Un garde de rang supérieur entra brusquement dans la pièce.
— Alexandre ? Veuillez me suivre.
Sa voix était dure.
Il fut surpris.
Lys le regardait d’un air paniqué.
Elle se doutait que c’était en rapport avec ce qui s’était passé hier.
Alexandre acquiesça, il se tourna vers Lys et lui sourit.
Il suivit les pas du garde.
— Merci pour la boisson.
Adressa t-il à Fernando.
Il avait un visage serein, rien à se reprocher.
*
— Bienvenue Alexandre.
Sa voix était claire.
Il mit un genoux à terre et baissa la tête en face de la silhouette qu’il pouvait deviner à travers le voile lumineux.
— Sais-tu pourquoi je t’ai convoqué… ?
Il ne répondit pas.
— Je sais ce qui s’est passé hier, dans les bois.
Sa voix ne laissait transparaître aucune émotion.
— Tu as transgressé la Règle…
On entendit les froissements d’un vêtement. Elle se déplaçait.
Elle se retourna et avança vers Alexandre à pas lents.
La panique envahissait le coeur du jeune homme.
Il acceptait sa sentence.
— Cependant, je te réserve un autre avenir.
La voix le sortit de ses pensées.
Alors qu’il s’attendait à perdre la vie quelques secondes auparavant, il releva la tête.
— Disons que je ferme les yeux pour cette fois.
Il aperçut la mère supérieure.
Elle était habillée d’une longue robe blanche à plis. Son visage était pâle et jeune. Ses cheveux d’un blond vénitien bouclaient à leur pointes et tombaient jusqu’au bas de ses hanches.
La lumière de derrière lui donnait un air irréel.
On semblait voir l’illusion d’un sourire sur son visage.
— Tu peux te relever.
Il s’exécuta en n’osant pas la regarder de nouveau.
Elle était un peu plus petite que lui.
— Sais-tu pourquoi cette loi existe ?
Après une pause, il répondit.
— Pour mieux protéger les gens… ?
Elle acquiesça d’un mouvement de tête.
— Je te propose une formation dans ma garde personnelle. Tu n’as pas besoin de me répondre tout de suite. Considère cela tranquillement. Si tu acceptes, sache que tu auras de grandes responsabilités.
Il était soudainement devenu muet.
La surprise se lisait sur son visage tout entier.
— Toutes tes questions trouveront leurs réponses si tu acceptes ma proposition.
Dit-elle comme si elle devinait ce qui se passait dans sa tête.
Elle lui sourit gentiment.
— Repasse quand tu veux si tu acceptes. Dans le cas contraire, fais comme si de rien n’était. Ne laisse pas les autres choisir pour toi. C’est le seul conseil que je te donnerai.
Il baissa sa tête en signe de remerciements.
— Entendu, j’y réfléchirai à tête reposée.
Il tourna les talons et s’en alla sans jeter de regards derrière lui.
Il semblait calme.
À la sortie, ses yeux mirent un peu de temps à se réhabituer à la lumière du soleil.
*
Il arriva devant le bâtiment et ses portes imposantes.
Il vit sortir un homme aux cheveux noirs. Il semblait ébloui par la lumière extérieure.
Après quelques instants et en se rapprochant, il le fixa comme s’il le connaissait.
Il se demanda s’il avait pu rencontrer cette personne par le passé.
Le garde lui fit signe d’entrer.
Il passa devant l’inconnu qui le dévisageait, lui fit un signe de tête pour dire bonjour, puis pénétra à son tour dans la sombre pièce.
Il comprenait mieux la réaction de son prédécesseur.
Après quelques secondes d’adaptation, il s’avança jusqu’à la source de lumière.
Une silhouette était de dos.
— Bienvenue, Cean.
Au son de la voix, il mit un genoux à terre à quelques mètres de la mère supérieure.
— Tu te doutes de la raison de ta venue…
Il garda son silence.
Des sueurs froides apparaissaient sur son front.
Il fixait le sol.
Le ton froid de la mère supérieure ne le mettait pas en confiance.
— Sais-tu pourquoi la Règle existe t-elle… ?
C’était comme le calme avant la tempête.
Il ravala sa salive et répondit avec précaution.
— Elle existe pour que les gens ne mettent pas en danger leur propre vie… ?
— Oui. Elle enseigne de prendre soin de sa propre vie et de dépendre de soi-même. Sais-tu pourquoi es-tu ici ?
— J’ai mis en danger ma propre vie et que je ne devrais pas être en vie aujourd’hui…
— Pas seulement ta vie, mais aussi la vie d’une autre personne…
Il frissonna. Un sentiment de culpabilité l’envahit.
— Ne t’inquiète pas pour la jeune fille. Elle va bien. Ta vie pose un problème.
Il ferma les yeux, s’attendant au pire.
— Disons que tu as été retrouvé inconscient dans la forêt, dans la version officielle. Aujourd’hui, c’est un avertissement que je te donne. En espérant que tu retiennes la leçon et apprenne de tes erreurs.
Il releva la tête.
— V… vous n’allez pas me punir.. ?
—Ne t’es-tu pas assez puni par ta propre bêtise ?
Répondit-elle.
Il regarda ses blessures et se tut.
— La chance que tu as eu hier ne se reproduira pas.
Elle se tourna vers lui, d’un pas léger.
Il fut stupéfait de la beauté et de la jeunesse de la mère supérieure.
Elle leva l’index droit jusqu’à devant ses lèvres.
— Gardons secret ce qui s’est réellemment passé.
2013.3.7