Il n’était pas rare que les gens les regardent de haut. Lui et sa soeur.
Malgré le fait que leur mère les ait toujours traités de la même manière que Cean et Aurore.
Une partie, avait du mal à comprendre leur famille et qu’Alexandra ait deux hommes.
Une autre, était jaloux des jumeaux.
Ils étaient prédisposés au combat avec leur père qui était l’un des meilleurs éléments de la garde, en plus d’être un professeur respecté. De plus, depuis leur plus jeune âge, ils s’amusaient à se comparer avec Cean et leur trio les avait fait beaucoup progresser.
Cela attisait une certaine jalousie, qu’ils puissent être chouchoutés ou même pistonnés à cause de leur lien avec la famille.
Quand ils étaient petits, Cean s’était déjà interposé à plusieurs reprises pour les défendre des brimades qu’ils pouvaient subir à cause de cette incompréhension et de la jalousie.
Hélène avait un niveau similaire à Alain.
Petits, ces problèmes les avaient rapprochés.
Ils n’osaient pas en parler à leur mère, de peur de la décevoir et de la déranger, et encore moins à leur père, qui était connu et respecté, de peur d’avoir un traitement de faveur et que leur situation empire.
Ils s’étaient serrés les coudes. Cean ne pouvait être là tout le temps, et ils lui avaient fait promettre de ne rien dire aux parents. Ils insistaient que c’était leur problème et que cafter ne ferait que donner raison à leurs agresseurs. Ne souhaitant pas que cela se retourne contre leurs parents.
Bien que jumeaux, Hélène était l’aînée, de quelques minutes seulement.
Elle était plus expressive et émotive que son frère, qui était plus silencieux et observateur.
Cela ne l’empêchait pas d’être protecteur et catalyseur lorsqu’elle s’emportait.
Ils apprirent à ignorer et se défendre.
Tant que les attaques n’étaient dirigés que sur eux.
Ils finirent par s’imposer et les brimades cessèrent à leur égard, ou du moins en majeure partie.
Alain était une cible de choix car il était plus réservé que sa soeur.
— Ta mère c’est qu’une traînée…
Murmura son adversaire, frustré d’avoir perdu ce petit échauffement.
— Pardon ?
Demanda t-il, pas certain d’avoir bien entendu.
— Fils de traînée.
Dit-il de manière plus distincte, le sourire en coin.
Croyant le provoquer. Il était essouflé et essayait de reprendre ses forces.
Alain perdit son sang froid.
Il courut vers lui et l’empoigna par le col.
— Retire ce que tu viens de dire.
— Je ne fais que dire la vérité. C’est une traînée ta mère, non ? Tu vas me faire quoi ? Me frapper ?
Dit-il, en faisant son malin.
— Ma mère n’est pas une traînée. Insulte-moi autant que tu veux, mais elle n’a rien à faire là dedans.
Sa voix était posée, mais ses gestes étaient violents, il avait soulevé par le col le garçon en face de lui, et il l’avait jeté sur le sol. L’avant bras lui bloquait le cou sans atteindre à sa vie.
— Retire ce que tu viens de dire.
Répéta Alain.
Il réfléchissait, il ne voulait pas prononcer des excuses à ce garçon qu’il ne respectait pas et jouait au plus fort.
Autour d’eux, les autres élèves s’étaient regroupés et se demandaient ce qu’il se passait.
Hélène vit la scène et s’inquiéta. Elle avait rarement l’occasion de voir son frère dans cet état.
Elle alla chercher son père, qui était un peu plus loin et finit par remarquer l’agitation inhabituelle.
— Papa… il faut que tu viennes, Alain…
Hélène avait les larmes aux yeux, émotive comme elle était.
Son père accourut et écarta les autres élèves.
Il attrapa son fils et l’écarta de son camarade qui se massa le cou.
— C’est un malade…
Lâcha t-il.
— Ça va pas, non ?! Qu’est ce que vous fichiez ?
Cria Chris. Sa voix était dure et grave.
Alain reprit peu à peu ses esprits et sa soeur vint à ses côtés. La voir en larmes le ramena à la réalité.
Que venait-il de faire ? Durant toutes ces années, il avait encaissé ces brimades, mais aujourd’hui c’était la goutte de trop. On ne parlait pas ainsi de sa mère qu’il aimait de tout son coeur. Elle n’avait rien fait de mal.
Ils étaient juste un schéma familial différent.
Pourquoi les gens étaient si méchants envers les choses qu’ils ne comprenaient pas ?
Son père était en colère, il ne tolérait pas que les élèves se battent entre eux de cette manière durant ses cours.
— Vous êtes tous les deux suspendus.
— Mais c’est lui qui a commencé !
Se défendit le garçon à terre, rejetant la faute sur Alain.
— Je ne veux rien savoir. TOUS LES DEUX. Vous irez réfléchir à votre comportement pendant une semaine. Je convoquerai vos parents, ça va aussi pour toi Alain. Circulez, il n’y a rien à voir.
S’adressa t-il finalement aux autres élèves.
— Que s’est il passé… ?
Demanda Hélène, près de son frère. Elle essuya ses larmes comme elle put.
— … Il a dit que maman était une traînée… j’ai pas réussi à garder mon calme… Chuchota t-il, pour que personne d’autre ne l’entende.
Il accepta sa punition plutôt bien, il savait qu’il avait fait une erreur en s’emportant.
Il rassura sa soeur que ça irait bien pour lui, et s’en alla.
— Ton frère est taré ! Vous êtes vraiment une famille de dégénérés…
Lanca l’autre en se relevant et s’en allant.
Elle commença à voir rouge mais elle avait appris de son frère et essaya de se calmer en ignorant les paroles de son camarade.
*
Après la journée de travail et de cours.
Chris rentra dans ses quartiers et voulut avoir une discussion avec son fils qui était dans le salon.
Il se crispa à la vue de son père mais il ne bougea pas. Il savait qu’ils allaient s’expliquer.
Sa soeur qui était dans sa chambre, entendit son père rentrer et vint retrouver son frère pour le défendre.
Il posa ses affaires et se mit à l’aise avant de s’adresser à Alain, en soupirant.
— Ne sois pas aussi tendu, viens me voir, on doit discuter.
Dit-il en s’asseyant à la table.
Alain se leva avec crainte et s’asseya en face de son père.
Il n’avait pourtant rien à craindre, il avait rarement levé sa main sur lui ou sur sa soeur. Mais le voir en colère cet après-midi n’était pas rassurant.
— Je sais que ça ne te ressemble pas de te battre comme ça avec un camarade. Est-ce que tu peux m’expliquer… ?
Sa voix était posée. Douce.
— Hélène, cela ne te concerne pas…
— … Si, ça me concerne aussi…
— Arrête Hélène.
Coupa Alain.
— Je veux en parler…
Alain se leva et fusilla sa soeur du regard.
La porte d’entrée s’ouvrit et Alexandra entra.
— … Je peux savoir ce qu’il se passe ici… ?
Demanda t-elle en entendant les éclats de voix.
Hélène et Alain étaient debouts en train de se regarder et Chris assit, regardait la scène.
Elle enleva ses chaussures et embrassa sa fille qui enlaça sa mère.
— J’ai entendu dire que Alain était suspendu.. j’imagine que vous êtes en pleine discussion… ?
— Helene voulait ajouter quelque chose.
Dit Chris.
— On va attendre la fin de votre conversation, d’accord Hélène ?
Dit Alexandra.
Elles s’asseyèrent sur le canapé et écoutèrent en silence.
— Reprenons.
Dit Chris en invitant Alain à s’expliquer.
— … Il a insulté maman.
Avoua Alain.
— D’accord…. mais pourquoi ?
— J’en sais rien ! Parce qu’il ne m’aime pas et qu’il voulait m’atteindre, certainement… ils passent leur temps à se chercher et à se prouver qui est le plus fort.
Alain voulait finir cet entretien le plus vite possible.
— Je vois… je comprends ta réaction mais la violence ne resoud pas… tout.
— Je sais, papa… je suis désolé. Vraiment. J’aurais pas dû répondre à sa provocation…
— Il a dit qu’on était une famille de dégénérés, aussi…
Ajouta Hélène, du canapé.
— D’accord…
Ponctua Chris, en levant les sourcils. Cernant le genre d’individu.
Alexandra sourit en caressant la chevelure noire et bouclée de sa fille.
— Vous savez, les enfants. Peu importe ce que les gens peuvent penser de nous. L’important, c’est ce que vous, vous pensez. Les insultes ne m’atteignent plus, tant que les personnes qui me sont chères ne pensent pas mal de moi. Est-ce que vous comprenez… ?
Expliqua t-elle.
— Merci Alain, d’avoir pris ma défense. Comme disait papa, parfois ça ne vaut pas la peine de donner du crédit à ce genre d’attaques.
— En tant que professeur, je ne peux pas te féliciter pour ton comportement… mais en tant que père, je suis fier que tu veuilles protéger tes valeurs, et surtout qu’on ne parle pas mal de maman…
Chris esquissa un sourire.
Il frotta la chevelure de son fils.
— Par contre… La convocation, c’est demain. Gabriel nous recevra… J’espère que personne ne s’emportera lors des explications avec l’autre famille. Je m’adresse à tous les deux. Chris et Alain.
Ajouta Alexandra
— Gabriel est au courant… ?
Demanda Hélène qui était lovée dans les bras de sa mère.
— Bien sûr. Il est au courant de tout.
Sourit Alexandra.
Alain se leva pour se lover également dans les bras de sa mère.
— Mes deux magnifiques moutons noirs.
Dit-elle, le rire dans sa voix.
Chris se leva également, et se dirigea vers la cuisine pour préparer quelque chose pour le dîner.
*
Dans le bureau de Gabriel.
L’élève et ses parents étaient assis en face, ainsi que sa femme, Chris et Alain.
Alexandra était sereine, ce n’était qu’une formalité.
Son fils était sanctionné et cela était normal.
Chris et Alain étaient un peu plus tendus.
De l’autre côté. L’élève ne tenait plus en place.
Les parents étaient intimidés.
Alexandra les avait rassurés avant d’entrer, qu’elle n’aurait pas de traitement de faveur et qu’ils n’avaient rien à craindre. Avec son tact naturel et son contact facile avec les gens.
— Bonjour à tous. Nous sommes réunis ici… pour parler de la suspension de ces deux élèves. Alain et Ulysse. Ainsi que de leur comportement. Est-ce que quelqu’un désire s’exprimer en premier ?
— Je n’ai rien fait !
S’exclama Ulysse.
Les parents étaient maintenant gênés et essayaient de faire taire leur progéniture.
— Très bien. Et Alain ?
Demanda Gabriel. Un peu interloqué par la réaction de l’élève.
— Je m’excuse de m’être laissé emporté par mes émotions et d’avoir usé de la violence contre mon camarade. Cependant, j’exige des excuses de mon caramade, d’avoir insulté ma mère.
Dit-il de manière distincte. Il avait réfléchi à ses paroles au préalable.
Gabriel se tourna vers l’autre parti.
Les parents se décomposèrent.
— Tu as insulté sa mère ?
Demanda sa propre mère à voix basse.
Alexandra resta stoïque, le regard droit devant elle, regardant Gabriel, sans aucune réaction. Mis à part un petit sourire crispé.
— Bah oui…
Répondit-il, d’une évidence.
— Excuse-toi, sur le champ.
Le pressa son père, en lui donnant un petit coup de coude.
— C’est bon… j’ai juste dit que c’était une traînée… c’est la vérité non ? Je vais pas m’excuser.
Répondit-il nonchalant.
Alexandra vit une veine sur la tempe de son mari Gabriel, apparaître, mais il sembla rester calme.
— Je me permets de vous signaler que vous êtes dans le bureau du directeur. Si vous pouviez avoir l’amabilité de vous tenir et de vous exprimer convenablement.
Gabriel avait une voix plus forte mais toujours aussi posée, bien qu’il y avait une once d’irritation dans son timbre. Il s’adressait à Ulysse qui s’enfonça dans son siège.
— Non, ce n’est pas la vérité. Et tu t’excuses. Maintenant.
Lui dit sa mère à voix basse, plus qu’embarassée.
Elle regarda Alexandra et s’excusa pour le comportenant de son fils.
Alexandra lui sourit, pour lui signifier qu’elle n’était pas rancunière.
— P…. pardon.
Lâcha t-il, à contre-coeur mais voyant le regard dur de Gabriel sur sa personne, ainsi que ses deux parents assis à côté de lui, il n’avait pas spécialement le choix.
— Vous n’avez pas « rien fait », Ulysse. Vous avez provoqué votre camarade. Je l’ajoute au dossier.
Reprit Gabriel, avec son timbre de voix habituel. Dur et rauque.
— Je ne tolère pas ce genre de comportement dans mon établissement. Ceci est un avertissement. Cela va de même pour Alain. Si vous avez des comptes à régler, vous le faites en dehors des heures d’enseignement et en dehors de l’établissement.
J’espère que cela ne se reproduira plus. Est-ce clair ?
Il regarda dans les yeux les deux élèves, qui ravalèrent leur salive.
— Bien, la sanction est une semaine de suspension, j’espère que vous profiterez de ce laps de temps pour réfléchir à vos actions et votre comportement.
Si personne n’a rien à ajouter, la convocation est terminée.
Ressentant la tension dans le bureau, Ulysse et ses parents sortirent les premiers.
S’excusant et remerciant Gabriel de sa clémence.
Alain était plus qu’intimidé par Gabriel.
Il avait rarement l’occasion de le voir dans son cadre de travail, aussi strict. Il savait qu’il avait merdé et s’en voulait.
Alexandra le rassura en lui prenant la main.
— Tout va bien. C’est fini.
Dit-elle, en lui adressant un sourire.
Il fondit en larmes dans ses bras.
Chris serra la main de Gabriel et eut un pincement au coeur en voyant son petit pleurer.
Gabriel fit le tour du bureau pour s’agenouiller au niveau d’Alain.
— Alain. Je m’adresse à toi comme un oncle, et non comme le directeur. Je suis fier que tu aies défendu ta mère.
Sa voix était douce et chaleureuse. Il posa sa main sur sa tête et lui adressa un sourire.
— Tu n’as pas à avoir peur de moi. Mais je souhaiterai que tu évites ce genre de situation à l’avenir…
— Vous faites les malins, les grands, mais j’ai senti une tension meurtrière dans cette pièce.
Dit alexandra en s’adressant à ses hommes.
— Je ne vois pas de quoi tu parles.
Répondirent-ils en coeur, Chris et Gabriel.
— Bon, allons-y. On ne va pas rester dans le bureau de Gabriel toute la journée.
Ils se levèrent et s’en allèrent en disant au revoir à Gabriel. Qui resta là, pour travailler.
Il embrassa tout de même Alexandra sur le front avant de la laisser partir.
Chris échangea un hochement de tête avec son ami et sortit.
*
Durant cette semaine de suspension, Alain resta chez lui.
Il dut s’occuper des tâches ménagères et le reste du temps, il s’adonna à sa passion : la mode et la création
Lorsque sa soeur rentrait, ils faisaient leur devoirs ensemble, elle lui prêtait ses cours pour qu’il puisse rattraper.
Cean passa le voir.
— Alors mon grand ? Tu fais le rebelle ?
Plaisanta t-il.
— Ça va… je me convertis en homme au foyer, précoce ton petit frère, non ?
— C’est bien vrai. Comment ça se passe ?
— Plutôt bien. Les parents m’ont pas trop passé un savon… enfin ton père m’a fait flipper, grave.
— Mais c’est un nounours !
— Parle pour toi, j’ai cru que j’allais me faire dessus dans son bureau. Heureusement que maman était là. J’ai l’impression qu’il est plus doux lorsqu’elle est là.
Soupira t-il.
— C’est pas une impression. Plus sérieusement, il est pas tout le temps tendre, et si je peux, j’évite de l’énerver. Rien que d’y penser, j’en ai des frissons.
Rit-il.
— Je me demande ce que ça doit donner lorsque maman se fâche avec lui.
— Tu veux pas voir ça.
— Ça arrive souvent… ?
— Non, mais ça peut être violent. Enfin, ça dure jamais longtemps, mais je préfère ne pas être là…
— Je comprends… avec papa ils se fâchent assez rarement, j’ai pas le souvenir qu’ils se soient déjà disputés. Tant mieux, tu me diras.
— Au fait, ils sont au courant pour… ?
— Non. J’ai réussi à éviter ça. Même si Hélène voulait tout balancer…
— Je sais que tu préfères pas, mais je pense qu’il faudrait leur en parler. C’est pas normal…
— Je sais. Mais ils ont déjà assez de problèmes à gérer. Ça, c’est du niveau de querelles de gamins.
— … Je pourrais leur en parler.
— Ne me fais pas ça. On a bientôt fini notre scolarité, après ça, on a décidé avec Hélène de faire des études de stylisme. On ne sera plus là. On pourra prendre un nouveau départ. C’est bientôt fini.
— … D’accord. Mais si un jour ça empire et que ça vous met en réel danger. Je devrais leur en parler.
— Quel genre de danger ?
— Je sais pas. Ça peut aller loin. Tu penses à Hélène ? Si elle se fait tabasser ? Si elle déprime à cause de ça et qu’elle en vient à… enfin tu la connais mieux que moi. Elle est émotive et prend toujours les choses à coeur. Bref. Je m’inquiète peut-être pour rien. C’est toi qui décide, je ne peux pas être partout pour vous défendre…
— Merci Cean. Maintenant je suis grand, je sais à peu près me défendre. Hélène aussi. Mais je comprends tes craintes. Je ferai attention.
15-16 ans : jumeaux
+2 pour Cean
2020.04.06