Palier

— Qu’est-ce qu’on fait alors ?

— Je n’ai pas le choix… on ne peut pas annuler ton voyage… je vais devoir t’accompagner.
Dit-il en faisant mine d’être contraint.

— Tu plaisantes ?

— Non, à peine. Puis ça nous ferait du bien d’avoir un peu de temps, loin du travail. Que nous deux… ça fait je ne sais combien de temps.

— … Tu n’as pas tort… mais comment on va faire ?

— On ne part pas très longtemps, puis les enfants sont grands. Et ils ne seront pas seuls. Chris sera avec eux.

— … S’il est d’accord.

— Je pense que oui.

Ils regardèrent autour d’eux.
La pièce était sans dessus dessous.
Ils se mirent à ramasser les feuilles qui avaient fini par terre et partout dans le bureau, ainsi que les livres tombés.
À la fin du rangement, le coup qu’elle avait pris contre la bibliothèque avait marqué son visage. Elle s’était cognée et assez fortement. Un petit bleu commençait à faire son apparition et une petite plaie saignait.
Elle ne remarqua rien.

— Tu saignes un peu… et tu vas avoir une belle bosse.
Dit-il, en lui montrant sur son propre visage l’endroit.

— Mince… j’oublie qu’en étant demi-humaine, mon corps est plus fragile… C’est pas grave. Ça va cicatriser et j’aurai un beau bleu…
Soupira t-elle.

— Tu es sûre que tu ne veux pas passer par l’infirmerie avant… ? C’est de ma faute—
S’inquiéta t-il.

— Arrête, c’est la mienne de n’avoir pas évite ton revers, si j’avais été plus attentive. Je passerai à l infirmerie au cas où. Pour être sûre de ne pas m’être cassé autre chose…
Soupira t-elle.

Lorsqu’elle en resortit.
Le médecin l’avait rassurée et elle avait juste un petit pansement et une pommade pour la bosse.
Les regards étaient inquiétants et les rumeurs allaient vites.
Compte tenu de sa blessure et les gens ignorant sa condition de demi-humaine, ils étaient en train de se dire que la dispute avait été violente et qu’elle avait été blessée par Gabriel.
Elle savait que c’était faux, mais elle ne pouvait pas empêcher les gens de parler.

Elle rentra chez elle et Chris l’accueilla, et vérifia qu’elle allait bien.

— Tu peux pas savoir à quel point j’étais inquiet. J’ai eu vent des rumeurs…. et de ne pas pouvoir te voir avant la fin mes heures de travail… tu vas bien… ? Lorsque gabriel va rentrer… il va voir…

— Chris, ce n’est rien et Gabriel n’y est pour rien. J’ai pas fait attention et c’est moi qui l’ai provoqué…

— Ce n’est pas une raison pour te blesser !

— On se disputait… pour des broutilles. Je me suis emportée…

Il s’approcha d’elle et regarda son petit pansement sur l’arcade sourcilière.
Il leva ses mains mais n’osait pas la toucher.

— Tu n’as vraiment rien ? Tu n’as mal nulle part ?

— Oui… ! C’est vraiment qu’une égratinure. Tu sais à quel point je marque facilement.
Le rassura t-elle.

Il soupira.

— Bon, vous vous disputiez pour quoi ?
Demanda t-il finalement.

— … Tu te souviens du voyage organisé ? Je devais y aller seule…
Dit elle en craigant sa réaction.

— Hm… vaguement… j’avais oublié à vrai dire. Ça a été confirmé ?

— Oui… et Gabriel n’a pas trop apprécié…

Chris soupira à nouveau.

— Vous avez décidé quoi ?

— Il… va m’accompagner. Si tu es d’accord… ?

Un ange passa.

— Est-ce que j’ai vraiment le choix… ?
Dit il, résigné.

— Oui…
Elle baissa les yeux.

— Bien sûr que je suis d’accord.
Se pressa t-il de dire. Se baissant pour regarder Alexandra dans les yeux.

— C’est que quelques jours, n’est-ce pas ? Les enfants sont grands maintenant, et je serai aussi plus serein de savoir que tu n’es pas seule. Je t’aurais bien accompagné à sa place, mais j’ai des obligations ces prochains jours.

Il raconta tout cela en espérant la rassurer et qu’elle ne culpabilise pas de le laisser de côté durant quelques jours.
Elle fit une moue, pas convaicue par ses arguments, même solides.

*

Lorsque Gabriel rentra, Chris ne lui laissa pas le temps de se déchausser, qu’il l’avait attrapé par le col.

— Bonsoir— ?
Dit Gabriel, avec étonnement.

Les enfants étaient dans le salon et ils se figèrent à la vue de cette scène.
Alexandra dut se lever et intervenir, rassurant les enfants et leur ordonnant de retourner dans leur chambre.
Bien entendu, ils restèrent dans le couloir des chambres, derrière le mur, regardant l’issue de la scène et inquiets pour leur mère, et de sa manière de gérer cette situation.
Elle se précipita entre Chris et Gabriel et somma Chris de lâcher Gabriel, elle s’était mise entre les deux et essayait de calmer Chris tout en gardant une distance de sécurité entre lui et Gabriel.

— Chris, calme-toi. On en a discuté…

— Laisse-moi m’expliquer avec lui. Il n’a pas à lever la main sur toi !

Elle tendait ses mains pour l’empêcher d’approcher.

— Je t’ai dit que c’était un accident ! Tu vas rester dessus longtemps ?
Elle commençait à s’impatienter.

— Je veux entendre ce qu’il a à dire pour sa défense.

Chris l’ignorait et s’était rapproché de Gabriel. Elle se retrouva coincée entre les deux hommes.

— Comme elle a dit… je ne l’ai pas fait exprès, je m’en veux déjà assez. Après si tu cherches à te battre, on peut régler ça immédiatement.
Répondit Gabriel calmement.

Il prit Alexandra par les épaules et la décala loin d’eux.
Ce fut à son tour d’hausser le ton.
De sa petite taille, elle poussa violemment les deux hommes.

— Personne ne se bat dans cette maison. Si vous voulez vous mettre dessus, faites le dehors !

Elle les tira jusqu’à l’extérieur et referma la porte derrière eux, les laissant pantois sur le paillasson.

— Les enfants, si vous ne faites rien, venez m’aider à faire à manger.
Dit-elle en reprenant une voix normale.

Elle savait qu’ils étaient dans le couloir et qu’ils avaient assisté à la scène.
Ils sortirent de leur cachette et firent un câlin à leur mère.

Dehors, Gabriel et Chris se trouvèrent bien idiots.

— On fait quoi maintenant… ?
Demanda Gabriel.

Ils s’étaient calmés et étaient punis comme des enfants.

— … Tu crois qu’on va devoir rester là longtemps ?

Gabriel se déplaça pour s’asseoir sur un rebord en pierres, et soupira.

— Le temps qu’elle ne nous en veuille plus. Au moins.

Chris le rejoignit et s’assit également.

— Bon, tu m’expliques ?

— Je te l’ai déjà dit. Je n’ai pas fait exprès. Nous étions tous les deux en colère et lorsqu’elle m’a foncé dessus pour me frapper. Genre vraiment violemment. J’ai paniqué et je l’ai repoussée. Sauf qu’elle n’a pas eu le temps d’éviter mon coup. Elle était tellement en colère… enfin bref. Je l’ai projetée contre la bibliothèque du bureau.

Il racontait ce dernier détail tout en se remémorant la scène, le visage dans ses mains, il n’en était pas fier.
Chris voyant la sincérité de son récit, et sa réaction, se mit à sa place et ne dit rien. Accepta tout simplement de lui pardonner. Sa colère n’était plus.

— On est censé la chérir et la protéger…
Dit-il sans arrière pensée.

— Je sais. Je le sais… tu te doutes bien que ça m’a vite refroidi. Et j’avais oublié qu’elle marquait aussi facilement. Je te raconte pas la honte quand on est allé à l’infirmerie. Ils ont cru que je la frappais.

Chris s’est mis à pouffer de rire.

— Tu peux rire… ils m’ont mis à l’ecart et lui ont posé plusieurs fois la question. Si ça allait et qu’elle voulait en parler. Je ne savais plus où me mettre quand elle me l’a rapporté.

Voyant son comparse rire de vive voix, il arrêta son récit et se mit également à sourire, puis rire doucement, se rendant compte du ridicule de la situation.

— Surtout qu’on a tous les deux crié et avec le boucan qu’on a fait dans le bureau… les témoins ont dû s’inquiéter.
Ajouta Gabriel, en reprenant sa respiration après avoir rit aux éclats.

— Les nouvelles, ou plutôt les rumeurs, ont vite circulé. J’ai des collègues qui sont venus en courant dans la salle des prof’ pour en parler, paniqués… certains avaient oublié que j’étais dans la même pièce. Je te dis pas comment j’avais hâte que la journée soit finie pour pouvoir avoir la vraie version des faits… la boule au ventre.
Excuse-moi… Je te dois aussi des excuses. De la voir blessée, ça a ravivé des souvenirs et j’ai vu rouge…

— Bon, puisque nous sommes reconciliés et calmes. On rentre ?

2020.05.28

— Si elle nous l’autorise…

Colère

Ils s’étaient mis à se battre dans le bureau de travail.
Les feuiilles sur la table qui formaient une pile avaient virevoltés dans la pièce puis sur le sol. Les mouvements et échanges de coups vifs et puissants les avaient emportés.

Le ton était rapidement monté à partir du moment où Gabriel avait claqué la porte derrière lui.
Laissant éclater la colère qu’ils contenaient en eux, ils profitaient d’être seul à seul pour s’exprimer.

Elle se retourna aussitôt pour lui faire face et s’adresser directement à son époux.

Il essayait de contenir sa rage et serrait le poing, levant à moitié sa main devant elle.

2020.05.06

Il était rare mais cela arrivait que le ton monte entre Alexandra et Gabriel.
Ils essayaient de ne pas s’emporter devant les enfants, mais il arrivait que cela explose malgré eux.

Cette fois-ci, elle entra dans le bureau hors d’elle, et il la suivit en claquant la porte derrière lui.
Elle sursauta et ce comportement l’énerva encore plus.

— Tu es obligé de claquer cette porte ?!
Elle haussa le ton sans s’en rendre compte.

— Et toi, es-tu obligée d’être aussi désagréable ?

— À qui la faute !
Elle leva les bras en l’air avant de les laisser retomber le long de son corps, exaspérée.

— Parce que c’est de ma faute ? Tu te mets en danger, c’est normal que je m’inquiète ! Est-ce que tu peux être moins égoïste ?

— Égoïste ? Moi ? J’ai le droit de choisir pour moi, quand même ! Je suis assez grande pour savoir si je me mets en danger, non ? Je sais me défendre !

— Je veux bien voir ça !

— Tu veux qu’on règle ça à mains nues ?! Il faut que je te batte pour que tu comprennes que tu n’as pas à me sur-protéger de la sorte ?!

Il s’approcha d’elle et tendit sa main qu’elle rejeta avec violence.

— Tu vas me parler sur un autre ton.
Sa voix était grave et grondante.

Il s’approcha encore et elle ne se démonta pas, elle le repoussa avec toute sa force.

— Tu t’es entendu, avant de me dire ça ?

— Arrête ça… !
Sa voix résonnait entre les murs.

— Toi, arrête !

Le ton et la tension montaient entre les deux.
Elle avait beau être plus petite, moins musclée, elle se défendait et il semblait l’ avoir oublié.
Cela n’arrivait pas souvent, lors de très rares occasions où ils s’entraînaient ensemble, mais elle l’attaqua.
Il fut pris par surprise, ne s’attendant pas à ce qu’elle se jette sur lui avec tant de violence.
Il réussit à éviter au dernier moment son coup, et il se reprit pour se défendre et rendre quelques attaques.
Il ressentait la colère qu’elle avait en elle et surtout qu’elle ne le ménageait pas.
Aveuglée par ses émotions, elle ne vit pas son coup venir, et elle se fit éjecter contre la bibliothèque, faisant tomber quelques ouvrages avec elle.
Il ne s’était pas non plus retenu pour la repousser.
Il s’en voulut immédiatement et s’arrêta pour demander si elle allait bien. Sa colère s’était envolée pour laisser place à l’inquiétude.
Elle se releva aussitôt et ne le laissa pas le temps de s’approcher.

— C’est ça. Ne te retiens pas et montre-moi à quel point je suis faible et fragile, que j’ai besoin d’être protégée…
S’essuyant avec le revers de sa manche, sa mâchoire.

L’étincelle de rage était encore vive dans ses yeux.

— C’est bon, j’ai compris… on peut s’arrêter là…
Capitula t-il, vraiment inquiet pour sa femme.

— Tu vas me laisser gagner, comme ça ? Sans défendre ce que tu disais plus tôt ?! Prouve-moi que je suis incapable de me défendre ! Je sais quand même de quoi je suis capable !
S’énervait-elle. Elle ne se calmait toujours pas.

— Ce n’est pas le sujet.
Dit-il exaspéré.

Elle ne le laissa pas finir et elle fonça sur lui, et il se laissa faire.
Elle l’attrapa par le col et s’apprêtait à le cogner. Elle arrêta son geste devant son visage.
Les larmes aux yeux, du surplus d’émotions.

— Je ne vaux que ça, à tes yeux ? Tu ne te donnes même plus la peine de te battre ? Sanglotait-elle.

— Je mérite que tu me frappes… Je n’aurais pas dû réagir comme ça.
Dit-il tout simplement.

Elle le relâcha, s’éloigna et s’assit sur le bord du bureau en regardant ailleurs, perdue dans ses pensées.

— C’est bon… tu t’es calmée… ?
Demanda t-il, sur ses gardes.

Elle ne répondit pas. S’essuyant rapidement ses larmes de colère.

— Est-ce que je peux regarder si je ne t’ai pas blessée… ?
Demanda t-il, en se mettant en face d’elle.

Elle haussa les épaules.
Il regarda rapidement et tâta ses côtes. Cela semblait aller. Il attrapa le menton de sa femme avec ses doigts pour qu’elle lui fasse face, et lui adressa la parole, les yeux droits dans ses yeux.

— Je suis inquiet. J’ai peur qu’il t’arrive quelque chose. Je sais que tu es forte et que tu sais te défendre, mais ça me rend malade de te savoir loin de moi…

— … Tu pouvais pas tout simplement me dire ça… ?
Dit-elle en essayant de se calmer, et arrêter ses sanglots.

2020.05.09

Indépendance

Tant qu’elle prévenait ses parents, elle avait le droit d’aller étudier chez William.
Ils savaient qu’ils étaient plus que des amis et elle avait eu une discussion avec sa mère.
Ainsi, lorsqu’il avait fini son travail plus tôt, certains jours de la semaine, il avait pris l’habitude d’aller la chercher à son lycée. Ils faisaient le trajet ensemble jusqu’à chez lui, et ils avaient un peu d’intimité avant que ses parents ne rentrent du travail, et que l’heure du dîner arrive.

Les premières semaines furent particulières, pour l’un comme pour l’autre.
Ils apprenaient à se découvrir, de corps comme d’esprit, mais il existait une attirance certaine.
Aurore se découvrit cette soif et ce besoin de contact avec William.
Elle le voyait d’un nouvel oeil depuis leur première fois. Sous un nouveau jour. Elle voulait en apprendre plus sur elle et sur lui, sur les plaisirs charnels.
Dès qu’ils étaient tous les deux, une alchimie se créaient.

La porte de sa chambre enfin refermée derrière eux, elle avait à peine le temps de poser ses affaires qu’elle lui sautait dessus, le serrant dans ses bras, se mettant sur la pointe des pieds pour l’enlacer et l’embrasser sur la bouche.
Il fut plus que surpris qu’elle soit si entreprenante.
Il dut même la réfréner.

— Tu ne veux pas qu’on prenne une douche ensemble avant… ?
Dit-il en décollant ses lèvres des siennes, presque à contre-coeur, et ses mains posées sur ses hanches fines, la gardant gentimement les deux pieds à plat sur le sol.

— … Oui, tu as raison.
Bouda t-elle, en se léchant les lèvres.

— Mes parents ne devraient pas rentrer tout de suite.
La rassura t-il. Un petit sourire aux lèvres.

Ils se dirigèrent vers la salle de bain qui était au rez-de-chaussée, et finirent pas faire l’amour dans la douche à l’italienne. Dans le feu de l’action.
Il avait voulu l’aider à se frotter le corps, et prise au jeu, elle avait voulu faire pareil.
L’effet était visible, le pénis de son compagnon était levé et bien dur.

— Je peux… ?
Demanda t-elle timidement.

— Bien sûr…
Répondit-il, ne pouvant s’empêcher de lâcher un gémissement lorsqu’elle le prit en main.

— Il faut bien nettoyer partout…
Dit-elle, en lui adressanr un sourire narquois.

— Ah… tu veux jouer à ça… ?

Il l’avait également attrapée pour essayer de lui appliquer de la mousse entre les cuisses.
La proximité et le savon avaient presque fait tomber Aurore, il la rattrapa et la serra dans ses bras.
Ce qui calma leurs envies de jeux.
Elle sentait son membre chaud et dur contre elle.
Ils se rincèrent.
Elle attrapa sa hampe pour le caresser doucement tout en se faisant rincer par l’eau chaude de la douche.
Puis elle le dirigea vers l’entrée de son vagin.
Il se frotta entre ses cuisses douces et chaudes pour effleurer les lèvres puis la pénétrer, lentement.
Elle changea de position rapidement, elle était maintenant les mains contre le carrelage du mur, ses petites fesses contre l’abdomen de William.

Ils essayèrent de ne pas être trop bruyants.
Finalement ils firent leur affaire et remontèrent à la chambre pour bouquiner et papoter dans le lit.
Et se câliner.

Ils découvrirent leur sexualité et s’épanouirent.
Aurore apprit à être à l’aise avec son corps. Elle apprit à apprécier le sex, à faire l’amour, les subtilités.
William également, même s’il était plus âgé, il était heureux de pouvoir échanger autant avec elle.
Ils continuèrent de faire attention avec les préservatifs et le cycle menstruel d’Aurore.

Les années du lycée passèrent et leur relation était solide.
Cependant, Aurore avait d’autres projets pour le « après », et elle en avait déjà discuté avec William.
Ils avaient décidé de se séparer après le lycée.
Aurore avait insisté pour qu’ils se séparent, en bons termes.
Il avait accepté, même si cela lui brisait le coeur.
C’était son premier amour mais il souhaitait respecter sa demande.

— Je sais qu’on a déjà eu cette conversation…
Commença t-elle, allongée dans le lit de William, le regardant dans les yeux, lui-même allongé à ses côtés.

Il savait de quoi elle allait parler et il appréhendait les prochains mots.

— Les résultats du baccalauréat sont bientôt… et je ne sais pas ce que je vais faire après… je n’ai aucune ambition… je suis sure d’une chose. C’est que je veux aller dans le monde des Humains pour en apprendre plus sur leur mode de vie…

— Est-ce que ce n’est pas dangereux ?

— Ma soeur, Hélène et Alain ont une boutique, là-bas.

*

Ils avaient pleurés, Aurore était décidée de rejoindre sa soeur pour chercher un petit travail là-bas.
Elle était une élève brillante mais faire de longues études ne l’intéressait pas. Elle n’avait aucune prédisposition comme son frère.

— Tu sais… que tu es toujours la bienvenue ici, d’accord ?
Avait-il ajouté.

— J’aurais toujours des sentiments pour toi… merci.

Ils avaient décidé de se séparer à cause de l’incompatibilité de leur emploi du temps.
Sous l’impulsion d’Aurore, puisque william voulait continuer leur relation même s’ils devaient se voir moins souvent.
Elle avait insisté pour qu’il puisse trouver quelqu’un pendant son absence.

— Je n’aime que toi, Aurore.
Avait-il dit.

*

William avait accepté la décision d’Aurore.
Ils ne formaient plus un couple, même s’ils s’aimaient.
Elle voulait voler de ses propres ailes, vivre ses expériences dans l’autre monde, sans contrainte, et sans imposer de contraintes à William.
Ils en avaient discuté longuement.
Il avait insisté pour qu’elle n’hésite pas à passer le voir lorsqu’elle aurait du temps, si elle le souhaitait.
Ils étaient d’accord qu’ils n’auraient plus d’attaches mais ils souhaitaient tous les deux rester aussi proches et, si l’occasion s’y prêtait, avoir des relations plus intimes.
Il y avait cette alchimie entre leurs corps et cela aurait été dommage de tirer un trait dessus.
C’était comme prendre une pause, mettre un hiatus sur leur couple, en attendant que Aurore se trouve et sache quoi faire de son futur.
Un hiatus sans en être un. Ils s’autorisaient à tomber amoureux d’autres personnes.

Les parents d’Aurore ne lui mettèrent pas la pression.
Ils eurent tout de même une discussion sur son avenir.
Son père avait son bulletin scolaire entre les mains et sa mère jetait un coup d’oeil dessus, assise à côté, par curiosité, mais elle savait déjà globalement le contenu.

— Tu as d’excellentes notes, tu es sûre que tu ne souhaites pas continuer tes études ici… ?
Demanda t-il, en parcourant le papier des yeux.

— Non, papa… j’aimerais essayer de travailler… me faire de l’expérience… dans le monde des Humains.

Il soupira et regarda sa mère.

— Ne me regarde pas comme ça, j’y suis pour rien.
Se défendit Alexandra.

— Je ne m’opposerai pas à tes projets, mais tu sais que le monde extérieur est dangereux, de plus tu n’as jamais été très forte en self-défense…

— J’aurais Ten’ avec moi. Puis je connais quand même les bases pour me défendre…

— C’est vrai que Hélène et Alain sont installés là-bas, maintenant…
Songeait Alexandra.

— Dans tous les cas, sache que tu as énormément de potentiel avec tes notes… Continua son père.

— Ce que papa veut dire, c’est que si tu changes d’avis, il est prêt à te former pour lui succéder.

— Alexandra !

— C’est ce que tu m’avais dit, non ?

— Oui, mais…. je ne veux pas lui mettre la pression. Au vu de tes compétences, et si cela t’intéresse, bien entendu.
Dit-il à sa fille, en faisant attention aux mots employés.

— Mais… Cean ?
Demanda t-elle, interloquée et surprise que son père pense à elle pour reprendre son travail.

— Cean a déjà ses propres projets, il souhaite devenir professeur et cela lui prend déjà énormément de temps. Je ne te le propose pas par dépit, mais sincèrement parce que je pense que tu en as le potentiel. Enfin, rien ne presse pour l’instant, c’était juste une idée qui me trottait dans la tête.

— Merci papa…
Elle le serra dans ses bras.

— Bon, le sujet est clos, alors ?

— Félicitations pour ton bac, Aurore.
Dit sa mère, rayonnante.

— Merci maman.

*

Elle commenca d’abord par poser pour la boutique d’Hélène, sa demi-soeur.
Son cousin Célestin fit un shooting photo rapide pour quelques sets de vêtements et il lui demanda si elle souhaitait publier sur un site de partages de photos.
Elle ne semblait pas intéressée mais donna son accord si lui voulait les poster.
C’est ainsi qu’elle commença à apparaître sur les réseaux sociaux et internet.
Sur le compte de la boutique Laine et Lin, et sur le compte de photographe de Célestin.
Son séjour dans le monde humain était exaltant, nouveau ? Tout lui semblait exotique, elle passa beaucoup de temps à apprendre sur les us et coutumes auprès de sa soeur, mais également de son cousin préféré Jasper.
Il l’invita même à loger provisoirement chez lui, ce qui leur donna l’occasion de rattraper le temps perdu.

Jasper avait un petit appartement pour ses études et pour son début de travail en tant qu’avocat.
Il luttait pour protéger les droits des personnes LGBT+ étant lui-même gay.
Ten’ l’accompagnait souvent et régulièrement.
Cela rassurait ses parents, mais il lui fallu également le temps pour s’habituer au flux des inconnus dans un monde nouveau pour lui.

Elle passa devant un club de strip-tease lors de ses périples, du tourisme.
La devanture était classe et une annonce indiquait qu’ils recherchaient quelqu’un.
Elle postula et malgré son inexpérience, elle fut acceptée pour être formée.
Elle fut timide aux premières fois puis rapidement elle prit ses aises et adopta son propre style de danse.
Le cadre lui avait plu et cela lui permit de gagner encore plus en confiance en elle.
Ses parents acceptèrent son choix de métier ainsi que son rythme de vie.
Elle était indépendante.

2020.05.04

Trouble-fête

— Non, je suis venu chercher Aurore.
Répondit William, qui avait repris son sérieux.

Des murmures s’élevèrent une seconde fois des élèves.
Aurore avait viré au rouge pivoine, se cachant derrière la silhouette de ses amis qui l’avaient défendue.

— Et tu ne pouvais pas l’attendre au portail, comme tout le monde… ?
Soupira le professeur.

— J’aurais pu…

— … Bon, débarasse-moi le plancher.
Répondit-il exaspéré.

— Aurore, est-ce que tu peux raccompagner ce trouble-fête à l’extérieur, s’il te plaît ?
Demanda t-il en se massant entre ses deux yeux, comme si la vue de cet individu réveillait en lui une migraine insupportable.

— Oui, monsieur…
Dit-elle d’une petite voix.

Les élèves se dispersèrent, voyant que le problème était maintenant réglé.
Pendant qu’elle finissait de ranger ses affaires, William attendait patiemment, presque fier de lui.
Ses amis restèrent auprès d’elle.

— Tu es sûre que ça va ?
Demanda celle qui avait pris sa défense.

— Tu le connais ?

Elle avait les bras croisés et elle s’était adossée sur une des table à côté.

— Oui… c’est… un ami de mon frère.
Répondit-elle, embarrassée.

— Ah… ton grand-frère, c’est ça ? Bon, j’imagine que ses amis ne doivent pas être mauvais… si jamais il y a un problème, tu nous appelles, d’accord ?

— Merci.
Sourit-elle.

Elle resta encore un instant, à surveiller la réaction d’Aurore, puis elle décida de rentrer et ses autres amis la suivèrent, laissant les deux presque seuls.
William s’avança alors vers Aurore et lui rendit son cahier, qu’elle lui arracha presque des mains, si elle n’avait pas eu peur de déchirer son précieux support de cours.

— Alors comme ça… je suis juste « un ami de ton frère » ?
Lui chuchota t-il.

Son visage rougit encore un peu plus et elle sortit de la classe.
Il lui emboîta le pas.

— Tu me fais la tête… ? Je voulais te faire la surprise… mais si je t’avais attendu au portail, j’aurais attendu je ne sais combien de temps…
Continua t-il, tout en la suivant.

— Tu passes ton temps à la bibliothèque, n’est-ce pas.. ?
Demanda t-il, plutôt sûr de lui.

— Qu’est-ce qui te fait dire ça ?

Elle s’était arrêtée cette fois, et elle le regardait dans les yeux.
Qu’elle lui adresse enfin la parole et qu’elle le regarde dans les yeux, le soulagea.

— Ton frère. Je me souviens qu’il m en avait parlé. Comment tu fais pour rester aussi longtemps au lycée… ?

— Je lis… je révise…
Se défendit elle, en baissant son regard.

Il lui sourit, attendrit qu’elle soit si studieuse.
Il ne put s’empêcher de poser sa main sur sa tête pour lui caresser les cheveux.

— Tu te moques de moi… ?
Bouda t-elle.

— Non… ! C’est adorable que tu sois si… sérieuse.
Sourit-il.

Elle se dégagea pour se diriger vers cette fameuse bibliothèque.

— Je sais que ça fait longtemps que je ne suis plus lycéen… mais la sortie c’est pas par ici…
S’inquiéta t-il.

— Je dois rendre quelques livres et je vais en emprunter d’autres, je fais vite.
Expliqua t-elle, en voyant le visage de son ami se décomposer.

— Ah… lâcha t-il, soulagé qu’elle n’allait pas le forcer à étudier avec elle.

— Tu détestes tant que ça l’école ?
Demanda t-elle curieuse.

— Ce n’est pas ça… mais j’aime pas spécialement étudier… ça ne veut pas dire que j’étais un cancre, non plus !
Se défendit-il, la voyant le juger.

— Je pourrais t’aider si jamais un jour tu en as besoin…

— D’accord… merci de proposer.
Répondit-elle, en pouffant de rire à sa réaction.

Elle essayait de s’imaginer quel genre d’élève il pouvait être pour que leur professeur réagisse de cette manière à sa vision.

Elle salua le bibliothécaire et sortit de son sac quelques gros volumes qu’elle posa sur son bureau.
Il les scanna pour les valider et elle se dirigea aussitôt vers les rayons d’étagères et de livres.
William salua également timidement l’homme à lunettes derrière son bureau et suivit Aurore dans sa recherche de nouvelles lectures.
Il n y avait pas grand monde à cette heure-ci, voire peut-être, tout le temps.
Isolés de la salle avec les bureaux d’étude, William en profita pour embrasser la jeune fille sur la joue.
Ce qui la surprit, et elle se retourna vers lui, outrée.
La main sur sa joue, comme si il lui avait donnée une claque.
Elle regarda autour d’elle pour vérifier que personne ne les avait vus.

— Ne t’inquiète pas, j’ai vérifié avant.
Chuchota t-il, son visage n’étant qu’à quelques centimètres d’elle. La rassurant.

Il en profita pour l’embrasser cette fois-ci, sur la bouche.
Lui donnant une bonne raison d’être outrée.

— Tu m’as terriblement manqué…
Lui murmura t-il, tout en reculant. Pour ne pas abuser de la patience d’Aurore.

Elle était maintenant rouge de honte. Ne sachant pas comment traiter ces émotions fortes. Elle était émue et touchée par ses mots, qui lui faisaient extrêmement plaisir. En realité, elle aussi, pensait à William et avait envie de le voir souvent, mais elle s’était faite une raison parce qu’il travaillait et il n’avait pas forcément le temps de la voir.

— Tu les choisis tes livres ?
Lui demanda t-il taquin, lui rappelant la raison première d’être ici.

— O-oui… !
Bégaya t-elle, en se tournant de nouveau vers les rangées de livre, pour prendre deux livres.

Elle les enregistra à l’accueil et s’en alla.
Cette fois-ci, ils allaient vers la sortie.
Elle resta muette jusqu’au portail.

Lui, avait l’air plutôt à l’aise.
Regardant autour de lui, presque nostalgique de se rappeler un temps qui lui paraissait si proche et à la fois si loin. Reconnaissant certains coins et se remémorant ses propres souvenirs.
Il était decontracté, perdu à moitie dans ses remembrances.

— Tu me fais encore la tête ?
Demanda t-il, encore une fois.

Il avait fait l’effort de respecter le silence d’Aurore dans l’enceinte du lycée.

— Non…
Souffla t-elle.

— Laisse-moi porter ton sac, au moins. J’ai le droit ?

Elle le dévisagea.

— J’insiste. Pour me faire pardonner de t’avoir mis mal à l’aise dans ton lycée…
Il lui prit le sac sans qu’elle n’eut réellement le choix.

— Mais il est super lourd !
S’exclama t-il.

— Je peux le porter toute seule…
Dit-elle en ne lâchant pas les sangles du sac.

— Ma question serait plutôt : comment tu fais pour le porter sans te faire mal ?

Le silence revint.

— Tu comptes me racompagner chez moi… ?
Demanda t-elle. Alors qu’ils arrivaient à un carrefour.

— C’était ce qui était prévu. J’ai pu m’arranger pour finir plus tôt aujourd’hui. Suis-je encore le bienvenue ?

— O-oui…

2020.05.01

Cadeau [R-18]

Ten’ était resté dans la cuisine de William, en train de boire dans une gamelle pendant que l’hôte portait deux verres frais dans chacune de ses mains, dans sa chambre qui se trouvait à l’étage, invitant Aurore à le suivre.
Elle venait de faire le trajet sous le soleil et boire une boisson rafraîchissante était plus qu’approprié.
Elle tira sur son haut pour le décoller de sa peau qui avait un peu sué, laissant entrevoir un peu plus ses clavicules.
Ce n’était pas la première fois qu’elle venait chez lui, mais aujourd’hui, il ne travaillait pas et il était dans une tenue bien différente. Cela lui paraissait nouveau, l’impression de rencontrer une nouvelle personne.
Son sourire était toujours le même, qui plus est, communicatif.
Ses cheveux mi-longs encore un peu mouillés, mais plus pour très longtemps, son T-shirt moulant ses muscles, et son petit short qui mettait en évidence ses cuisses bien fermes.

— Excuse-moi, je sors de la douche, j’ai fait un peu d’excercices avec les chiens juste avant que tu arrives…

Ses paroles la sortirent de sa contemplation qui commençait à être un peu trop prononcée.

— N’hésite pas à t’assoir sur mon lit, j’ai rarement l’habitude de recevoir ici…

Elle s’exécuta et il lui tendit son verre d’eau, sur lequel des gouttes de condensation s’étaient formées, à cause de la différence de température et de l’humidité.
Il posa le sien sur son bureau et se dirigea vers sa bibliothèque pour chercher un ouvrage.
Elle en profita pour observer sa chambre.
Il avait des volets qui s’ouvraient de manière inclinée, ce qui leur faisait profiter de l’air frais sans que le soleil ne tape trop fort dans la pièce.
Le lit était fait et son bureau était rangé. C’était assez minimaliste mais sa bibliothèque dans laquelle il venait de se perdre était bien remplie et beaucoup plus désordonnée.

— Désolé, j’ai pas eu le temps de chercher le livre que je voulais te donner… mais je suis sûr qu’il est quelque part là dedans…
Dit-il en continuant de le chercher des yeux.

Elle posa son verre vide à côté du sien sur le bureau et s’accroupit à côté de lui.

— Il s’appelle comment ? Je peux t’aider.

Il sursauta presque, de la voir aussi proche de lui en un rien de temps. Elle était un tout petit peu plus petite, et accroupie ainsi à ses côtés, elle paraissait encore plus minuscule.

Ils cherchèrent tous les deux, et de temps en temps elle tombait sur un titre qui l’intriguait.
Une fois, elle posa son doigt sur la tranche pour essayer de le prendre mais William réagit à temps et l’en empêcha, les joues légèrement roses.
Sa main se posa sur le poignet fin d’Aurore.

— Je… te conseille pas de le feuilleter… c’est pour les plus de 18 ans… Bafouilla t-il.

Il invitait personne dans son antre et il avait fallu qu’il oublie que dans sa bibliothèque, il s’y trouvait toutes sortes d’ouvrages.

— Ah… pardon.
S’excusa t-elle immédiatement.

— Je ne sais pas si tu en as déjà lu… enfin… je ne vais pas t’en empêcher si tu y tiens… j’étais un peu plus jeune que toi lorsque je l’ai lu, celui-ci…
Rougit-il.

— Non… pas vraiment. Je lis beaucoup mais pas encore ce genre d’ouvrage.
Dit-elle, sans la moindre gêne, encore naïve.

Le terme qu’elle avait utilisé était adorable et il fondit de l’intérieur.

— Est-ce que mon frère en a aussi… ?
Demanda t-elle.

— Euh…. je ne voudrais pas l’embarrasser mais certainement… enfin je crois. C’est pas une honte d’en lire ou d’en avoir, je pense.

Il avait pris un air un peu plus sérieux.

— D’accord…

Elle n’y connaissait encore rien et elle avait une soif immense de connaissance. Elle ignora la main de William et continua son geste pour prendre le petit livret.

— P-par contre… si tu veux le lire, tu peux t’installer sur mon bureau ou sur le lit… je vais continuer à chercher ton livre.
Dit-il rapidement avant qu’elle ne se décide à l’ouvrir sous ses yeux.

Elle était plongée dans cette BD érotique, la couverture était relativement bien dessinée et l’histoire était… rapide. C’était sa première BD pour adultes et elle sentit ses joues rougir lorsqu’elle aperçut les dessins de nu.
Elle avait lu des livres d’anatomie et de biologie mais mis en scène de cette manière, c’était la première fois.
Elle avait à peine eu le temps de le refermer après sa lecture, que William se tenait devant elle.
Peut-être avait-il voulu abréger ce moment gênant et il avait trouvé le livre assez rapidement pour cela.

— Je peux te le prêter… si tu veux ?
Dit-il. Presque aussi gêné qu’elle.

Elle refusa poliment, comprenant mieux pourquoi il était embarrassé qu’elle le lise à côté de lui.
Elle sentait quelque chose de bizarre dans son bas ventre mais elle préféra ne pas en faire part à son hôte.
Il se doutait qu’elle était maintenant plus gênée et il changea de sujet pour rétablir l’atmosphère qui était devenue pesante.
Il lui tendit le livre qu’il cherchait.

— Par contre celui-ci, tu peux le garder, si ça te plaît.

C’était un ouvrage sur les légendes au sujet des chiens de la même race que Ten’ avec en couverture une belle illustration et des reliures fines.
Le livre était presque neuf alors que l’impression et le style de couverture laissait plutôt penser qu’il datait.
Elle l’attrapa pour le feuilleter presque aussitôt.

— Je l’ai lu un nombre incalculable de fois lorsque j’étais plus jeune, je ne pense pas en avoir besoin dans le futur, et si tu l’apprécies, ça me ferait plaisir de le savoir chez toi.
Expliqua t-il.

Il s’asseya ensuite à côté d’elle, profitant du feuilletage des pages.
Il en profita pour s’écarter et attraper son livret pour adultes pour le déplacer sur sa table de chevet.
Loin d’elle.

— M-merci ! Il est magnifique ! Merci beaucoup !
Dit-elle en se tournant vers lui, les yeux brillants de joie.

Elle ne s’attendait pas à un tel cadeau.

— Ouaw… je pensais pas que ça te ferait tant plaisir que ça…
Rougit-il.

Elle hochait la tête pour signifier que si.
C’était le bon moment pour s’exprimer.
Il prit une grande inspiration et se lança.

— Je voulais aussi te dire quelque chose…
— … Oui ?

— Je… crois que je suis amoureux de toi.
Dit-il d’un seul souffle.

Elle resta muette.
Elle n’était pas mal à l’aise mais elle ne ressentait pas grand chose. Ni même de la peur.
Elle le connaissait depuis longtemps maintenant, et elle savait que c’était quelqu’un de respectueux, qu’il n’allait pas lui faire de mal ou la forcer à faire des choses, mais elle ne sut pas comment réagir.

— Je… je suis désolée… c’est la première fois… qu’on me dit ça… et… je ne sais pas comment je dois réagir… ?

Il rit nerveusement.

— Tu dois savoir si tu ressens quelque chose pour moi… ? Je sais que ça doit être compliqué… pour toi… je suis plus grand.. enfin si tu ne m’aimes pas c’est pas grave. Je voulais juste me déclarer. Te dire ce que j’avais sur le coeur… tu n’es pas obligée de me répondre maintenant, non plus…

— Je… ne sais pas… je ne te déteste pas ?
Essaya t-elle de dire.

Il rit de plus belle.

— Bon au moins, c’est ça de pris. Si je te mets mal à l’aise, n’hésite pas à me le dire. Je veux surtout pas que tu te sentes mal à cause de mes sentiments…

Il se résignait déjà à prendre un rateau.

— C’est que… c’est quoi être amoureux… ?
Demanda t-elle.

— Hmm… je ne sais pas trop moi-même… ça fait un moment que j’éprouve quelque chose pour toi… je pense à toi, à ton sourire… mon coeur bat plus fort lorsque je te vois, je te trouve mignonne… intelligente… j’ai envie de te prendre dans mes bras… par exemple… ?
Énuméra t-il, encore plus rouge qu’avant.

— Le coeur bat plus fort comment… ?

— Tu veux sentir… ?
Demanda t-il.

Elle acquiesça et il prit sa main pour la poser sur sa poitrine, gonflée et bien ferme. Effectivement son rythme cardiaque était plus fort.
Il la regardait dans ses yeux pendant tout ce temps et il osa demander.

— Est-ce que… je peux t’embrasser… ?
Hésitant.

— … Sur la bouche… ?
Demanda t-elle, pour être sûre.

— Oui.
— C’est que… je n’ai jamais…
Elle détourna son regard.

— Moi non plus.

— D’accord…
Dit-elle, en trouvant le courage de le regarder à nouveau dans les yeux.

Gardant sa main dans la sienne, il s’approcha d’elle, son visage maintenant à quelques centimètres du sien.
Ils continuaient à se regarder dans les yeux, n’osant pas quand commencer.
Elle pouvait presque entendre son coeur battre à tout rompre dans la poitrine de William.
Il approcha alors ses lèvres pour les poser sur les siennes.
Elles étaient douces, tièdes, il s’y reprit à plusieurs reprises, quittant ses lèvres pour s’y reposer, lentement, doucement, à des endroits différent de sa bouche.
Qui aurait pu croire qu’il existait une telle surface sur ses lèvres.
Elle se surprit à apprécier ces baisers, à se prendre au jeu, et d’elle-même, elle se mit à aller chercher ses lèvres, à ouvrir légèrement sa bouche pour que son souffle puisse s’y engouffrer.
C’était inespéré pour lui, elle ne le rejetait pas, pas tout de suite, et il sauta sur son pas en avant pour lui attraper le menton pour la maintenir.
Elle s’arrêta alors, le regardant d’un regard triste.

— Est-ce que… je fais mal ? …
Demanda t-elle.

— Non, au contraire…
Dit-il, son coeur était sur le point d’exploser.

— Ouvre un peu la bouche…
Dit-il.

Elle s’excécuta immédiatement.
Il approcha de nouveau son visage en biais pour l’embrasser, ses lèvres également légèrement entrouvertes, pour y glisser sa langue, humide et douce.

Elle ressentit quelque chose en elle, une boule chaude à l’intérieur d’elle, ce n’était pas son ventre, c’était beaucoup plus bas.
Elle avait beaucoup plus chaud, son souffle était plus court et pas seulement parce que sa bouche était prise.
Avec sa main sur son torse, elle resserra ses doigts dans le tissu de son T-shirt.
Et de son autre main, elle s’osa à le glisser sous le tissu, pour toucher ses abdominaux.
L’effet fut immédiat, il frissonna ce qui l’arrêta net, et il décolla sa bouche pour lui dire de continuer, qu’il aimait sentir ses doigts sur sa chair.
Il n’était pas spécialement très musclé, il avait un corps dans la moyenne, pas trop fin mais ni trop large, et ses muscles étaient de taille normale mais bien dessinés. Ce qu’elle avait rarement l’occasion de voir parce qu’il portait généralement un T-shirt plus ample et une blouse pour aider ses parents.
Sans parler de quand il se trouvait sur le terrain d’entraînement, il avait un débardeur spécifique qui était fait pour être taché, de sueur et de poussière.

Lorsqu’il se rapprocha pour l’embrasser, son esprit revint sur lui et le moment présent.
Ses doigts fins continuaient de se balader sur son torse, comme si elle cherchait à cartographier la moindre parcelle de sa peau et de ses muscles.
Il cachait bien son jeu. Se dit-elle.
Il se pencha de plus en plus sur elle et l’allongea sur le lit, sa main accompagnait sa chute jusqu’à ses draps.
C’était à son tour, au coeur d’Aurore de battre la chamade.

À ce moment précis.
Quelqu’un frappa à la porte et une voix féminine retentit de l’autre côté.

— Will’ ? Tu es occupé ?
— … Oui, maman.
— Je peux entrer ?
— NON !
— Ah… je me demandais… il y a Ten’ en bas… Aurore est avec toi ?

— Oui, maman… est-ce que je peux être tranquille maintenant… ?
Dit-il rouge pivoine.

Surplombant toujours Aurore qui ne savait pas si elle devait s’exprimer ou se taire, mais la vision de William totalement dans l’embarras la fit sourire plus qu’elle ne l’aurait pensé.

— Oui oui… il commence à se faire tard… et je me demandais si elle restait manger avec nous ce soir… ?

Elle fit oui de la tête.

— Oui maman…
— D’accord, j’appelle ses parents alors…

Aurore acquiesça encore une fois.

— Merci maman…

Et ils entendirent des pas s’éloigner.
Ils pouffèrent de rire tous les deux.

— J’imagine que ça nous a un peu coupé l’envie maintenant…
Dit-il, en s’apprêtant à se relever.

Elle ne le laissa pas s’éloigner et de ses bras, elle l’enlaça pour l’attirer vers elle et qu’ils reprennent où ils en étaient.

— Est-ce que… ça veut dire que tu m’aimes… bien… ?
Demanda t-il, le sourire aux lèvres.

C’était au tour d’Aurore de rougir.

— Il faut continuer… pour être sûr…
Dit-elle, espiègle.

Il l’embrassa à nouveau, et cette fois-ci, il fut surpris que sa langue soit accueillie par celle d’Aurore, qui caressait timidement le bout et les côtés de la sienne.
Ils se découvraient, et ils apprenaient à se caresser, à appréhender leurs émotions…

En short, son érection finit par faire tendre le tissu, ce qui ne passa pas inaperçu. Il se sentait à l’étroit et bouillonnant dans cette partie qui semblait pointer vers le ciel.
Aurore n’avait encore rien remarqué, profitant du baiser tendre qui lui procurait une émotion et une sensation qu’elle ignorait. Quelque chose de nouveau, du plaisir.
Les images de ce qu’elle venait de lire restaient imprégnées dans sa tête, et semblaient lui expliquer les étapes à suivre.
Est-ce que cela allait être encore plus agréable ? Était-ce possible ? Elle avait envie de William.
Qu’il continue, qu’il la prenne dans ses bras, qu’il la serre fort. Elle essayait d’effacer la suite de la BD de sa tête. Elle n’était pas encore prête de se déshabiller ni de l’accueillir en elle. D’ailleurs comment cela marchait ?
Comme si son envie était réciproque, il commença à faire la même chose en glissant timidement sa main sous le haut d’Aurore, elle frissonna au toucher qui décupla son plaisir, elle gémit malgré elle, ce qui les surprit tous les deux et il s’arrêta quelques secondes, pour demander s’il pouvait continuer.
L’embarras visible sur son visage, elle acquiesça et remarqua alors son érection, elle ne cacha pas sa surpise.

— … Je… pardon, je suis beaucoup trop excité..

Il se confondit en excuses mais elle le rassura.
C’était donc ça, ce qu’elle ressentait : de l’excitation.

— Qu’est-ce qu’on doit faire… ?
Demanda t-elle, un peu perdue.

— Hm… on peut commencer par se déshabiller…
Suggéra t-il, en ayant un peu hâte de la voir sans ses vêtements, puis voyant la gêne qu’elle exprimait sur son visage, il lui réexpliqua qu’elle avait le droit de vouloir arrêter.

— Non… mais, toi d’abord. Déshabille-toi…

— Ok, pas de problème, mademoiselle.
Sourit il, enlevant son T-shirt d’abord, et elle put admirer ses magnifiques muscles et quelques cicatrices dues aux entraînements avec les chiens.

Il était sur le point de retirer son short.
Elle vit alors son appareil reproducteur se dresser, comme libéré de cette prison qu’était ce tissu.
La surprise sur son visage était visible.
La surprise et une certaine appréhension.
Est-ce que c’était ce gabarit qui allait entrer dans son vagin encore vierge… ?
Elle demanda, si elle pouvait le toucher. Il accepta.
Il était amusé qu’elle découvre ce qu’était un pénis.
La sensation de ses doigts et de sa main empoignant son chibre le fit réagir et elle s’excusa de lui avoir fait mal.

— Au contraire, ça me fait énormément de bien…

Il lui caressa les cheveux. Avant de lui demander de retirer à son tour ses vêtements.
Elle en avait oublié cette étape. Elle s’empressa de retirer son haut, dans le même ordre que William.
Elle ne portait pas de soutien gorge, sa poitrine était petite mais ferme et ses seins avaient une forme bien ronde, avec des tétons roses qui pointaient, elle avait une sorte de chair de poule à cause de sa gêne et à cause d’une petite brise qui venait de s’engouffrer dans la chambre.
Puis elle retira le bas, avec sa culotte qui était, à sa grande surprise, un peu humide, mais pas de transpiration. Elle avait lu dans un livre que la femme produisait un peu de cyprine, un liquide qui permet de lubrifier lors des rapports.
Un peu honteuse, elle fit un tas de ses vêtements en essayant de cacher la tache au fond de sa culotte.
Il sourit et la rassura.

— Ne t’inquiète pas, c’est naturel et il n’y a rien de sale là dedans.

Elle rougit, et ses paroles la rassura un peu.
Elle etait maintenant nue, assise sur son lit, elle ne savait pas quoi faire et essayait de se cacher avec ses bras.

— Ne cache rien. Tu es magnifique… je suis si heureux que ce soit avec toi que je partage ma première fois…
Dit-il en repoussant gentiment ses bras pour la caresser des doigts ses hanches tout en remontant vers ses flancs et le bas de ses seins.

— Je peux ?
Demanda t-il.

Elle avait confiance et accepta.
Sa caresse la chatouillait presque, et l’excitait encore plus. Elle ferma les yeux et profita de cet instant.
Ses doigts se baladèrent tout autour de ses seins pour ensuite faire le tour de ses tétons, ce qui fit parcourir comme un courant électrique dans tout son corps.
Gênée, elle se jeta dans ses bras.

— P-pardon… j’y suis allé un peu trop fort… ?

— Non… j… je crois… que j’ai envie de toi… William…
Prononca t-elle dans le creux de son oreille, ce qui le fit frissonner.

— C’est ta première fois… je vais prendre mon temps pour te préparer… j’ai peur de te faire mal avec…

Il ne finit pas sa phrase mais ils se comprirent.
Il l’allongea sur le dos, sur ses draps et l’embrassa sur tout son corps, ce qui la fit gémir tout doucement.
C’était sa première fois, mais il avait eu le temps de se documenter au préalable…
Avec une de ses mains, il la caressa sur la cuisse pour la faire venir sensuellement vers son intimité.
Elle n’osait pas mais finit par écarter ses jambes lorsqu’il commença à toucher ses lèvres inférieures.
Elle était trempée, et cela le rassura.
Il caressa tout doucement le contour pour étaler la cyprine, et suivant la douce musique de sa voix, il pénétra lentement une phalange. Son gémissement se fit plus intense. Elle ressentait du plaisir et il aimait ça.
Il commença des petits allers et venues, tout en lenteur et en y mettant plus de longueur, petit à petit.
Il s’arrêta ce qui la fit faire une moue. Ses cheveux étaient en partie collée sur son visage et sa nuque à cause de l’effort physique et des sensations qu’elle ressentait.
Elle avait l’impression d’avoir couru un marathon.

— Ne boude pas. Je vais chercher un préservatif…
Dit-il. Prévoyant.

Elle resta sur le lit, à l’observer se diriger vers sa table de chevet, il prit un petit étui dans un tiroir et en déballa la protection.
Il le déroula sur son membre qui paraissait énorme et revint rapidement à ses côtés.

— Est-ce que tu te sens prête… ? Tu peux toujours dire non.
Lui demanda t-il, allongé sur le côté et lui caressant le visage. Tout en la regardant dans les yeux pour être sûr qu’il ne la forçait pas.

— Oui… j’en veux encore…
Prononca t-elle, ne croyant pas qu’elle venait de prononcer ce genre de paroles.

— D’accord
Dit-il en s’excécutant. Il lui posa un baiser sur son front puis ses lèvres.

Il se positionna sur elle, la surplombant, et souleva ses jambes toutes fines, et de sa main, il déposa le bout de son gland en face de sa fente.
Elle sentit une résistance, elle n’avait pas peur, elle le voulait en elle, mais son corps était encore jeune, frêle et surtout inexpérimenté.
Il l’embrassa tout en passant une de ses mains dans les cheveux blonds de la jeune fille, il essaya de forcer un peu plus pour que son gland puisse la pénétrer.

— Tu as mal… ?
Demanda t-il inquiet.

— Non… vas-y… continue…

Elle prit sur elle pour qu’il puisse entrer dans son intimité.
Il réussit enfin, mais elle étouffa un cri.
Il s’arrêta net.

— Tout va bien… ?
Demanda t-il, encore plus inquiet d’avoir pu lui faire mal.

— Oui… ça m’a surpris…
Sourit-elle.

— Je vais bouger… mais tout doucement…
Prévient-il.

Elle se laissa guider.
Il y allait de manière très douce et elle put accueillir sereinement ces nouvelles sensations dans le bas de son ventre.
Et ce qui devait arriver, arriva, elle sentit monter l’orgasme.
Il enlaçait les doigts d’Aurore avec les siens, et lui également, sentait les paroies vaginales se resserrer autour de sa hampe, c’était beaucoup trop agréable.
Sentant l’extase influencer les muscles internes et les mouvements de bassin, conscients ou inconscients de sa partenaire, il était au bout. Il n’allait pas pouvoir se retenir non plus.

— Aurore… je vais éjaculer… je…
Souffla t-il.

— Je sens… quelque chose monter en moi…
Souffla t-elle, également.

— Laisse-toi aller.
Dit-il avant de pousser un râle.

Elle sentit son pénis gonfler à intervalle réguler à l’intérieur d’elle et une vague de plaisir intense l’envahit, jusqu’à exploser, juste après.
Tous les deux se crispèrent et ils s’arrêtèrent de bouger.
William s’écroula sur Aurore et l’embrassa encore et encore.
Elle rit doucement, puis lui rendit une partie des baisers.

Il se retira après un petit moment et retira également la préservatif pour vérifier qu’il avait bien tenu et n’était pas percé.

— Tu vérifies la quantité… ?
Demanda t-elle curieuse.

— Oui… on peut dire ça… Et si je ne t’ai pas mis enceinte aujourd’hui.
Sourit-il.

Elle blêmit.

— Je plaisante. Ne t’en fais pas, j’ai eu le temps de préparer ma première fois un bon moment dans ma tête… et je ne rigole pas avec ce genre de choses… tu peux me faire confiance. Désolé que ça ait été aussi… court…

— Pas de problème. Moi, j’ai trouvé ça plutôt bien…
Dit-elle sans émotion.

— Il faudra recommencer alors…
Lui dit-il, en lançant un regard de défi.

— D’accord. Sans problème.
Sourit-elle.

— Mais… pas aujourd’hui…
Dit-il en soupirant.

Ils se rhabillèrent et malheureusement ils n’allaient pas pouvoir utiliser la douche tout de suite.

Elle chercha son téléphone pour envoyer un message à ses parents, en plus de l’appel qu’ils avaient dû recevoir.

Ils se rhabillèrent, plein de sueurs et d’autres fluides corporels. Ils purent tout de même se laver les mains dans la salle de bain au rez-de-chaussée, ils tentèrent de se recoiffer pour paraître présentables.
Elle venait de redécouvrir William et son coeur battait maintenant pour lui. Elle appréciait leurs interactions.
Son regard qui lui adressait et son sourire charmeur. Bon vivre.
Tous les deux un peu pudiques, il l’embrassait en catimini sur la bouche lorsque personne ne regardait.
Vérifiant que ni sa mère, ni son père n’étaient dans les parages, il embrassa la petite Aurore sur la joue, puis sur la bouche, avant qu’elle ne se love dans ses bras.

— Du coup… je te fais une demande officielle… est-ce que tu veux bien sortir avec moi… ?
Demanda t-il, avec ses bras autour de la taille de sa potentielle petite amie.

— Pour combien de temps… ?
Demanda t-elle, terre à terre.

— Aussi longtemps qu’on le souhaitera… ?
Réfléchit-il.

— D’accord !

Ils se rendirent à table pour le dîner.
Les deux parents de William étaient également là.
Tous les deux blonds mais d’un blond plus foncé qu’Aurore, les cheveux plus épais, sa mère avait des yeux bleux d’un clair presque cristalin et son père avait les yeux verts.
Son père avait l’air bourru, plutôt grand même s’il n’était pas très large, William savait d’où venait la structure de ses muscles. Les cheveux lisses et courts.
Quant à sa mère, son visage était doux mais son regard dur. Aucun doute là dessus, c’est son sourire qu’il avait.
Ils gardèrent le silence sur ce qu’ils faisaient dans la chambre mais sa mère n’avait pas la langue dans sa poche.

— La prochaine fois, ne faites pas de chichis et utilisez la douche…
Dit-elle en picorant un accompagnement sur la table.

Tous les deux, enfoncèrent leur visage derrière leur bol de riz.

— Ne les embête pas…
Soupira son père, qui avait bien trop l’habitude de son franc parler qui pouvait être mal pris.

— Je dis les choses simplement. Will’ est bien né de quelque part !
S’indigna t-elle.

— Maman… !
S’écria son fils. Imaginant ses parents faire la même chose qu’eux quelques heures auparavant.

— Sinon, c’est officiel Will’ ? Vous êtes ensemble ?
Changea de sujet son père. Il adressa un sourire bienveillant à Aurore.

Ils se regardèrent et il acquiesça.

— Bon courage à toi, ma petite Aurore. De supporter notre Will’.
Dit-il en lui lançant un clin d’oeil.

Elle rendit le sourire avec quelques rougeurs aux joues. Pensant que c’était plus elle qui allait être une enfant à côté de ce grand garçon.
Le repas était chaleureux, et elle s’amusait de voir William se quereller gentiment avec sa mère.

Elle remercia les hôtes et elle regroupa ses affaires pour rentrer chez elle.
Ten’ qui était parti s’amuser et manger avec les autres chiens d’élevage, fut rappelé sans problème.
Devant la porte d’entrée, William l’embrassa encore une fois, à l’abri des regards de ses parents et lui souhaita une bonne nuit.
Sa mère lui cria du salon.

— Raccompagne-la, gros bêta !

Il se sentit honteux de n’y avoir pas pensé et enfila des claquettes pour la ramener chez elle.
Il s’excusa alors qu’elle s’excusait que sa mère l’ai forcé à devoir faire le chemin jusqu’à chez elle.

— Mais non ! C’est moi qui suis trop idiot, même si c’est sûr, je peux pas te laisser rentrer seule —avec Ten’— à cette heure-ci. J’en profiterai pour saluer ta famille.
Rajouta t-il après que le chien sembla lui lancer un regard de reproche.

Ils papotèrent, ils avaient surtout l’habitude de parler de Ten’ sans s’épandre sur leur vie privée, et aujourd’hui ils apprenaient vraiment à se connaître. Du moins, Aurore.
Elle se fit la réflexion qu’elle ne l’avait jamais envisagé parce que c’était le meilleur ami de son frère. Et qu’elle le considérait comme un grand-frère.
En réalité, elle n’avait jamais envisagé l’amour avec n’importe qui.
Ce soir, elle était sur son petit nuage et elle n’était pas la seule.

*

C’est son père qui reçu l’appel de la mère de William.
Elle ne s’épancha pas sur les détails, et ils savaient qu’Aurore était sortie avec Ten’ aujourd hui, c’est tout.
Elle n’était jamais loin et ils avaient confiance avec Ten’ qu’elle ne serait pas seule et qu’elle était assez raisonnée et raisonnable pour ne pas faire de bêtises.
Il fut à peine surpris qu’elle soit chez William. Ils se connaissaient, c’était le vétérinaire de Ten’, et le meilleur ami de Cean. Il remercia la mère pour Aurore en espérant qu’elle ne les dérange pas.
Il raccrocha et Cean qui traînait dans le salon interrogea son père.

— La maman de William. Aurore est chez eux et va rester dîner là-bas ce soir, apparemment.

Cean semblait gêné par cette information, et son père le remarqua.

— Il y a un problème avec William… ?
Demanda t-il en toute innocence.

— Non non… C’est juste que… il est amoureux d’Aurore… je me fais peut-être des idées…

Hélène qui était dans le couloir ne rata pas une miette et approcha son demi-frère pour lui soutirer plus d’informations.
Gabriel soupira, mais eut tout de même un micro pincement au coeur, sa fille adorée était-elle en train de vivre sa première histoire d’amour… ?

— Ton ami William est amoureux d’Aurore ? Tu m’en a jamais parlé !
S’amusait la petite curieuse qu’était Hélène.

— J’allais pas t’en parler avec Aurore dans la même pièce ! Et j’étais pas censé le dire…

Il était inquiet pour les deux, Aurore et William.
L’agitation attira Alain qui sortit de sa chambre pour demander ce qu’il se passait.
Gabriel laissa les enfants discuter et s’en alla à ses occupations.

— C’est quelqu’un de bien j’espère !
Questionnait Hélène.

— C’est mon ami je te signale. Et s’il lui venait l’envie de faire du mal à Aurore… tu te doutes bien que je serais le premier à le lui faire regretter.
S’exprima Cean.

— Mais Aurore, elle est amoureuse de lui ?
Demanda Alain, tout de même curieux qu’on en vienne à parler de William tout d’un coup.

— Je ne pense pas…
Réfléchissait Cean.

— Elle est allée chez lui pour quoi ?

— Aucune idée, elle a l’habitude d’y aller pour Ten’…

— Ça se trouve on se fait des idées pour rien…
Conclua Alain qui était en train de retourner dans sa chambre.

Quand Alexandra rentra, Gabriel lui fit passer le message pour Aurore, et elle ne tarda pas à recevoir un petit message de sa fille elle-même, quelques minutes plus tard. Elle entendit la discution de ses autres enfants et dut intervenir.

— Par contre… lorsqu’Aurore rentrera. Je ne veux pas vous voir la harceler de questions. C’est sa vie privée et elle a le droit de ne pas vouloir en parler. Si elle souhaite en parler, elle le fera.

Elle entendit ses enfants faire la moue et rechigner.
Elle soupira.

— Moi aussi je suis curieuse, mais mettez-vous à sa place. Est-ce que vous aimeriez qu’on vous noie de questions ?

— D’accord…
Dirent-ils, sans trop de conviction.

— Bien. Venez m’aider à préparer à manger, s’il vous plaît.

*

Il n’osa pas vraiment entrer, sachant que toute la famille était derrière cette porte.
Elle vit son hésitation et s’approcha de lui, mais ne savait pas trop non plus quoi faire alors elle resta devant lui et le remercia de l’avoir raccompagnée.
Il pouffa de rire en voyant sa gêne et s’approcha et se pencha pour l’embrasser tendrement sur la joue.

Cean, Hélène et Alain avaient entendu des voix en provenance de l’extérieur et ils se précipitèrent à la fenêtre pour voir quelque chose.
Ils étaient alors tous les trois, le visage collé à la vitre pour regarder la scène, et peut-être entendre quelque chose de la conversation.
Ils virent alors William se pencher pour embrasser Aurore sur la joue.
Il se rendit compte de leur présence, et Aurore se tourna également vers la fenêtre et elle crut mourir de honte.
Leur mère arriva pour tirer les rideaux et pousser ses enfants à se décoller de la vitre, mais c’était trop tard.

William lui-même était un peu gêné, mais d’un autre côté, il n’avait pas honte de sa relation avec Aurore. Tôt ou tard cela se saurait.

— Je… je vais te laisser, je crois que ta famille t’attend… merci encore pour la journée… bonne nuit ?

— Je suis désolée… pour mes frères et soeur… et merci à toi… pour tout ! Rentre bien ?
Dit-elle en touchant le livre qui était dans son sac en bandoulière.

— T’en fais pas. On se recontacte, t’as mon numéro !
Dit-il en s’éloignant et en lui faisant de grands signes pour lui dire au revoir.

Il savait que s’il ne bougeait pas, ils allaient sûrement rester devant sa porte pendant un moment.
Elle lui rendit des petits signes de sa main, timidement mais souriante. Le coeur battant.

*

Elle ouvrit la porte et enleva ses chaussures.
En murmurant un petit  » Je suis rentrée… »
Elle évitait le regard de Cean, surtout et d’Hélène et Alain qui faisaient semblant de ne rien avoir vu.
Ils étaient restés flâner exprès dans le salon pour espérer une miette d’information de sa journée.

— Les enfants, si vous avez fini, allez dans votre chambre.
Avait dit Alexandra, sans aucune animosité.

Ils n’eurent pas d’autre choix que d’obéir. Gabriel qui était juste derrière elle leur lançait des regards meurtriers.
Sa mère s’adressa à Aurore quand ils furent partis, de leur champ de vision, du moins.

— Tu as passé une bonne journée ?
Demanda t-elle innocemment, c’était le genre de questions qu’elle posait en temps normal.

— Oui… je vais aller me coucher je pense. Est-ce quelqu’un va à la salle de bain ?

— Utilise la notre, celle dans notre chambre, si tu veux.
Proposa Alexandra.

Elle se doutait que sa fille aurait peut-être envie d’être un peu seule et pas tout de suite confrontée à sa fratrie.

— Merci maman…

Elle se dirigea vers sa chambre pour déposer ses affaires et prendre ses vêtements de rechange pour la nuit.
Son frère l’attendait sur le palier de sa porte, la regardant sans rien oser dire.
Elle sentait son regard pesant sur elle et préfera baisser les yeux et aller directement vers sa porte.
Il finit par briser le silence avant qu’elle ne quitte le couloir.

— Aurore… je sais que ça ne me regarde pas… mais si jamais Will’ fait quelque chose de déplacé ou se comporte mal avec toi… hésite pas à venir m’en parler. Je serai toujours de ton côté.
Dit-il d’une voix rassurante.

Elle ne s’attendait pas à cette réaction de son frère, mais au fond d’elle, ce n’était pas étonnant, quand elle connaissait son caractère protecteur.
Elle fut émue et elle se retourna vers lui pour le regarder dans les yeux.

— Merci Cean. Ne t’en fais pas… si jamais ça arrive, je n’y manquerai pas.
Elle lui adressa un sourire.

Les joues un peu rouge, il détourna son regard.

— J’y compte bien !
Ajouta t-il avant de tourner ses talons et retourner dans sa chambre, en fermant la porte derrière lui.

Alain était parti dans la salle de bain et Hélène avait entrouvert la porte de sa chambre pour épier leur conversation.
Aurore s’en alla vers la chambre de sa mère.
Elle et Gabriel étaient encore dans la cuisine à discuter tout en faisant la vaisselle.
Chris rentrerait plus tard, semblerait-il.
Ils avaient l’air d’avoir une discussion sérieuse mais leur ton était léger. Gabriel profitait parfois que les enfants aient le regard ailleurs pour adresser une petite intention à Alexandra, qui le rappelait alors à l’ordre.
Les enfants n’avaient jamais les yeux vraiment loin.

La douche lui fit un bien fou.
Elle repensa à ce qu’elle venait de vivre et ne put s’empêcher de rougir. La sensation était encore présente et elle avait l’impression de ne pas être rassasiée. Elle voulait en savoir plus sur son propre corps, et sur le sien.
Ten’ s’était posé sur le tapis devant la cheminée, la gueule sur ses pattes, il semblait profiter du calme relatif de la maison.
Sa douche fut courte.
Elle avait hâte de retourner dans sa chambre et feuilleter son présent. Le livre.
Lorsqu’elle sortit en T-shirt et short, les cheveux un peu mouillés, sa mère était assise sur son lit et l’incita à s’asseoir en tapotant la place à côté d’elle.
Assise en tailleur, elle avait fermé la porte de la chambre.

— Il faut qu’on parle…
Dit-elle, d’une petite voix mais chaleureuse.

— Je sais que tu lis énormément et je suis désolée si je n’ai jamais vraiment eu l’occasion de te parler de… sexualité, en général…

— Oui… maman ?
Aurore rassura sa mère, elle n’était pas gênée par sa conversation.

Elle hésita à poser sa main sur celle de sa fille, mais elle le fit tout de même.

— Je ne veux pas m’immiscer dans ta vie privée, mais je m’en voudrais si je ne te posais pas la question. Si jamais tu as une relation intime avec quelqu’un… tu connais l’importance des moyens de contraception, n’est-ce pas… ?

Aurore posa son autre main sur celle de sa mère et la resserra dans la sienne.

— Oui, maman.
Elle la regarda droit dans les yeux, et sa voix était claire et nette.

Alexandra soupira de soulagement.

— Bon, j’ai tout dit. Après libre à toi, si tu veux m’en parler ou non. Sache que je serai toujours disponible pour en discuter avec toi.
Sourit-elle, en espérant ne pas être trop insistante. Je sais que tu es jeune mais je sais également que tu es mature et intelligente. Je te fais confiance. D’accord… ?

— Merci maman…

Aurore prit une longue pause, regardant un bout du drap du lit, elle réfléchissait.
Elle ressentait l’envie de se confier mais ne savait pas où ses sentiments nouveaux la mèneraient.

— Dis maman… c’était comment ta première fois ?

Ce fut au tour d’Alexandra de devenir rouge pivoine.

— Bien… euh…. comment dire… tu sais, je n’ai connu que ton père… et Chris… du coup c’est peut-être un peu embarrassant de te raconter ma première fois avec papa…

Voyant que sa fille était captivée par le début de son récit, elle se décida à lui raconter en partie comment c’était.

— Disons qu’il a été très doux et compréhensif. Il savait que c’était ma première fois. Contrairement à moi, il en avait eu des conquêtes !

Elle avait l’impression de rajeunir de 20 ans. C’était étrange.

— C’est comment d’être amoureux… ?

— Est-ce que tu penses être amoureuse… ?
Demanda t-elle.

— Je… ne sais pas…
— Est-ce que tu apprécies le temps que tu passes avec cette personne ?

— Je crois… ?
Réfléchit-elle.

— Laisse-toi le temps. Profite du moment présent. Si, déjà, tu désires revoir cette personne, et être à ses côtés, c’est déjà une bonne piste.
— C’est différent de l’amitié… ?
— Hmm. C’est une très bonne question. Est-ce que tu as envie de prendre dans tes bras et d’embrasser tous tes amis ?
— … Hm… embrasser sur la bouche ?
— Oui.
— Non, je ne pense pas.
— L’amour c’est quelque chose de plus intime, je pense. Plus intense. Je ne peux pas te dire exactement comment ça se passe, il dure plus ou moins longtemps selon les couples, ce n’est pas une science exacte. Tu devras le découvrir par toi-même et faire ta propre expérience…
— He crois comprendre…
— Enfin, c’est à consommer sans modération, tant que vous vous protégez !

— Oui maman… !
Râla Aurore, sur l’insitance de sa mère sur ce point.

— William a l’air à cheval sur ce point…
Souffla t-elle, pour la rassurer, les joues un peu plus rouges et non à cause de la douche chaude.

— Oh ? Vous… ?

— Oui…
Rougit-elle encore plus fort en n’osant plus regarder sa mère dans les yeux.

— Allez, va te coucher.
Abrégea sa mère, en lui embrassant le front. Avec un large sourire.

— Bonne nuit maman… merci.
Dit-elle avant de sortir.

Elle embrassa son père qui était assis dans le canapé en train de lire avec ses lunettes sur le nez.

— Bonne nuit papa.
— Bonne nuit Aurore.

Ten’ se releva et suivit Aurore dans sa chambre.
Sa porte était toujours légèrement entrouverte et une des porte-fenêtres dans le salon qui donnaient vers l’extérieur l’était également, pour lui permettre de sortir en pleine nuit si besoin.

*

Elle était assise à son bureau, les cours venaient de finir et elle rangeait ses affaires dans son sac, comme tous ses camarades.
Ils étaient en train de discuter joyeusement sur comment occuper leur fin d’après-midi et Aurore n’était jamais interessée. Elle avait une réputation de rat de bibliothèque et effectivement, c’est ce qu’elle songeait faire, s’y rendre pour en apprendre un peu plus sur le corps humain… de manière scientifique bien entendu.
La tête ailleurs, elle rangeait, le regard fixe devant elle.
Quand quelqu’un de sa classe l’interpela pour lui dire qu’un grand l’attendait, à la porte, non pas de l’école, mais de la classe.
Elle leva les yeux et elle vit William, qui regardait ailleurs.
Et leur regards se croisèrent et elle rougit jusqu’aux oreilles.
Que faisait-il ici ?
L’entrée de l’établissement était libre mais il n’avait rien à faire ici.
On était dans un lycée, Aurore était en première année et ce jeune homme ne faisait pas partie des troisièmes années. Il était un peu plus grand, il avait une sorte de prestance différente, et surtout, il était inconnu de presque tous. Malgré que le lycée n’ait pas d’uniforme, il avait quelque chose qui dénotait avec l’endroit.
Il lui fit un large sourire.
Elle se pressa de mettre dans son sac ses dernières affaires, mais dans la précipitation, elle fit tomber un de ses cahiers qui s’ouvrit.
Il s’approcha pour l’aider à le ramasser et lui tendre, et il en profita pour lire ses notes.
Elle ne savait plus du tout où se mettre.

— Aurore… est-ce que ça va ? C’est qui ce gars ?
Demanda un camarade de sa classe, la voyant gênée et pas dans son attitude habituelle.

— Oh, toi ! Si t’es venu pour embêter Aurore, tu vas avoir des problèmes !
S’écria une voix féminine grave.

Elle s’interposa entre Aurore et William et le toisa. Elle était plutôt grande pour une première année mais William était plus grand tout de même.

— Je ne savais pas que tu avais des gardes du corps…

William recula, refermant le cahier et en levant ses mains en guise de défense.

— Je ne lui veux aucun mal, il y a méprise.

— T’es qui pour débarquer comme ça dans notre classe ? T’as redoublé combien de fois ?

— Wow, on se calme. J’suis un aîné, depuis quand il n’y a plus aucun respect… ?

Le ton commençait à monter et les autres de la classe avaient leur regard rivé sur eux.

Un adulte arriva dans la classe et se dirigea vers le bureau devant le tableau, pour recupérer quelque chose dans le tiroir qui semblait être le sien.
Voyant la tension de la pièce et les yeux rivés sur le groupe d’élèves, il leva également les yeux pour observer cette scène étrange.

— Il y a un problème professeur ?
Demanda un élève, voyant l’homme froncer des yeux.

— Oh non, j’avais juste oublié quelque chose dans mon bureau. Par contre… que se passe t-il ?
L’interrogea t-il, en toisant l’épicentre de l’agitation.

— Euh… un aîné qu’on a jamais vu est venu dans notre classe.. on ne sait pas trop ce qu’il veut…
Tenta t-il d’expliquer.

Le professeur s’avança pour voir de plus près.
Il reconnut la tête blonde du jeune homme.

— William ? Que fais-tu ici ?
L’interpela t-il.

— Professeur !
S’exclama t-il, comme sauvé de cette situation difficile.

Des murmures s’élevèrent.
Aurore aurait souhaité dissiper le malentendu mais les évènements s’enchaînaient trop vite.
Les defenseurs et amis de la jeune fille se reculèrent, sachant maintenant que l’inconnu était du même lycée qu’eux.

— L’école te manque à ce point… ?
Demanda t-il à son ancien élève.

— Pas le moins du monde.
Sourit-il.

— Si c’est pour faire le pitre, je te prierais de bien vouloir quitter ma classe, ainsi que l’enceinte de l’établissement. C’est pas un terrain de jeu, ici.

15 – 23

2020.04.21

Jeux

Ils vivaient tous sous le même toit, ou plutôt dans le même appartement-complexe.
Il y avait une chambre pour les parents qui avait un lit assez grand pour que trois personnes dorment dedans de manière confortable.
Cette chambre avait sa propre salle de bain et toilettes parce que c’était beaucoup plus simple ainsi.
Un salon qui servait de pièce commune, avec une cheminée et un énorme canapé et des fauteuils pour tous les membres de la famille. Une table basse se situait entre le feu, lorsqu’il était allumé, et le canapé.
La porte d’entrée donnait sur cette salle.
La cuisine ainsi que la table à manger n’était pas loin.
C’était une cuisine ouverte qui donnait sur le salon et la table à manger se trouvait entre les deux zones.
De l’autre côté, se situait un grand couloir qui donnait sur les chambres des enfants, de part et d’autre.
Chacun avait sa propre chambre qui était à peu près de la même superficie. Pas trop grande ni trop petite.

Les devoirs se faisaient soit dans la chambre, soit sur la table basse dans le salon. Un tapis et des petits coussins étaient disposés pour qu’on puisse s’asseoir à même le sol pour travailler.
La salle commune était souvent utilisée, que ce soit par les enfants ou les parents.

*

Ainsi Hélène était très proche de sa petite soeur.
Cean discutait énormément avec Alain.
Ils jouaient parfois le rôle des grands-frères au sujet d’Aurore qui était la benjamine.
Il leur arrivait également de se disputer.
Aurore et Hélène se mettaient à pleurer mutuellement lorsqu’elles se fâchaient pour un sujet, ce qui exaspérait Alain et Cean.
Cean s’était déjà disputé avec Alain lors d’une partie de jeux et il n’avait pas apprécié perdre contre son cadet. Il était alors parti bouder dans sa chambre.
Aurore était alors allée discuter avec Alain pour savoir ce qui n’allait pas, et il s’était passé les nerfs sur elle, et Hélène l’avait réprimandé en consolant Aurore. Il s’était par la suite excusé.
Cean était sorti de sa chambre pour voir ce qu’il se passait et avait été agacé qu’il s’en prenne à sa petite soeur mais ayant pris un peu de recul, il alla également s’excuser de sa réaction au lieu de mettre de l’huile sur le feu.
Le soir même, Hélène rapporta à leurs parents.

Gabriel venait à peine de rentrer et Alexandra s’était échouée dans le canapé. Ses deux filles dans les bras. Et les garçons encore un peu fâchés, de chaque extrémité du canapé.
Elle souriait.

— Cean… c’est normal de ne pas aimer perdre mais il faut savoir accepter que nous n’avons pas les mêmes qualités, et l’humilité est une chose importante.
Savoir accepter sa défaite. Et en tant que grand-frère, tu devrais être fier qu’Alain ait réussi à te battre alors qu’il est plus jeune. Et Alain, tu pourrais enseigner à Cean comment faire pour s’améliorer. N’est-ce pas ?

Elle jeta alors un regard à Gabriel.

— J’en connais un qui a toujours du mal à accepter que je puisse le battre au combat.

Il se déchaussa. Et lui rétorqua de sa voix bien grave.

— Il m’est arrivé de gagner !
— Mais on reste pas longtemps fâchés, n’est-ce pas, Gabriel ?

— Oui oui…
Dit-il, en s’en allant se laver les mains pour préparer à manger.

— Vous voyez les enfants ?
Sourit Alexandra.

Les filles observèrent Gabriel s’éloigner, avec de grands yeux et les garçons relativisèrent.
Ils échangèrent un regard et pouffèrent de rire, voyant que leur mère avait ce genre d’interactions aussi, avec Gabriel.

Chris ne tarda pas à rentrer et se déchaussa tout comme Alexandra et Gabriel avant lui.
Il se posa quelques minutes pour profiter de ses enfants, embrassant Alexandra sur le front, au passage.
Elle lui laissa sa place et alla se laver les mains pour aider Gabriel aux préparatifs.
Aurore se leva également après avoir embrassé Chris, pour suivre sa mère.
Gabriel prit Alexandra dans ses bras, comme s’il ne la voyait pas assez de la journée.

2020.04.17

Rideaux

Le médecin remarqua le réveil d’Hélène et s’approcha d’elle pour vérifier son état.

— Ne force pas, les effets de la drogue doivent être en train de se dissiper. Je vais prévenir tes parents que tu es réveillée.

Il avait effectué ses gestes tout en s’exprimant, une lampe stylo qu’il sortit de la poche de sa blouse et qu’il dirigea sur les yeux de la patiente qui n’avait pas vraiment son mot à dire, ni la force d’exprimer un quelconque rejet.
Ses paroles répondaient à une partie des questions qu’elle se posait.
Sa gorge était sèche et elle se la racla difficilement avant d’essayer de prononcer quelques mots.
Il lui apporta un verre à la bouche, l’aidant à se désaltérer.

— Je t’ai mis sous intraveineuse en attendant que tu ailles mieux pour te sustenter.

Elle connaissait ce médecin, c’était celui de famille, celui qui connaissait ses « antécédants médicaux » comme c’était indiqué sur sa fiche publique et officielle.
C’était un homme plutôt baraqué, sa blouse semblait presque trop petite, les manches remontées jusqu’au dessus des coudes, il était musclé et des poils longs et foncés recouvraient ses avant-bras.
Les cheveux courts et bruns foncés, une barbe taillée et entretenue qui lui donnait un air plutôt propre sur lui. Ce qui était rassurant pour un médecin.

— N’essaye pas de trop bouger, tu as quelques côtes brisées. Pour éviter de compliquer la resolidification des os, il vaut mieux que tu restes allongée quelques temps. Ça devrait être fini d’ici quelques jours, si tout va bien.

Il avait croisé ses bras, l’air de sermoner la blessée.
Il lâcha un soupir.
Elle essayait de traiter toutes ces informations, le cerveau encore embrumé.
De la drogue ?

— Si tu insistes pour retourner en cours, il faudra te déplacer en fauteuil roulant, pour que le maintient du dos soit bon, mais je te recommanderais de prolonger ta convalescence d’une bonne semaine de plus, après que tu seras déchargée et de retour chez toi.
Continua t-il.

Elle ne savait pas quoi répondre et resta silencieuse.

— Je te laisse réfléchir à tout ça, je reviendrai te voir un peu plus tard.
Finit-il par conclure et s’en aller.

Il n’était pas spécialement commode pour un médecin. Peut-être pour que les gens n’aient pas envie de revenir à l’infirmerie. Cela ne l’empêchait pas d’être très compétent. Il avait été recommandé par Chrystal qui était avant lui, l’infirmière en cheffe, avant de prendre congé et partir vivre avec Alexandre, l’oncle d’Hélène.

Les premières personnes à lui rendre visite furent ses parents. En fin d’après-midi, alors que le soleil commençait à se coucher et que la lumière qui se reflétait dans la pièce et sur les rideaux blancs commençait à virer au orange doux.
Sa mère lui serra sa main dans la sienne et elle l’embrassa sur le front, comme son père.

— Comment te sens-tu… ?
Demanda t-elle, par automatisme, sachant qu’elle ne devait pas se sentir en pleine forme. Elle souhaitait une réponse honnête.

— Ça va…

Sa voix était revenue mais restait un peu enraillée, sèche. Hélène se racla un peu la gorge.

— Ça n’a pas l’air d’être très grave, c’est ce que le docteur a dit. J’étais dans les vapes à mon réveil mais ça va beaucoup mieux maintenant. Tant que je ne bouge pas…trop… Par contre, il ne m’a rien expliqué… je ne me souviens pas pourquoi je suis ici… il a parlé de drogue… ? Est-ce que vous pouvez m’expliquer… ?

Chris serra le poing en se remémorant l’histoire.
Alexandra comprit d’un regard qu’elle allait devoir lui raconter.

— Il va y avoir un conseil de discipline très important concernant cette histoire. Une enquête a été lancée et on commence déjà à avoir tous les détails. Nous non plus, on ne sait pas encore exactement ce qu’il s’est passé.
Dit-elle en échangeant un regard avec Chris.

— Tout ce qu’on sait, enfin. Ce dont on est sûr, c’est que Ulysse t’a fait boire une drogue… qu’on appelle drogue du violeur. On ignore comment il s’en est procuré mais c’est très grave. Heureusement, Alain et Cean sont arrivés à temps. Et moi aussi…

Elle marqua une pause.
Chris continua.

— Ne t’inquiète pas, mis à part les lésions physiques, ils ne t’ont pas…

Il s’arrêta et n’arrivait pas à exprimer le mot, il reprit.

— Le docteur a fait une analyse de tes vêtements qu’on a dû découper pour te les retirer… les traces dessus serviront de preuve. Dernière chose : Cean et Alain nous ont tout raconté… au sujet des brimades…

Il s’approcha d’elle et la serra dans ses bras.

— Pardon papa…
— Pourquoi tu t’excuses… ?!

— … On voulait pas vous embêter avec ça… on voulait pas vous causer de problèmes….
Répondit-elle en rendant l’étreinte à son père.

— Jamais vous nous embêtez ou vous nous causez de problèmes ! C’est également notre rôle de vous aider, de vous protéger si besoin.

Il l’embrassa sur le front pour ne pas lui faire mal en la serrant trop fort dans ses bras.
Sa mère fit de même.

— Promets-nous de nous en parler, la prochaine fois que quelque chose de similaire vous arrive.

— … D’accord. Promis… maman… papa…
— On va te laisser te reposer.

Ils partirent, la laissant avec ses pensées.
La fatigue et la douleur persistante sur son torse et dans ses membres. Elle finit tout de même par s’endormir, malgré elle, tout en réfléchissant aux évènements.

Elle se réveilla doucement lors qu’elle entendit quelques voix et quelqu’un approcher.
Elle reconnaissait cette silhouette.
Alain tira le rideau et se faufilla à l’intérieur, pour enfin voir sa soeur.
Vu son expression, il se doutait de l’avoir réveillée.

— Excuse-moi, tu dormais… ?

— J’étais en train de me réveiller.
Dit-elle, en lui souriant, immobile. Allongée sur le dos.

— Comment… te sens-tu ?
Demanda t-il.

— Endormie… j’arrête pas de m’endormir. Mais sinon ça va.

Elle se doutait que son frère devait culpabiliser et elle préféra ne pas parler des douleurs qu’elle ressentait en permanence.
Il s’assit sur le rebord du lit et attrapa sa main dans la sienne sans la regarder.
Elle serra un peu plus fort ses doigts sur les siens.

— Tu sais, ce n’est pas de ta faute.
Dit-elle.

— Mais… si j-
— Ce qui est fait est fait. On ne peut pas changer le passé. Puis je ne vais pas si mal.

Elle essaya de sourire, mais elle grimaça en faisant un faux mouvement.
La réaction fut immédiate, il s’inquiéta.

— Ça va ?!
— Oui oui, j’ai juste essayé de bouger mon bassin comme une idiote…
— … Tu n’as pas trop mal ?

— … Ça va.
Mentit-elle.

— En realité, je ne suis pas si blessée que ça…
Sourit-elle, pour le rassurer.

Elle savait qu’elle était en peignoir fin, mais elle n’avait pas eu l’occasion de voir l’ampleur des dégâts.
Mis à part les pansements et bandages sur ses bras et ceux sur son visage qu’elle devinait facilement.
Alain ne put s’empêcher de pleurer. Les larmes coulèrent d’elles-même, malgré lui et il tenta d’essuyer ça rapidement mais Hélène le remarqua, ce qui le fit éclater en sanglots.

— Je… je suis tellement désolé… c’est moi qui aurait dû me retrouver à ta place…

— Ne dis pas ça. Je n’aurais pas supporté que tu sois dans cet état, non plus… je vais bien, regarde. Encore quelques jours et ça sera du passé.

Elle ressera ses doigts sur la main de son frère et esquissa un autre sourire.
Le voir pleurer, montrer ses émotions, n’était pas courant.
Et elle en eut le coeur chamboulé.

Durant les jours suivants, tout le monde de sa famille passa la voir. Aurore, Cean. Les cousins étant trop loin, et pas concernés par leur monde, on leur épargna le déplacement, surtout qu’Hélène n’était pas mourante.

*

Cean rentra chez lui et dut expliquer à Aurore ce qu’il venait de se passer. Elle était horrifiée.
Elle, la petite dernière chouchoutée par ses camarades parce qu’elle était la fille du directeur, ses yeux vairons la rendant d’autant plus spéciale.
Même son caractère était bon, doux et chaleureux. Elle parlait à tout le monde et était avenante avec ses camarades. Elle était populaire et imaginer des brimades aussi violentes sur sa soeur et son frère, cela la mettait hors d’elle. Alors qu’elle était de nature calme et posée.
Son frère expliqua l’état dans lequel se trouvait Hélène et Aurore eut peur.
Cean, également touché par cet évènement ne pouvait pas s’empêcher d’imaginer Aurore dans une situation similaire et il la serra fort dans ses bras, pour se rassurer et la rassurer.

— Je ne te laisserai jamais subir ce genre d’actes. Je serai toujours là pour te protéger.
Dit-il comme une incantation, en lui caressant ses cheveux fins et blonds.

2020.04.17

Gifle

Elle se réveilla dans un lit blanc et elle reconnut la séparation en tissu de l’ infirmerie.
Sa vision était encore un peu floue mais elle était déjà plus consciente depuis… Depuis quand d’ailleurs ?
Elle avait du mal à se souvenir des derniers moments de lucidité qu’elle avait pu avoir.
Sa tête lui lançait et pendant qu’elle se battait pour se remémorer ses derniers souvenirs, son corps lui rappelait qu’elle n’était pas au meilleur de sa forme.
Elle avait du mal à se mouvoir et elle ressentait une douleur globale. Ne sachant pas trop d’où elle provenait, si ce n’était pas tout son être qui était mal.
Ses sens lui revenaient petit à petit, elle remarqua qu’elle avait quelque chose sur son visage. Des pansements, certainement.
Son torse semblait aussi recouvert de bandages mais elle ne put pas le vérifier, le moindre mouvement la faisait souffrir.
D’ailleurs, l’ouïe aussi était de la partie. Une machine était reliée à elle et commença à biper de plus en plus fort, ou alors de la même intensité mais elle avait l’impression que le son était de plus en plus strident depuis qu’elle s’était réveillée.
Elle avait l’air seule dans cette pièce.

Elle aurait pu avoir peur, mais il n’en était rien.
Elle voulait juste se souvenir mais tout était flou dans son esprit.
Son frère. Elle était avec lui, puis. D’ailleurs, ou était-il ?
Elle commença à paniquer. Si elle, était dans cet état, quel en était de son frère ?
Elle voulut se lever et sortir pour appeler quelqu’un et qu’on réponde à ses questions. Mais son corps était dans l’incapacité de bouger, elle avait trop mal et était trop faible.
Elle voulut s’exprimer et elle se rendit compte que même sa mâchoire était douloureuse. Sa bouche pâteuse.
Un simple « ah… » sortit de ses lèvres.
Elle entendit quelques bruits et voix à l’extérieur.
Elle avait du mal à distinguer les personnes mais peut-être que quelqu’un arriverait enfin et lui expliquerait tout ceci.

— Non. Vous ne pouvez pas entrer. Elle a besoin de repos.
— On… voulait lui offrir quelque chose pour son rétablissement… c’est pas grand chose mais c’est une corbeille de fruits. Est-ce que vous pourrez…

— Oui oui. Merci pour elle.
Dit l’infirmier.

Le groupe d’élèves repartirent bredouille.

*

Alexandra avait mis en cellule de détention les deux élèves encore dans les vapes et retourna auprès de Gabriel.

Dans son bureau, Alain, Cean et Chris étaient également là.
Cean était en train d’expliquer ce qu’Alain voulait cacher à ses parents, au moment où Alexandra arriva.
Chris se dirigea vers son fils et le giffla. Puis le serrer dans ses bras.

— Pourquoi… ? Tu n’avais pas à nous le cacher…
Dit Chris, l’étreignant encore plus fort, l’émotion dans sa voix.

— … Je sais pas, Papa… je ne voulais pas vous inquiéter pour rien…
Pleurait-il. Soulagé de ne plus porter ce fardeau sur ses épaules.

— Depuis combien de temps… ?
Demanda Alexandra, également émue.

— … Depuis longtemps… à l’époque je venais d’entrer à l’école…
Dit Cean, qui se rappelait qu’il défendait Hélène et Alain.

— Intolérable… Qu’il y ait ce genre de discrimination, c’est intolérable… comment on a pu être aveugle a ce point… ?!
Gronda Gabriel.

Alexandra se dirigea vers Gabriel pour le calmer. Elle-même extrêmement touchée par ces révélations.
Chris relâcha son étreinte pour laisser Alain respirer et se remettre de ses émotions.

— Au début, c’était juste des petites piques… parfois de la jalousie des camarades…
Expliqua Cean, pour atténuer la gravité des brimades.

— Non, Cean. Ce n’est pas acceptable. Cela reste grave. Personne ne devrait à avoir à subir ce genre de comportement.
S’exprima Alexandra.

Le silence se fit dans la pièce.

— Comment va Hélène… ?
Demanda Cean.

— L’infirmier l’a emmenée en civière avec un élève. Celui qui m’a prévenue d’où vous étiez. Elle devrait être à l’infirmerie en ce moment.
J’ai mis en cellule les deux autres que vous avez assommés dans les vestiaires… Tant que tout n’est pas tiré au clair, je préfère ne pas m’exprimer. Une enquête va être ouverte. D’ici là, tenez-vous à carreaux. Cean et Alain, vous pouvez rentrer à la maison. Ne dites rien aux élèves, nous ferons une annonce et les détails ne les regardent pas. Est-ce que c’est clair ?

— Oui maman…
Dirent Alain et Cean en choeur.

— Est-ce que je peux aller voir comment va Hélène ?
Osa demander Alain.

— … je ne vais pas t’en empêcher, tant que tu ne gênes pas le médecin… après je ne te le recommande pas, parce que tu risques de te faire du mal… elle est…

Rien qu’en y repensant, l’émotion refit surface et elle ravala un sanglot.

— Pardon-…

Gabriel serra sa main dans la sienne pour lui signifier qu’il était là.

— Je comprends…
Le coeur d’Alain se ressera et il quitta la pièce. Suivi de Cean.

— Je suis désolé Alain…
— C’est moi qui suis désolé… tu avais raison… j’aurais dû en parler aux parents dès le départ…
— Tu ne pouvais pas savoir… puis maintenant c’est fini…
— … Peut-être… je tiens à aller voir Hélène…
— Moi aussi. Allons-y ensemble.

*

Alexandra essaya de retrouver son calme.
Gabriel, en voyant sa femme dans cet état, eut le coeur qui fit un tour dans sa poitrine.
Chris également.
Il la rejoint pour la serrer dans ses bras et ils se retrouvèrent lui et Gabriel à la consoler, ce qui la fit sourire.

— Merci… ça va aller.
Dit-elle en retirant quelques larmes du bout de ses doigts.

— Son état est si… ?
— Oui… Elle a probablement des côtes de brisées et son visage est déformé. Elle a été droguée… Il faut que je vous raconte ce que l’élève m’a dit…

Après son récit, la rage de Gabriel et de Chris était incommensurable.

— J’ouvre l’enquête dès maintenant pour savoir la vérité sur l’affaire. Qu’ils soient élèves n’empêchera pas la sanction d’être lourde ! N’importe quoi !!! Comment peut-on… ?!

Alexandra prit Gabriel dans ses bras.

— Calme toi…
— Tu ne peux pas me dire ça… c’est ta fille… je la considère comme ma propre fille… rien que d’imaginer ça sur Aurore… ‘Xandra… tu te rends compte… ?

Les larmes de rage montaient aux yeux de son mari.

— Je sais… moi aussi ça me met hors de moi. Mais pour l’instant on ne peut qu’attendre la vérité sur ce qu’il s’est passé. D’ailleurs, il va falloir prévenir les parents d’Ulysse et de son ami…

Chris bouillonnait de rage, que ses enfants soient traités en tant que paria le touchait déjà énormément. Que sa fille soit dans cet état et que des élèves aient pu manigancer ce traitement, il n’en revenait pas.
Ça le dégoutait presque d’être enseignant et de n’avoir rien vu venir, ni pu faire pour éviter cela.
Alexandra laissa Gabriel gérer l’enquête et se dirigea vers Chris, qui l’enlaça en la serrant très fort dans ses bras.

— Je suis tellement désolée…
Sanglota t-elle contre lui. Se sentant fautive d’avoir mis ses enfants dans cette situation.

— ‘Xandra… tu n’as rien fait de mal. Tu nous as donné de magnifiques enfants… moi… je m’en veux d’avoir été aveugle-

— Je suis aussi professeur, je te signale. Je t’interdis de rejeter la faute sur toi !
Je… je pensais que je pourrais peut-être leur éviter les brimades… j’ai été cible avec mon frère lorsque nous étions enfants… je me sens tellement inutile.

— Bon, vous deux là. Vous allez arrêter de dire n’importe quoi.
Gabriel s’exprima pour les gronder.

— Vous n’êtes pas fautifs, et Chris, je te laisse t’occuper de prévenir les parents des deux en cellules. Plus vite ça sera fait, plus vite on pourra aller voir comment se porte Hélène !

— Oui chef… je retourne auprès d’Hélène.
Dit Alexandra en sortant de la pièce.

— Tu crois que ça ira… ?
Demanda Chris. Inquiet.

— Elle est forte… tu parles d’Alexandra ?
S’assura Gabriel, continuant ses tâches pour préparer l’enquête.

— Oui… ma fille est entre de bonnes mains, j’ai confiance.

— Tu la connais… elle culpabilise certainement d’avoir créé cette différence de traitement entre ses enfants. Que les miens soient privilégiés par rapport aux tiens…

— C’est une excellente mère. Je l’ai vue donner énormement d’amour aux miens. Je vois pas en quoi elle devrait culpabiliser.
Défendit Chris.

— Je le sais, et je n’en doute pas, mais c’est Alexandra… elle le pense certainement. C’est à nous de la rassurer.
— C’est vrai… bon j’y vais.
— Essaye de rester diplomate. Je sais que tes enfants sont en jeux… mais garde ton calme. Tu sais ce que c’est d’être parents. Ils n’y sont pas forcément pour quelque chose dans les agissements de leurs enfants. Ils seront jugés en temps et en heure.

— Reçu…
Dit Chris, avec un petit sourire en coin, adressé à Gabriel.

Il avait toujours agi de manière professionnelle mais il savait que dans ce cas particulier, même Gabriel avait du mal à garder son sang froid.

2020.04.12

Réputation [R-18]

L’un resta aux toilettes prétexant qu’il n’allait pas bien.
Son ami le nargua en lui disant qu’il ratait quelque chose et que c’était pas de chance.

Celui qui rejoignit Ulysse lui en voulut d’avoir commencé sans lui. Il était en train de s’amuser avec la poitrine de la victime qui ne réagissait pratiquement pas, à part quelques gémissements.

— Ça va, j’ai encore rien fait. Il est où l’autre ?
Dit-il pour se dédouaner.

— Laisse tomber, il a chopé une gastro ou un truc dans le genre.
— Tant pis pour lui. Tu veux commencer par quoi ?
— Hm… j’étais parti pour la tabasser d’abord. T’as dit que tu savais pas combien de temps ça durait les effets, non ?
— Exact.
— Si on la tabasse maintenant, si jamais elle reprend ses esprits, on sera tranquille. Puis ça nous défoulera un peu avant de nous vider les couilles…

— Pas con. J’ai prévu les capotes, au fait.
Dit-il en sortant une guirlande de préservatifs de sa poche.

— T’es le meilleur.
Dit-il en lui en tapant cinq.

— Ici, c’est pas ouf, on la déssape dans la douche ?
— J’ai une meilleure idée, on la tabasse sous la douche, et on s’occupera des fringues après.

Ils la traînèrent jusqu’au coin des douches et ils commencèrent à lui donner des baffes, des coups dans le ventre, dans les jambes. À lui cracher dessus, chacun leur tour.

— Putain ça m’excite grave, j’ai envie de lui éjaculer dessus.
— Bah vas-y, on la rincera après de toute facon.

Elle était recroquevillée sur elle-même, ne sachant pas si c’était de douleur ou juste à cause de l’impact des coups.
Elle avait toujours l’impression d’être dans du coton, tout était flou, les voix lointaines, elle devinait le sol en carrelage et reconnaissait vaguement les douches du vestiaire mais elle n’en était pas sûre.
Même les coups qu’on lui donnait semblaient être adressés à une autre personne, elle n’en ressentait presque pas la douleur. Cette douleur était vivace puis s’estompait comme tout autour d’elle.
Elle n’avait même pas la force de crier ou de parler.

Ils appuyèrent sur le bouton pour déclencher la douche et la laissa couler sur le corps presque inerte d’Hélène.

— Tu crois qu’elle peut se noyer ?
Demanda Ulysse, presque comme si c’était une blague.

— On va vite le savoir.
Répondit l’autre, sur le même ton.

Ils étaient là, spectateurs et amusés par ce qu’ils voyaient.

*

Celui qui était aux toilettes, attendit que son ami parte pour sortir et courir vers l’extérieur.
Il était terriblement mal à l’aise de cette situation et culpabilisait pour Hélène.
Il cherchait quelqu’un, désespérément, un adulte probablement.
Comme avait prévu Ulysse, ce jour-là et à cette heure-ci, les lieux étaient pratiquement vides.
Quelques élèves traînaient encore dans les couloirs pour discuter, mais la plupart étaient en train de rentrer chez eux.
Il essaya la salle des professeurs, avec un peu de chance il restait quelqu’un.

*

Alain était rentré chez lui, mais quelque chose clochait.
Hélène n’était pas là.
Il savait qu’elle devait être rentrée et qu’elle prévenait toujours si elle allait quelque part.
Les mots de son frère retentirent dans son esprit.

« Et s’ils s’en prenaient à Hélène ? »

L’angoisse l’envahit.
Ses chaussures n’étaient pas dans l’entrée.
Il l’interpela. Pas de réponse.
Il courut dans sa chambre, elle n’était pas là.
Il commença à paniquer.
Il s’inquiétait peut-être pour rien.
Si elle n’était pas à la maison, c’est qu’elle était peut-être restée à l’école. Il ne voulait pas inquiéter ses parents pour rien.
Il appela quand même Cean pour être sûr qu’elle n’était pas allée les voir, connaissant sa relation avec Aurore.

— Allô ? Cean ? C’est moi Alain.

Il appelait du fixe.

— Oui Alain ? Il y a quelque chose ?
Demanda t-il.

— Hélène est pas chez toi ?
— Euh non, pourquoi ?
— Pour rien… elle est pas rentrée à la maison, je… je suis un peu inquiet. Elle est peut-être encore à l’école. Je vais aller voir.

— Attends. T’es sûr que ça va ?
Demanda t-il, entendant la détresse dans sa voix.

— … Quelqu’un m’a enfermé dans ma salle de classe. J’espère qu’Hélène va bien. Je te laisse, je retourne à l’école.
— J’arrive. Je viens t’aider.

— Merci…
Lâcha t-il avant de raccrocher.

Cean raccrocha et s’adressa à Aurore qui était dans le salon.

— Je retourne à l’école, Alain a oublié quelque chose là-bas, je vais l’aider. Si maman ou papa rentre, tu leur diras ?
Mentit-il.

— D’accord.

Il avait promis à son demi-frère de ne rien dire.

*

Alain interrogea des élèves au hasard. Avec son tact légendaire, il essaya de se contrôler et être courtois.
Les groupes qu’il abordait ne semblaient pas être au courant.
Quand une personne à part entendit ses questions et l’interpela.

— Ta soeur, tu veux dire cheveux noirs longs bouclés et peau un peu mate ? À peu près de cette taille ?
Mima t-elle.

— Oui.
— Ça fait un moment, mais il me semble l’avoir vue avec un garçon, ils étaient en train de se diriger vers le gymnase. Ils ont dû repartir depuis…
Expliqua t-elle en tentant de se remémorer la scène.

— Merci !
Remercia t-il en courant jusqu’au gymnase.

Cean le suivait.

Comme elle l’avait prédit.
Le gymnase était vide.

— Merde… !
— Alain. Regarde ça.

Cean ramassa un bout de tissu qui ressemblait à une manche de chemise.

— Ça ressemble… à ce qu’elle portait. Ils sont où, putain ?!
S’énerva t-il. Sa voix résonnant dans tout le gymnase.

Après l’écho, le silence revint, mais un bruit de fond était presque imperceptible.

— Tu entends… ?
Demanda Cean.

— Quoi… ?

Alain et sa rage bouillonante l’empêchait de bien entendre, sa colère faisait qu’il n’entendait que les battements de son coeur contre sa tempe.

— Il y a un bruit…. d’eau… ? De douche ?

— Les vestiaires ! S’écria Alain.

Ils coururent jusqu’aux vestiaires et restèrent silencieux pour se diriger vers les douches.
Ils aperçurent les deux garçons en train de rire en regardant le corps d’Hélène sous le jet d’eau.
Alain vit rouge. Il se rua sur Ulysse pour lui asséner un coup de poing au visage, de toute sa force.

Les deux spectateurs se retournèrent et n’eurent pas le temps de se défendre.

— Putain, ils foutent quoi ici ?!
S’exprima Ulysse avant de se prendre le coup et tomber sur le carrelage.

Alain était en train de passer ses mains autour du cou tout en l’enjambant.
Son pantalon était défait et on pouvait voir son caleçon.
Il essaya de ne pas y penser mais l’idée lui traversa l’esprit, qu’il ait pu passer à l’acte sur sa soeur.
Cean donna un coup de poing à l’autre garçon qui essayait de s’enfuir. Il s’écroula sur le sol.
Il se dirigea ensuite sur Hélène pour la sortir de la douche et vérifier qu’elle était encore vivante.
Son corps était gelé, trempé, et ses cheveux étaient défaits et emmêlés devant son visage.
Il ne vit pas tout de suite le rouge à ses lèvres, et quelques boursoufflures sur le visage.
Il dut crier à Alain d’arrêter avant de tuer Ulysse, qui essayait de se défendre.

— Il faut qu’on s’occupe d’Hélène ! Arrête Alain !

La colère le rendait sourd et il avait l’impression que rien ne pouvait l’apaiser tant qu’Ulysse resterait en vie.
Une partie de sa rage était envers lui-même.
De n’avoir pas pris les avertissements de Cean au sérieux.

*

Il ne restait qu’Alexandra en train de ranger des piles de papier lorsque l’élève frappa et entra.

— Oui… ? En quoi puis je t’aider ?

— Madame… C’est grave, dans les vestiaires… il y a une agression…
Dit-il essouflé.

— Pardon ? Calme-toi. Comment ça, une agression ?

— Il faut que vous veniez, tout de suite… !
La pressa t-il.

Elle posa ce qu’elle avait dans ses mains et suivit l’élève avec hâte.
Le voyant essoufflé, elle n’osa pas l’interrompre pour qu’il lui explique les détails.

Elle entendit des bruits de lutte et en s’approchant elle fut prise d’horreur en voyant son fils en train d’essayer d’étrangler Ulysse au sol, et Hélène dans les bras de Cean, inerte.

— Maman… il faut arrêter Alain…
Dit Cean qui essayait de déplacer le corps de sa soeur en dehors de la douche.

Totalement trempée, rien qu’au toucher il sentait qu’elle avait quelques côtes cassées. Il n’était pas judicieux qu’il la porte mais il ne pouvait pas la laisser sur le carrelage humide et froid.

— Hélène… tu m’entends ?…
Demandait-il pour qu’elle donne un signe de vie.

Elle respirait encore mais elle avait probablement perdu connaissance.
Alexandra se précipita sur Alain pour le dégager de sa position. Il lâcha son emprise sur son cou, voyant sa mère, il se calma, mais donna tout de même un dernier coup de poing dans son visage, qui l’assomma sur le sol.

— Je ne sais pas ce qu’il s’est passé ici, mais ça demandera des explications.
Dit-elle en regardant les corps des garçons assommés.

Elle se tourna ensuite vers Hélène.
Elle ordonna à celui qui l’avait amenée ici, de prévenir l’infirmier pour ramener de quoi transporter quelqu’un en soin intensif.

— Quant à vous deux… il faut quelqu’un pour prévenir Gabriel de… tout ceci. Et j’ai besoin de détails…

Alain ne se sentait pas très à l’aise pour aller voir Gabriel et Cean se dévoua pour y aller.
Alexandra s’approcha du corps d’Hélène et fit les mêmes gestes que Cean auparavant, pour savoir si elle respirait encore, tâter son pouls, tâter le corps et vérifier qu’elle n’avait pas des blessures plus graves.
La tension de la découverte était retombée et elle voyait l’état déplorable de sa fille, elle ne put s’empêcher de retenir ses larmes.

— C-comment ça a pu arriver…. ?
Dit-elle en essuyant d’un revers ses yeux, en espérant que cela passerait inaperçu.

— Je suis désolé…
S’excusa Alain. Lui-même sous l’émotion voyant sa soeur dans cet état.

— Ce n’est pas toi qui l’a mise dans cet état, Alain. Tu n’as pas à te rendre coupable…
Dit-elle pour le rassurer.

— C’est ma faute si elle a été prise pour cible… parce qu’Ulysse avait une dent contre moi, à cause de la dernière fois…

— C’est inadmissible. Ce genre de représailles est inadmissible ici.

La colère s’était emparée d’Alexandra.
Il était rare de voir sa mère aussi remontée et il en eut des frissons dans le dos.

— Sache que cela ne restera pas impuni. Ne fais rien d’incensé et laisse-nous nous occuper de ça. Si tu fais du mal à ceux qui sont à l’origine de ceci, cela risque de se retourner contre toi.

— Oui, maman…

Il savait qu’il pouvait faire confiance à sa mère pour cela mais rien que ses mots lui inspiraient la peur.

— Cean a raison. Hélène est mal en point… ses côtes sont probablement brisées et il vaut mieux ne pas la déplacer plus. Il faut qu’on attende la civière.
Les deux garçons ici, ne vont pas tarder à reprendre connaissance. Est-ce que je peux te demander d’aller chercher ton père, déjà pour le mettre au courant de la situation, puis d’autre part pour qu’il prévienne les parents que leurs fils vont devoir répondre de leurs actes.

Elle passa sa main sur les cheveux de sa fille pour dégager son visage et elle remarqua l’étendu des dégâts.
Un autre pincement au coeur suivit.

— Que s’est-il passé… ?
Demanda t-elle dans le vide.

L’infirmier arriva avec l’autre élève qui resta là, à observer la scène, tremblant.

— Je…. je peux vous expliquer…
Avoua t-il.

Pendant que l’infirmier, avec l’aide d’Alexandra, installait Hélène sur la civière, il leur expliqua alors le plan d’Ulysse et qu’il n’avait pas assumé et s’était isolé pour pouvoir prévenir de ses agissements.

— Je… je sais que je suis fautif aussi, je suis terriblement désolé…

Alexandra posa sa main sur son épaule et le remercia de lui avoir raconté tout ce qu’il savait.

— Je ne vais pas te mentir, je ne sais pas quelles seront les sanctions, mais merci.
Est-ce que tu peux aider l’infirmier à emmener Hélène, s’il te plaît ?
Je vais embarquer ces deux-là, en cellule de détention…

Elle utilisa sa magie pour les soulever et lier leurs poignets et les chevilles puis les faire léviter pas loin d’elle.
Il en resta bouche bée.
Sa réputation n’était pas volée.

2020.04.12

Guirlande [R-18]

Le retour d’Alain à l’école passa presque inaperçu.
Les autres élèves chuchotaient et d’autres l’ignoraient comme d’habitude.
Ils n’avaient jamais été très sociables envers les autres camarades de classe. Cela n’était pas choquant.
Ils restaient entre eux, soudés.
Hélène lui avait permis de rattraper tous ses cours.
L’autre élève suspendu ne tarda pas à faire son retour en grandes pompes. Saluant ses amis et n’hésitant pas à s’exprimer sur la dureté de cette semaine chez lui, en jetant des regards prononcés vers celui qui en était la cause.
Hélène jeta à peine un regard derrière elle et emboîta le pas de son frère pour se rendre en cours.
La journée se passa sans accroche.
Pas de cours d’entraînements aujourd’hui.

Ils étaient sur le point de quitter les lieux d’études.
Dans l’entrée, quelqu’un accourut pour interpeller Alain.
Il ne cacha pas sa surprise.

— Le professeur m’a dit qu’il voulait s’entretenir avec toi rapidement. Il a oublié de te le dire. Il t’attend dans la salle de classe à l’étage.
Expliqua t-il un peu essouflé.

Alain jeta un coup d’oeil à Hélène.

— Je vais rentrer d’abord, prends ton temps.
Répondit-elle, comprenant sa question non formulée.

— Ok, on se retrouve à la maison.
Dit-il en retournant sur ses pas.

Elle se dirigea vers la sortie, quand ce fut à son tour de se faire interpeller, par une autre personne.

— Est… ce que… tu as un peu de temps… ? Je voudrais te dire quelque chose… en privé…

Le garçon semblait gêné et pas très à l’aise.

— Euh… oui ?
Réfléchit-elle.

— Tu veux bien me suivre dans un endroit avec moins de monde… ?
Demanda t-il en regardant le flux d’étudiants passer autour d’eux et sortir.

C’était compréhensible , elle acquiesça et le suivit.
Il était nerveux et elle le ressentait.
Il se dirigea vers le gymnase d’entraînement.
À cette heure-ci, elle était étrangement vide. D’habitude il y avait toujours un ou deux groupes qui révisaient les gestes et techniques. C’était peut-être pas l’heure exacte où ils arrivaient. Elle était déjà venue pour s’améliorer.
Il s’arrêta devant elle.
Elle ouvrit la bouche mais la referma aussitôt. Finalement c’était son problème.

— Tu voulais me dire quoi… ?
Demanda t-elle pour briser le silence.

Il regardait autour de lui, effrayé par quelque chose.
Elle regarda également autour d’elle.

— Il n’y a personne, tu peux parler.
Le rassura t-elle.

La porte s’ouvrit derrière elle et trois autres personnes arrivèrent.
L’élève devant elle s’en alla de manière précipitée, sans même lui adresser une parole et il évita son regard.
C’étaient Ulysse et deux autres garçons, dont celui qui avait interpelé son frère.

— Surveille la porte.
Dit Ulysse au timide, qui acquiesça sans demander son reste.

Hélène commença à rassembler les pièces du puzzle et une peur l’envahit. Qu’est-ce qu’il manigançait ?
Elle était seule contre trois.
Elle resta sur ses gardes et recula d’un pas.

— Qu’est-ce que tu me veux ?
Dit-elle, sur la défensive.

Il s’avança seul vers elle.

Ses acolytes restaient à observer. Étaient-ils là juste pour le rassurer et intimider ?

— Hm… tu vas bientôt le savoir.
Dit-il, en se pavanant, le sourire au coin des lèvres.

— T’approches pas de moi. Mon frère t’a mis une raclée, ça t’a pas suffit ?

Elle jetait un regard aux deux autres garçons, mais ils ne semblaient pas bouger.
Elle n’était pas rassurée mais devait montrer qu’elle n’avait pas peur d’eux. Du moins elle essayait.
Elle ne voulait pas se battre, son frère en avait fait les frais et elle savait qu’elle allait s’attirer des problèmes si jamais ils en venaient aux mains.
Il s’approcha encore, ignorant ses paroles.

— T’es pas moche, tu sais ?
Dit-il en la regardant de manière insistante de haut en bas. Son regard s’arrêtant sur sa poitrine généreuse.

Elle était plutôt jolie, c’était un fait. Le corps bien formé depuis l’adolescense, elle avait développé sa poitrine qui la gênait plus qu’autre chose lors des cours de combat. Musclée comme toutes celles de sa classe, elle avait une bonne morphologie, la peau légèrement hâlée et ses magnifiques cheveux noirs un peu bouclés, avec son regard doux comme ceux de sa mère, aux pupilles marron. Dans un autre contexte elle aurait pris ça bien, mais dans celui-ci, elle se sentait souillée par ces mots et son regard lubrique.

Elle ne prit pas la peine de lui répondre.
Il était maintenant juste devant elle.
Elle ne put s’empêcher de lui donner une gifle qui résonna dans tout le gymnase.
Le coup était parti tout seul et elle se surprit elle-même d’avoir fait ce geste

— Merde.
Pensa t-elle.

Il resta cloué sur place, ne s’attendant pas à se faire gifler. Ses amis étaient tout autant surpris et ne savaient pas s’ils devaient en rire.
Il se sentit humilié et voulut frapper Hélène. Qui était préparée et évita son coup.
Elle se dit qu’elle devait éviter d’envenimer la situation, sans non plus s’excuser pour sa baffe, mais si elle pouvait éviter de se battre, ça serait bien.
Elle évita alors assez facilement tous les coups qu’Ulysse voulait lui asséner.
Plus il essayait et plus il s’énervait, et ses coups devenaient de plus en plus prévisibles.

— Arrête de bouger… !!!
S’écria t-il.

Il s’épuisait tout seul.

— Bon… est-ce que je peux partir, maintenant ?

Elle aurait pu essayer d’ouvrir la porte mais les deux autres acolytes semblaient monter la garde, et elle craignait encore qu’ils ne décident de le rejoindre.
Elle aurait pu également passer par la porte du vestiaire, mais tourner le dos à trois garçons, ce n’était pas la meilleure idée qui soit.

*

D’ailleurs, son frère, qu’en était-il ?
Il était arrivé à la salle de classe où son professeur était supposé l’attendre. Il entra. Personne.
Il entendit la porte se refermer derrière lui et un bruit de serrure.
Quelque chose n’allait pas.
Il voulut ouvrir la porte mais elle était maintenant verrouillée.
Il ragea de l’intérieur. Il essaya de forcer mais s’arrêta.
Il ne fallait pas qu’il abîme le mobilier, sinon ça se retournerait contre lui et il ne voulait pas devoir expliquer qu’un élève ou quelqu’un s’était amusé à l’enfermer dans la salle.
Il s’était fait piéger et il se doutait qu’Ulysse était à l’origine.
La porte n’allait pas s’ouvrir.
Même s’il voulait l’enfoncer, les gonds n’étaient pas dans le bon sens.
Il soupira et se tourna vers les fenêtres.
Il n’était pas si haut, le premier étage. Par chance les fenêtres n’étaient pas verrouillées.
Elles donnaient vers la cour intérieure.
Il fit attention à ne pas se faire mal en essayant de s’accrocher aux aspérités et aux pierres du mur pour descendre petit à petit, atteignant l’étage du dessous et se laisser tomber.
Il se dépoussiéra les vêtements et se releva comme si de rien n’était et il prit le chemin de la maison.

*

— Vous allez me regarder longtemps ?!
S’énerva Ulysse.

— Attrapez la !
Ordonna t-il.

C’était ce qu’elle redoutait et elle prit ses distances.
Elle ne connaissait pas leurs niveaux et essayait de jauger où ils se situaient par rapport à elle.
Ils essayèrent de l’attraper à plusieurs reprises mais elle réussit à esquiver, jusqu’à ce que l’un des deux attrape un pan de ses vêtements, sa manche, et la déchire pendant qu’elle essaye de se dégager.
Ulysse eut le temps de reprendre son souffle et se joignit à l’attaque.
Les nombreux assauts avaient épuisés Hélène.
Elle devait faire attention aux deux garçons et être attentive à leurs mouvements.
Elle se relâcha un bref instant et l’un d’eux réussit à lui attraper le bras, l’autre profita de cette ouverture pour l’immobiliser en lui attrapant l’autre bras.
Elle ne pouvait plus rien faire. Ils étaient plus forts qu’elle à deux, lui imobilisant chaque bras.
Ulysse était satisfait et cela se voyait sur son visage.
Il s’approcha à nouveau d’elle.

— Pourquoi vous faites ça ?!
Demanda t-elle, désespérée, en continuant de se débattre. Sans succès.

Elle espérait une réponse mais au fond d’elle, elle savait que c’était peine perdue, que la réponse serait injuste envers elle.
Il fouilla dans sa poche et en sortit une sorte de fiole.

— Qu’est-ce que-

Elle n’eut pas le temps de s’exprimer.
Il lui attrapa la mâchoire et avec la pipette qui se trouvait sur le bouchon de la fiole, il injecta directement dans le fond de sa gorge, un liquide pâteux qui glissa dans sa trachée. Impossible de cracher ou d’empêcher cela.
Il avait maintenu sa tête et sa mâchoire de sorte qu’elle soit obligée d’avaler.
Elle dut déglutir, en toussant. Il lui avait serré la mâchoire tellement fort qu’elle avait encore mal après qu’il eut relâché son emprise.

— C’est pour punir ton frère. À cause de lui mes parents m’ont passé un savon mémorable. Je vais lui apprendre à rester à sa place.

Ils semblaient attendre quelque chose.

— Qu’est ce que-
— Ah ça ?
Il montra le flacon vide.

— C’est rien. Tu vas vite en ressentir les effets. T’inquiète pas, c’est pas du poison, tu vas pas en mourir.
Rit-il.

Elle ne trouva pas sa remarque drôle, au contraire, elle s’inquiéta, même si elle fut rassurée que sa vie ne soit pas directement en danger.

Il commença un monologue, comme s’il avait besoin de s’exprimer et qu’on l’écoute. Et surtout qu’ils attendaient toujours.

— J’ai eu le temps de faire mes recherches pendant cette semaine chez moi. Chercher ce produit, trouver un moyen pour te le faire boire… c’était pas de tout repos.
Tu seras beaucoup plus docile dans quelques minutes. On va pas occuper le gymnase toute la soirée, ça serait louche, n’est-ce pas ?

Elle se sentit tout à coup fatiguée, plus qu’auparavant.
Elle avait chaud et sa respiration était beaucoup plus lente. Sa vision était plus floue et elle semblait voir le monde au ralenti.
Etait-ce ce qu’elle avait avalé ?
Ses muscles étaient engourdis, et elle sentit ses jambes se dérober sous elle, bien qu’elle tenait encore debout.
Elle n’arrivait plus à se débattre ni contracter ses muscles. Son corps ne lui obéissait plus.
Les acolytes firent un signe à Ulysse pour le prévenir qu’elle ne se débattait plus et semblait ailleurs.

— Ah, j’ai presque failli attendre ! Amenez la dans le vestiaire. Je vais prévenir qu’il n’y a plus besoin de garder la porte du gymnase. Je vous rejoins.

Ils trainèrent le corps titubant d’Hélène qui avait l’air soûl.

— C’était peut-être de l’alcool ?
Se demanda t-elle.

Son esprit était de plus en plus embrouillé.
Même si elle tentait de résister, plus le temps passait et moins elle était consciente.

Les deux la posèrent sur un banc, sur lequel elle s’allongea directement tellement elle ne tenait plus debout ni assise. Ils la regardèrent, et se regardèrent. Elle était vulnérable et ils n’étaient pas sereins de cette situation.
Elle semblait dormir mais ses yeux étaient à moitié dans le vague, de temps en temps elle les rouvrait mais pas longtemps. La manche déchirée était encore dans sa main et il la posa sur le banc.

— Elle me fait de la peine comme ça…
— Je crois qu’on en a assez fait… non ?

L’inquiétude s’entendait dans leur voix.
Ulysse ne tarda pas très longtemps.
Il ne semblait pas vouloir s’arrêter là.
Il s’accroupit pour mieux la regarder.

— On fait moins la maligne dans cet état… hein ?
La narguait-il.

Il essaya de la déshabiller.

— Tu fais quoi ?!
S’écria l’un de ses acolytes, paniqué.

— Bah, on va s’amuser.
Répondit-il, ne voyant pas où était le problème.

— Ah… d’accord.

Il ne voulait pas le vexer mais d’un autre côté, il voulait partir pour ne pas être mêlé à cela.
Son camarade avait l’air de penser la même chose, au vu de son regard qu’il lui adressait.

— J’ai envie d’aller pisser…
Dit soudainement celui qui était resté silencieux.

— Putain, tu fais chier. Dépêche-toi, ou je vais m’amuser sans toi.
Répondit Ulysse, le dos tourné aux deux autres.

— Euh… moi aussi…
Ajouta l’autre.

— Grouillez-vous, je sais pas combien de temps le produit va faire effet. En tout cas c’est trop drôle comment elle est totalement à notre merci.

Il toucha ses bras puis posa ses mains sur sa poitrine pour la malaxer.

— Les gars, ses seins sont ouf !

Il s’amusait comme un enfant qui découvrait le corps d’une femme.

— On revient vite. Tu nous attends hein !
— Ouais… c’est pas sûr si vous prenez trop votre temps.

Il ne leur adressa même pas un regard.

Ils s’étaient rendus aux toilettes en se dépêchant, dès qu’ils furent assez loin, ils chuchotèrent.

— Mec, ça craint. On fait quoi ?
— Je sais pas… on peut pas le laisser tout seul avec elle, je sais pas jusqu’où il peut aller, et d’un autre côté… il nous écoutera pas si on lui dit d’arrêter…
— Ou il va plus jamais traîner avec nous.
— Merde. Il faut prévenir quelqu’un. Il faut qu’il y ait l’un de nous deux qui reste avec lui, et l’autre qui aille chercher de l’aide.
— Dans tous les cas, on va être dans de beaux draps. Mais je veux pas avoir ça sur la conscience si jamais il arrive un truc de grave à Hélène… elle mérite pas ça.
— Allez, pierre feuille ciseaux.

— T’as qu’à dire que j’ai une gastro et que je peux pas être là. Gagne du temps, il faut pas paraître suspect sinon il risque de se douter qu’on a vendu la mèche…
— Ok. Fais vite.

Ils se séparèrent.

Pendant ce temps.
Ulysse avait commencé à la peloter sans vergogne.
Elle réagissait à peine, elle était droguée.
Un de ses amis revint.

— T’es tout seul ?
— Euh… il est pas bien, il a la gastro je crois.
— Il déconne, il fallait que ça arrive maintenant ! Tant pis pour lui.
— O-ouais… il est grave dégouté.
— Bon, on commence sans lui.
— Tu faisais quoi ?
— Je réfléchissais à quoi lui faire. Tu veux toucher ses seins ?
— Euh… okay…
— Fais pas ton timide, elle se souviendra de rien, t’inquiète.

Il y alla sans trop de conviction.

— Qui commence ? Tu veux être le premier ?
— À… faire quoi ?
— Quelle question ! À la baiser !

Il se crispa. Il fallait qu’il trouve une excuse pour ne pas à avoir à le faire.

— Mais… tu ne crois pas que c’est risqué… ? Ça se trouve elle a des MST…
— Mec. Tu me prends pour qui. J’ai des capotes.

Il sortit de sa poche une girlande de préservatifs.

— T’as pensé à tout.
— Une semaine, gars. J’ai eu le temps de réfléchir. Après, on peut même y aller à deux. Soit en sodomie, soit la fellation. Tu préfères quoi ?
— Euh… j’ai pas réfléchi. Je pensais… qu’on allait juste la punir…
— Bah, c’est ça la punition. Et en plus on va prendre du bon temps.
— Je… je pense pas que je vais réussir à bander… toi, si ?
— J’ai la gaule depuis tout à l’heure, à force de la peloter. Bon, tu te décides… ?

— Je… crois que je vais te laisser y aller en premier. P’tre que ça m’excitera…
Dit-il, en se dégoutant lui-même de prononcer ces mots.

— Si tu veux.

Il commença à enlever la boucle de sa ceinture pour descendre son pantalon. Son pénis était en érection et était à l’étroit dans son caleçon.

— T… t’es sûr qu’on… va pas avoir de problème avec ça… ?
Demanda t-il inquiet.

— Tant qu’on se fait pas choper. Je t’ai dit, j’ai pensé à tout. Je sais qu’aujourd’hui, le gymnase et les vestiaires sont vides, normalement… et même si quelqu’un débarquait, on lui dirait qu’il n’a rien à faire là. S’ils voient des jeunes en train de faire leur affaire, ils savent déguerpir, tu ne crois pas ?
— … Euh si, tu as raison.
— Tu réfléchis trop, c’est pour ça que t’arrives pas à bander.
— Ça doit être ça…

Il priait pour que quelqu’un arrive, et vite.

2020.04.10