Respect

Depuis que Chris avait fait tomber son mensonge sur ce qu’il ressentait pour Alexandra, elle était sur un petit nuage.
Elle retombait amoureuse de lui, même si elle devait se comporter comme si de rien n’était, elle profitait de chaque instant qu’elle pouvait passer en privé avec Chris pour le prendre dans ses bras, le coller.
Et ils couchaient ensemble. Régulièrement.
Alexandra était adulte et elle savait ce qu’elle faisait, elle prenait le plaisir de la chair et le partageait avec Chris sans aucun remord.
Ils avaient discuté longuement et elle avait tiré un trait sur leur union de manière officielle.
Chris lui avait fait promettre cette clause si elle voulait continuer à entrenir cette relation avec lui. Il ne voulait surtout pas mettre son avenir en péril.

Gabriel en pâtit de ce changement.
Lui qui commençait à éprouver un attachement pour la jeune femme, il essayait de faire en sorte qu’elle s’intéresse à lui, mais elle n’avait d’yeux que pour Chris. Il le vit et, même s’il ne souhaitait pas s’immiscer dans la vie privée d’autrui, il dut prendre Chris à part pour en parler.
Il le convoqua à son bureau.
Il ne tourna pas autour du pot et posa les questions qui fâchent.

— Si je t’ai convoqué ici aujourd’hui, tu te doutes que ce n’est pas pour te demander comment ça va.

Chris resta silencieux.

— Je ne vais pas y aller par quatre chemins. Je veux que tu sois honnête et sincère avec moi. Qu’elle est la relation que tu entretiens avec Alexandra ? Je ne suis pas aveugle, je vois comment elle te regarde.
— … Je suis son garde du corps…
— Tu n’es pas que ça. Dis moi.
— Et plus. Nous avions eu une relation à une époque et… je crains qu’elle ait encore des sentiments à mon égard.
— Est-ce que ces sentiments sont réciproques ?
— … Je lui ai fait promettre de ne pas rompre votre accord pour moi.
— Là n’est pas ma question. Est-ce que tu l’aimes ?
— Oui.

Gabriel soupira.

— Ne la sanctionnez pas, j’en porte l’entière responsabilité-
— Arrête. Je ne vais rien faire. Il y a des choses qu’on ne peut pas controler et je ne peux pas la forcer à quoi que ce soit.
— Mais votre contrat… ?
— Il ne stipule pas qu’elle soit ma propriété. Elle est libre de faire ce qu’elle veut avec qui elle veut… je suis juste… peiné… parce que je crois ressentir quelque chose pour elle et je vois bien que ce n’est qu’à sens unique.
— Vous-
— Oui, tu m’as entendu. Je ne sais pas comment m’y prendre pour qu’elle me regarde et qu’elle me considère. Tu peux rire de moi.
— Non… je n’oserai pas… je peux peut-être lui en toucher un mot…
— Surtout pas ! Laisse la, elle a l’air tellement heureuse à tes côtés, je ne peux pas lui enlever ça.
— Je… je suis désolé.
— Ne le sois pas. Merci pour tes explcations, je comprends mieux et je ne t’embêterai pas plus.

*

Chris se sentait mal pour Gabriel. Il n’avait, au premier abord, pas une bonne opinion de ce viel homme beaucoup trop sûr de lui, suffisant et hautain, mais le voir aussi vulnérable à cause de ce qu’il ressentait, lui avait fait reconsidérer la chose.
Ce n’était pas un mauvais type et il pensait au bien-être d’Alexandra. Finalement.

*

Colère.
Elle s’était emportée, tabassant un combattant sur le terrain d’entraînement, Chris était intervenu pour empêcher Alexandra d’en faire plus, mais le mal était fait.
L’homme était à terre, à moitié conscient, le nez en sang.
Elle était furieuse, les sourcils froncés, le regard noir.
Elle avait effrayé plus d’une personne aux alentours.
Gabriel avait eu vent de l’évènement et avait demandé des explications
Alexandra ne voulait rien entendre, elle se débattait pour se libérer et finir la personne qui avait manqué de respect.

Gabriel dut intervenir et il dut lui injecter un tranquilisant pour l’immobiliser et l’endormir.
Il demanda à Chris des explications pendant que l’autre homme était emmené à l’infirmerie pour se faire examiner.

— C’est une furie… elle aurait pu me tuer !
Dit-il, en jetant à peine un regard vers Chris.

— Oui, je confirme… c’est ce qu’elle voulait faire.
Répondit-il, sans chercher à vouloir atteindre son interlocuteur

Il l’entendit et un froid glacial parcourut son dos.
L’autre partit, en ruminant et se plaignant un peu de trop de sa blessure au visage.
Ils se rendirent dans le bureau de Gabriel, il allonga Alexandra sur un divan et posa un duvet sur elle.
Il invita Chris à s’asseoir en face de son bureau et l’interrogea.

— Je te fais entièrement confiance, raconte moi ce qui a put la mettre dans cet état.

*

Ils se baladaient dans les couloirs.
Alexandra était de bonne humeur et elle marchait côte à côte avec Chris.
Lorsqu’elle entendit des aboiements derrière elle.
Elle se retourna, et ne comprit pas ce qu’il se passait ni pourquoi des hommes étaient en train de rire.
Elle crut comprendre que les rires étaient adressés dans leur direction.
Elle se tourna vers Chris, l’air de lui demander s’il en savait plus. Il continua son chemin sans relever.
Elle trouva son comportement étrange et le rattrapa en trottant et se positionna devant lui pour qu’il s’arrête.
Il n’avait aucun moyen de fuir.

— Tu me caches quelque chose… ? J’ai l’impression que tu sais…
— Ce n’est pas important.
— J’ai l impression que si.

— On peut y aller ? Je t’expliquerai mais pas ici.
Chris voulait s’éloigner, et il était en train de presser Alexandra.

— Bah alors, qu’est-ce qu’il t’arrive le petit toutou ?
La voix se rapprochait et les interrompit.

Il était accompagné de plusieurs hommes qui roulaient des épaules.
Alexandra fut interpelée et Chris lâcha un énorme soupir.

— Pardon ? C’est à nous que vous vous adressez ?
Demanda t-elle.

— Viens Alexandra, on s’en va…
Chris essaya d’échapper à la situation.

— Non, je crois que j’ai pas bien entendu ce qu’il a dit.
Alexandra s’interposa et s’approcha de cet individu en laissant Chris derrière elle.

— Bien le bonjour mademoiselle Alexandra.
S’inclina t-il, ses acolytes faisant de même. Ils semblaient remarquer sa présence qu’à cet instant.

— Bonjour. Pouvez-vous répéter ce que vous avez dit auparavant ?
— Oh… ce n’est que le surnom affectif qu’on donne à votre garde du corps. Rien de méchant, n’ayez crainte.
— « Petit toutou »… ? Vous vous moquez de moi ?
— Absolument pas, mademoiselle. Votre garde est d’un rang inférieur… n’avez-vous jamais songé à prendre quelqu’un d’un rang plus prestigieux qu’un simple… paysan ? Voyez-vous, je ne suis pas le seul à penser qu’il ne mérite pas d’être à vos côtés. Il n’est que l’ombre d’un chien-

Elle lui asséna une droite qui le fit tomber à terre, et elle ne ne laissa pas se relever.
Ses amis reculèrent d’un pas et songèrent à partir en courant.
Elle avait essayé de contenir ce qu’elle ressentait mais plus son interlocuteur était en train de parler, plus elle sentait sa colère monter, puis elle finit par éclater.

— Ne vous avisez pas de manquer de respect à Chris…

Elle voyait rouge et ce n’était pas que le sang qu’elle était en train de faire couler, c’était également son propre sang parce qu’elle avait frappé tellement fort qu’elle avait esquinté la peau de ses phalanges.
Chris paniqua et l’attrapa, la bloqua pour pas qu’elle fasse plus.

— Alexandra !! Calme toi ! Ca suffit !

Elle ne semblait rien entendre, il l’avait rarement vu comme ça.
Leur grabuge avait finit par attirer l’attention et les rumeurs circulant comme une trainée de poudre au vent, Gabriel arriva relativement rapidement.

*

Gabriel ne savait pas s’il devait en rire ou être consterné.
Il avait dû endormir Alexandra pour qu’elle se calme, elle était dans un sommeil profond à quelques mètres de lui et de Chris. Allongée dans le divan de son bureau.
Il venait d’entendre la version des faits de Chris et il ne la remettait pas en cause.
Il ne savait pas quelle décision prendre concernant ce qui venait de se passer.
Il allait devoir convoquer son employé et remonter les bretelles des deux protagonistes. Alexandra allait être réprimandée, c’était sûr. Même si elle était une invitée de marque sur son domaine. Il ne pouvait pas lui octroyer un privilège aussi grand.

Elle se réveilla, un peu groggy, Gabriel vérifia qu’elle était bien en état de réfléchir et l’entendre calmement.
Elle était trop occupée à se demander ce qui venait de se passer et pourquoi elle était ici, pour se rappeler sa colère. Ce fut Gabriel qui le lui rappela et la prévint qu’elle allait devoir des excuses à son employé. Il avait essayé de lui expliquer de la manière la plus neutre pour qu’elle ne s’emporte pas mais elle boudait.
Chris dut quitter la pièce.
Alexandra était assise devant le bureau de Gabriel avec l’autre personne, qui avait un pansement sur le nez.

— Votre comportement est innaceptable. Alexandra, c’est un avertissement sévère que je vous fais, on ne se bat pas dans un lieu inadapté comme un couloir, et on ne frappe pas gratuitement mes employés.

Elle avait baissé la tête, et la personne à côté d’elle avait gonflé le torse, en prenant une position de supériorité face à elle.
Elle sentait qu’il la narguait mais elle préféra l’ignorer en restant silencieuse.

— Quant à vous, vous avez obligation de donner des excuses à notre invité Chris. Lui comme Alexandra, m’ont sauvé la vie, et je ne tolèrerai aucune quelconque marque d’irrespect à leur égard. Est-ce clair ? Si cela venait à se reproduire, je m’occuperai personnellement de la sanction, et ce que vous avez pu subir ne sera qu’une égratinure en comparaison. Est-ce que je me suis bien fait comprendre ?
— … Oui, monsieur… je… pardonnez moi…
— Ce n’est pas à moi que vous devez vous faire pardonner. Tachez que vos excuses soient adressées à la bonne personne.

Il inclina sa tête et déglutit.

— Sur ce, vous pouvez disposer.

L’employé se leva sans tarder et sortit, laissant Alexandra avec Gabriel.
Il sortit en furie, en tâchant de ne pas trop montrer qu’il était mécontent de la conclusion de cette convocation.
Alexandra ne savait pas si elle devait se réjouir devant Gabriel. Elle ne s’en tirait pas trop mal, finalement mais cela était tout de même un avertissement concernant son comportement.
Elle quitta la pièce en restant neutre et courtoise.
Elle sauta dans les bras de Chris qui l’attendait.

*

Chris ne se sentait pas en forme ce jour là.
Il devinait qu’il avait un début de migraine et sa température corporelle était anormalement élevée.
Il avait la nausée et il préféra sauter le repas du midi.

Alexandra s’inquièta de ne pas le voir à la cantine et elle demanda aux alentours si on ne savait pas où il était. Cela ne lui ressemblait pas de s’éclipser sans la prévenir.
Elle finit son plat et ne le voyant pas arriver, elle alla le chercher. Elle le trouva à l’ombre d’un arbre, assis et perdu dans ses pensées.

— Tu étais donc là ! Qu’est ce que tu fais ? C’est l’heure de manger, je t’ai pas vu à la cantine, qu’est-ce qui t’arrive… ?

Elle voyait qu’il n’était pas dans son état habituel.
Il avait le regard dans le vide et il tremblait légèrement.
Il essaya de se relever, et Alexandra s’approcha aussitôt pour le soutenir.

— Chris… ? Tu vas bien… ?

Il ne donnait pas de réponse et elle s’inquiétait de plus en plus.
Lorsqu’elle entra en contact avec sa peau, elle remarqua qu’il était brûlant.

— Chris… ! Tu… !
— Ca va… je crois que je suis un peu…

Il ne réussit pas à finir sa phrase, la main sur son front pour essayer de faire passer sa migraine qui lui donnait le vertige, inutilement, il perdit contrôle de ses jambes et s’écroula.
Elle le rattrapa dans ses bras et réussit à le refaire s’asseoir, adossé contre l’arbre.
Elle paniqua. Elle avait rarement vu Chris malade et encore moins dans un état comme celui-ci. Elle ne préférait pas penser à la fois où il avait failli mourir à cause d’elle.
Elle l’allongea lentement et partit chercher de l’aide pour le transporter à l’infirmerie.
Le coeur battant à toute allure, elle l’accompagna et resta auprès de lui pendant le diagnostic.
La médecin la rassura et dut la forcer à quitter l’infirmerie.
Malgré ses efforts pour ne pas y repenser, elle craignait de le perdre encore une fois.

Gabriel arriva pour discuter avec Chrystal et après son rapport, il échangea quelques mots avec Alexandra.
C’était la première fois qu’il la voyait aussi émotive et inquiète. Elle était aux bords des larmes et ne savait pas quoi faire.
Chris avait perdu connaissance et ne semblait pas pouvoir se réveiller, pour elle, ce n’était pas bon signe.
Chrystal et Gabriel cherchaient à la rassurer du mieux qu’ils pouvaient mais elle avait un terrible pressentiment.
Elle essayait de leur faire confiance, mais concernant la santé de Chris, elle perdait pieds.

— Ca me fait énormement de peine de te voir ainsi. Chris va aller mieux, il respire, Chrystal va prendre soin de lui et le remettre sur pieds. Tu n’as pas à t’inquièter autant.

*

Il faisait nuit, la lueur de la lune pénétrait dans la pièce à travers des volets fins aux fenêtres.
Alexandra était sur le point de quitter l’infirmerie, elle avait retenu ses larmes mais elle ne pouvait pas le faire indéfiniment. Elle avait veillé Chris aussi longtemps qu’elle le pouvait, et Gabriel était passé voir comment ça allait.

Il la suivit, il voyait à quel point elle était affectée par l’état de santé de Chris. Ce n’était pas un simple garde du corps, il le savait et il avait été prévenu de la relation particulière qu’ils avaient, mais le voir et le constater de ses propres yeux était different. Il ne pensait pas que cela ne le laisserait pas indifférent.
Il ignorait si c’était la tristesse d’Alexandra qui le rendait si émotif ou l’inquiètude qu’elle avait pour Chris. Quoi qu’il en soit, il avait cette présence désagréable au creux de sa poitrine qui ne semblait pas près de disparaître.
Inconsciemment, il rattrapa Alexandra, sans savoir réellement ce qu’il voulait faire, son corps bougea de lui-même, il lui attrapa la main, la forcant à s’arrêter et se retourner dans sa direction.

Les yeux rouges, mouillés, elle le regarda, le suppliant de la laisser libérer ses glandes lacrimales dans un lieu sans aucun témoin.

Son coeur se resserra dans sa poitrine, il ne pouvait pas la laisser seule avec son chagrin.
Pourquoi était-elle aussi inquiète alors que Chris était juste malade ? Sa vie n’était pas en danger. Il ne comprenait pas.

— Alexandra… tu n’as pas à t’isoler. Sache que je suis là, si tu as besoin d’une épaule… Chris va aller mieux, il a juste besoin de repos.
— Je sais… je le sais… c’est idiot de ma part… je ne peux pas m’empêcher de…

Les larmes roulèrent sur ses joues et elle essaya de les essuyer avec sa main libre.
Gabriel la tira vers lui, la serrant dans ses bras et elle ne put se retenir plus, la chaleur et le réconfort de Gabriel la toucha et elle se laissa aller en pleurant sur son torse.

— Je… je suis désolée… je sais que ce n’est pas grave mais… je le vois rarement malade et son état me rappelle la fois où il était gravement blessé… c’est stupide n’est-ce pas ?… Cette fois-là, j’ai cru qu’il allait mourir et c’était ma faute. Il était dans cet état à cause de moi…

*

Chrystal prit Gabriel à part pour parler en privé.
Elle avait osculté Chris et elle savait que son état n’était pas naturel. Elle lui expliqua que cela venait d’un mage de chez eux, et qu’il n’y avait aucun doute là dessus.

Gabriel prit les précautions nécessaires et sans en dire un motà Alexandra, il se rendit voir le coupable.
Le responsable de l’état de Chris n’avait aucun remords et pensait faire cela pour Gabriel, pour son profit et qu’Alexandra s’intéresse enfin à lui.
Il dut rester diplomate et lui expliquer qu’il souhaitait réussir à gagner le coeur d’Alexandraà la loyale.
Sans le vexer, et heureusement, il fut compréhensif
Il proposa de faire mourir Chris d’une mort qui paraîtrait naturelle aux yeux des autres, en ayant pour complice Chrystal et Gabriel mais il refusa catégoriquement.

Chris reprit connaissance dans les heures qui suivirent et Alexandra pleura de joie.
Gabriel les laissa. Il ne voulait pas la voir triste et il était satisfait de son choix. Son bonheur faisait le sien. Il aurait préféré que ces émotions lui soient directement adressées mais il ne pouvait pas forcer les sentiments.

2021.11.03

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