Embuscade

Gabriel avait remercié Chloé et s’était excusé d’avoir pu douter d’un piège.
Ne souhaitant pas déranger plus, il avait écourté leur séjour de manière brève et Aurore s’était également inclinée pour remercier ses hotes.
Nao avait du mal à faire confiance et craignait une feinte, il regardait Gabriel d’un mauvais oeil et se positionnait pour protéger Chloé si jamais il tentait quelque chose.
Chloe lui attrapa sa main et lui signifia d’un regard que ce n’était pas la peine d’être aussi méfiant envers eux.
Il savait qu’il n’avait rien à craindre d’Aurore mais il n’avait pas confiance en cet homme. Il dégageait une aura imposante et cela se voyait dans ses yeux qu’il doutait de la sincérité de Chloé.

— Nous avons déjà trop abusé de votre générosité et de votre protection. Nous devons nous en aller.
— C’était un plaisir. Êtes-vous sûrs que vous n’avez pas besoin qu’on vous escorte… ?
— Cela devrait aller…

*

Chloé était inquiète et décida de les suivre pour s’assurer que tout se passe bien. Elle avait un mauvais pressentiment.
Nao avait remarqué son regard et lorsqu’elle se tourna vers lui, il comprit ce qu’elle allait faire.

— Je viens aussi.
Di-il aussitôt, sans lui laisser le choix.

— Je vais avoir besoin de ta garde robe, pour passer inaperçue.
Répondit-elle en souriant, elle s’y était attendu et ne s’opposa même pas à son intervention.

Elle était dans la chambre de Nao et elle finit par choisir un sweat sombre à capuche et un jeans, puis elle se rendit dans sa chambre pour enfiler des bottines à talons plats.

— Je te conseille de changer de tenue aussi, et on va les rattraper.
Dit-elle, en lui lançant une casquette.

Il l’attrapa et se rendit dans sa chambre pour chosir une tenue similaire à cette de Chloé.
Un T-shirt trop grand, un gilet à capuche terne mais épais, un jogging large et des paires de baskets compensées, qui le faisaient paraître un peu plus grand qu’il ne l’était. La casquette fut posée sur sa tête.
Lorsqu’il retourna voir Chloé, elle était méconnaissable.
Ses cheveux longs étaient tressés et rangés dans sa capuche, le jeans dans lequel elle était, flottait, et il était rentré dans ses chaussures au niveau des chevilles et lui donnait un certain style. Sa carrure fine avait disparu sous les couches de vêtements amples et personne n’aurait pu deviner à quel point elle était petite et maigre en dessous de cet accoutrement.
Quant à Nao, il avait une apparence très différente de d’habitude, il faisait dans ce cas précis, très jeune et jeune des rues. En temps normal il prennait soin de son apparence et préférait porter des vêtements plus adultes, sophistiqués, pour paraître d’une classe sociale un peu plus aisée et surtout, pour avoir l’air plus mature et âgé que son apparence pouvait le suggérer.
Chloe resta muette quelques secondes pour le contempler avant d’ajouter de manière très neutre, sans aucune moquerie.

— C’est vrai que je ne te vois jamais habillé comme ça.

Nao préféra garder le silence.
Chloé paraîssait également plus jeune dans ces vêtements et on aurait pu penser qu’ils étaient du même âge.
Il était même difficle de savoir si c’était un garçon ou une fille avec la capuche relevée.
Ils ne perdirent pas plus de temps.
Elle se dirigea vers la porte de sortie et accéléra le pas pour les rattraper.
Son odorat était assez développée pour qu’elle puisse suivre la trace subtile d’Aurore qui avait dormi dans la chambre de Nao.

*

Ils avaient réussi à les rattraper et ils étaient dans la forêt.
Chloé était aux aguets et Nao était loin d’être distrait.
Ils étaient à une distance assez éloignée pour ne pas se faire remarquer, se servant des arbres et des buissons pour ne pas être à portée de vue, et leur accoutrement était fait pour qu’on ne les reconnaise pas, mais également car ils leur permettaient de pouvoir se déplacer et se battre avec facilité, si besoin.
Le chien ne devait pas non plus les remarquer mais les bois étaient assez suspicieux pour qu’il ne s’intéresse à leur présence.

— Nao, prépare toi… nous ne sommes pas seuls.
Chuchota Chloé, qui s’était arrêtée et observait tout autour d’elle.

Elle restait auprès de lui pour pouvoir le protéger si besoin.
Ce geste et cette position fit plaisir à Nao, cela le toucha profondément mais il savait qu’il n’était plus aussi inexpérimenté qu’avant. Il était à même de se défendre et de la défendre. Il aurait voulu se positionner devant elle pour pouvoir lui servir de bouclier mais il préféra se raviser et analyser la situation environnante.
Cela ne servait à rien de se battre pour savoir qui protègerait qui. Il savait que s’ils se retrouvaient en danger, il réagirait et ferait en sorte de la protéger.

— Je sais.
Dit-il simplement, d’un souffle, déjà en position.

Gabriel s’était également arrêté et avait fait signe à sa fille de ne pas s’éloigner. Il avait reculé pour pouvoir se positionner à ses côtés et Ten’ grognait sans trop savoir d’où la menace venait.

— Fais revenir Ten’. Cela peut être dangereux pour lui.

Aurore appliqua les ordres de son père. D’un claquement de langue, Ten’ était revenu auprès d’Aurore et elle s’accroupit pour essayer de le calmer. Caressant son poil et en lui sussurant des mots pour le canaliser.
Gabriel essayait de garder son sang froid mais la situation ne le rassurait pas. Il n’arrivait pas à identifier la menace. Il pestait contre lui-même de ne pas être très bon dans les sorts de défense.
Il invoqua tout de meme un léger bouclier autour d’Aurore. Ce n’était pas de la même intensité et efficacité que ceux que sa femme était capable, mais cela devrait suffire.
Aurore se retrouva dans une sorte de prison de cristal avec Ten’.
Elle lui fit comprendre son étonnement. Elle le regarda dans les yeux en attendant des explications.

— Ne t’en fais pas, c’est juste une mesure de sécurité. La source est difficile à identifiier et je préfère prendre cette précaution.
Sourit-il doucement en explication.

Elle savait qu’elle était un fardeau et elle se jura intérieurement de reprendre les entraînements de manière plus sérieuse.
La silhouette ne se fit pas prier pour apparaître.

— Tu as bien fait, mais cela ne la protègera pas indéfiniment.

Une personne habillée de manière simple, les cheveux courts en carré, châtains. Descendit de la cîme des arbres, comme si un fil la maintenait en l’air depuis tout ce temps. Avec grâce, elle posa les pieds à terre.

*

Sur le chemin, Aurore était un peu à la traîne, emboîtant les pas de son père, elle réfléchissait, perdue dans ses pensées.
La silhouette de son père devant elle.
Il n’avait pas tellement changé physiquement depuis qu’elle était petite, et elle n’était pas spécialement grande.
Depuis quand n’avait-elle pas passé du temps ainsi avec lui ? À quand remontait le dernier moment complice qu’elle avait pu passer avec lui ?
Depuis quand avait-elle arrêté de chercher à lui parler ?
Qu’est-ce qui avait changé ? Etait-ce elle ?
Elle s’en voulait intérieurement. Ses parents l’avaient toujours bien traitée.

Gabriel était trop préoccupé par son mauvais pressentiment à partir du moment où ils avaient pénétré le bois, pour réfléchir à tout cela. Son esprit était occupé par autre chose.

*

Lorsqu’il aperçut l’ennemie, son mauvais pressentiment était toujours présent. Elle n’était pas seule.
Sur ses gardes, il ne répondit pas et attendit.
Il était peut-être vieux mais il n’avait pas perdu de sa force ni de son habilité au combat.
Au contraire. Et cela surprit presque son ennemie.
Il préféra laisser l’adversaire commencer l’assaut pour en profiter pour analyser son niveau et son style de combat.
Elle semblait faire la même chose, ils furent alors à portée l’un de l’autre et ils échangèrent des coups succincts et rapides, à l intensité croissante.
Jaugeant mutuellement leur force, ils semblaient juste s’échauffer. Mais Aurore pu voir l’adversaire se fatiguer petit à petit, de manière presque imperceptible.
Son père avait l’air de bien tenir.
L’attention de Ten’ fut attirée par autre chose.
Une autre silhouette apparut au loin, cette fois-ci, une forme masculine atterrit et s’approcha de son père de manière rapide.
Aurore tenta de s’interposer en utilisant le peu de magie qu’elle ne savait pas contrôler, pour forcer ce nouvel ennemi à ralentir sa course et ne pas attaquer son père.
Elle réussit à faire sortir du sol quelques racines, avec peine, qui réussirent à obliger cet homme à s’arrêter et observer cette magie, amusé par ce niveau faible d’utilisation. Il jeta un coup d’oeil rapide à l’auteure de cette blague et reprit son chemin.
Cela suffit à alerter Gabriel qui pu prévoir l’arrivée d’un autre adversaire.

 

2021.06.14

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