Cassée

Elle ouvrit lentement les yeux, comme si elle se réveillait d’un mauvais rêve mais elle avait encore en mémoire le corps étranger qui l’avait pénétré, la douleur ressentie et l’impuissance face à son agresseur.
Elle aurait tellement préféré que tout ceci ne soit qu’un cauchemar mais les sensations et sa mémoire l’empêchaient de balayer ça d’un revers de la main.
Elle ne savait pas comment réagir ni où elle était.
Elle se souvenait vaguement de ce qu’il s’était passé avant qu’elle ne perde connaissance et son premier réflexe fut de penser à sa soeur.
Elle pencha la tête lentement pour observer ce qu’il y avait autour d’elle.
Elle reconnut une infirmerie, peut-être celle du domaine de ses parents, puis elle vit, un peu flou mais elle discerna, sa soeur sur le lit d’à côté, en compagnie du médecin en chef.
Elle rassembla les pièces du puzzle et elle sourit timidement, rassurée que sa soeur était avec elle.
Elle referma ses paupières.
Il lui était encore difficile de les garder ouverts longtemps, mais son ouïe était intacte.
La voix et le ton d’Hélène laissaient penser qu’elle était en meilleure forme.

— Aurore… !

Helene remarqua les mouvements faibles du lit d’à côté et s’exclama. Elle bondit en dehors de sa couverture pour aller la voir de plus près.
Elle entendit le médecin soupirer et s’exaspérer, puis la rejoindre.
Il examina Aurore, tâtant son pouls, vérifiant les perfusions.

— Comment te sens-tu, Aurore… ?

Ce à quoi elle ne répondit pas.
Elle ne savait pas quoi répondre.
Elle serra les draps avec ses poings.
Elle se sentait souillée, salie, honteuse. Elle n’avait rien pu faire. Elle n’arrivait pas à exprimer ce qu’elle ressentait.
Elle savait que sa question concernait son état physique mais elle était trop préoccupée par son état mental.

— Est-ce que tu as mal quelque part… ? Tu as faim ? On peut t’apporter ce que tu veux, n’hésite pas à nous le dire.

— … Non… merci.
Réussit-elle à répondre, faiblement.

Elle avait envie de vomir, elle se dégoutait, ce qu’on lui avait fait la dégoutait. Elle n’avait certainement pas faim.

— Il faut que tu avales quelque chose, c’est pour ton bien…
Insista t-il, sans succès.

Aurore ne dit rien de plus.
Elle détourna le visage et perdit son regard sur un point imaginaire de la pièce.

— … Je sais que tu viens de te réveiller, mais Hélène m’a raconté ce qu’il s’est passé là-bas… j’ai besoin de ton autorisation pour vérifier que tu n’as pas été infectée par une maladie sexuellement transmissible… et te faire prendre un équivalent de pilule du lendemain, mais un peu plus efficace, puisque ça fait un peu plus de 24h…

— D’accord…
Murmura Aurore, toujours perdue dans ses pensées.

— Dans ce cas, je vous laisse quelques minutes, je reviens après.
Annonca t-il, laissant les deux soeurs ensemble.

*

Au bout de plusieurs jours. Hélène put quitter l’infirmerie, à contre-coeur. Elle voyait qu’Aurore n’allait pas bien.
Le médecin la rassura, mais elle n’était pas sereine.
Sa mère et Chris étaient passés le lendemain matin.
Alexandra se fondit en excuses, de précautions qu’elle aurait dû prendre pour éviter cela mais Hélène n’était pas du même avis.

— Maman… nous sommes grandes et nous ne pouvons pas vivre dans une cage dorée et tu ne peux pas nous protéger de tous les dangers… on fera plus attention la prochaine fois. Ce n’est pas de ta faute… ni la faute de personne…

Il eut beaucoup d’étreintes.
Puis lorsqu’ils discutèrent avec Aurore, ils sentirent que cela n’allait pas.
Alexandra continua à s’excuser mais Aurore sourit pour la rassurer, puis Chris proposa à Aurore de voir un médecin psychologue spécialisé pour pouvoir l’aider à surmonter cette expérience traumatisante.
Elle déclina poliment cette offre.
Elle mit un peu plus longtemps avant d’avoir l’autorisation à quitter le cadre de l’infirmerie.

— Aurore… il faut que tu manges. Je sais que je t’en demande beaucoup mais je ne peux pas te laisser partir en sachant que tu ne te nourris pas assez. Tu as déjà perdu énormément de poids… le traitement que je t’ai donné a en plus déclenché tes règles…
Le médecin en chef était inquiet et ce n’était pas le seul.

Elle essaya de se forcer et manger.
Lorsqu’elle put quitter l’infirmerie, toute sa famille et ses amis la surveillaient de près et de loin.
Ten’ fut plus qu’heureux de pouvoir veiller sur sa maîtresse. Il fut au pied du lit dès qu’elle fut à l’infirmerie et ne la quitta plus après.
William était également passé la voir.
Elle avait terriblement maigri. Elle n’était pas spécialement épaisse avant mais là, c’était frappant.
Il n’avait pas pu feindre et il lui dit.
Elle afficha un sourire timide sur son visage sans aucune émotion, en guise de réponse.

— Aurore… tu m’inquiètes vraiment… je te le dis sincèrement parce qu’on se connait et que tu sais que je ne te mentirais jamais… tu dois consulter et reprendre une alimentation suffisante.
— …
— Tu ne travailles plus, j’imagine ?
— Non… j’ai prévenu mon patron et je suis actuellement en arrêt maladie jusqu’à nouvel ordre…
— Ok, ça me rassure…
— Tu crois que je le fais exprès… ? Je… j’ai la nausée… lorsque je me vois dans le miroir, j’ai envie de vomir… ! J’aimerai retrouver ma forme d’avant… !
— Je ne sais pas… je te dis juste à quel point je m’inquiète et on s’inquiète pour toi.

Alors que Hélène et Alain s’étaient remis sérieusement aux entraînements sur leur temps libre, Aurore souhaita également se mettre sérieusement à la pratique de la magie. Elle voulait être assez forte pour se protéger et protéger les autres.
Ce fut Alexandra qui fut sa professeure , c’était la plus qualifiée pour la magie et ainsi elle pouvait vérifier qu’Aurore se nourissait bien.
Elle avait fini par passer à une alimentation principalement liquide, tout ce qui était soupe, jus et boissons énergétiques, pour tenter de reprendre goût à la nourrriture.

*

Rêve cauchemar pas canon de Hélène au sujet de leur séjour.
Elle se réveille en sursaut, en sueurs en plein milieu de la nuit, après avoir vu l’expression morte d’Aurore à l’infirmerie, après leur retour chez elles.
La culpabilité est encrée en Hélène.
Elle souffle de soulagement de savoir que ce n’est qu’un mauvais rêve.

Par acquis de conscience, elle va s’entraîner plus dur et plus régulièrement, revenant assister aux cours de son père.
Elle demandera à son père de l’entraîner plus sérieusement en plus des cours réguliers.
Il sourira en repensant à Alexandra à son âge, avec la fouge de l’époque.

— Pourquoi tu souris comme ça, papa ? J’ai fait quelque chose mal… ?
— Non non… je me disais que tu ressemblais vraiment à ta mère, ainsi… avec cette énergie à revendre… lorsqu’elle était beaucoup plus jeune.
— … C’est flatteur mais… elle était comment maman, à cette epoque… ? À mon âge, elle avait déjà Cean, non ?
— C’est vrai. Tu me rappelles ta mère quand elle avait 16-17 ans et que je l’entrainais.
— Elle avait quel niveau à cet âge ?
— Hm… à peu près le tien, actuellement. Si je me rappelle bien…
— La vache ! Mais elle était super précoce ou quoi ?!
— Elle passait ses journées à s’entraîner… pour que son père soit fier d’elle. Ils n’étaient pas très proches. Il était trop occupé par ses responsabilités.
— Ah… je ne me rends pas trop compte parce que… on passe quand même beaucoup de temps ensemble, nous… tous ensemble.
— Oui. Tu pourras demander à papi Phyl la prochaine fois que tu le vois. Ce n’était pas facile, il était tout seul à tout gérer et je l’aidais de temps en temps, dans l’ombre. Rien à voir avec comment Gabriel gère ça aujourd’hui. Il peut compter sur maman et il reste proche de Cean et Aurore.
— Ca a l’air compliqué quand même…
— Ca, c’est sûr. P’tre que maman a eut son motà dire sur cette relation, pour ne pas recréer le cadre dans lequel elle a grandit avec son père. Enfin, maintenant ça va mieux, mais à l’époque elle en a souffert de son absence.
— Je vois…
— Allez, assez parlé. Tu commences ou je commence ?
— Ah… !

2 réflexions sur “Cassée

  1. FluoCrazyKenny dit :

    J’ai tellement envie de faire un gros câlin à Aurore… ça me rend triste de la voir comme ça.

    Et à Hélène aussi mais quelque chose me dit que Hélène va mieux s’en sortir qu’Aurore…

    • J’avais commmencé à rédiger un arc où Aurore allait pas bien, mais j’suis pas allé au bout.
      Hélène a déjà traversé des périodes pas cool, donc elle est un peu moins sensible à ça, même si c’était traumatisant…

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.