Ils se baladaient de nuit sur un grand boulevard.
Les lampadaires éclairaient d’une faible lueur et cela leur suffisait.
Chloé était avec Nao et ils profitaient de l’air frais et du calme ambiant.
Leurs pas étaient silencieux et ils se murmuraient quelques mots, ne souhaitant pas perturber le sommeil des humains.
Ils traversèrent la route pour se retrouver dans le parc et puis la forêt.
Il y faisait sombre mais la lueur de la lune éclairait légèrement leur chemin
Chloé ressentit et vit passer une silhouette dans les bois. Elle fit comme si de rien n’était et essaya de localiser la chose. Nao ne semblait pas avoir remarqué la présence subtile d’un intrus, trop concentré par le moment présent, certainement.
Chloé s’était tournée vers lui pour jauger s’il avait remarqué la même chose.
Il ne comprit pas.
Cela s’enchaîna très vite.
Chloé se positionna face à Nao, l’attaque vint de derrière. Elle n’avait pas eu le temps de se retourner pour voir l’ennemi.
Elle poussa Nao de toutes ses forces pour l’éloigner. Il tomba sur ses fesses, au sol.
Elle sentit l’attaque de plein fouet
C’étaient de nombeux pics qui la transpercèrent de tout son corps, de son dos jusqu’à passer au travers de son torse.
Nao la fixait les yeux ébahis, il était trop tard et il était impuissant, désemparé de la voir embrochée par ces pics asserrés qui étaient tintés de son sang.
Elle lui sourit, ne pouvant parler, la douleur avait été vive et intense et elle sentait ses forces la quitter.
Elle voulait lui dire quelque chose, lui dire qu’elle ne regrettait rien et que tout allait bien se passer, peut-être même blaguer dans cette situation.
Les pics se retirèrent d’un coup, comme ils étaient venus, et elle s’écroula au sol.
Du sang s’écoulant de ses plaies et de sa bouche.
Nao était maintenant aux aguets et il vit enfin la présence hostile qui s’adressa à lui.
— Je pensais que vous étiez beaucoup plus coriaces. J’ai bien fait de me cacher et vous prendre par surprise. Je voulais t’avoir en premier mais apparemment, ta protectrice a préféré se sacrifier. Moi qui avait peur de ses pouvoirs… !
Il se mit à rire, le son de sa voix résonna dans la pénombre puis il s’avança dans la lumière de la lune, à travers les branches.
— Qu’as-tu dans le ventre, petit ?
Demanda t-il, après avoir repris son souffle.
Nao était debout et serrait ses poings, il devait rester concentré et ne pas sous-estimer son adversaire. Il avait beau être fier, il n’était pas imprudent et il ne voulait pas laisser le geste de Chloé gâché.
Il fallait finir et descendre cette ordure rapidement pour pouvoir vérifier l’état de Chloé.
Maintenant qu’il savait à quoi ressemblait son pouvoir, il se tenait à distance. Il avait retenu la longueur approximative de sa dernière attaque et il allait rester prudent.
Pour mettre en pratique son hypothèse, il s’avança juste assez pour être à portée et attendit qu’il tente de l’attaquer en premier lieu.
— Qu’est-ce que vous nous voulez ?
Demanda Nao, pour faire la conversation et faire passer le temps.
— Moi ? Pas grand chose. Vous éliminer pour prouver à mes pairs que je vaux quelque chose. Ils sont tellement flippés qu’ils ne tentent jamais rien et préfèrent vous laisser tranquille. Je vais leur démontrer que vous n’êtes rien du tout. J’ai déjà mis K.O. votre supposée boss. C’était vraiment trop facile. Maintenant, à ton tour !
Sur ce, il lança sa main dont les ongles s’allongèrent de manière aiguisée en direction de Nao, qui esquiva aussitôt et sortit son épée pour couper les pics. Il fonça sur son adversaire qui l’avait sous-estimé et ne pensait pas qu’il serait aussi rapide.
Nao lui découpa le corps en deux, puis la tête pour être sûr, puis utilisa sa magie pour le brûler jusqu’à le réduire en cendres.
En attendant que les flammes consument les restes, il retourna auprès de Chloé.
Il se précipita auprès de sa protectrice et n’osa pas la toucher.
Elle ne bougeait plus et baignait dans son sang.
Il espérait qu’il n’était pas trop tard, il pouvait sentir qu’elle n’était pas encore morte mais cela ne tenait à pas grand chose et il avait peur.
— Non… non, pas ça… Chloé… !
Les larmes commençaient à lui monter aux yeux et il essaya de se contrôler. De garder son calme.
Il releva la tête et essaya de ravaler ses larmes.
Il réfléchit à une solution pour gagner du temps.
Il positionna ses mains au dessus du corps de Chloé et utilisa sa magie pour la refroidir, la geler pour ralentir le flux de sang qui s’écoulait d’elle.
Il n’avait pas réussi à trouver une meilleure solution.
Délicatement, prudemment, il essaya de remettre la tête et le corps de Chloé dans le bon sens.
Lors de sa chute, son visage avait été abîmé. Son front et sa joue avaient cogné puis frotté au sol.
Il essaya de la porter à bout de bras et se dépêcha de rentrer.
Lorsqu’il arriva enfin chez eux, Il demanda de l’aide.
Flora n’arrivait pasà croire ce qu’elle voyait, mais réagit au quart de tour.
— Nao… ? Que s’est-il passé… ?
— Flora… aide-moi… Chloé… elle est gravement blessée…
L’émotion était en train de le regagner.
Flora comprit dans les grandes lignes. Elle s’approcha et lui prit le corps de Chloé pour la porter et l’allonger sur le canapé du salon.
— Tu n’as rien ?
Demanda Flora rapidement, sans même lui jeter un regard.
— Non. J’ai refroid la température de son corps pour ralentir la circulation… je ne sais pas qu’est-ce que je dois faire pour l’aider…
Dit-il pour lui expliquer le maximum de détails.
Après que Chloé ait été installée, Flora resta silencieuse un court instant pour l’observer et essayer de prendre les bonnes décisions.
Nao respecta ce silence. Il craignait de subir la colère de Flora, elle qui n’avait jamais perdu son calme en face de lui, et qui prenait souvent les choses à la légère.
Elle s’était tue, elle ne blaguait plus et une expression grave se lisait sur son visage. Elle etait serieuse.
— Va chercher son maître. Il doit savoir si on peut la sauver. Dépêche-toi.
Flora s’exprima froidement et son regard ne quittant pas le corps immobile de Chloé.
Nao ne chercha même pas à discuter. Il ne portait pas le maître de Chloé dans son coeur, mais il comprit qu’il n’y avait pas d’autre moyen et qu’il mettrait son resentiment de côté, si cela pouvait aider et sauver sa bienfaitrice.
— J’y vais.
Dit-il simplement, avant de quitter la pièce et les lieux.
Vladislaw n’était pas loin et regarda la scène à l’écart , n’osant pas s’approcher aux premiers abords. Après le départ de Nao, il vint voir et lorsqu’il vit l’état de Chloé, il se rendit compte de la gravité de la situation.
— Flora…
— Demande à ta copine et a sa famille s’ils peuvent nous aider… Chloé était en bons termes avec eux, j’espère qu’ils se souviennent d’elle…
— J’en suis certain. Je reviens le plus vite possible.
Il posa sa main sur l’épaule de Flora et la serra pour la réconforter.
Lorsque tout le monde fut parti, Flora prit la main de Chloé dans la sienne et la serra.
Elle pouvait maintenant laisser ses émotions s’exprimer. Elle ne voulait pas les montrer, montrer à quel point elle était affectée devant ses pairs.
Si Chloé n’était plus là, elle savait qu’elle devait reprendre les rennes. Ce dont elle était le moins sûr, c’est si Nao et Vladislaw resteraient à ses côtés.
Ce qui les gardait ici, c’était Chloé, leur fidélité envers leur protectrice et créatrice.
— S’il te plaît… ne me laisse pas, ne m’abandonne pas…
Elle posa son front sur le dos de sa main et pria de toutes ses forces qu’elle l’entende.
*
Nao avait fait de son maximum pour arriver au plus vite, sans perdre de temps, il avait foncé dans le bureau du comte, sans même consulter Bréto ni qui que ce soit. Il connaissait le chemin, même s’il venait rarement dans ces lieux.
Il n’eut pas besoin de frapper et même s’il n’en avait pas l’intention, la porte du bureau était déjà ouverte, comme si sa visite était attendue.
Le comte se retourna vers lui, et son regard froid se posa sur l’enveloppe physique si jeune de Nao.
— J’attendais quelqu’un, mais pas à ce que ce soit toi… Nao.
Dit le comte en se rapprochant lentement.
Nao n’osa pas répondre. Il était tétanisé par les yeux du comte qui se posaient sur lui.
D’habitude si arrogant envers ce viel homme, il sentait la température glaciale de son expression. Il avait peur de sa réaction. C’était de sa faute si sa protégée et bien-aimée Chloé était dans cet état.
Et il se doutait qu’il savait.
Inconsciemment, il avait baissé son visage mais il ne s’était pas incliné.
Voyant que Nao n’allait pas répondre tout de suite, le comte enchaîna.
— Pour que tu sois là, c’est qu’il est arrivé quelque chose de grave. Je sens que Chloé est en danger. Explique-moi.
S’exprima t-il de manière neutre et monotone, avec une subtilité dans son timbre.
Il était inquiet et à la fois impatient de savoir ce qui se passait réellement.
— Elle… Chloé… elle a été gravement blessée… je suis venu parce que nous ne savons pas quoi faire pour…
— Emmène-moi auprès d’elle.
La décision du comte fut rapide et succincte
Nao hocha de la tête timidement et montra le chemin du retour.
Le comte regardait la bague sur un de ses doigts.
C’était un anneau simple et sobre mais il jouait avec en le faisant tourner lentement.
Quelque chose le tracassait.
Le métal dans lequel cet objet était forgé n’était pas anodin, il était également enchanté et la température qu’il dégageait aujourd’hui, était anormale.
Ce petit détail l’avait alerté, et le rendait anxieux.
Ce qui le rassurait, c’était de savoir que l’anneau ne s’était pas encore brisé. Il était simplement froid, de plus en plus froid, et ce n’était pas un bon signe.
Il le savait : il était arrivé quelque chose à sa protégée et favorite, mais il ignorait les détails.
*
Le comte observait Chloé.
Flora était restée à la même place et serrait la main de Chloé, comme si elle avait peur qu’elle disparaisse d’un moment à un autre.
— Elle n’est pas en état de boire mon sang. Il faut à tout prix une transfusion.
Dit le comte, sans aucune émotion.
— On a pas ça ici…
Répondit Nao, honteusement.
Vladislaw arriva avec Alexandra et un homme qu’ils n’avaient jamais vu.
— Je suis le médecin de famille.
Se présenta t-il, avant de les écarter pour osculter Chloé.
— Elle est anormalement… froide… ? Je sais que vous êtes des sangs froids mais…
Commença le médecin, en appréhendant qu’on se moque de lui.
— O-oui, c’est normal, c’est parce que je lui ai fait baisser sa température corporelle.
Expliqua Nao, subitement, pour essayer d’apporter des informations pouvant aider à cet examen.
— Je comprends mieux… effectivement, elle a perdu beaucoup de sang, même si votre action a aidé à la maintenir… en vie, si je peux dire… elle est dans un état critique, je ne vais pas vous mentir, elle a besoin de soin d’urgence.
Expliqua le médecin, songeur.
— On le sait. Si c’était pour nous répéter cela, ce n’était vraiment pas la peine de venir !
S’exprima Flora, les larmes aux yeux.
Vladislaw la prit par les épaules pour la calmer.
— Nous avons besoin d’aide… de réponses. Que pouvons-nous faire ?!
Flora essaya de se contenir en prononçant ces mots.
— C’est pour ça que je suis là.
Alexandra s’exprima, elle s’avança et s’interposa pour que le médecin n’ajoute pas d’huile sur le feu.
Le connaissant, il n’avait pas sa langue dans sa poche et n’aurait pas hésité à rabattre le clapet à Flora qui leur manquait de respect.
— Je me présente, je suis Alexandra. Je suis navrée de vous rencontrer dans cette situation. Je suis sure que Chloé aurait souhaité qu’on fasse connaissance dans d’autres circonstances. Je peux faire quelque chose pour elle. Ce n’est pas grand chose et il faudra faire vite pour qu’elle soit prise en charge. Je vais avoir besoin de quelques informations, je vais appeler mon frère pour qu’on nous envoit une ambulance. Faites-moi confiance, ma belle-soeur saura prendre en charge Chloé. Elle sera entre de très bonnes mains.
— Mieux vaut éviter de la déplacer de manière inadéquate. Le brancard sera très utile dans son état.
Acquiesça le médecin.
Flora n’étant pas en état de répondre sans que ses émotions prennent le dessus, ce fut Nao qui s’avança vers Alexandra et lui fournit toutes les informations dont elle avait besoin.
Vladislaw restait auprès de Flora pour la canaliser, tandis que le comte regardait la scène sans pouvoir rien faire.
Le médecin finit d’osculter Chloé et discuta avec Alexandra en apparté.
Il semblait contrarié et Alexandra ne lui laissa pas le choix. Il baissa les bras et la mit en garde.
Même s’ils étaient discrets, l’ouïe des autres personnes dans la pièce, était très développée.
— Je sais à quoi vous pensez.
— Je sais que tu n’approuves pas, mais je suis venue dans ce but. Je sais que je peux l’aider et je lui dois ça. Ce n’est pas grand chose.
— C’est dangereux. Et si…
— Je compte sur toi si jamais j’en fais trop, mais je pense que tu t’inquiètes pour rien. Je ferai attention.
— … Je ne réussirai pas à vous convaincre de toute facon. Vous avez déjà votre plan.
Soupira t-il.
— Oui, j’ai confiance en ces gens. Je ne risque rien.
Affirma Alexandra avant de se tourner vers Chloé.
Elle se positionna, les mains au dessus des plaies de Chloé et ferma les yeux.
Les autres l’observèrent sans rien dire.
Ils savaient qu’elle n’était pas mal attentionnée mais ils restaient perplexe.
Le comte comprit tout de suite.
Il savait que certaines personnes avaient le don de pouvoir guérir d’autres mais c’était un pouvoir à double tranchant, à utiliser dans certains cas et dur à maîtriser. Il ne pensait pas qu’il rencontrerait une telle personne ici.
Au bout de plusieurs minutes, Alexandra rouvrit les yeux et baissa ses bras.
Pendant ce processus, le comte sentit la bague à son doigt changer légèrement de température, le métal était moins froid mais l’était encore.
Alexandra se tourna vers le médecin et lui sourit.
Puis s’adressa aux autres personnes.
— Je ne pourrais pas faire plus… mais je pense que son état devrait être un peu plus stable. Cela nous laisse le temps de la déplacer et pouvoir préparer la transfusion…
Expliqua Alexandra.
Elle faiblit un peu, et le médecin la tint pour la stabiliser.
— Je vous l’avais dit…
— J-je vais bien, merci. Juste un petit vertige…
Répondit-elle pour le rassurer, et se rassurer elle-même.
Elle se ressaisit.
Peu de temps après, on frappa à la porte de derrière et Chrystal arriva avec un brancard.
— Donnez-moi un coup de main, je suis toute seule. J’ai fait au plus vite.
Ordonna t-elle en sortant de la voiture d’ambulance qu’elle avait garé comme on lui avait indiqué.
Vladislaw et le médecin prirent le brancard tandis que Chrystal était rentrée pour voir Chloé.
Elle salua rapidement les personnes et ne perdit pas de temps.
En très peu de temps, Chloé était installée dans la voiture, le médecin était à l’arrière pour surveiller et Vladislaw était également avec lui.
Alexandra fit signe au comte de monter à l’avant avec Chrystal, et ils formèrent un second groupe avec Nao et Flora.
— Ils vont à l’hôpital, on va les rejoindre juste après. Cela ne sert à rien qu’on soit aussi nombreux dans la voiture.
Flora était restée sans voix, ne sachant pas comment réagir, encore sous le choc de les avoir vu emmener Chloé.
Nao semblait également perdu.
Alexandra les rassura du mieux qu’elle put
— Chloé est entre de très bonnes mains. Chrystal était notre médecin de famille avant de venir vivre ici. Elle est plus que compétente.
Pendant le trajet, puis le temps d’attente jusqu’à arriver sur les lieux. Nao put expliquer à Flora qui était Alexandra.
*
Vladislaw était aux côtés de Chloé.
Dans la voiture il lui prit sa main et la serra dans la sienne. Il avait un rapport différent des autres avec elle.
Flora était protectrice et maternait Chloé, elle l’adorait de tout son coeur et cela se voyait.
Nao admirait Chloé et l’aimait profondément sans réussir à l’exprimer correctement.
Mais Vladislaw, il n’était pas aussi attaché à elle que les deux autres. Sans parler du comte.
Il la respectait et lui était fidèle, il l’appréciait. Il aimait la vie qu’il menait grâce à elle, maintenant.
2021.08.26