

— Ca me fait plaisir que ça te plaise. Vraiment. À vrai dire, c’est de la part du comte et de moi-même. Nous avons choisi tous les deux cette arme qui était dans l’armurerie privée. Elle n’est ni trop grande ni trop petite, par contre je ne pense pas que tu puisses l’utiliser en ville mais ici, ça ne posera aucun problème que tu la portes sur toi, même en évidence dans le château.
— C’est… je… merci ! Il va falloir que j’aille le remercier aussi… ! Je pensais qu’il ne m’appréciait pas spécialement…
— C’est juste qu’il n’est pas très expressif. Mais je te rassure qu’il a pris soin de choisir ton arme. C’était même mignon de le voir si investi.
— Ah… tu es sure que je peux garder une si jolie arme… ? Elle faisait partie de son armurerie quand même… non ?
— Elle sera mieux avec toi qu’enfermée dans une pièce, tu ne crois pas ?
— Vu comme ça…

Elle restait songeuse à admirer ce qui était maintenant son arme.

— Lorsque j’ai fini mes formations d’entraînement ici, il m’a également offert une arme, pour me féliciter. Ca m’avait fait extrêmement plaisir, du coup je me suis dit que ça serait sympa que tu aies la tienne. Prends-en soin.
— J’y compte bien ! Mais au fait. C’était quoi ton arme ?
— Une dague. J’ai une préference pour la magie mais il a tenu à ce que j’ai toujours cette dague sur moi, pour me défendre au cas où.

Elle sortit sa dague qui était rangée dans un fourreau sur sa cuisse, sous sa robe.
C’était également un magnifique objet forgé certainement par la même personne. Les dessins et motifs sur la garde avaient une similitude avec celle de Flora mais la lame était légèrement différente. Elle semblait enchantée. Elle brillait comme si elle venait d’être forgée.

— Elles peuvent être enchantée. La mienne a été enchantée par mon maître. Si jamais il m’arrive quelque chose, il sera au courant. Et j’ai enchanté la tienne pour que je sois prévenue si jamais tu es en grand danger.

Il était certain qu’elle la gardait toujours sur elle.

— Je ne sais pas quoi dire ni quoi faire pour te remercier…

Elle baissa la tête, gênée et Chloé s’approcha d’elle pour l’embrasser sur le front.

— Prendre soin de toi. Ca sera déjà très bien.

Flora lui sauta dans les bras et la serra fort. Ce qui la surprit mais elle sourit et l’enlaça. Elle était heureuse que Flora soit là.

— Oh. Au fait, je crois que Frekio a aussi un cadeau pour toi. Tu devrais aller le voir. Il doit être dans sa chambre.
— Ah- je peux emmener mon épee pour lui montrer ?
— Oui, bien sûr. Tu me diras.

Elle lui fit un clin d’oeil et Flora rougit jusqu’aux oreilles avant de s’échapper de la pièce avec son cadeau.
Elle frappa à la porte, les mains un peu moites et il ouvrit.
Un peu gêné il l’invita à entrer.
C’était la première fois qu’elle pénétrait dans son antre et elle était un peu nerveuse.

— Hé… euh… Chloé m’a dit que tu avais quelque chose…
— Euh… oui. C’est sur la table…

L’objet était également enveloppé dans un tissu mais la matière était moins noble et on aurait dit que ça avait été enroulé dedans qu’emballé soigneusement.

— Je peux… ?
— Oui oui, vas-y…

Il se recoiffait d’une main, machinalement et se grattait l’arrière de la tête. Un peu anxieux de sa réaction.

Elle le déroula sur la table parce qu’elle ne savait pas trop comment ni par quel bout le défaire et elle ne comprit pas ce que c’était. Elle l’observa sans rien dire pendant un moment, essayant de deviner ce que ca pouvait bien être. Puis.

— C’est quoi… ?
— Ah… euh, alors c’est une ceinture et un fourreau pour l’épée…
— AH ! D’accord… !

Elle avait posé son épée sur la table à côté du tissu et elle attrapa la ceinture pour essayer de le mettre sur elle.
Voyant qu’elle avait un peu de mal. Il lui proposa de l’aider, il se mit à genoux devant elle et passa les sangles au bons endroits.
Elle se laissa faire et tripoter, les joues un peu plus rouges.
Il passait ses mains de manière hésitante en essayant de ne pas la toucher à des endroits gênants et il régla les sangles pour que cela soit parfaitement ajusté. Il se releva, satisfait.

— Voilà ! Je me suis dit que tu aurais besoin de ça pour pouvoir porter fièrement ton arme.
— Merci beaucoup !

Sourit-elle à pleine dents. Elle était contente, doublement.
Et il lui rendit son sourire, heureux d’avoir pu lui faire plaisir.
Et comme elle l’avait fait avec Chloé, elle lui sauta au cou pour le remercier.
Il fut tout aussi surpris et un peu gênée et elle le ressentit alors elle écourta son étreinte. Elle l’avait fait intuitivement parce qu’elle se comportait comme ça avec Chloé mais elle s’était beaucoup trop emportée par sa joie et gênée elle se décrocha de Frekio.
Ils se regardèrent dans le blanc des yeux, et Frekio ne résista pas, il fit le premier pas et l’embrassa sur la joue. Un peu trop près de la bouche.
Elle resta sans voix et sans bouger.
Elle continua à le regarder, à attendre.
Et il recommença, cette fois-ci, il l’embrassa sur la bouche et elle lui rendit son baiser.
Cela faisait si longtemps qu’elle était amoureuse de lui mais qu’elle pensait qu’il ne partageait pas ses sentiments. Maintenant elle était sure et elle était comblée. C’était le plus beau jour de sa vie.

*

— Non… celle là n’est pas assez bien. Il manque quelque chose…

Il était debout à regarder les porte-armes et les différentes armes sur les murs, à faire les cents pas en cherchant la pièce qu’il avait en tête.
Elle le regardait, amusée et étonnée qu’il prenne cela aussi à coeur.

— Je ne pensais pas que tu allais t’investir autant pour m’aider…
— C’est sa première arme, c’est quelque chose de très important, il faut choisir la bonne ! Et si elle ne lui plait pas… il faut au moins qu’elle soit de bonne qualité…
— C’est vraiment adorable… tu t’es pris autant la tête quand tu as choisi ma dague… ?

— … Bien sûr.
Répondit-il, un peu embarrassé.

— Ah mais bien sûr !
— Pardon… ?
— Ta dague ! J’aurais du y penser !
— Oui… ?
— L’artisan qui a fait ta dague, je crois bien que je dois avoir d’autres armes de lui, peut-être même une épée. Une épée courte, ça serait bien. Ca ne devrait pas l’encombrer tout en gardant une puissance de frappe assez correcte.

2021.01.06

Urgence [RolePlay]

Elle fut convoquée en urgence dans le bureau du maître.

— Mes éclaireurs m’ont signalé un groupe dangereux… de notre race, à quelques kilomètres d’ici.

Elle était alertée et il n’eut pas encore formulé sa question qu’elle se proposait déjà à y aller les éliminer.
C’était une tâche qui lui tenait très à coeur.
Elle ne supportait pas que ces individus puissent blesser et tuer des innocents, et qu’ils menent cette non-vie de massacres sauvages dictés par leurs instincts de soif et de survie.
C’était pour eux également, une souffrance.
Ces créatures avaient été laissées en liberté après qu’on ait tenté de leur donner la vie éternelle, la personne avait-elle été trop sensible pour les achever, ou alors quelqu’un prenait un malin plaisir à les créér et les lâcher dans la nature pour un carnage sans précédent ? Elle n’avait pas trouvé de réponse claire à cette question informulée.

— Fais attention à toi.
— Je sais.

*

— Tu y vas ? Seule ?
— Oui, je comptais y aller seule, pourquoi ? Tu comptais m’accompagner ?
— J’aurais aimé mais je suis assigné à autre chose aujourd hui…
— Dommage.
— Tu n’emmènes pas Flora avec toi ?
— …
— Je pense qu’elle est prête, et puis elle doit mettre en pratique ce qu’elle a appris, sur le terrain. Tu ne penses pas ?
— Tu as raison mais…
— Tu ne lui as rien dit ? Ce n’est pas une enfant, tu sais. Un jour ou l’autre elle sera confrontée à ce genre de situation.

Entendant la conversation au loin, Flora fut attirée par le son de leur voix et elle prit part à la discussion.

— Hey, je vous cherchais. Vous êtes en train de vous disputer… ?
Elle regarda les deux, ses yeux allant de l’un à l’autre, ne comprenant pas pourquoi ils s’étaient tus lorsqu’elle s’était approchée.

— Non non, on parlait simplement…
— Chloé va aller traquer des gens dangereux de votre race. Et elle comptait y aller seule…
— Quoi ?! Mais. Je viens ! Hein, Chloé ? Je peux ?
— … Si tu veux. Frekio me faisait remarquer que c’était une bonne occasion pour mettre en pratique tes entraînements. Mais… ça risque d’être très dangereux… et tu n’as peut-être pas envie de voir ça… des gens comme nous mais… différents… on va devoir les neutraliser.

Elle n’osa pas regarder Flora dans les yeux. Elle voulait lui épargner ça mais maintenant que Frekio lui avait dit, elle savait qu’il avait raison. Elle ne pouvait pas mentir à Flora ni la protéger éternellement. C’était une adulte comme elle, et elle avait le droit de savoir et aussi faire ses choix.

— Dangereux… si c’est aussi dangereux que tu le dis, mieux vaut que je t’accompagne ! Non ? Et il va bien falloir qu’un jour je les affronte, alors autant que ce soit aujourd’hui que par surprise. Au moins je saurais à quoi m’attendre dans le futur.

Elle chercha du support dans les yeux de Frekio et il acquiesça, d’accord avec son argument.

— … Eh bien, d’accord. Préparons-nous et allons-y. Rapidement. Ils sont pas tout prêts alors on va prendre des chevaux. Prends le stricte minimum pour te défendre, je t’attends à l’étable dans environ un quart d’heure.

Chloé soupira et consentit à prendre Flora avec elle.

— Tu vois, c’était pas si difficile !
Lui donna une tape dans le dos, Frekio.

Elle lui jeta un regard mauvais en réponse.

2021.01.04

Apprentissage [RolePlay]

— Je suis appelée ailleurs pour une urgence, tu vas devoir te débrouiller sans moi aujourd’hui…

Chloé avait l’air inquiète mais elle n’avait pas le choix.
Elle dut laisser sa protégée un moment.

Flora l’avait rassurée. Cela faisait quelques jours déjà qu’elle arpentait les couloirs sans se perdre, ou du moins elle savait retrouver le chemin de sa chambre.
Elle s’était habituée un peu à l’étiquette et elle était plus à l’aise qu’à son arrivée.
La vie ici était déroutante mais elle avait la chance de s’adapter rapidement.
Chloé lui avait servi de guide, tout en lui expliquant les bases, et aujourd’hui, cela lui permettrait de souffler un peu, de visiter sans but particulier.
Elle se baladait alors, observant les détails nouveaux du château qu’elle n’avait pas déjà vu.
C’était un bel endroit et l’activité incessante dans les coulisses la surprenait.
Son regard reconnut une silhouette familière et Frekio apparut devant elle, souriant comme à son habitude.

— Hé, salut toi ! Flora, si je ne me trompe pas ?
— B-bonjour.

Elle s’inclina comme une véritable servante et son interlocuteur rit à gorge déployée.

— Oh, t’es pas obligée de te comporter comme ça avec moi. Je ne suis pas très fan des courbettes… Mais je vois que tu t’es vite habituée à notre petit monde. Ca me rappelle presque Chloé lorsqu’elle est arrivée ici.

Voyant la curiosité se dessiner sur son visage il continua.

— En parlant de la louve, elle n’est pas avec toi aujourd’hui ?
— Non… elle est occupée ailleurs…

— Quel dommage… hm… ça nous donne l’occasion de passer du temps sans qu’elle me réprimande.
Sourit-il à pleines dents.

Flora rougit légèrement.
Il y avait quelque chose chez lui qui lui plaisait et elle n’arrivait pas à mettre le doigt dessus. Il était chaleureux.
Elle était trop timide et intimidée pour parler, il continua la conversation.

— Si tu veux, je peux te faire la visite, s’il te reste encore des endroits à découvrir ? J’imagine que Chloé a dû te montrer les lieux les plus importants… au pire on va se balader. Tu es libre ?
— O-oui.

*

— Tu avais l’air intéressée par le passe de Chloé. Elle t’en a parlé ?

Elle fit non de la tête.

— Ah, je lui laisse le soin de te raconter certains détails mais je peux te dire que cet uniforme te va mieux quand même.

Elle rougit de nouveau, à croire qu’il faisait exprès de la taquiner.

— Oh, je ne dis pas ça pour te flatter, mais tu sais, quand elle est arrivée ici, elle avait la peau sur les os. Tu vois comme elle est aujourd’hui ? Imagine encore plus maigre… elle flottait dans cette robe. On pouvait se demander comment elle arrivait à tenir debout. C’était assez poignant comme vision… surtout que j’ai vu l’état de son corps quand je l’ai accompagnée à la salle d’eau. Elle avait peur d’y aller seule parce qu’elle connaissait pas les lieux. Rien que d’y penser, Chloé qui a peur, ça me fait doucement sourire quand on la voit aujourd’hui.

— Vous… vous êtes proches, non… ?
Osa t-elle demander. L’information qu’il l’ait vue nue l’ébranla plus que prévu et elle posa cette question qui sous entendait autre chose.

— Oh, on est juste de bons amis, même si parfois je me demande si elle n’est pas plutôt mon ennemie…

— Ah, d’accord…
Répondit-elle avec une pointe de soulagement. Pourquoi était-elle si soulagée ?

Il remarqua ses réactions. Elle était beaucoup plus expressive et… montrait plus ses faiblesses que sa protectrice, et cela l’amusa.

— Si ça peut te rassurer, je n’ai pas eu de relation plus intime avec Chloé… par contre elle en a eu avec au moins une autre personne… que tu as dû rencontrer à ton arrivée…
Dit-il, joueur. L’incitant à deviner qui cela pouvait être.

— Le comte… ?
Supposa t-elle, vu qu’il la regardait et s’adressait à elle vraiment d’une manière particulière, plus subtile, mais elle n’en était pas sure. Avaient-ils le droit d’avoir une relation ? C’était son maître quand même.

— Ah, sa relation avec le comte est… spéciale. C’est son maître, elle te l’a dit, non ? Du coup, disons que ça ne compte pas vraiment. Ils sont liés d’une manière très forte mais je pensais à une autre personne. Le majordome.
— B-bréto ?! Mais… vous êtes sûr… ?

Cette révélation la choquait.

— Haha ! Alors, déjà, tuttoie-moi, et oui. Mon flair ne me trompe jamais et même s’ils ont été très discrets à l’époque, il y a encore des rumeurs qui courent de nos jours. Si tu tends l’oreille, tu pourras p’tre entendre quelques commérages. C’est un peu le couple chouchou des employés.
— Mais… il est si… froid ?
— N’est-ce pas ! Il cache bien son jeu. Ils font un duo vraiment atypique. Rien que de l’imaginer mielleux et dans les bras de Chloé… c’est vraiment trop bizarre !

Elle pouffa de rire. Pour une fois, elle était moins tendue et Frekio se mit à apprécier son expression.
Ses petites tâches de rousseur et ses cheveux roux bouclés, elle avait son petit charme qui ne le laissa pas indifférent.
Frekio était intarissable. Il était bavard et Flora buvait ses paroles.
Puis il reprit un instant son sérieux.

— Je vois à quel point Chloé est heureuse depuis qu’elle est rentrée avec toi. Je sais pas si tu te rends compte à quel point ta présence est importante… comment te dire… je ne connais pas bien le processus de votre race, mais les nouveaux nés comme toi sont rares, ça c’est certain… et j’ai vu Chloé rentrer la mort dans l’âme de nombreuses fois… elle a beaucoup échoué, elle te le racontera peut-être si tu lui demandes mais je vais te raconter de mon point de vue. Je pense qu’elle a voulu sauver des humains comme elle a été sauvée par le maître, malheureusement ce n’est pas aussi simple que de le souhaiter. Je ne pense pas qu’elle te forcera à rester à ses côtés. La connaissant, elle doit juste être heureuse d’avoir pu te sauver, même si d’après le comte, la vie éternelle n’est pas un cadeau. Tu devrais être libre de faire ce que tu veux dès qu’elle aura fini de t’enseigner ce que tu dois savoir.
— Je… je ne sais pas ce que je dois faire… Je… crois que je me sens bien à ses côtés. Je lui dois énormément et elle prend encore soin de moi… j’ai grandi sans mes parents et… elle m’apporte vraiment beaucoup, je crois. Pour l’instant… si elle est d’accord… je pense que je vais rester avec elle… au moins pour pouvoir un jour lui rendre la monnaie de sa pièce…
— Si tu penses qu’elle t’a sauvé, et que ce n’est pas une malédiction, c’est déjà un grand soulagement que tu lui fais.
— Elle… elle m’a donnée une seconde chance… même si je ne peux pas retourner à ma vie d’avant… je découvre encore énormément de choses, et j’ai envie de continuer à vivre…
— C’est un bon début. Si tu restes à ses côtés, veille bien sur elle pour moi, d’accord ? Elle porte souvent trop de choses sur ses épaules et elle ne se confie jamais, j’ai l’impression… je sais qu’elle ne veut inquiéter personne mais je ne suis pas dupe.
— D’accord… je ferai de mon mieux !
— Merci !

Leur chemin finirent par croiser celui de Bréto.

— Ah, bonjour Bréto…

Le sourire de Frekio avait disparu.
Flora s’inclina en face du majordome qui les jaugeait du regard.

— Frekio, Flora.
Il s’inclina également.

— F-Flora a du mal à croire que Chloé et toi étiez amants… !
Lanca t-il pour faire diversion et il poussa Flora devant lui avant de s’éclipser en lui jetant un clin d’oeil.

Elle était plus qu’embarrassée et n’osa pas prononcer un mot ni relever la tête
Il était imposant et impressionnant à sa manière.
Il soupira et s’avança vers elle.

— Relevez la tête, mademoiselle Flora. Je vois bien que Frekio s’est joué de vous…

Elle s’excusa tout de même et elle crut lire un sourire sur son visage.

— Excusez-moi. Vous voir avec cet uniforme me rappelle beaucoup Chloé, mais vous êtes très différente. On peut lire en vous comme dans un livre ouvert.
— Je…
— Ce n’est pas un reproche. Ma remarque était peut-être déplacée. Veuillez me pardonner. Surtout ne soyez pas si tendue en ma présence. Vous êtes la protégée de Chloé et je ne vous causerai aucun tort… puis-je vous aider ?
— C’est que… est-ce que je dois savoir d’autres choses sur moi, mes manières ou mon comportement, ici… ?
— … Vous finirez par vous y habituer avec le temps. Ne soyez pas trop pressée ni trop dure avec vous même. Le temps, vous allez en avoir beaucoup. Je ne peux pas vous chaperonner comme notre ami Frekio, mais je n’ai rien contre votre compagnie. Si vous êtes interessée pour me suivre durant ma ronde. Je pourrais alors vous éclairer sur quelques sujets.
— Merci beaucoup !
— Votre énergie fait plaisir à voir.

Il ne pouvait s’empêcher de les comparer, parce qu’il avait encore l’image de Chloé dans cet uniforme à ses débuts, il avait encore des sentiments forts pour elle, mais elles étaient si différentes, qu’il souriait intérieurement. Il se rendit compte à quel point Chloé réprimait ses expressions et ses ressentis, ce qui n’était clairement pas le cas de Flora qui était enjouée ou intimidée et tous ses états d’âmes se lisaient sur son visage. Puis, elle était plus en chair que sa tutrice. Une poitrine plutôt généreuse et des formes qui remplissaient bien sa tenue. Elle avait des courbes.

Elle put apprendre en regardant Bréto travailler.
Et il avait une aura rassurante, finalement. Maintenant qu’il lui avait dit qu’elle ne devait pas le craindre, elle pouvait se relâcher un peu.

— Je pense que Chloé vous formera à l’art du combat, ou de la magie… elle-même pratique les arcanes, selon votre souhait et vos affinités avec le sujet, elle pourra peut-être vous superviser. Dans l’autre cas, ça sera certainement Frekio. Ce bougre passe beaucoup trop de temps à flâner.
— La magie ? Le combat… ?
— Oui. Nous autres créatures, nous devons apprendre à nous défendre contre certains dangers. Du moins ici. Mais cela sera toujours utile, même en ville.

Intérieurement, elle savait qu’elle avait plus d’affinités avec le combat, et pas seulement parce qu’elle voulait passer du temps avec Frekio.

— Est-ce que vous appréciez votre séjour ici ?
— O-oui. Merci de prendre soin de moi et de m’accepter parmi vous…
— Nous sommes de la même race. Nous devons nous entraider.
— Euh… est-ce qu’il y en a d’autres comme nous ici… ?
— Non.
— Pourquoi… ? Je veux dire, est-ce que… le comte est votre maître aussi… ?
— Oui, et c’est plus complexe que ça… notre maître n’est pas aussi optimiste que Chloé… et moi je n’ai jamais eu d’intérêt de perpétuer notre race. Je suis comblé par le simple fait de servir mon maître. Ce qui explique notre nombre restreint.

Il était sérieux, dur et même un peu froid lorsqu’il donnait des ordres mais en dehors de ce contexte, ses traits se radoucissaient un peu.
Et ce fut flagrant maintenant que Frekio lui avait dit, mais lorsque Chloé revint de sa tâche et qu’elle croisa leur chemin, elle vit le regard de Bréto changer.
Et elle comprit comment Chloé avait pu s’attacher à lui.

— Bréto, Flora !
S’exclama t-elle.

— Chloé.

Le coeur de Flora bondit de joie.
Elle ne savait pas trop pourquoi mais elle était heureuse de la retrouver et elle s’inclina vers Bréto pour le remercier avant de rejoindre sa maîtresse.
Elle avait appris si peu et à la fois beaucoup sur qui était Chloé et elle avait envie de lui poser des questions.

— Merci d’avoir pris soin de Flora durant mon absence.
Dit Chloé en s’inclinant.

Une mèche de sa coiffure s’était défaite et Bréto tendit la main pour la replacer dans ses cheveux.
Son geste était d’une délicatesse que Flora en resta bouche bée.

— Merci…
Murmura Chloé, sans aucune émotion visible sur son visage.

Bréto était également impassible de l’extérieur.

— Sur ce, nous nous reverrons plus tard.
Il s’inclina et s’en alla dans la direction opposée.

Chloé se tourna dans la direction de Flora sans attendre.

— Je suis vraiment désolée de t’avoir laissée seule… !
S’excusa t-elle, les sourcils étant la seule marque d’expression sur son visage.

— Non, ne sois pas désolée ! Je me suis bien amusée ! Frekio m’a tenue compagnie aussi !
— Ah… si tu le dis alors… tu as passé une bonne journée ?
— Oui ! Excellente !
— Est-ce que tu as envie de faire quelque chose en particulier ?
— Hm… retourner dans la chambre ? J’ai plein de questions !

— D’accord…
Sourit-elle.

*

C’était étrange.
La manière dont Flora avait de s’adresser à Chloé. Comme une amie mais qui avait l’air plus jeune.
Aucune marque de respect en particulier, contrairement à elle et son maître.
Elle n’était pas sa maîtresse.
Elle ne s’était jamais positionnée sur ce genre de relation.
Elle la considérait presque comme une soeur, ou comme une présence de grande soeur, ce qui était perturbant vu qu’elle faisait plus jeune.

*

Flora s’était avanturée dans les jardins intérieurs du domaine seule.
Elle souhaitait juste se balader en attendant Chloé et elle ne vit pas le danger venir.
Une autre créature du domaine profita de son insouciance pour l’attaquer. Peut-être pensait-elle qu’une simple servante, surtout nouvelle, ne devait pas être importante et qu’on ne lui prêterait aucune intention s’il lui arrivait quelque chose.
Elle n’eut le temps que de sursauter de surprise puis de peur lorsqu’elle aperçut la silhouette se jeter sur elle vivement.
Elle ferma les yeux et chercha à se proteger.
Un bruit retentit et en rouvrant ses paupières, elle vit Chloé près d’elle.
Elle avait été rapide et elle s’était interposée entre elle et la forme inconnue, qui s’était enfuie au plus vite.
Chloé avait eu le temps de retenir son visage et cela serait rapporté au maître, mais elle ne fit aucun commentaire de plus et se retourna vers Flora.

— Tu n’as rien ?
Demanda t-elle, avec une pointe d’inquiétude dans sa voix.

— N-non, je crois. C’était quoi… ?!

Le coeur battant encore à toute allure, Flora se tenait la poitrine comme si cela pouvait l’aider à se calmer et ralentir son rythme cardiaque.
Chloé avait pris un coup de griffe sur son bras et cela avait déchiré sa manche et sa chair qui dégoulinait sur le sol. C’est le bruit des gouttes s’échouant sur l’herbe qui l’avait interpelée et lorsqu’elle vit les taches et l’état de Chloé, elle se figea. Elle était sous le choc.

— M-mais, Chloé ! Ton bras !!!
— Ah. Ce n’est rien. Ne t’en fais pas. Ca va vite guérir, par contre Erynia va faire la tête lorsque je vais lui amener ma tenue…
— Mais on s’en fiche de la tenue, tu saignes ! Et pas qu’un peu !!!
— Flora, calme-toi, regarde.

Et en un rien de temps, le sang coagula et les flots cessèrent pour cicatriser et la plaie se refermer sous les yeux ébahis de la rousse.

*

Il eut plusieurs épisodes ou Chloé intervint pour protéger et materner Flora qui lui sont gravés dans sa mémoire et qui ont fait qu’elle suivrait Chloé jusqu’au bout du monde. En plus du fait qu’elle l’adorait vraiment.
Elle prit des cours de combats auprès de Frekio et en plusieurs mois, elle avait déjà un bon niveau.
Chloé la testa un peu sur le terrain d’entraînement et elle fut satisfaite de ce qu’elle avait appris.

— Je vois que tes efforts ont porté leurs fruits, je suis fière de toi. Cela te servira si tu veux faire ta vie et être indépendante.

Quelque chose se resserra dans sa poitrine. Elle ne voulait pas partir. Elle était bien en compagnie de Chloé. C’était rassurant d’être à ses côtés. Après tout, cette nouvelle vie lui faisait peur. C’était beaucoup plus facile d’être sous la protection de Chloé, même son but, aurait été de pouvoir protéger Chloé à son tour.
Elle baissa la tête, songeuse, à ces mots. Ne sachant pas comment réagir ni quoi répondre.

Frekio était dans les parages et toussa pour couper ce moment gênant.

Elles restèrent encore quelques mois avant que Chloé ne décide que l’apprentissage de Flora était terminé.

— Je… je ne veux pas être seule… je veux continuer à rester à tes côtés… est-ce que je peux ?
Demanda t-elle, anxieuse. Ses mains avaient attrapé celles de Chloé et se resserraient.

— Ah… bien sûr que tu peux, ça me touche que ma compagnie ne te sois pas désagréable. Tu peux rester autant que tu veux avec moi. Juste, garde en tête que tu n’es en aucun cas forcée de me suivre. D’accord ?
— C’est compris !

2021.01.01

Première [RolePlay]

Flora se souvenait encore de leur première rencontre.

Elle qui était en train de se vider de son sang dans une ruelle sombre.
Elle s’était faite agresser et cela avait mal tourné. Elle ne s’était pas laissée faire et eux non plus, résultant d’une bagarre. Elle les avait tué mais elle avait été blessée. Mortellement.

Pourquoi la vie avait-elle été aussi injuste avec elle ?
Ses parents s’étaient suicidés et elle avait découvert leur corps alors qu’elle n’était qu’une enfant.
Elle ne s’était pas laissée abattre, parce qu’elle n’avait pas le choix, son histoire aurait pu s’arrêter là mais non.
Elle en avait décide autrement. Alors elle avait continué à vivre sa vie, elle avait continué ses études, réussit à obtenir une bourse, elle était dans sa vingtaine, en études supérieures et le peu d’argent qu’elle avait pour vivre, était sa bourse qu’elle utilisait avec parcimonie. Son logement étudiant était en partie payé par cette chance qu’elle avait. Et son intelligence.
Elle avait la tête bien faite et c’était une chose que ses parents lui avaient laissée.

Alors, quand ces jeunes brigands l’avaient menacée de leur donner ses affaires et tout ce qu’il y avait de valeur.
Elle avait refusé. Elle s’était battue pour arriver où elle en était. Et elle ne laisserait pas ces gens la voler sans rien faire. C’était ce qu’elle s’était dit, mais même la plus intelligente de sa promo pouvait ne pas prendre la plus intelligente des décisions.
Lorsqu’ils sortirent leurs armes blanches, de manière dissuasive, aux premiers abords. Elle s’était figée puis elle avait paniqué.
Puis quelqu’un s’était approché d’elle pour la forcer à donner son porte-monnaie et son sac à dos.
Elle n’avait pas réfléchi et par réflexe elle l’attaqua et réussit à lui prendre son couteau, et le retourner contre lui.

— Putain, c’est une tarée, elle va m’ouvrir si ça continue. Les gars, aidez-moi !
— La garce, elle va pas s’en tirer comme ça !
— Il y a tant de choses dans tes affaires qui valent plus que ta vie ?!

Elle ne savait pas quoi répondre.
Pour elle, c’était logique et par principe, elle ne voulait pas donner à une bande de voleurs ce qu’elle possédait et ce qui allait lui servir à survivre pour les prochaines semaines à venir. Autant se tirer une balle dans le pied.
Elle n’eut pas le temps de se poser pour penser que ses adversaires foncèrent sur elle pour la désarmer ou juste l’attaquer et lui faire peur ?
Elle réagit par instinct et elle blessa son premier homme. Qui recula et se mit à tituber, se vidant de son sang.

— Les gars… elle m’a eut…
— La salope, elle est dangereuse, tuez-la !

Cela ne pouvait pas bien finir.
Quelle ironie. Ses parents n’avaient plus eu envie de vivre alors qu’elle, elle s’était battue pour sa vie et même au siège de la mort, elle avait la soif de vivre.

Il s’était mis à pleuvoir et elle regardait le ciel, suppliant une présence invisible et intérieurement, de la laisser vivre. Pourquoi le destin s’acharnait sur elle ? Se dit-elle. Elle était arrivée aussi loin pour mourir ainsi ?
C’était injuste. Sa seule fierté c’était qu’elle n’avait pas cédé ses affaires, alors un sourire se dessina sur son visage.
Et une silhouette apparu au dessus d’elle.

Elle avait senti l’odeur du sang et était venue jusqu’ici, assistant à toute la scène sans pouvoir intervenir.
Elle prit en pitié la pauvre et malchanceuse jeune femme au sol.
Elle s’approcha d’elle et elle savait qu’elle était encore en vie, mais qu’elle allait mourir bientôt.
Affaiblie et se vidant de son sang.
Elle l’aida à se redresser légèrement et lui demanda avant qu’elle ne perdre totalement conscience.

— Si tu veux vivre, peu importe le prix, réponds-moi.
Souffla t-elle.

Elle rouvrit les paupières et essaya de deviner les traits de la personne à ses côtés mais il faisait trop sombre.

— Je ne veux pas mourir…
Réussit-elle à prononcer.

L’étrangère n’attendit pas une seconde de plus et elle s’ouvrit le poignet et le porta à sa bouche.

— Bois. Ne pose pas de questions.
Ordonna t-elle.

La blessée s’exécuta.
Ses blessures avaient guéri par magie. Pas complètement mais elle n’était plus en train d’agoniser au sol.
Elle essaya de se relever aussitôt.

— Tu habites où ? Je te raccompagne.
— …
— Donne-moi ton adresse, tu ne vas pas rester consciente longtemps.

Et elle lui dit son adresse avant de perdre connaissance.
Chloé la porta et fouilla dans ses affaires pour trouver l’étage et l’appartemrnt exact, puis ses clés.
Elle allonga le corps de sa protégée sur son lit et attendit qu’elle reprenne ses esprits.
Elle se rappelait du rituel que son maître avait fait sur elle. Ce n’était pas son premier essai et elle devait prendre ses précautions.
Elle voulait y croire. Que cette tentative ne soit pas un échec et qu’elle n’ait pas besoin d’y mettre un terme, de ses propres mains.
La tête encore dans les vapes. La rousse se réveilla.

— Je… suis chez moi ?
— Oui, je me suis permise d’entrer… j’ai posé tes affaires sur la table.

Elle était sur ses gardes.

— Vous m’avez sauvée ? Comment… pourquoi ?
— Cela dépendra de ta volonté. Disons que je t’ai donné un surcis. Si tu acceptes ta condition et que tu arrives à supporter… tes pulsions, tu pourras continuer à faire ce que tu veux…
— Ma volonté ? À quoi ? Quelle condition ? J’ai bu votre… sang, c’est ça ?
— Je sais que ça fait beaucoup de questions. Pour la faire simple. Je ne suis pas humaine, je suis ce que vous appelez parfois « vampire » en tout cas nous avons quelques codes similaires.
— Je suis devenue une vampire… ?
— Pas encore totalement. Je n’ai pas fini ta transformation. Mon sang n’a pu que te soigner mais il est également un poison qui va grignoter peu à peu ton humanité et te rendre dépendante à son goût. As-tu peur ?
— Non… enfin… je comprends mieux cette sensation… étrange de brûlure dans ma gorge… elle devient de plus en plus insupportable…

Elle s’approcha d’elle. De manière instantannée.

— Es-tu prête ?
— Pour… ?
— Je vais finir ta transformation et pour cela, je dois boire ton sang.
— D… d’accord ? Je n’ai pas vraiment le choix, n’est-ce pas ?
— Si. Tu peux encore refuser et je te tuerai ici.
— La mort ou… l’inconnu. Non, ça va. Je suis prête. Buvez mon sang…

Elle se pencha sur sa nuque et elle enfonça ses crocs dans sa chair et elle but.
Elle en avait oublié le goût si spécial du sang humain et elle faillit perdre pied.

Ce n’était pas désagréable. Pas tant que ça.
Elle sentit la vie et la chaleur la quitter et elle crut qu’elle était morte un instant.
Elle s’était endormie. Vidée et fatiguée.
À son réveil, beaucoup trop de questions se bousculaient dans sa tête. Et surtout une soif extrême et ce n’était pas de l’eau qu’elle voulait boire.

— Ah, elle m’avait prévenue… c’est… tellement dur de ne pas juste me laisser aller et… sauter au cou de cette fille.
Se dit-elle intérieurement

— Tu es réveillée ? Comment te sens-tu ? Est-ce que tu te souviens… ?
Elle était un peu en retrait, elle la sondait.

Elle se souvenait de ses échecs où son interlocuteur l’agressait pour tenter de la vider de son sang. Elle se tenait sur ses gardes et elle essayait de deviner les pensées de la nouvelle née.

— Oui… je crois que ça va… c’est normal que j’ai envie de… vous attaquer… ?
Elle était confuse et elle se contrôlait, du moins elle essayait.

— Oui. Ce sont nos pulsions bestiales, nos besoins primaires. Si nous n’arrivons pas à nous contrôler et qu’on se laisse aller… nous ne valons pas plus que des animaux… et dangereux. Si tu le souhaites, je pourrais t’aider à gérer cette sensation. Elle finit par s’estomper…

Elle sourit tristement mais continuait d’observer son comportement, sur la défensive.

— Je… j’imagine que si je perds le contrôle… et que je ne suis plus animée que par mes pulsions… vous me tuerez ?
— Oui.
— Je vois.
— Tu n’as pas peur ?
— Non, ça me rassure. J’imagine que si je deviens dangereuse, je risque de tuer des innocents, c’est ça ? Je préfère encore que vous m’empêchez de nuire.

— Eh bien… tu as du tempérament, toi.
Sourit-elle, surprise.

— Par contre… c’est vraiment dur de garder la tête froide avec cette… brûlure… de l’intérieur… je vais devoir supporter ça longtemps… ?
— Tu es vraiment forte.

Elle s’approcha alors d’elle. La femme aux cheveux rouges était recroquevillée sur elle-même sur son lit, et faisait peine à voir.

— Je vais peut-être finalement perdre la tête… si cette douleur ne s’estompe pas…
— Ne t’en fais pas. Les premiers instants sont les plus difficiles. Je vais te soulager. Bois mon sang.
— Q-quoi ?! Mais- je-
— Ne t’inquiète pas. Je pense que je peux te faire confiance. Tu as la volonté en toi. Regarde tes dents, tes canines.

Elle passa ses doigts sur ses lèvres et elle entrouvrit la bouche.
La brune caressa ses canines pointues et la pointe aiguisée s’enfonça légèrement au bout de ses doigts.
La goutte de sang s’écoula sur sa lèvre, ses dents et dans sa bouche.

— Mais- je.
— Oui. Tu as un peu changé physiquement depuis. Tu vas devoir apprendre à t’en servir. Ce que je t’ai fait. Tu vas le reproduire sur moi. Enfonce tes canines au niveau de mes artères et abreuve-toi.
— Comment je fais pour savoir que je ne vais pas vous tuer… ?
— Je t’arrêterai avant.
— Je…
— Je te fais confiance, alors fais-toi confiance.

— Tu me rappelles ma première fois.
Sourit-elle chaleureusement.

*

Elle tituba un peu.

— Est-ce que vous allez bien ? Je suis désolée !
— Oui oui, merci de t’en inquiéter. Ca va aller.

*

— Au fait, je m’appelle Chloé. Tu peux m’appeler Chloé.
— Moi, c’est Flora…
— Je sais.
— Ah bon ?
— J’ai vu ta carte d’identité.
— Ah bah oui…

— Tu sais qu’il va être compliqué que tu continues ta vie d’avant… même si tu es « vivante ». Ta peau, ton apparence, ta froideur… puis tu ne vieilliras plus…
— Ah… je m’en doutais un peu. Mais vous m’avez donnée une seconde chance. N’est-ce pas ?
— On peut voir ça comme ça.
— Pourquoi… ?
— J’ai vu du potentiel en toi…
— Ah… ?
— Notre race est en voie d’extinction. Quand je parle de notre race, je parle de ceux qui n’ont pas perdu le contrôle. La plupart se multiplient en créant des nouveaux nés dangereux et ne se préoccupent pas de l’équilibre, de l’utilité de garder une conscience.
— On est beaucoup… ?
— À vrai dire. Non. Mais du peu que nous sommes, la majorité n’est pas dotée de volonté ni d’intelligence comme toi et moi.
— C’est rassurant…
— Mais j’aime penser que ceux comme nous sont plus nombreux que je ne pourrais le croire, c’est juste qu’ils sont très discrets.

— Qu’est-ce que je dois faire maintenant… ?
— Je te conseille de quitter la ville et laisser tout ça derrière toi. Après à toi de voir comment le gérer.
— … Je vais simuler ma disparition quoi…
— C’est pas une mauvaise idée.
— Comment tu avais fait, toi ?
— Je n’ai pas eu besoin.
— Ah. Euh au fait, on se tutoie ? C’est que t’as l’air plus jeune que moi…
— Aucun problème… ! Si tu savais l’âge que j’ai réellement… mais ça me va. Tu peux me tutoyer.
— Si tu as l’air si jeune, c’est qu’on t’a… ?
— Oui. J’étais jeune à l’époque.

Flora profita de sa chance pour rendre son appartement. Arrêter ses études. Avec un poids sur le coeur. Elle aurait tellement aimé continuer ses études et être diplômée, elle avait 25 ans et elle aurait pu faire un master et un doctorat, mais tout ça, c’était maintenant derrière elle.
Elle prévint ses professeurs et ses quelques camarades de promotion qu’elle devait retourner à la campagne pour des raisons familiales, pas le choix.
La mort dans l’âme, elle leur dit au revoir.
Puis elle fit ses affaires et elle suivit Chloé.
Elle sentait qu’elle était maintenant liée à elle.

Elle ne savait pas où aller et elle pouvait lui faire confiance. Elle ne lui avait pas forcé la main mais elle lui laissait plusieurs alternatives.

— Tu peux venir avec moi, ou bien te débrouiller en solitaire… à toi de voir.
— Je n’en sais pas assez… j’aurai trop peur de faire des bêtises…
— C’est vrai que tu manques encore d’expérience mais tu as su me prouver que tu avais toute ta tête. C’est déjà beaucoup.
— Je peux rester avec toi encore un peu… ? J’ai nulle part où aller maintenant…
— Bien sûr. Je n’allais pas t’abandonner. Suis-moi alors. On va aller dans un endroit idéal pour t’apprendre plein de choses. Et tu vas rencontrer mon maître.
— Ton… quoi ?
— Celui qui a fait de moi ce que je suis aujourd’hui.
— Est-ce que je dois t’appeler… ma maîtresse ?
— Oh non, c’est juste que… oh tu verras quand on arrivera.

Et elle comprit l’époque et le contexte.

— Sois toi-même et tout ira bien.

Chloé avait vérifié que la tenue de Flora n’ait aucun défaut de plus et elle lui avait dit ces mots avant de frapper et d’entrer dans le bureau. Le sourire rassurant et confiante.

— Maître, je vous présente Flora.

Chloé avait fait une révérence et s’était inclinée.
Flora, perturbée, avait tenté de faire pareil.
Son regard s’était posé sur cette figure imposante par son aura, son maître était effrayant à ses yeux. Il était froid et il lui semblait qu’elle aurait pu mourir rien que d’un claquement de doigts.

— … C’est une nouvelle née.
Prononça t-il, de manière neutre mais beaucoup trop froide, presque désapprobateur.

— Oui. Je lui enseignerai tout ce qu’il faut savoir comme vous l’avez fait pour moi.
Expliqua Chloé sans sourciller.

— Bien. Flora, j’espère que vous ferez attention à vos faits et gestes dans mon domaine. Si vous commettez des erreurs, elles seront de la responsabilité de votre tutrice, Chloé. Je vous conseille de bien vous tenir.
Dit-il en se tournant vers elle. Son regard était dur, sévère et sans aucune once de sympathie. Elle n’osa même pas relever sa tête.

— Outre cet avertissement. Vous êtes la bienvenue ici et si vous avez des demandes, faites en part à Chloé.

Il aquiesça en direction de Chloé, lui donnant l’autorisation de faire ce qu’il faut.

*

Elles s’étaient dirigées dans une forêt et Chloé s’était arrêtée devant un buisson et un regroupement d’arbres particulier par rapport aux autres aux alentours.
Elle se faufila dans le buisson et fit signe à Flora de la suivre.

— Donne-moi la main.

Elle s’excécuta et Chloé posa sa main sur la façade du tronc cachée par le buisson.
Elles passèrent à travers l’écorce et en marchant, elles se retrouvèrent dans un tout autre endroit.
Une autre forêt beaucoup moins accueillante.

— Wouah… c’est… c’était quoi ?
— Un portail que j’ai créé. Reste près de moi. Ca peut être dangereux.

Elle obéit et resta sur ses gardes, regardant autour d’elle en essayant d’apercevoir les présences qu’elles percevait derrière les arbres et buissons.

— Le domaine n’est pas loin. Parmi les autres personnes importantes mis à part le maître, il y a Bréto, son majordome. Une armoire à glace, tu le reconnaitras tout de suite, et Frekio… Qui devrait nous tomber dessus parce qu’il adore flâner.
— Un majordome… ? C’est quelqu’un de riche, ton maître… ?
— En quelque sorte.

Flora aperçut le grillage du domaine et une partie du château dépasser du bois et les hectares de terrain.

— Ah d’accord… ça rigole pas.
— Ca peut être dépaysant pour toi, si tu as connu que la vie urbaine.
— Euh… oui. Est-ce que je dois savoir d’autres choses… ?
— Si tu te comportes comme quelqu’un de civilisé, ça devrait aller. Je crois ?
— … rassurant.

*

— Bonjour Chloé. Puis-je vous aider ?
— Bonjour Bréto. Oui. Est-ce que le maître est dans son bureau ?
— Oui. Il doit vous y attendre. Il devient rare de voir de nouvelles têtes par ici.

Il s’inclina en direction de Flora pour la saluer et elle ne sut pas comment réagir.
Paniquée et embarrassée elle tenta de faire pareil.

— Flora, voici Bréto. Le majordome des lieux. Veuillez excuser sa maladresse, elle n’est pas de notre époque et les moeurs ont drastiquement changé depuis…
— Bien sûr. Je ne lui en tiens pas rigueur. Enchanté de faire votre connaissance, Flora.
— Nous n’allons pas faire attendre plus longtemps le comté, merci Bréto.

Chloé s’inclina et se dirigea vers un escalier.
Flora lui emboîta le pas timidement.

— Je suis désolée… je…
— Non non, ne t’inquiète pas. Il peut paraître un peu froid mais il est loin d’être méchant. Tu es nouvelle, tu ne crains rien. Tant que tu ne cherches pas des problèmes.
— Non !
— Alors détends-toi.

Elle lui sourit et cela la calma un peu.

— Mais… c’est tellement étrange de t’entendre t’exprimer comme ça ! Je me croirais dans un film !
— Ahah, ce n’est pas faux. C’étaient l’étiquette et les manières de mon temps. On peut dire que ce petit monde est un peu figé à cette époque.
— … Bréto… le majordome… il était pas un peu bizarre… ? J’ai cru sentir… une odeur familière sur lui. Je me trompe peut-être… ?
— Tu ne te trompes pas. Il est comme nous.
— Tout le monde est comme nous, ici ?
— Non. Pas exactement. Disons qu’il existe plein d’espèces différentes et nous co-existons tous ensemble ici. Selon certaines règles.
— Euh, j’ai une autre question… les présences dans la forêt… ? C’était pas mon imagination ?
— Non. Il y a des créatures dans la forêt. Et elles ne sont pas toutes gentilles.

Durant leur trajet elles discutèrent, puis elles arrivèrent à destination.

*

— Hé Chloé ! Tu nous amènes une invitée ? Moi c’est Frekio ! Bienvenue ici. Si tu as des questions, je me ferai une joie de te répondre ou d’être ton guide !

— Salut Frekio… Flora, voici l’énergumène dont je te parlais.
Soupira Chloé.

— Quoi ? C’est comme ça que tu me présentes ?! Tu n’as pas de coeur ! Je suis un des gardes rapprochés du maître ! Un peu plus de respect s’il te plait ! Enchanté, Flora, c’est ça ?

Il lui baisa la main et elle rougit.

— Bon, maintenant que les présentations sont faites, va voir ailleurs si j’y suis.
— Pourquoi t’es aussi froide avec moi ?! Tu m’as manquée ! Je voulais que tu me racontes comment c’est dehors !

— Une autre fois, Frekio. Nous avons des choses à faire.
Soupira t-elle encore, exaspérée.

— À plus Flora !
Fit-il de la main en lui lançant un clin d’oeil avant de s’en aller.

— Excuse-le, il n’est vraiment pas possible…
— Tu as l’air de bien le connaitre…
— Oh oui. Un très bon ami, même s’il est parfois un peu trop… lui.
— Juste ami… ? Vous aviez l’air proches… ?
— … Encore heureux ! Ah non, on a jamais été plus proches que des amis !

— Ah pardon… c’était peut-être indiscret…
Répondit-elle les joues rouges.

— Non pas du tout, ne t’en fais pas pour ce genre de questions. Tu peux me demander tout ce qui te passe par la tête.

Chloé lui montra sa chambre qui était restée intacte avec le petit lit pour une personne.

— Je peux te laisser ma chambre si cela te convient.
— Mais, et toi… ?
— J’ai mes aises ici. Fais comme chez toi ici. Désolée, c’est assez rustique mais l’essentiel y est.
— C’est parfait. Merci beaucoup.
— On pourra discuter ici de manière un peu plus intime, il y a des oreilles un peu partout dans le château. Je dois avoir mon ancien uniforme dans un de mes placards… ah le voici ! Il est presque comme neuf… mais je pense qu’il va nécessiter des retouches pour qu’il t’aille.
— Tu es sure que je peux le porter… ?
— Oui, je ne le porterai plus, ma tenue est ici, regarde. J’ai porté cet uniforme à mon arrivée ici… quelle nostalgie… ah pardonne-moi. On va aller rendre visite à Erinya, c’est la dame en chef des servantes. Elle pourra faire quelque chose pour ta tenue. Si ça ne te dérange pas, je vais me changer ici d’abord.

*

— C’est un très beau geste plein de sens que Chloé te fait là, petite Flora. Elle t’offre son uniforme de servante.

Chloé ne savait plus où se mettre, gênée par les mots et la révélation de son geste.

— Il est déjà plus à ta taille mais effectivement, il va manquer quelques retouches pour que ce soit parfait.

2020.12.31

Voiture [RolePlay]

Elle profita d’un moment pour réserver dans un restaurant chic et inviter ses trois proches : Flora, Nao et Vladislaw, à son retour.
C’était une sorte de rituel. Pour les remercier d’avoir pris la relève durant sa courte abscence et pour passer un peu de temps tous ensemble.

Flora était expressive et sa joie s’exprimait souvent en bondissant dans les bras de Chloé. Ce qui lui valait le regard noir de Nao. Qui aurait souhaité secrètement faire la même chose mais il était beaucoup trop timide.
Vlad’ ne prêtait plus attention à ces effusions.
Il était plus détaché. C’était le plus jeune du groupe en terme de vie en communauté avec eux. Il était le dernier à les rejoindre et sa vie en tant que non-humain était encore à ses prémices si on ramenait à l’échelle des autres.

— Je vous emmène au restaurant ce soir. Soyez prêts pour 19h.
— Je peux conduire, dis ?!

C’était Flora qui bondit de joie et posa sa question qui n’en était pas vraiment une.

— Si cela te fait plaisir.
Sourit Chloé, qui lui tendit les clés de la dite voiture.

— Vous êtes beaucoup trop permissive avec Flora, vous lui cédez trop de choses… !
S’indigna Nao.

— Ah… ? Vraiment… ? Ou tu voudrais conduire à sa place, Nao ?
Demanda t-elle, songeuse.

— Non, ce n’est pas ça… elle est trop gâtée Flora, elle ne sait même pas se tenir correctement en public…
— Je ne te permets pas, oh ! Et puis je ne vais pas faire de bêtises avec la voiture de Chloé ! T’es juste jaloux !

Le ton commençait à monter et Vladislaw soupira.

— Assez.

Chloé n’eut pas à dire plus. Son ton sévère sembla arrêter le temps et les deux se calmèrent.

— Je ne vois pas d’inconvénient à autoriser Flora à conduire la voiture. Ce n’est pas du favoritisme, elle me l’a demandé, j’ai accepté. Si tu as des requêtes, Nao, ne te retiens pas, je sais que tu es plus réservé, mais il n’y a aucune raison que je refuse si c’est justifié.
Expliqua t-elle, d’une voix douce qui les apaisa.

Flora bouda un peu et Nao baissait la tête, honteux de se faire réprimander.
Mais il avait quelque chose qui lui trottait dans la tête, et cela le rongeait de ne pas pouvoir l’exprimer.
C’était le bon moment pour le demander, il fallait qu’il prenne son courage à deux mains pour le formuler.

— Dans ce cas… est-ce que je peux dormir avec vous ?

Il eut un blanc.
Vlad’ le regarda les yeux tout ronds, se demandant s’il avait perdu la tête, et d’un autre côté il savait que Flora se glissait régulièrement dans la chambre de Chloé.
Mais il gardait son ressenti pour lui, expliquant peut-être ça par son statut de femme et son statut d’aînée et de favorite.
Et Flora ne réagit pas plus.

— Eh bien, bien sûr.
Répondit Chloé, comme à son habitude.

— Si tout est réglé, et que personne n’a autre chose à ajouter… ?
Reprit-elle la parole.

Personne n’avait autre chose à dire. Alors ils disposèrent et se préparèrent pour la sortie de la soirée.
Vlad’ était encore sous le choc.
Etait-ce aussi simple ? Il fallait juste demander ?

2020.12.27

Reboot

Dans un domaine en campagne, une riche famille avait un fils unique. Ils avaient une entreprise familiale et il devait en hériter.
Cependant, le fils n’était pas du même avis.
Le manoir dans lequel ils vivaient avait une salle d’entraînement où ils enseignaient des cours d’arts martiaux de haut niveau et la famille était réputée pour leur style.
Le fils avait suivi ces cours depuis son plus jeune âge.
Approchant la vingtaine, il se rebella contre ses parents qui lui parlait de mariage et de son futur.
Il ne souhaitait pas de cet avenir. Son voeux le plus cher était de pouvoir être libre de faire ce qu’il voulait.
La discussion n’était pas très constructive et hors de lui, le père comme le fils, l’héritier décida de renoncer à son statut et s’en alla. Claquant la porte à ses parents.
Il quitta le domaine et marcha, longuement, jusqu’à arriver à une autre ville, puis une autre.
Les mains dans les poches et rien d’autre.
La mère empêcha le père de prendre une décision sous le coup de la colère, elle réussit à le raisonner.
Elle aussi n’était pas de bonne humeur mais elle essaya de temporiser.
Ils décidèrent de le laisser faire ce qu’il voulait, en espérant qu’il finisse par revenir de lui-même.
Il avait toujours été élevé avec une cuillère d’argent dans la bouche. Ils ne lui laissaient pas beaucoup de chance de survie dans le monde normal.
Un de leur employé fut envoyé pour le surveiller de loin, où il se trouvait, sans intervenir. Sauf cas de danger.

Le fils erra pendant longtemps avant d’arriver dans une ville. Il se mit à pleuvoir à grandes cordes, et il ne savait pas depuis combien de temps il marchait. Son estomac commençait à crier famine mais il l’ignora. Il était maintenant trempé et dans une ville qu’il ne connaissait pas.
Il eut le temps de réfléchir. La température ambiante ainsi que la pluie ne lui avaient pas rafraîchi les idées.
Il était encore énervé contre ses parents, et puis contre lui-même. Il se trouvait tellement idiot. Il était majeur et adulte mais il avait quitté le domaine sans rien, sans aucune préparation. Qu’allait-il faire maintenant ?
Il était trop fier pour rentrer la queue entre les jambes.
Perdu dans ses pensées, et la pluie n’aidant pas, il heurta quelqu’un.
Il n’y prêta pas plus attention, et la minute d’après, quelqu’un l’interpella et le tira vers lui.
Il était tellement distrait qu’il n’avait pas vu que le feu était rouge pour les piétons.

— Ca va pas la tête ?!
Cria la personne à côté de lui.

Elle était petite et elle n’avait pas de parapluie non plus. Trempée tout comme lui.
Il ne répondit pas, en pensant qu’elle allait le laisser tranquille et passer son chemin.
Ce fut tout le contraire.
Elle insista pour lui parler et lui demander s’il allait bien.
Agacé par ses questions, il finit par la suivre pour éviter de répondre et parce qu’il n’avait nulle part où aller.

*

Un des hommes de main était alle chez eux.
Elle avait ouvert, et il avait demandé Sephyl.
Avec stupéfaction il s’était interposé et était méfiant, la porte de leur domicile entrouverte.

— Je dois vous dire quelque chose de très important.
Avait insisté l’homme.

Il l’avait fait entrer, à contre-coeur, lui laissant une chance de s’expliquer.
3 ans à peu près, s’était écoulé depuis qu’il avait quitté sa famille, il ne pensait pas que son passé le rattraperait.
Il aurait pu l’ignorer mais son devoir de fils le rappelait. L’homme lui avait dit qu’il était possible qu’il soit également en danger et que la meilleure manière de protéger la femme qu’il aimait, était de reprendre en main la situation.
Ses parents étaient dans une situation complexe et il devait rentrer pour réclamer son statut d’héritier.
Il hésita mais sa compagne le poussa à y aller.
Elle savait à quel point c’était important et elle ne voulait pas qu’il regrette.

Leur domaine avait été attaqué et des combattants professionnels cherchaient à faire tomber leur famille.
Ils s’étaient infiltrés.
Il arriva trop tard, son père était au sol, sans signe de vie, sa mère était à ses côtés et respirait encore mais faiblement.
Elle avait réussi à se venger mais elle avait prit un coup mortel.
Il dut rester au domaine pour s’occuper des affaires et épargna à sa compagne le risque de venir vivre avec lui. C’était trop dangereux, et il ne voulait pas lui imposer la vie qu’il avait eut dans cet environnement.
Il décida de subvenir à ses besoins pendant qu’elle élèverait leurs enfants, la protégeant de loin.
Il voulait les protéger de son influence.

Les enfants grandirent sans connaître leur père.
Ils vivèrent dans une petite maison de campagne, dans une autre ville.

*

Un jour, des hommes prirent sur leur domaine un enfant en train de se cacher, épiant les entraînements des élèves. Curieux, il l’interrogea.
C’était un orphelin qui s’était échappé de son établissement pour venir suivre les cours, en clandestin. Il avait les cheveux longs, la peau mate, les vêtements abîmés et sales.
Il était arrogant, il n’avait pas peur des représailles.

— Que fais-tu ici ?
— J’ai entendu parler de votre cursus.
— Tu n’as ni l’âge, ni les moyens de le suivre. D’où viens-tu ?
— De… l’orphelinat.

Cela le laissa perplexe. L’orphelinat le plus proche se trouvait à des kilomètres.

— Ils sont au courant de ta présence ici… ?
— Non… j’ai fait le mur.
— Tu ferais mieux d’y retourner, et rapidement.
— Plutôt mourir.
— Fais attention à ce que tu dis. Je peux exaucer ton souhait.
— Faites donc.
— Pourquoi risquer ta vie pour juste venir assister à nos cours ?
— Je voulais voir de mes propres yeux, et ils sont pas si difficiles.

— Ah bon ? Qu’est ce qui te fait dire ça ?
Demanda t-il, amusé.

Il fit une démonstration, imitation médiocre de ce qu’il avait pu entrevoir avant de se faire attraper.
Sephyl voyait un certain potentiel dans cet enfant.
Pris de pitié et parce qu’il voulait lui donner cette chance, comme lorsqu’on lui avait tendu la main.
Il mit cet enfant arroguant au défi.

— Quel âge as-tu ?
— 11 ans.
— Comment t’appelles-tu ?
— Chris.
— Je peux te jeter dehors comme un moins que rien. Ou bien, te laisser une opportunité de me prouver que mes cours sont accessibles même pour un gamin de 10 ans. Une semaine.
— Quoi ?
— Je te laisse une semaine ici. Tu suivras les cours du premier cycle. À la fin de la semaine, si tu réussis à battre les élèves de ton cycle, j’admettrai que tu as raison concernant la difficulté de mes cours.
— C’est tout ?
— Sois reconnaissant que je te donne accès à cette formation. Il y en a qui paieraient cher pour cela. D’abord, tu vas te laver et changer de tenue.

Il appela un de ses hommes pour l’emmener et il donna des instructions.
Il permit à Chris de loger dans une petite chambre, on lui donna une tenue trop grande pour les cours, qu’il porta à longueur de journée parce qu’il n’avait rien d’autre à part ses vêtements abîmés et sales.
Il mangeait à sa faim avec les autres élèves.
On le regarda bizarrement. Il était petit et chétif, comparé à ses camarades aînés. Ils avaient 15 ans minimum. Mais Chris avait quelque chose dans le regard. Il se fit remarquer dès les premiers jours, il était déterminé et n’avait pas peur du ridicule, n’hésitant pas à en faire plus, il s’entraînait dans sa chambre et en faisant des exercices autour du domaine.

La semaine terminée, il réussit à tenir tête et même battre certains de ses camarades lors du test imposé. Mais il perdit face aux meilleurs du cours.
Sephyl regarda les combats avec intérêt.
Alors que Chris était encore émotionnel vis à vis de sa défaite, attendant qu’on le jette dehors.
Sephyl le prit à part pour discuter.
Il reconnut qu’il avait un certain talent.
Il avait également fait des recherches sur lui, sur son dossier à l’orphelinat, et comme il avait réussi à attirer son attention, il décida de s’occuper de l’administratif pour que Chris ne dépende plus de l’orphelinat.
Il était libre. Sephyl se désigna comme tuteur légal.
Comblant le vide de ne pouvoir voir et élever ses propres enfants, il prit Chris sous son aile.
Contrairement à lui, Chris adorait la discipline du combat. Il était heureux d’apprendre et de s’améliorer.

Chris n’en revenait pas.
Il pensait avoir lamentablement échoué, il avait été trop confiant, trop prétentieux. Une semaine était trop court et il ne pouvait pas rattraper le retard de ses camarades en ce laps de temps. Il pensait que cela s’arrêtait pour lui. Ses espoirs.
Il n’avait pas pensé aux conséquences, il allait devoir retourner à l’orphelinat, ou aller ailleurs, parce qu’il n’avait aucune envie de retourner là-bas. Il aurait peut-être même préféré qu’on le tue sur place, pour abréger ses souffrances. Que tout s’arrête ici et maintenant.
Lorsque Sephyl lui annonça qu’il était libre, lui laissant le choix de rester apprendre ou s’en aller, il dut lui faire répéter, de peur de n’avoir pas compris.
Il n’hésita pas une seconde. C’était son rêve de rester se former. Il ne montra pas sa joie intérieure mais Sephyl le voyait.

Il était considéré comme un élève à part entière mais avec un statut spécial. Il était différent, il était plus jeune mais il était doué.
Il suivit le premier cycle et finit parmi les premiers de la promotion. Sephyl était fier de lui, impressionné. C’était le plus jeune à terminer ce cycle.
Il lui demanda ce qu’il pensait pouvoir améliorer dans les enseignements et Chris aida grandement avec ses retours.

Sephyl devient parent vers 23 ans.
Alicia en a 24.
Il adopte Chris vers ses 11 ans. Sephyl a 29 ans, ses enfants ont 6 ans.
Chris a 5 ans d’écart avec Alexandra et Alexandre.
Alexandra arrive vers l’âge de 14-15 ans. Elle termine le collège.
Chris en a 20.

*

Chris décida de rester auprès de Sephyl.
Bien qu’il lui ait dit qu’il était libre de partir, à partir de ses 18 ans, il avait assez de compétence pour postuler dans une autre école ou bien se faire embaucher comme apprenti. Il avait le potentiel d’être garde du corps même s’il était encore jeune.
Sephyl le garda sous son aile, le choix de Chris.
Il en fit son homme de main favori, parce qu’il pouvait compter sur lui et il avait confiance.

Chris le considérait comme la figure paternelle qu’il n’avait jamais eu.
Comment le remercier de lui avoir offert cette vie stable, de lui avoir offert la possibilité de poursuivre son rêve d’enfant, lui qui n’était qu’un simple orphelin.

*

Alexandra avait des difficultés à gérer ses émotions.
Lorsqu’elle était en colère, elle devenait violente et ses crises de colère devinrent plus compliquées à gérer avec l’adolescence.
Les années au collège étaient formatrices, les enfants n’étaient pas tendres et elle jouait une figure de bagarreuse, les études ne l’intéressaient pas. Ce qu’elle voulait, c’était de l’action.
Son frère était son contraire. Il préférait étudier et il excellait. Il préférait éviter les conflits et ignorait les mots blessants à son égard.
Alexandra ne pouvait pas laisser passer cela, elle frappait les élèves qui osaient se moquer d’eux.
Elle se fit convoquer à plusieurs reprises dans le bureau du directeur et sa mère dut se fondre en excuses. Elle ne comprenait pas et avait du mal à la gérer.
Elle ne savait pas comment s’excuser de son comportement, c’était plus fort qu’elle. Même si elle était désolée de causer des soucis à sa mère, elle recommençait.

Sa mère essaya de la raisonner et lui expliquer qu’elle devait au moins essayer d’obtenir le diplôme du collège.
Elle, n’avait pas eu la chance de finir ses études, elle leur avait raconté comment elle avait du travailler à l’époque.

2022.02.28

Photoshoot

Elle avait une séance photo avec son cousin Célestin et sa soeur Hélène.
Comme d’habitude, Hélène l’accompagnait avec des nouvelles tenues qu’elle avait crées et elle adorait mettre en scène Aurore sous les projecteurs et l’oeil avisé de Célestin.
Il aimait ces séances qui le changeaient de son quotidien de photographe.
Aurore était au naturel, Hélène tenait à ce qu’il n’y ait pas besoin de maquillage, ainsi ils n’avaient pas besoin de faire appel à une tierce personne pour s’occuper de ce point.
La séance était menée avec professionalisme, pourtant une ambiance décontractée régnait.
Ils profitaient des lieux qui étaient libres à certains moments de la semaine.

Aurore suivait les directives de Hélène et de Céslestin.
Sans broncher, elle arrivait à rester concentrée et cherchait à satisfaire leurs exigences.
Ses longs cils blonds, ses yeux vairons qui ressortaient sur sa peau pâle et la blondeur de ses cheveux longs.
Les boucles accentuaient son air de poupée angélique.

Célestin avait l’habitude de faire des photos de mode, mais sa cousine dégageait quelque chose, couplé avec les vêtements originaux et de qualité que Hélène concevait, c’était un mélange très particulier et spécial.

Après la séance, il les invitait à manger quelque chose chez lui, où il proposait un goûter avec du thé.
Son appartement était plutôt bien situé, petit mais fonctionnel et très bien agencé pour qu’il puisse avoir accès à ses affaires sans que ce soit le bazar à longueur de temps.
Elles s’étaient posées sur son lit, tandis qu’il était assis sur son tapis, l’ordinateur posé sur une petite table, il développait en modifiant les différentes options que lui proposaient son logiciel de retouches photos.
Ils en profitaient pour discuter, de tout et de rien, des dernières nouvelles.

— Ca faisait super longtemps depuis notre dernier shooting, qu’est-ce que vous devenez les filles ?
Demanda Célestin, en continuant à traiter les photos.

— Et bien… il s’est passé pas mal de choses… Aurore fréquente quelqu’un. Par exemple.
— Hélène aussi !
— Et bien, et on me les présente pas ?
— C’est que c’est assez récent…
— Moi aussi… !

Répondirent-elles, les joues un peu rosées.

— C’est mignon, vous êtes amoureuses…
— Et toi, Céles’ ?
— Non… je n’ai personne.

2021.12.26

Songe

Aurore avait réussi à dévier l’attaque de justesse, mais Ten’ avait été projeté contre un tronc d’arbre et avait été sonné.
Elle était effrayée mais essayait de ne pas paniquer, malgré tout son corps qui tremblait.
La présence ennemie se rapprochait d’elle, dangereusement et elle, elle reculait, petit à petit, essayant de garder une distance.
Elle avait envoyé un message pour prévenir de sa position mais elle ne savait plus à qui exactement et elle n’avait pas le temps de vérifier.
Elle essayait d’invoquer des barrières de racines et de terre pour se protéger mais l’ennemi les balayait d’un seul geste.
Elle se retrouva vite acculée, et en reculant en marche arrière, sans pouvoir regarder où elle mettait les pieds, elle finit par trébucher et tomber, évitant une attaque lui étant destinée.
Elle entendit l’ennemi claquer de la langue.
Elle se releva aussi vite qu’elle le put pour courir et s’enfuir.

Vladislaw arriva au bon moment, il attrapa Aurore et l’emporta en courrant.
Il n’eut pas le temps de lui expliquer.
Chloé apparut juste après et s’interposa.

—Mets la en sécurité, je m’occupe du reste.

Vladislaw acquiesça sans dire un mot.
Il l’éloigna et lorsqu’ils furent au calme, il la déposa et lui demanda si elle n’avait rien.
Le coeur encore battant, elle reprenait sa respiration.

— Mais Chloé-
— Ne t’inquiète pas pour elle, il n’est pas de taille contre elle.
— Je… ma mère… elle…
— Respire, calme toi. Tu peux faire confiance à Chloé. Est-ce que ta famille est au courant ?

Aurore chercha son téléphone dans sa poche pour vérifier, et elle appela son père dans la foulée.
Il entendit dans sa voix la panique et il resta calme pour ne pas aggraver la situation.
Il eut Vladislaw à l »appareil qui lui expliqua ce qu’il en était et il raccrocha.
Aurore sauta dans les bras de son sauveur, encore tremblotante.

— Merci… merci d’être venu…
— Ce n’est rien… je ne suis pas d’une grande aide, mais Chloé elle, oui.
— Comment as-tu su… ?
— C’est Chloé. Elle a compris ce que c’était lorsque je lui en ai parlé et elle m’a dit de la suivre aussitôt.

*

Gabriel fit au plus vite pour arriver sur les lieux.
Chloé avait déjà réduit en poussière l’ennemi et s’était approchée d’Alexandra pour vérifier son état.
Gabriel paniqua.
Chloé le rassura.

— Elle respire encore, c’est faible mais elle n’est plus en danger. Par contre, il faut la mettre sous perfusion, elle a été très affaiblie.
— Merci… je ne sais comment vous remercier…

Gabriel la porta et l’emmena en soin.
Le médecin les conseilla de l’ammener dans l’hopital de son frère, pour qu’il puisse faire des examens plus poussés sur son état humain.

*

Elle allait mieux, elle avait retrouvé le sourire.
Après avoir rassuré toute la famille, son frère vint la voir pour lui parler de ses résultats médicaux.
Il attendit de pouvoir lui en parler en privé, et il ne semblait pas spécialement joyeux.

— Qu’il y a t-il, Alexandre ? Tu en fais une de ces têtes !
Se moqua t-elle, gentiment.

Il s’asseya.

— … Tu es en train de reprendre des forces grâce à la perfusion. Tu manges correctement… tu dors bien ?
Dit-il en tournant les pages de son dossier.

— Hm… oui ? Tu as autre chose à me dire… ? Ne tourne pas autour du pot avec moi…
— Je sais… mais… on a trouvé des cellules cancérigènes dans ta prise de sang… tu…
— C’est mauvais à ce point… ?
— Oui… je…
— Je n’en ai plus pour très longtemps… ?
— Je ne sais pas… ça peut-être des semaines, des mois… peut-être encore un an ?
— Tu sais ce que je pense de l’acharnement médical. C’est trop tard pour soigner, n’est-ce pas ?
— Oui… je suis tellement désolé…

— Tu n’y es pour rien. Et je suis pas encore morte.
Essaya t-elle d’adoucir l’atmosphère.

— C’est vrai…
— Je ne me sens pas mourante, pas encore.
— Chrystal m’a dit que ta partie magique doit compenser, mais la partie humaine risque de lâcher d’un moment à un autre…

— Je… je dois en parler à Gabriel et Chris…
Elle baissa les yeux, songeuse, grave.

Son frère la laissa seule., pour réfléchir.

— Je suis là, si tu as besoin de quoi que ce soit.
Dit-il, avant de partir et refermer la porte derrière lui.

Il se sentait impuissant, il l’était.
Elle, sa soeur jumelle, allait mourir, et il ne pouvait rien y faire. Il avait déjà annoncé ce genre de nouvelle lugubre à des patients, mais cette fois-ci, cela le touchait personnellement.
Il n’était pas très démonstratif mais il tenait à sa soeur.
Chrystal voyait sa peine et elle le consola de son mieux.

*

Elle regarda ses mains, ne sachant pas quoi penser, quoi dire. Elle allait mourir.
Elle rit nerveusement.
Elle avait échappe à la mort tant de fois, mais cette fois-ci, c’était une mort lente, presque douce, qui l’attendait.
Elle essayait de voir le côté positif : elle avait le temps de dire aurevoir, de préparer son départ.
Un départ vers un long voyage, seule.
Elle réfléchissait à la manière dont elle allait annoncer cela à ses époux. Comment allaient-ils réagir ?
Quelle question : mal, certainement.
Une chose était sure, elle ne voulait pas être mourante, ni qu’elle se dégrade peu à peu, perdant ses fonctions vitales minimales. Elle ne voulait imposer cela à personne. Elle allait devoir en discuter sérieusement avec eux.
Sans parler de l’annoncer à ses enfants.
Elle ne pouvait pas leur cacher.

*

Gabriel et Chris vinrent la voir à l’hopital.
C’était assez inhabituel qu’elle demande à les voir tous les deux, ils auraient fini par passer la voir chacun à leur tour à cause de leur emploi du temps, mais qu’elle demande explicitement de les voir ensemble était étrange.
Lorsqu’elle leur annonça la nouvelle, ils restèrent sans voix. Sans réaction.

À l’intérieur de lui, quelque chose s’était brisé.
Il aurait voulu croire qu’elle leur faisait une très mauvaise blague mais elle n’avait pas l’expression qui allait avec.
Gabriel l’approcha le premier et s’assit dans la chaise qui était à côté d’elle, prenant sa main dans la sienne.
Il n’avait pas les mots.
Plusieurs questions se bousculaient dans sa tête. Combien de temps leur restait-il. Y avait-il des solutions ?
Chris s’assit à côté d’elle et prit son autre main et ils restèrent silencieux un moment, à la serrer dans leurs bras, la soutenir sans un mot.

Elle avait déjà consulté Chloé qui lui avait exposé les risques et les inconvénients si jamais elle tentait une transformation. C’était trop d’incertitudes et Alexandra ne voulait pas prendre ce risque.
Elle ne voulait pas non plus vivre une éternité. Elle imaginait la douleur de voir ses enfants mourir avant elle et cela lui était insupportable. Elle préférait accepter son sort.
Son corps allait lâcher, comme une sorte de bombe à retardements.

*

Le jour J.

Cela faisait des semaines qu’elle avait quitté l’hopital.
De premiers abords, elle avait l’air totalement en bonne santé mais elle savait que son organisme ne tenait plus à grand chose. Par chance, son organisme magique compensait mais elle sentait ses aptitudes diminuer drastiquement et elle savait que la fin devait être proche. Elle voulait partir en pleine conscience.
Ses enfants étaient prévenus et même s’ils ne voulaient pas que cela se termine ainsi, c’était son choix et ils devaient la respecter.

Elle avait préparé la seringue contenant la dose mortelle. Elle savait que cela serait une fin douce, elle s’endormirait pour toujours.
Gabriel l’attendait et Chris n’était pas loin.
Ils l’accompagnèrent en pleine forêt, au calme, loin de tout.
Une dernière balade, rien que tous les trois.

Ils s’arrêtèrent pour faire une pause, assis sur le tronc d’un arbre qui était tombé, elle sortit la seringue qu’elle positionna sur son bras.
La main de Chris et de Gabriel l’aidèrent à la maintenir et effectuer la pression nécessaire.
Tout ce qu’elle avait à dire avait déjà été dit.
Il ne fallut que quelques minutes avant qu’elle ne ferme les yeux et qu’elle tombe.
Les bras des hommes l’empêchèrent de basculer, et ils la posèrent delicatement dans les bras de Gabriel.
Chris se tenant à ses genoux, serrant sa main dans la sienne.
Elle semblait simplement s’être endormie, un sourire léger sur ses lèvres, en train de faire un doux songe, la vie avait quitté son corps.

Ils rentrèrent et Gabriel l’allongea sur le lit de leur chambre.
Elle avait choisi de ne pas faire des adieux larmoyants avec ses enfants, que ses derniers instants soient avec Gabriel et Chris.
Cela ne les empêcha pas de pleurer après.
Ils étaient réunis autour d’elle, l’embrassant une dernière fois sur le front.
Elle était encore tiède, ses joues encore roses.

*

Chris décida de retourner au domaine de Sephyl.
Maintenant qu’Alexandra n’était plus là, que ses enfants étaient grands et autonomes, vivant leur propre vie, il n’avait aucune bonne raison de rester.
Cela lui était également douloureux de ressentir le vide laissé par la mort d’Alexandra. Il avait besoin de temps seul. À faire le deuil.
Puis, il ne se voyait pas dormir avec Gabriel, sans Alexandra.

Hélène était très émotive et avait du mal à s’en remettre. Elle tenta de se plonger dans son travail et ses créations mais elle voyait sa mère dans ses projets.
Alain était plus discret mais il était également affecté. Il voyait à quel point leur père était triste, comment sa soeur extériorisait, mais lui, il gardait tout en lui.

Céan ne voulait pas accepter sa mort.
Mathilde, sa compagne, fit tout pour lui remonter le moral et l’aider à faire le deuil. Elle tenta de le réconforter avec les bons mots et elle fut d’un grand soutien.
Il décica de l’épouser peu de temps après, et ils eurent une fille qu’ils appelèrent Sylvia.

Aurore était également dans le déni, elle était en colère. Elle aurait préféré que sa mère accepte de se transformer pour rester en vie. Vladislaw lui expliqua à de nombreuses reprises à quel point c’était risqué et que cela était plus une malédiction qu’autre chose.
Elle n’arrivait pas à oublier sa mère, et elle vit son père seul et elle décida de l’aider en acceptant sa formation et en remplaçant en quelque sorte le vide de sa mère, en s’occupant des affaires avec son père. Cela lui permettait également de passer du temps avec lui.

Gabriel était méconnaissable. Il était atteint d’une profonde tristesse et sa santé se dégrada subitement.
Aurore prit soin de lui et dut appeler sa soeur Hélène pour venir l’aider à lui remonter le moral et le secouer pour le réveiller.
Elles en profitèrent pour faire un tri dans les vêtements de leur mère et elles en récupérèrent certains pour elles.
Alain était allé discuter avec Céan.

— Elle me manque… je sais que je n’étais pas très présent ni proche… mais sa présence… sa maniere de prendre de nos nouvelles… de recadrer Gabriel… qui sera capable de gérer les humeurs de Gabriel maintenant qu’elle n’est plus là… ?
— Oh, ne t’inquiète pas pour ça… Aurore a reprit un peu les rennes depuis… elle a tellement grandi… et tu sais… moi aussi elle me manque… on doit avancer. Elle nous surveille, je suis certain, et elle n’aurait pas voulu qu’on se morfonde sur son sort.
— Je le sais… d’ailleurs, tu vas être papa, j’ai eu la nouvelle. Félicitations.
— Merci… oui, Mathilde est enceinte… je…
— Tout va bien se passer, je t’imagine très bien totalement gâteux.
— Oh… t’es pas le seul à me dire ça…

2021.12.16

Table [R-18]

Il avait des muscles saillants, bien marqués par ces entraînements intensifs pour garder une certaine forme. Sa carrure était plus qu’imposante lorsqu’elle était à ses côtés
Il pouvait l’envelopper toute entière, il aurait pu lui briser les os rien qu’à la puissance de ses bras.

Elle n’était pas tant plus faible. Elle était elle-même entraînée et malgré sa taille plus petite et ses épaules moins larges que lui, elle arrivait à lui tenir tête.
Elle devait juste ruser pour ne pas se faire attraper parce qu’elle savait qu’en terme de force brute, elle était perdante.

Aujourd’hui, ils étaient seuls dans le bureau.
Elle avait fermé la porte derrière elle, et elle le regardait avec malice.
Elle devinait ses muscles à travers ses vêtements
Les manches longues de sa chemise étaient retroussés au niveau de ses avant-bras, et ses yeux étaient rivés sur ses mains qu’elle voulait voir sur elle. Sentir sa poigne sur son corps.

Il ne se douta de rien lorsqu’elle l’enlaça par derrière, il se retourna pour lui faire face et elle lui caressa la peau, avec toute la sensualité qu’elle pouvait mettre dans ces gestes.
Baladant ses mains sur son épiderme, sur le dos de ses mains, ses poignets, son avant-bras et ses bras, pour les remonter jusqu’à son torse, là où elle s’arrêta pour défaire le noeud du lacet de son col de chemise.
Il lui attrapa les poignets.

— Je peux savoir ce que tu fais… ?
Demanda t-il, amusé.

— Rien… du… tout.
Sourit-elle, en essayant de continuer son plan.

— Si tu le dis… on va continuer à rien faire, alors…
Prit dans son jeu, il la souleva pour l’asseoir sur la table du bureau.

Elle en avait vu d’autres, cette table.
Ses cheveux bruns bouclés qui tombaient en cascade sur ses épaules, son sourire malicieux.

Il l’observait attentivement, ses mains immenses passèrent derrière son cou, sur sa nuque pour l’envelopper et la maintenir pendant qu’il approchait son visage, pour l’embrasser, la dévorer lentement.
L’autre main avait saisit sa hanche, massant avec ferveur ses côtes et la zone juste en dessous de sa poitrine. Elle était si petite à côté de lui mais il devinait ses muscles sous ses vêtements.
Il la souleva pour la basculer sur son épaule.

— On risque de faire trop de bruit ici, je t’emmène.
Dit-il, tout en la transportant comme une proie, alors que c’était elle qui avait lancé la chasse à son égard.

La chambre se trouvait juste à côté, il prit soin de refermer la porte derrière lui.
Il la déposa aussi délicatement qu’il put, sur le lit, puis la surplomba de sa présence. Son ombre projetée sur elle, elle ne se laissa pas intimider.
Elle soutenait son regard et elle avait qu’une hâte, qu’il choisisse à quelle sauce il souhaiterait la déguster.

Ses cheveux blonds parsemés poivre et sel, retombant en pagaille devant son visage, ses cils clairs et son regard d’un océan abyssal, il la regardait, savourant l’instant de calme avant qu’il ne décide de se jeter sur ce qui aurait pu être sa victime.

Ce fut elle qui attaqua la première.
Elle glissa ses doigts dans les mèches claires et les agrippa pour les tirer doucement mais fermement. Loin de là était son idée de lui faire mal.
Elle faisait ça pour le provoquer mais surtout parce qu’elle savait qu’il appréciait cette sensation.

Il se laissa faire, fermant les yeux pour profiter pleinement, comme apprivoisé par ce simple geste, il se rapprocha d’elle pour qu’elle puisse continuer de le chouchouter.
Puis, assez près d’elle, il changea de direction pour plonger son visage dans le creux de sa nuque et l’embrasser précautionneusement jusqu’à son épaule, et de ses mains, il souleva son haut pour pouvoir glisser ses doigts sur son abdomen.

*

Elle était enveloppée dans les draps et l’oreiller moelleux dans lequel sa tête disparaissait à moitié.
Il était à ses côtés, sa carrure imposante semblait lui servir de rempart pour la protéger.
Tourné sur le côté, il la contemplait, la serrait dans ses bras musclés.
Elle souriait, d’une plénitude et d’un bonheur apparent, elle se sentait bien avec lui, elle se sentait en sécurité.
Elle se tourna pour lui faire face.
Les draps, la couverture, les oreillers et les rideaux du baldaquin formaient un cocon dans lequel ils avaient un semblant d’intimité.

Il n’eut qu’à se pencher pour poser ses lèvres sur les siennes et l’embrasser avec toute sa passion.
Sa main rugueuse et imposante caressa les formes de son corps, en commençant par ses hanches et en descendant plus bas.

Elle l’empoigna par son bras, gentiment mais avec une certaine force.
Elle rougit et sa respiration s’arrêta un instant.
Il venait de passer ses doigts entre ses cuisses pour la caresser tendrement avant de pénétrer un doigt épais dans l’antre de son intimité.
Elle en avait le souffle coupé, elle savourait ce moment et le plaisir qu’il lui procurait lui faisait perdre ses moyens.
Haletante, elle s’agrippait à lui, lui suppliant de ne pas arrêter, les joues rouges et les oreilles brûlantes, elle était contre son torse musclé, au bord de l’extase.

2022.02.26