Trouble-fête

— Non, je suis venu chercher Aurore.
Répondit William, qui avait repris son sérieux.

Des murmures s’élevèrent une seconde fois des élèves.
Aurore avait viré au rouge pivoine, se cachant derrière la silhouette de ses amis qui l’avaient défendue.

— Et tu ne pouvais pas l’attendre au portail, comme tout le monde… ?
Soupira le professeur.

— J’aurais pu…

— … Bon, débarasse-moi le plancher.
Répondit-il exaspéré.

— Aurore, est-ce que tu peux raccompagner ce trouble-fête à l’extérieur, s’il te plaît ?
Demanda t-il en se massant entre ses deux yeux, comme si la vue de cet individu réveillait en lui une migraine insupportable.

— Oui, monsieur…
Dit-elle d’une petite voix.

Les élèves se dispersèrent, voyant que le problème était maintenant réglé.
Pendant qu’elle finissait de ranger ses affaires, William attendait patiemment, presque fier de lui.
Ses amis restèrent auprès d’elle.

— Tu es sûre que ça va ?
Demanda celle qui avait pris sa défense.

— Tu le connais ?

Elle avait les bras croisés et elle s’était adossée sur une des table à côté.

— Oui… c’est… un ami de mon frère.
Répondit-elle, embarrassée.

— Ah… ton grand-frère, c’est ça ? Bon, j’imagine que ses amis ne doivent pas être mauvais… si jamais il y a un problème, tu nous appelles, d’accord ?

— Merci.
Sourit-elle.

Elle resta encore un instant, à surveiller la réaction d’Aurore, puis elle décida de rentrer et ses autres amis la suivèrent, laissant les deux presque seuls.
William s’avança alors vers Aurore et lui rendit son cahier, qu’elle lui arracha presque des mains, si elle n’avait pas eu peur de déchirer son précieux support de cours.

— Alors comme ça… je suis juste « un ami de ton frère » ?
Lui chuchota t-il.

Son visage rougit encore un peu plus et elle sortit de la classe.
Il lui emboîta le pas.

— Tu me fais la tête… ? Je voulais te faire la surprise… mais si je t’avais attendu au portail, j’aurais attendu je ne sais combien de temps…
Continua t-il, tout en la suivant.

— Tu passes ton temps à la bibliothèque, n’est-ce pas.. ?
Demanda t-il, plutôt sûr de lui.

— Qu’est-ce qui te fait dire ça ?

Elle s’était arrêtée cette fois, et elle le regardait dans les yeux.
Qu’elle lui adresse enfin la parole et qu’elle le regarde dans les yeux, le soulagea.

— Ton frère. Je me souviens qu’il m en avait parlé. Comment tu fais pour rester aussi longtemps au lycée… ?

— Je lis… je révise…
Se défendit elle, en baissant son regard.

Il lui sourit, attendrit qu’elle soit si studieuse.
Il ne put s’empêcher de poser sa main sur sa tête pour lui caresser les cheveux.

— Tu te moques de moi… ?
Bouda t-elle.

— Non… ! C’est adorable que tu sois si… sérieuse.
Sourit-il.

Elle se dégagea pour se diriger vers cette fameuse bibliothèque.

— Je sais que ça fait longtemps que je ne suis plus lycéen… mais la sortie c’est pas par ici…
S’inquiéta t-il.

— Je dois rendre quelques livres et je vais en emprunter d’autres, je fais vite.
Expliqua t-elle, en voyant le visage de son ami se décomposer.

— Ah… lâcha t-il, soulagé qu’elle n’allait pas le forcer à étudier avec elle.

— Tu détestes tant que ça l’école ?
Demanda t-elle curieuse.

— Ce n’est pas ça… mais j’aime pas spécialement étudier… ça ne veut pas dire que j’étais un cancre, non plus !
Se défendit-il, la voyant le juger.

— Je pourrais t’aider si jamais un jour tu en as besoin…

— D’accord… merci de proposer.
Répondit-elle, en pouffant de rire à sa réaction.

Elle essayait de s’imaginer quel genre d’élève il pouvait être pour que leur professeur réagisse de cette manière à sa vision.

Elle salua le bibliothécaire et sortit de son sac quelques gros volumes qu’elle posa sur son bureau.
Il les scanna pour les valider et elle se dirigea aussitôt vers les rayons d’étagères et de livres.
William salua également timidement l’homme à lunettes derrière son bureau et suivit Aurore dans sa recherche de nouvelles lectures.
Il n y avait pas grand monde à cette heure-ci, voire peut-être, tout le temps.
Isolés de la salle avec les bureaux d’étude, William en profita pour embrasser la jeune fille sur la joue.
Ce qui la surprit, et elle se retourna vers lui, outrée.
La main sur sa joue, comme si il lui avait donnée une claque.
Elle regarda autour d’elle pour vérifier que personne ne les avait vus.

— Ne t’inquiète pas, j’ai vérifié avant.
Chuchota t-il, son visage n’étant qu’à quelques centimètres d’elle. La rassurant.

Il en profita pour l’embrasser cette fois-ci, sur la bouche.
Lui donnant une bonne raison d’être outrée.

— Tu m’as terriblement manqué…
Lui murmura t-il, tout en reculant. Pour ne pas abuser de la patience d’Aurore.

Elle était maintenant rouge de honte. Ne sachant pas comment traiter ces émotions fortes. Elle était émue et touchée par ses mots, qui lui faisaient extrêmement plaisir. En realité, elle aussi, pensait à William et avait envie de le voir souvent, mais elle s’était faite une raison parce qu’il travaillait et il n’avait pas forcément le temps de la voir.

— Tu les choisis tes livres ?
Lui demanda t-il taquin, lui rappelant la raison première d’être ici.

— O-oui… !
Bégaya t-elle, en se tournant de nouveau vers les rangées de livre, pour prendre deux livres.

Elle les enregistra à l’accueil et s’en alla.
Cette fois-ci, ils allaient vers la sortie.
Elle resta muette jusqu’au portail.

Lui, avait l’air plutôt à l’aise.
Regardant autour de lui, presque nostalgique de se rappeler un temps qui lui paraissait si proche et à la fois si loin. Reconnaissant certains coins et se remémorant ses propres souvenirs.
Il était decontracté, perdu à moitie dans ses remembrances.

— Tu me fais encore la tête ?
Demanda t-il, encore une fois.

Il avait fait l’effort de respecter le silence d’Aurore dans l’enceinte du lycée.

— Non…
Souffla t-elle.

— Laisse-moi porter ton sac, au moins. J’ai le droit ?

Elle le dévisagea.

— J’insiste. Pour me faire pardonner de t’avoir mis mal à l’aise dans ton lycée…
Il lui prit le sac sans qu’elle n’eut réellement le choix.

— Mais il est super lourd !
S’exclama t-il.

— Je peux le porter toute seule…
Dit-elle en ne lâchant pas les sangles du sac.

— Ma question serait plutôt : comment tu fais pour le porter sans te faire mal ?

Le silence revint.

— Tu comptes me racompagner chez moi… ?
Demanda t-elle. Alors qu’ils arrivaient à un carrefour.

— C’était ce qui était prévu. J’ai pu m’arranger pour finir plus tôt aujourd’hui. Suis-je encore le bienvenue ?

— O-oui…

2020.05.01

2 réflexions sur “Trouble-fête

  1. james dit :

    Isolés de la salle avec les bureaux d’étude、: le caractère « 、 » génère un espace bizarre. j’imagine que t’as ripé en voulant taper « , « .

    • Ah, oui. De temps en temps, sur mon téléphone, je change de clavier de langue, et j’entre une autre virgule en japonais à la place. Celle ci a échappé à ma vigilence.
      Merci.

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