Talent

Cela faisait déjà plusieurs semaines qu’elle côtoyait ce jeune homme un peu moins âgé qu’elle.
Elle avait quelques heures de pause devant elle avant de reprendre son travail et elle en profita pour passer ce temps avec lui.
Il l’attendait dans le parc, non loin.
Il lui fit de grands gestes lorsqu’il la vit arriver.
La bonne humeur du garcon la fit esquisser un sourire.
Il l’embrassa sur le front et ils commencèrent leur petite balade en parlant de tout et de rien.
Ils s’arrêtèrent un moment et il proposa d’acheter un petit quelque chose à grignoter.

— Attends-moi, je reviens tout de suite !

Elle le laissa faire. Elle s’assit à un banc et contempla le paysage en attendant. Elle méditait sur cette relation, lorsque quelqu’un se mit devant elle et l’interpela.
C’était une voix qu’elle reconnaissait.

— Regarde ce que t’es devenue ! Tu avais tant de potentiel…

— Si t’es venu juste pour me dire ça, tu peux rentrer chez toi.
Répondit-elle, froidement.

— Tu te rends pas compte que ton talent est gâché à rester ici ?
— Je fais ce que je veux de ma vie, tu ne crois pas ?

Cela commençait à l’agacer.

— Je suis sûr que ta mère est du même avis que moi…
Soupira t-il, comme pour la provoquer.

— Qu’est-ce que ma mère vient faire là-dedans ?! Laisse-moi tranquille, je n’ai pas à te justifier mes choix.

Elle essaya de garder son sang froid.

— C’est l’humain avec qui tu traines, c’est ça ? C’est à cause de lui si tu te voiles la face ?!

La voyant rester impassible, il ne put s’empêcher de s’emporter un peu.

— En quoi cela te regarde ?! T’es pas mon petit ami, à ce que je sache. Je n’ai aucun compte à te rendre ! Maintenant va-t-en.

Elle haussa légèrement le ton et détourna la tête pour couper court à la conversation.

Il en resta muet.
Il l’attrapa par le bras et la força à se lever.
Totalement prise au dépourvu elle ne dit rien et le regarda avec des yeux de poisson, écarquillés.

2018.02.19

Étal

Cendres avait vu une arme sur l’étal de Ferdinand qui lui avait tapé dans l’oeil.
Il jeta un dernier regard sur l’objet avant de partir sans se retourner.
Il reviendrait.

Le lendemain, il revint, à la plus grande surprise de l’artisan.
Cendres n’habitait pas du tout dans ce quartier et avait refait exprès tout le trajet pour retourner à son atelier.

— Bonjour ? Que puis-je faire pour toi ? Tu as oublié quelque chose, peut-être ?
Demanda Ferdinand.

— Bonjour monsieur. L’arme que vous avez là, m’intéresserait…
Répondit Cendres en pointant l’épée.

Ferdinand se retourna et attrapa l’arme pour lui tendre.

— Bien sûr, tu peux la regarder de plus près si tu le souhaites. Je peux même y apporter des modifications si besoin.

Cendres n’était pas très bavard mais manipulait l’épée avec un regard expert et l’observait sous toutes ses coutures, en jouant avec la lumière et caressant la lame.
Ferdinand assistait à la scène comme un spectacteur satisfait.

— Je vais vous la prendre, monsieur.
Finit par dire Cendres.

— Bien. Je vais juste la nettoyer et lui donner un petit coup de neuf avant de te la léguer, si tu permets.
Ajouta Ferdinand, en tendant sa main pour la récupérer.

— C’est qu’elle est sur la devanture depuis un moment sans intéresser personne… elle a un peu pris la poussière.
Dit Ferdinand gêné.

— C’est une belle pièce. J’ai de la chance que personne ne se soit manifesté avant moi.
— Dis-moi. Tu as fait tout ce chemin juste pour elle ?

— Oui. Je suis exigeant et je n’avais pas encore trouvé d’arme qui me plaise autant, jusque là. J’ai gardé mon épée d’apprenti pendant tout ce temps. J’attendais juste le bon moment pour en changer.
Expliqua Cendres.

— Je vois…
Dit Ferdinand songeur.

Il lui rappelait l’époque où il était lui-même aventurier.

Cendres en profita pour regarder de plus près les autres pièces qui étaient exposées.
Il avait plus le temps pour s’attarder sur chaque détail contrairement au jour précédent.
La porte s’ouvrit derrière lui, ce qui le fit un peu sursauter.

— Papa ! Tu peux me tailler mon crayon-…
S’écria Lys en même temps qu’elle passait la porte.

Elle s’arrêta dans son élan lorsqu’elle vit Cendres qui avait l’air presque aussi surpris qu’elle.
Elle se demandait ce qu’il faisait ici, puis voyant son père travailler, elle rougit. Elle était dans une situation peu avantageuse pour elle.

— B-bonjour… je… pardon de vous avoir dérangés…
Bafouilla t-elle avant de retourner ses talons.

— Attends Lys.
Arrêta son père.

— Sers donc quelque chose à notre client. S’il te plaît.

Voyant Cendres faire des gestes pour lui signifier que ce n’était pas la peine.

— J’insiste.

Lys, encore un peu gênée, retourna à l’intérieur de la maison et sortit des verres et une bouteille.
Elle boitait encore un peu mais elle pouvait se déplacer.
Elle posa le tout sur la table et le servit.

— Vous aviez l’air intéressé par les travaux de mon père, je ne vous retiens pas plus.
— … Tu peux me tutoyer, je ne suis pas si vieux que ça…

2018.01.26

Exaucer

Il n’est pas marié, sa fiancée est morte de maladie alors qu’il était encore infirmier et il n’avait rien pu faire pour la sauver.
Ils étaient jeunes et ils avaient profité du bon temps de la fin de semaine pour sortir et se balader dans les rues.
Ils vivaient déjà ensemble, heureux.
Elle travaillait dans une petite épicerie comme vendeuse. Elle était de constitution faible mais gardait le sourire et faisait comme de rien n’était.
Pour ne pas inquiéter Michel, elle ne lui parlait pas de ses petits problèmes de santé.

Ils marchaient côte à côte, il était content de passer du temps avec elle. Elle souriante, dans sa petite robe d’été. Ils n’avaient pas tellement d’argent mais ils économisaient pour un mariage prochain.
Ils se dirigèrent vers quelques magasins, ils rêvassaient à quoi acheter quand ils seraient mariés et quand ils auraient plus d’économies.
Il se retourna et ne vit plus Isabelle.
Elle ne le suivait plus.
Derrière une foule de passants, elle était debout, les genoux fléchis et la main entre sa poitrine.
Elle le regarda d’un air triste, elle grimaça de douleur et s’écroula au milieu des gens, sur la route.
Il courut vers elle, elle s’accrocha à lui.
Il lui tenait la main et la serrait fort contre lui.

— Isabelle…
Murmurait-il.

Les passants pouvaient penser qu’ils n’étaient qu’un couple qui se déclarait leur amour.
Elle le regarda dans les yeux et sourit tristement.

— Michel… Je suis désolée… Je ne pourrai pas vieillir à tes côtés… Merci pour tout…

Elle ferma les yeux, lentement et perdit connaissance. Les larmes au coin de l’oeil.

— ISABELLE…

Il serrait encore sa main entre ses doigts.
Il la porta telle une enfant, son corps frêle dans ses bras et courut vers l’hôpital le plus proche.
Il s’excusa auprès des gens qu’il bousculait.
Un homme baraqué qu’il avait soigné auparavant l’interpela.

— Hé, c’est pas Michel !?… Qu’est-ce qui se passe ?!

Il était sur un chariot attelé, c’était un chauffeur.
Il vit Michel essouflé une personne dans ses bras et pressé.

— Monsieur… Ma fiancée vient de s’évanouir, je dois aller à l’hôpital au plus vite…
Dit-il d’une traite en mangeant à moitié ses mots.

— Monte ! À l’hôpital tu dis ? Raconte-moi tout en chemin.
— Merci Monsieur !

Arrivés à l’hôpital, elle passa aux urgences mais il était déjà trop tard. Son coeur avait arrêté de battre.
En sortant, Jean, le chauffeur l’interpela. Lorsqu’il vit le visage blême de son ami, il n’osa pas dire un mot.
Il remercia Jean et resta un peu dans le jardin de l’hôpital.
Il retourna à la chambre d’Isabelle et s’assit à côté d’elle.
Elle semblait dormir à poings fermés.
Il prit sa main et l’embrassa.
Il ne finit pas de s’excuser et pleurer.
Une femme médecin entra dans la pièce au bout de quelques heures.
Elle s’adressa à lui comme si elle le connaissait et lui expliqua que c’était le souhait d’Isabelle de ne pas le mettre au courant de sa maladie.
Elle savait qu’elle n’avait plus beaucoup de temps à vivre.
Qu’elle s’excusait et qu’il ne devait pas s’en vouloir.
Elle lui dit de se ressaisir, qu’il devait continuer à vivre pour lui et pour elle.
Elle partit et le laissa seul avec Isabelle.
Il décida d’aller dans la forêt.
Il savait qu’Isabelle avait toujours rêvé d’y aller mais que c’était bien trop dangereux.
Elle aurait voulu approcher l’arbre géant qu’elle voyait de la fenêtre de leur appartement.
Il n’avait plus envie de vivre sans Isabelle.
Il prit une décision folle, se leva et la prit dans ses bras. Ils allaient y aller.
Peu importe s’il se faisait dévorer par les bêtes.
Les chasseurs étaient nombreux. Les gens qui s’y rendaient savaient ce qu’ils y faisaient. Ils étaient chasseurs ou chassés.
Le regard sans vie, les yeux rouges après avoir tant pleuré.
Il voulait au moins l’emmener dans l’endroit qu’elle voulait tant voir.

Un homme de grande carrure.
Il avait une veste avec une capuche en tissu. Dessous un T-shirt aux manches longues et évasées, une sorte de jupe longue ouverte sur le côté avec un pantalon en tissu léger en dessous et de petites bottes.
Il était derrière des buissons et vit Michel arriver, sans aucune arme sur lui, portant une jeune fille dans ses bras. Il se dirigea vers lui sans se faire remarquer.
Il dégaina son épée et la pointa sur le dos de Michel.

— Que faites-vous ici ?
Demanda t-il d’une voix glaciale.

Michel n’osa pas répondre et semblait se réveiller de sa folie.

— Donnez-moi une raison de ne pas vous tuer.

— … Isabelle… Ma fiancée… Je veux juste me rendre au pied de l’arbre…
Dit-il, les mots entrecoupés de sanglots ravalés.

L’homme armé sembla comprendre la situation.
Il analysa ses alentours pour savoir si aucun danger n’était présent.
Il baissa lentement son épée et poussa un soupir.

— Vous n’avez rien à faire ici. Il n’est pas possible d’aller aussi loin sans se faire tuer…

Son visage caché dans l’ombre de sa capuche.

— Tout ce que je peux faire c’est emmener votre… Isabelle jusqu’à l’arbre…

Il proposa cela en voyant la tristesse se dessiner sur le visage de Michel.

— Vous ne pouvez pas rester ici, vous mettez votre vie en danger. Je vais vous raccompagner jusqu’à la sortie. Rentrez chez vous.

Michel ne savait plus quoi faire.
Même cette dernière chose qu’il voulait accomplir, exaucer pour Isabelle, il en était incapable.
Il regarda l’homme, perdu dans ses pensées.

— Continuez tout droit à partir d’ici, la voie me semble dégagée. Dépêchez-vous de partir.
Dit-il en le jaugeant.

Il soupira de nouveau.

— Vous pouvez me faire confiance, je porterai votre fiancée jusqu’à l’arbre. Je vous le promets.

Michel hésita quelques secondes puis s’approcha lentement de l’inconnu et lui donna le corps de sa bien-aimée.

— Reprenez-vous. Vous devez continuer à vivre, c’est ce qu’elle aurait souhaité, je pense…
Dit-il en regardant Michel dans les yeux.

Michel ne put retenir ses dernières larmes.

— Je suis désolé, je ne peux pas vous laisser aller plus loin dans la forêt…

Lorsqu’ il rentra jusqu’à son appartement, sans se retourner.
Il ne put supporter la vue des affaires d’Isabelle, il ne put s’empêcher de repenser à quelques heures, quelques jours plus tôt. Sa présence était encore palpable. Son odeur.
Il ravala un sanglot et décida de tout mettre dans des cartons.
Dès la semaine prochaine, il demanderait à être interné à son travail.
Comme l’inconnu l’avait dit, il ne devait pas se laisser submerger par sa peine.
Il devait continuer à vivre, et ne se pardonnant pas de n’avoir pu sauver la personne qui comptait le plus pour lui, il se mit à étudier pour être médecin et aider le plus de personnes qu’il pourrait.
Il passa rapidement du statut de simple infirmier à assistant chirurgien puis lui-même médecin et chirurgien.
Les années s’écoulèrent sans qu’il ne s’en rende compte.
Sortant rarement de son lieu de travail.
Il ne s’intéressait plus à rien à part son métier.
À part ce détail, c’était un interne exemplaire qui faisait du boulot irréprochable.
Plusieurs jeunes filles s’étaient éprises de lui mais sans succès.
Il les rejetait toutes sans exception, en s’excusant de ne pouvoir leur rendre leurs sentiments.
Son coeur avait été donné à Isabelle et il ne trouvait personne à sa hauteur, ni ne se sentait pas d’aimer autant quelqu’un d’autre.

Il devait avoir la trentaine lorsqu’il rencontra Daisy.
Une petite fille d’environ 16-17 ans.
Elle était dans un état pitoyable. Elle avait des bleus sur le visage et sur ses bras.
Son corps frêle faisait peur à voir.
Ses vêtements étaient en lambeaux et crasses.
C’était une sans-abri ou une mendiante.

2013.7.10

Boisson

Il mit alors un extrait de mélange d’alcool et d’autres produits, dans sa boisson. Assez pour qu’elle ne s’en rende pas compte.
Il attendit qu’elle fut assoiffée pour lui proposer à boire.
Elle but plusieurs grandes gorgées de son verre. Accordant son entière confiance à son tuteur.
Lorsqu’elle reposa son verre, elle sentit le sol se dérober sous ses pieds.
Elle se tourna vers lui.
Le regard interrogateur.
Il l’observait, s’approcha d’elle à grands pas.
Elle recula mais le décor autour d’elle tremblait.
Son souffle était plus court et elle sentait sa poitrine se resserrer.
Il l’accula jusqu’au bureau.
Le dos à la table, les mains posées à plat pour tenter de garder l’équilibre.
Elle releva son visage pour observer celui de l’autre.

— Pourquoi ?
Pensait-elle.

Pourquoi avait-il mit de l’alcool dans sa boisson.
Il la prit par la taille et de l’autre main il prit son visage dans sa main.
Il approcha ses yeux de ceux de la jeune fille et respira son odeur en partant du creux de son cou.

2013.9.8

Vingt-cinq

En cette nuit d’hiver, je m’étais baladé un peu partout dans l’hôpital, ma tasse de café chaud à la main.
Dans la salle d’accueil, je sentis la présence d’une personne sur les sièges.
Elle était allongée sur plusieurs places, dormant profondément.
Je m’approchais d’elle.
Elle était habillée en souillonne, une enfant de la rue, en soit.

— Hey, gamine ! C’est interdit de coucher ici.

Ne se réveillant pas à mes appels.
Je la secouais un peu.
Elle ne réagit presque pas.
Le corps gelé.
Si elle restait ici, elle finirait par mourir de froid. Certainement.
Je regardais autour de moi.
Personne aux alentours.
Je la portais jusqu’à ma chambre.
Elle ne se réveilla pas jusqu’au lendemain.

— Suis-je morte ?

Ce fut ses premières paroles.

— Comment te sens-tu ?
— … Froid…
— As-tu faim ?
— Oui…
— Attends quelques minutes, je vais te chercher quelque chose.

En partant chercher un morceau de pain de la veille ou quelques restes. Je me demandais ce que j’allais faire d’elle et dans quels problèmes je m’étais jeté…

— Comment t’appelles-tu ?
— … Numéro 25…

Un numéro. C’était certainement une esclave ou un lien avec des trafics d’humains…

— Tu sais, tu n’as pas le droit de t’endormir sur les sièges de l’hôpital… Ce n’est pas un dortoir. Tu comprends ? Je suis désolé mais tu vas devoir t’en aller.

Elle sortit lentement du lit.

— Tu peux emporter avec toi le morceau de pain.
Lui dis-je en tendant le pain rassit d’hier.

— Tu vas retrouver le chemin vers la sortie… ?

Elle prit la nourriture en gardant la tête baissée.
Serrant la miche dans ses mains comme si c’était de l’or.
J’avais un peu de peine à la jeter dehors mais je ne pouvais pas faire autrement.
Elle releva lentement son visage vers moi.

— Je… je ne peux retourner d’où je viens… S’il vous plaît… Laissez-moi rester ! Je dormirai par terre ! Je mangerai les restes de la veille ! Je ferai tout ce que vous voulez ! Ne me renvoyez pas là-bas… !
Me dit-elle, suppliante.

— « Je ferai tout ce que vous voulez » ?

Je m’approchais d’elle.
Elle recula par réflexe.
Elle fut acculée au mur.
Elle leva les yeux vers moi.
Si petite, si vulnérable.
Je plaquai ma main gauche sur le mur, près de ses hanches.
Ma main droite sur son visage.

— Ce que je veux ?
Répétais-je en lui souriant.

Je voyais la peur dans ses yeux. Ou bien était-ce de l’incompréhension ?
Au bout de quelques secondes de silence. Elle baissa les yeux et détourna son visage.
Je m’éloignais.

— Fais attention à ce que tu pourrais dire… File.

Je me retournai vers mon bureau.
Je sentis qu’on me tirait par le bout de ma veste.

— … Faites ce que vous voulez de moi… Mais laissez moi rester ici…

Je lui attrapais le bras d’une main et de l’autre je soulevais son visage vers le mien.

— Vraiment… ?

Elle détourna le regard.

— … Oui…

Je l’attrapais alors par ses hanches et je la portais jusqu’au lit.
Mes mains de chaque côté de sa tête, sur le lit.

2013.8.19

Banc

Je l’ai recueillie alors qu’elle était en train de dormir sur un banc de l’église, le regard vide.
Je m’en souviens comme si c’était hier.

Il faisait froid. Il neigeait.
J’étais dans le hall de la bâtisse. Je regardais par les grandes fenêtres la tempête de neige qui se préparait.
En faisant ma ronde auprès des bancs pour vérifier que personne n’avait rien oublié lors de la dernière messe, je vis une personne allongée, recroquevillée sur elle-même. Tremblotante.
Sa longue chevelure noire laissait penser que c’était une fille.
Elle portait une robe sale et rapiécée.
Une fille des rues, en somme.
Lorsque je voulus la réveiller puisqu’elle ne répondait pas à mes appels.

— Hé, petite, tu ne peux pas rester dormir ici-

Je lui attrapai le bras pour qu’elle ouvre les yeux et qu’elle quitte les lieux.
Cet endroit était une église mais n’était pas un foyer pour les sans-abri.
Il n’y avait pas assez de chambre pour accueillir tous les démunis de la ville.
Son corps était gelé.
Je n’eus pas le coeur à la jeter dehors par ce temps.
Je regardai autour de moi, et j’enfreins la règle.
Je la portai jusqu’à ma chambre.
Elle semblait dormir profondément.
Je la posais dans mon lit, sous la couette qui allait réchauffer son petit corps frêle.
Je la réveillerai demain, et elle devra retourner d’où elle vient.
C’est ce que je m’étais dit.
Ne pouvant plus me coucher, j’en profitais pour revoir mes notes et travailler sur mes recherches.
À l’époque, je n’étais qu’un simple infirmer assistant qui étudiait pour être médecin.
Dans ma petite chambre, je travaillais pour l’église et l’hôpital qui y était rattaché.
Cette église existait pour donner de l’espoir aux gens.
Derrière, des groupes de gens travaillaient dans la recherche de nouveaux médicaments et soins, une autre partie était constituée de médecins et d’infirmiers pour s’occuper des blessés.
Ainsi le lendemain matin, elle ouvrit ses yeux.
Le regard vide, elle n’avait aucune idée de où elle se trouvait.
Je la rassurais du mieux que je le pouvais, en lui disant qu’elle ne craignait rien. Qu’on était dans les appartements de l’hôpital.
Bien entendu je lui rappelais qu’elle n’avait pas le droit de passer la nuit dans le hall de l’église.
Que cette fois-ci ça passerait mais que la prochaine fois, il ne faudra pas.

— Si je t’avais laissée sur le banc, quelqu’un d’autre t’aurais demandé de partir… Tu comprends ?

Ne sachant pas si elle comprenait ce que je lui disais ou non.
Elle semblait se cacher sous la couverture, réprimandée.

— S’il vous plaît… Je ferai tout ce que vous voudrez… Ne me renvoyez pas à l’extérieur…

Les larmes aux yeux, sanglotait-elle ?
« Ce que vous voudrez » ?
Est-ce qu’elle se rendait compte de l’ampleur de ses paroles… ?
Assis à mon bureau. Je me massais l’arc nasal, après une nuit blanche, je n’avais pas l’esprit clair.

— Est-ce que tu te rends compte de ta situation ? Cela ne dépend pas de moi… Ce n’est pas possible.

Je me levai pour aller me rincer le visage, de quoi me réveiller et me rafraîchir.

— Prends ton temps mais lorsque je reviendrai je te raccompagnerai jusqu’à la porte. C’est clair ?

Mes études étaient assez pénibles sans que je m’encombre d’une personne en plus à ma charge.

2013.8.15

Maillon [Fanfic] Etrian Odyssey

Elle sut dès son plus jeune âge qu’elle serait moine.
Aventurière comme le fut son père.
Bien qu’elle vivait seule depuis quelques années déjà, après la disparition de son père dans le labyrinthe, puis la mort de sa mere, de maladie.
Elle n’apprit que trop tard la raison de la mort de son père, il était parti chercher un remède pour soigner sa femme.
Chacun avait ses raisons de devenir aventurier : la gloire, la recherche, gagner sa vie, et bien d’autres.
Elle était curieuse des secrets du labyrinthe, toute l’économie ou presque de la ville reposait sur ce donjon.
Les études et la recherche étant trop contraignantes, elle avait décidé de s’engager en tant qu’aventurière et mener ses propres recherches lorsqu’elle en aurait le temps.
Il fallait bien qu’elle vive.
Le premier jour où elle décida de s’engager, elle se rendit à l’entrée du labyrinthe. Préparée, la tenue, les provisions.
Il ne manquait plus que rejoindre un groupe, trouver un ou plusieurs partenaires pour une expédition.
Il était bien entendu hors de question de s’y aventurer seul. Sauf exception des vétérans, et encore.
Il y avait un petit paquet de monde sur la place.
Elle était venue au petit matin.
Un peu intimidée par tant d’aventuriers. Les habitués se connaissaient tous et se saluaient chaleureusement.
Certains groupes étaient déjà formés et n’attendaient que le dernier membre de leur équipe.
Elle se fit bousculer, justement, par un retardataire.
Il arriva à toute allure, il s’excusa et repartit vers ses amis.

— Désolé ! Mon réveil n’a pas sonné !
— On n’attendait plus que toi…

La place commençait à se vider peu à peu.
Les groupes entrant un à un dans le donjon.
Il ne restait presque plus personne, à part elle.
Elle était nouvelle, personne n’avait besoin d’un novice, et les personnes qu’elle avait interrogé pour lui proposer ses services n’avaient pas besoin d’un moine.

Il, l’avait remarquée mais l’ignora et entra sans s’attarder sur la nouvelle arrivante.
Lorsqu’il finit sa quête, il était déjà tard et il se rendit au bar.
Il s’assit à sa table habituelle.
Il s’installa et commanda la même chose que les jours d’avant.
Son sac de butin amassé pas loin, à ses pieds.
Lorsqu’il releva sa tête pour observer la salle, il entendit d’abord une voix familière. Il regarda dans la direction de la provenance du son.
C’était la fille de ce matin. Elle était en train de faire toutes les tables pour demander aux aventuriers s’ils ne voulaient pas la prendre dans leur équipe pour débuter.
Bien entendu, chacun refusait, ils ne connaissaient rien d’elle et une novice ne les intéressait pas.
Il était dur de faire confiance à quelqu’un, de plus une personne de plus c’était aussi partager le butin.
Si le maillon était mauvais, c’était la vie du groupe en jeu.
Il entendit des commentaires à quelques tables de lui.
Deux femmes, une magicienne et une guerrière discutaient.

— Elle va bien finir par se lasser…
— Personne ne va la prendre. Elle est là depuis le début de soirée…
— C’est pas un jeu d’être aventurier.
— Qu’elle retourne chez elle jouer à la poupee…

Ce qu’elles disaient était dur mais il était du même avis que ces femmes.
Ses débuts n’avaient pas été faciles non plus.
Bien que le profit était proportionnel au danger encouru, beaucoup se ravisaient lorsque leur vie était en danger.
Il s’apprétait à détourner le regard et l’ignorer comme ce matin lorsque de nouveaux clients entrèrent.
C’était un groupe de guerriers baraqués. Ils riaient et semblaient de fort bonne humeur.
Ils s’installèrent à une table sans trop de discrétion.
Ils discutèrent bruyament.
Un des hommes, s’arrêta de parler, fit un signe à son camarade en désignant la jeune fille.
Le propriétaire du bar se fichait pas mal de la fille. Du moment qu’elle ne dérangeait pas les clients, il n’y avait pas de problèmes.
Celui qui semblait être le chef de groupe interpella la fillette lorsqu’elle se fit rejeter par la dernière table qu’elle venait de faire.

— Hey, petite ! Viens par ici.

Ses amis riaient intérieurement.

— Oui ?!

Elle releva la tête et ses yeux brillèrent d’un espoir.

— Tu cherches un groupe à rejoindre ?
— … O- oui !
— Tu peux rejoindre le notre si tu veux, on pourra t’apprendre plein de choses.

Le regard vitreux, il n’avait certainement pas de bonnes intentions.
La petite, aveuglée par la joie d’enfin pouvoir être dans un groupe était sur le point d’accepter.
Au fond de la salle, les deux femmes commençaient à s’agiter.
Elles voyaient ce qui était en train de se passer et étaient sur le point de se lever pour donner une leçon à ces messieurs malintentionnés.
Quand tout d’un coup, à quelques tables d’elle, il se leva.
Surprises par cette intervention, venant d’un homme, elles restèrent à le fixer et se rassirent.
Il se dirigea vers les hommes, attrapa la fillette par le bras et la tira derrière lui.

— Je peux savoir ce que vous êtes en train de proposer.
Sur une voix plutôt mençante et froide.

Son regard n’inspirait pas confiance.
Le leader prit peur et ne voulut pas se risquer à des explications dans ce lieu public.

2013.8.7

Marcel

La porte s’ouvrit et prise au dépourvu, la pluie battante à l’extérieur, elle s’affala sur le sol, trempée jusqu’aux os.
L’homme baraqué et chauve s’apprétait à la frapper en pensant que ce n’était qu’un voyou. Il se ravisa au dernier moment. Il referma la porte aussi vite qu’il put pour éviter de tremper son carrelage inutilement.

Il s’accroupit vers elle.
C’était une jeune adolescente plutôt maigre.
Elle se releva avec un peu de mal, elle se tourna vers l’homme.
Elle prit peur à la vue de l’inconnu comme si elle avait vu un fantôme.
Elle fit un bond en arrière.

— J…je suis désolée !
Dit-elle d’une voix paniquée.

Elle était sur son postérieur, les mains en guise de bouclier.
Elle recula comme elle le put.
Elle se cogna contre la table de travail.
Le choc faillit faire tomber un bol sur elle.

Il ne sut pas comment interpréter sa réaction.
Il ne pensait pas qu’il était aussi effrayant.
Il n’était pas du genre à s’occuper d’autrui, il préférait s’occuper de ses affaires.
Il cherchait déjà un moyen de se débarrasser de l’intrus qui venait de débarquer chez lui.
Il resta accroupi pour ne pas l’effrayer plus.
Il chercha les bons mots pour la mettre en confiance et comprendre ce qu’il se passait.

— … Tu n’as rien à craindre ici. Je ne te ferai aucun mal. Que s’est-il passé… ?

Elle était encore perdue dans ses pensées.
Elle semblait chercher du regard quelque chose. Un repère.
Le souffle encore court.
Elle pensait qu’elle était peut-être en lieu sûr mais pas pour longtemps.
Elle devait partir d’ici et ne pas déranger plus.

— Je…
Commença t-elle.

Elle tenta de se lever mais prise d’un vertige après avoir tant couru, elle s’évanouit sur le sol.
L’homme se précipita pour l’attraper avant qu’elle ne percute le carrelage.
Il l’examina un peu plus.
Elle était extrêmement légère et maigre.
Ses vêtements étaient trempés et sales.
Il se demanda combien de temps elle était restée à l’extérieur, sous la pluie.
Elle avait un peu de fièvre.
Il soupira.
Cela lui rappelait de mauvais souvenirs.
Il décida de la porter jusqu’à l’étage.
Il la déshabilla, elle allait attraper froid s’il la laissait dans des vêtements complètement trempés.
Il lui mit un marcel propre lui appartenant et un short.
Elle flottait dedans mais c’était mieux que rien.
Il se dirigea vers une chambre libre, ce n’était qu’une modeste petite chambred’ami, plutôt sombre. Tout l’étage était sombre.
Il tira la couverture et la posa dedans.
Il se rendit compte qu’elle était vraiment gelée.
Il se renseignerait à son sujet demain.
Il jeta les vêtements mouillés dans la corbeille à linge sale.
Il jeta un dernier regard dans la chambre d’ami et s’en alla vers sa propre chambre.
Il alla chercher son caleçon de nuit et se rendit dans la salle de bain pour prendre une douche, se changer et aller se coucher.

Il dormait qu’avec un caleçon de nuit.
Il se réveilla au petit matin.
Il se demanda si tout ce qui s’était passé hier était un rêve.
Il se rendit dans la chambre d’ami, il y avait toujours quelqu’un dans le lit.
Il poussa un soupir.
Il se demanda ce qu’elle, ferait à sa place.
Il se changea et mis un pantalon.
Il s’approcha du lit de la fille et toucha son front pour savoir si elle allait mieux.
La fièvre semblait être retombée.
Il alla s’occuper du linge sale, le laver et l’étendre.
Après la pluie torrentielle d’hier soir, il faisait un soleil radieux aujourd’hui.
Il descendit ouvrir à son cuisinier.

2013.7.29

Cuisine

Vivant dans un petit appartement dans un immeuble de moyenne classe.
Sa mère faisait le métier de fille de joie et elle lui avait donné naissance sans savoir qui était le père.
Son père biologique était parti sans demander son reste.
Actuellement, sa mère avait un autre conjoint.
Sa mère ne prennait pas soin de Daisy. Elle avait fait le minimum pour qu’elle grandisse.
Pour elle, un enfant devait servir à quelque chose. Elle était dure.
C’était sa manière d’élever sa fille.
Elle continuait à faire son travail qui permettait de faire vivre la petite famille. Elle avait appris à Daisy les tâches ménagères. Ainsi, Daisy s’occupait du bien-être de la maison et de celui de sa mère.
Elle devait rester cachée pour ne pas se faire voir des clients.
Le conjoint de sa mère était son proxénète.
Depuis quelques temps, Daisy avait atteint sa puberté et ressemblait de plus en plus à une jeune femme.
Elle voyait le conjoint et sa mère faire leurs choses d’adulte, à travers l’ouverture de la porte. Elle les entendait.
Elle les évitait.
Une fois, le conjoint l’avait surprise en train de regarder à travers la porte, par accident.
Elle était partie aussitôt.
Honteuse.
Bien qu’elle évitait la chambre de sa mère, elle les entendait.
Anya et Rupert.
Rupert avait des mauvaises semaines et rentrait de très mauvaise humeur. Il se défoulait sur Daisy pour ne pas le faire sur sa conjointe avec qui il faisait l’amour.
Les jours où il rentrait alors qu’Anya n’était pas là, il prenait Daisy à part et la violentait pour le moindre détail et reproche au sujet de la maison.

— DAISY ! Qu’est-ce que c’est que ça ?! VIENS ICI ! TOUT DE SUITE. Tu n’as pas passé le balai dans cette pièce ! Regarde cette poussière !
Disait-il en criant dans tout l’appartement.

Il lui montrait le tas de poussière qui s’était accumulé dans un coin.
Il l’attrapait par le bras et lui donnait alors une énorme claque.

— Excusez-moi… Cela ne se reproduira plus… Je vous le promets. Je suis désolée…
Repondait-elle en pleurant, effrayée de la réaction de Rupert et surprise de la frappe sur sa joue.

Il la relâchait et repartait à ses occupations comme si de rien n’était.
Se sentant plus serein après avoir extériorisé sa frustration.
Jusqu’au jour où il avait entrevu Daisy dans l’ouverture de la porte.
Il avait sourit.
Il avait remarqué qu’elle avait changé physiquement. À travers son T-shirt trop grand de souillonne et sa jupe crasseuse. Il imaginait ses formes.
Il s’intéressait à son corps vierge.
Quelques jours après, il la prit à part, toujours quand il pouvait être seul avec elle, c’était son petit secret, il battait Daisy, et elle n’osait rien dire à sa mère.
Il la chercha dans tout l’appartement. Elle se reposait. Ne mangeant pas grand chose elle était tout le temps fatiguée.
Elle dormait dans un tas de couvertures dans un recoin de la cuisine.
Il s’approcha d’elle et s’accroupit juste devant elle.
Il remit une de ses mèches de cheveux à sa place.
Elle se réveilla en sursaut et voulut s’éloigner de lui.

— Je t’ai vue l’autre jour… Tu nous regardais, n’est-ce pas ? Ça t’interesse ce que ta mère et moi nous faisons ?
Dit-il avec un large sourire.

Elle secoua machinalement la tête pour lui signifier que non.

— Je suis désolée ! Je ne voulais pas regarder ! Je ne l’ai pas fait exprès ! Je ne le referai plus ! Je vous le promets !

La peur et les sanglots dans sa voix.

— Tu peux regarder autant que tu veux tu sais… Tant que tu le fais discrètement…

Le sourire jusqu’aux oreilles.

— Non ! Je ne voulais pas ! Je suis désolée !
— Tu préfères peut-être essayer… ? Je peux te montrer, tu sais…

Il s’approchait de plus en plus, en touchant l’épaule de Daisy.

— Non… Je… Non… !

Elle reculait mais était prise au piège dans le coin de la pièce.
Il avait bien trop de force comparé à elle.
Elle pouvait crier autant qu’elle le voulait, personne n’allait venir.
Il lui mit la main sur sa bouche pour l’empêcher de faire trop de bruit, il tenta de l’étrangler pour qu’elle finisse par se taire.
Elle perdit connaissance.
Il la viola.
Ceci se produisit à de nombreuses reprises.
Jusqu’au jour où sa mère rentra plus tôt et le surprit en pleine action.

— Rupert… Qu’est-ce que tu fais… ?

Elle se tenait à la porte de la cuisine.
Il se retourna lentement alors qu’il venait de finir.
Il remit son pantalon rapidement et tenta de s’expliquer.

— Anya… ? Ce n’est pas ce que tu crois ! Je peux tout t’expliquer.

Il se leva et prit Anya avec lui et l’emmena dans sa propre chambre.

— Qu’est-ce que tu faisais… avec Daisy… ma fille !

Elle commençait à élever le ton.

— Je vais tout t’expliquer ! Calme toi ! C’est elle qui me fait du charme ! Je ne voulais pas te le dire pour pas te faire de peine… Depuis qu’elle comprend notre relation… Elle me saute dessus quand tu n’es pas là… Je l’ai repoussée plusieurs fois… Mais tu sais que nous les hommes… Nous pensons avec ce qu’il y a en dessous de notre ceinture… Pardonne-moi…

Elle était sans voix et ne savait pas comment interpréter cette révélation…

— Depuis combien de temps… ?
Finit-elle par demander.

— … Plusieurs mois.

Il était assis sur le lit, les coudes sur ses genoux, le visage baissé dans ses mains.

— … C’est vrai ce que tu me racontes… ?

Les mains sur sa bouche, debout, elle ne savait pas quelles mesures prendre.

— Bien sûr !!! Tu doutes de moi ? … Je n’aime que toi… Anya…

Il releva la tête et la regarda avec les larmes aux yeux.

— Pardon… Rupert… Mon chéri… Je suis perdue avec cette situation. Tu comprends.. C’est ma fille…

Elle s’approcha de lui et s’agenouilla et prit son visage dans ses mains.

— Anya…

Pendant tout ce temps. Daisy était restée dans la cuisine, encore brisée du viol même si elle avait commencé à en avoir l’habitude.
Le temps qu’elle reprenne ses esprits.
Sa mère était maintenant au courant. Qu’allait-il se passer ?
Elle entendait des voix venir de la chambre.
Est-ce qu’elle allait être libérée de son suplice ?

Elle s’avança jusqu’à Daisy, l’aida à se relever.
Elle la regarda dans les yeux, elle avait du mal à contrôler ses émotions.
De sa main libre, elle leva son bras et donna une giffle à Daisy.
Daisy ne s’y attendait vraiment pas.
Elle était encore sous le choc. Elle ne comprenait pas ce qui se passait.
Pourquoi sa mère l’avait gifflée.
Même si elle ne lui montrait pas de l’affection, elle ne l’avait jamais frappée. Elle avait toujours tout fait pour qu’elle soit satisfaite de ce qu’elle faisait.
Les larmes coulèrent sur son visage sans qu’elle ne s’en rende compte.
Elle ne savait pas ce qu’elle avait fait de mal.
Sa mère la tira par le bras droit et l’emmena dans l’entrée.
Elle ouvrit la porte et la jeta sur le palier.

— … Ne remets plus jamais les pieds ici… !
Dit Anya, la voix tremblante entre la colère et la tristesse.

Derrière elle, Rupert était sorti de la chambre et regardait la scène. Il affichait un visage satisfait et victorieux. Anya était de dos et ne pouvait pas voir ses véritables intentions.

— … Maman… ?
Dit Daisy d’une petite voix et le regard paniqué.

— … Tu n’es plus ma fille à partir d’aujourd’hui… !
Lui répondit-elle en lui claquant la porte au nez.

Anya se retourna et vit Rupert, dans le couloir.
Il la regardait avec ses yeux doux et feignait la tristesse.
Elle s’avança dans ses bras et pleura.
Il la consola et la serra dans ses bras.

— Peut-être que tu as été un peu trop dure…
— … Tu crois… ?
— Tu ne veux pas lui donner une dernière chance… ? Je sais que c’est ta fille… Ce n’est pas facile…

— … Tu… as peut-être… raison.
Dit-elle entre ses sanglots.

— Elle est encore jeune et n’a pas notion de ce qui est bien ou non…
— … Je… qu’ai-je fait… ?
— Je vais aller la chercher… D’accord ?
Dit-il de sa douce voix.

Tout ce qu’il voulait c’était coucher avec Daisy. Ce qu’il ne pouvait pas dire à sa compagne c’est qu’il préférait Daisy parce qu’elle était plus jeune, et qu’il pouvait être violent avec elle. Le fait qu’Anya la jette dehors n’était pas prévu, cela l’embêtait plus qu’autre chose. Il ne pourrait plus avoir Daisy à portée de main.
En allant la chercher il pourrait la récupérer et l’enfermer quelque part en attendant. La séquestrer sans que cela ne se sache. Il pourrait toujours dire que Daisy ne voulait plus rentrer et reniait sa propre mère, ou bien qu’il n’avait pas réussi à la retrouver.
Il laissa Anya se remettre de ses émotions et sortit de l’appartement.
Cela ne faisait pas longtemps que Daisy n’était plus là. Elle ne devait pas être très loin.

Daisy descendit les escaliers un à un. Elle avait toujours été enfermée dans l’appartement et avait rarement vu à quoi ressemblait la vie à l’extérieur.
Elle marchait, nonchalante, les yeux sans vie.
Sa mère l’avait rejetée et elle ne savait pas pourquoi.
Elle se remémorait tout ce qu’elle avait fait et essayait de comprendre où était son erreur, sa faute.
Elle sortit de l’immeuble. Il faisait nuit et il pleuvait des cordes.
Elle était en T-shirt un peu trop grand pour elle, sous lequel elle portait une jupe mi-longue sale.
Ses cheveux bruns et longs étaient en tresse à moitié en pagaille.
Elle resta sous l’abri au dessus de la porte de l’immeuble, ne sachant pas trop où aller ni que faire.
Elle entendit des pas derrière elle, et la porte s’ouvrit et laissa apparaître Rupert qui ne cacha pas sa joie.
Daisy prit peur.
Elle avait toujours eu peur de Rupert et elle comprit que c’était à cause de lui si sa mère l’avait jetée dehors. Il lui avait rapporté des mauvaises choses.
Elle sentit que s’il l’attrapait, sa vie était en péril.
Il tendit le bras pour l’attraper et la faire taire, au cas où.
Daisy eut le réflexe de descendre les escaliers et partir en courant.
Il n’y avait plus les murs de la cuisine qui l’empêchaient de s’enfuir. Le monde extérieur était vaste.
Avec la pluie, elle glissa sur une marche et s’affala par terre. Elle était pieds nus.
Rupert sourit et s’approcha doucement de Daisy.
Elle se leva précipitemment et courut dans n’importe quelle direction. Elle devait partir. Et loin.
Rupert souriait de plus en plus. Cette situation lui plaisait. Si elle s’enfuyait loin il pourrait alors la maltraiter sans qu’Anya soit au courant. Si cela se passait en bas de l’immeuble, cela serait beaucoup plus dangereux pour lui, il devrait faire beaucoup plus attention à ce qu’il pourrait dire et faire.
Elle ne savait pas quelle heure il était mais les rues étaient vides. Elle n’avait croisé personne. Aussi parce qu’il pleuvait averse et que personne ne voulait sortir par un temps pareil. Les rideaux d’eau ne permettaient pas de bien voir ce qu’il se passait au loin. On devinait les enseignes de restaurants et autres lieux animés par la lumière qui était diffusée.
Elle emprunta une petite ruelle en pensant qu’elle pourrait couper et semer Rupert.
C’était un cul-de-sac.
Elle arriva devant une grande facade d’immeuble. Elle chercha à frapper aux portes aux alentours pour demander de l’aide mais personne ne répondit.
Ils devaient penser que c’était quelqu’un de saoul ou de louche.
Personne n’allait ouvrir à un inconnu.
Il était trop tard pour elle de faire demi-tour et de revenir sur la grande avenue. Elle se cacha derrière une caisse en bois. En priant qu’il ne la retrouve pas.
Elle avait froid et claquait des dents.
Elle mit ses mains sur sa bouche et essayait d’étouffer le bruit comme elle le pouvait. Elle avait à la fois peur et froid.
Son nez la picotait et elle avait aussi envie d’éternuer.
Elle essayait de se retenir en coupant sa respiration et à la fois cammoufler le bruit de ses dents.
Elle finit par lâcher un petit éternuement.
Rupert vit la caisse trembler et avait vu Daisy emprunter cette ruelle. Il s’approcha tout doucement et la surprit.

— Viens ici… Tu vas voir… Je vais être gentil…
Dit-il avec son sourire dérangeant. Il avait tout sauf des bonnes intentions envers Daisy.

Elle se débattit et fit du bruit en tapant dans les caisses autour d’elle.

— Arrête ça !
Dit-il, en essayant de la maîtriser et la frappa dans le ventre.

— Tu vas me suivre sagement et être une gentille fille n’est-ce pas… ?

Il avait perdu son sourire et la regardait avec mépris.
À ce moment là, un homme d’une trentaine d’année ouvrit la porte et sortit dans la ruelle. Le bruit l’avait intrigué et il était sortit voir.
Il vit alors une jeune fille en train de se faire embêter par un homme d’une vingtaine d’années, les cheveux longs et avec une chemise. Il la frappa au ventre.
L’homme de 30 ans réagit tout de suite au coup de poing. Il s’avança rapidement vers Rupert et lui donna une leçon.
L’homme était plutôt grand et baraqué, à la peau un peu hâlée, il était chauve.
Rupert ne comprit pas ce qu’il lui arrivait. L’homme était arrivé par derrière et lui avait donné un coup qui l’avait assomé. Il était à terre. Le baraqué l’enjamba et alla auprès de la fillette, qui se tenait le ventre à moitié pliée en deux. Elle leva la tête pour voir la scène et tourna de l’oeil.
Elle n’avait plus assez de force après avoir courut autant et tenir debout face à la douleur.
Rupert reprit ses esprits et se releva.
Il vit le baraqué chauve et voulut lui donner à son tour une petite leçon. Il tenta de le frapper.

2013.6.13

Carafe

Il l’avait emmenée avec lui.
Le médecin avait dit qu’il était possible de trouver un remède qui pourrait soulager Hélène de son mystérieux mal.
Il y avait un peu trop de « peut-être » mais ce n’est pas comme s’il avait le choix.
Il était rentré chez lui, après une journée bien remplit.
Il avait ouvert la porte, la tête perdue dans ses pensées, il regardait la serrure en la poussant.
Ruminant quelques mots et attendant qu’Hélène lui souhaite la bienvenue.

— Je suis rentré…

Aucun bruit.
Aucun retour.
Il releva la tête en balayant la pièce des yeux.
Il manquait quelque chose sur la table.
La nappe, ainsi que tout ce qui se trouvait sur la table.
Il baissa les yeux.
Hélène était là.
Il ne voyait que ses jambes.
Elle était allongée à côté de la table.
On aurait pu croire qu’elle faisait une sieste, ou une mauvaise blague.
Si la nappe n’était pas par terre avec des débris de verre à quelques centimètres de son corps.

Il ne comprit pas tout de suite la situation.
Il eut un blanc.
Que faisait-elle par terre.
Puis.

— Hélène… ?

En espérant qu’elle lui réponde.
Où que la personne devant ses yeux était quelqu’un d’autre.
Il reconnaissait la robe qu’elle avait l’habitude de porter.
Se rendant compte au bout de quelques secondes qu’il n’avait pas de réponse.
Il posa rapidement ses affaires par terre. Son sac à dos et son manteau.
Il manqua de trébucher en enjambant la petite marche de l’entrée.
Il prit soin d’éviter les morceaux de verre et s’agenouilla auprès d’elle en ne sachant pas trop quoi faire.
Il remarqua que l’eau de la carafe s’était déjà évaporée.
Il se demanda depuis quand elle était dans cet état.
Il écarta précautionneusement la vaisselle cassée et contrôla la respiration d’Hélène ainsi que son pouls.

Son souffle était court et saccadé.
Il ne ressentait presque pas son pouls.
Elle était froide.
Il passa son bras droit sous la taille mince de la jeune fille.
De son autre main, il maintint la tête.
Il l’approcha de lui, et la serra dans ses bras pour lui transférer un peu de chaleur humaine.
Il se releva doucement et la porta jusqu’au lit, et la coucha sous la couverture.
Alors qu’il l’avait bordée depuis quelques minutes, songeant à aller prévenir le médecin.
Elle entrouvrit ses minuscules yeux.
Son corps commençait à se réchauffer et elle reprenait un peu conscience.
Son souffle était toujours aussi irrégulier.
Il fut surpris qu’elle reprenne conscience.
Cela semblait utiliser ses dernières forces.
Elle vit la silouhette familière de Ray. Elle ne voyait pas très clair.
Elle sentit sa présence.
Elle n’arrivait pas à parler.
Elle sentit sa main caresser son visage.
Elle sentit son baiser sur son front.

— Repose-toi.
Murmura t-il.

Elle voulut bouger sa main droite pour le toucher.
Elle ne put que la déplacer de quelques centimètres sous la couverture avant qu’il l’arrête et prenne sa main et en embrasse les doigts.

— Je suis là.
Lui dit-elle. Pour la rassurer.

Elle sombra de nouveau dans un sommeil.
Il éteignit la lumière de la chambre et laissa la porte entrouverte avant de retourner dans la salle principale.
Il voulait pouvoir entendre le moindre bruit.
Il fit un peu de rangement sur le sol pour éviter que quelqu’un ne se blesse.
Ceci fini, il retourna jeter un coup d’oeil dans la chambre pour s’assurer qu’elle dormait et que tout se passait bien.
Il ferma la lumière du salon et partit chercher le médecin.

Le médecin était toujours disponible en cas d’urgence.
Il entra dans le hall et se dirigea vers l’accueil.
L’hôtesse était là et se demandait ce qu’il avait à faire à une heure aussi tardive ici.

— Bonsoir, excusez-moi, est-ce que le docteur Michel est disponible ?
Demanda t-il le souffle un peu court.

— Je suis désolée monsieur, le docteur est en pause actuellement.
Repondit-elle d’un ton doux et calme.

Dans la chambre à quelques mètres de là, les murs étants un peu fins, Michel, à moitié endormi sur son lit, entendit une voix familière.
Après avoir reconnu à qui elle appartenait, il se leva et sortit de la pièce.
Au bruit de la porte, l’hôtesse se retourna.
Elle voulut dire quelque chose mais le médecin leva la main droite pour lui faire signe que ce n’était pas nécessaire et qu’il prenait la situation en main.
Il se dirigea vers lui, surprit.

— Bonsoir, que puis-je faire pour toi ?
Demanda t-il d’une voix chaleureuse. Des poches sous les yeux.

— Bonsoir Docteur, je m’excuse de vous réveiller à une telle heure…

— Ce n’est rien, je dois bien nourrir cette rumeur qui dit que je ne dors jamais… Par contre, je vais aller chercher un thé, suis-moi et raconte-moi ce qui t’ammène. Tu en veux un ?
Dit-il le sourire au coin des lèvres.

— Non merci.
Refusa t-il poliment.

— Tu es bien celui qui a prit la petite Hélène sous son aile, n’est-ce pas ?
— Oui, justement… C’est à son sujet…

Il prit une inspiration et lui raconta la situation.

— J’étais conscient qu’elle avait une santé fragile… Mais je ne pensais pas que son état allait s’agraver…

La main libre sur son menton, songeur.
Il finit son thé et récupéra sa trousse dans sa pièce personelle et lui fit signe de lui indiquer le chemin.

2013.5.27