Gifle

Elle se réveilla dans un lit blanc et elle reconnut la séparation en tissu de l’ infirmerie.
Sa vision était encore un peu floue mais elle était déjà plus consciente depuis… Depuis quand d’ailleurs ?
Elle avait du mal à se souvenir des derniers moments de lucidité qu’elle avait pu avoir.
Sa tête lui lançait et pendant qu’elle se battait pour se remémorer ses derniers souvenirs, son corps lui rappelait qu’elle n’était pas au meilleur de sa forme.
Elle avait du mal à se mouvoir et elle ressentait une douleur globale. Ne sachant pas trop d’où elle provenait, si ce n’était pas tout son être qui était mal.
Ses sens lui revenaient petit à petit, elle remarqua qu’elle avait quelque chose sur son visage. Des pansements, certainement.
Son torse semblait aussi recouvert de bandages mais elle ne put pas le vérifier, le moindre mouvement la faisait souffrir.
D’ailleurs, l’ouïe aussi était de la partie. Une machine était reliée à elle et commença à biper de plus en plus fort, ou alors de la même intensité mais elle avait l’impression que le son était de plus en plus strident depuis qu’elle s’était réveillée.
Elle avait l’air seule dans cette pièce.

Elle aurait pu avoir peur, mais il n’en était rien.
Elle voulait juste se souvenir mais tout était flou dans son esprit.
Son frère. Elle était avec lui, puis. D’ailleurs, ou était-il ?
Elle commença à paniquer. Si elle, était dans cet état, quel en était de son frère ?
Elle voulut se lever et sortir pour appeler quelqu’un et qu’on réponde à ses questions. Mais son corps était dans l’incapacité de bouger, elle avait trop mal et était trop faible.
Elle voulut s’exprimer et elle se rendit compte que même sa mâchoire était douloureuse. Sa bouche pâteuse.
Un simple « ah… » sortit de ses lèvres.
Elle entendit quelques bruits et voix à l’extérieur.
Elle avait du mal à distinguer les personnes mais peut-être que quelqu’un arriverait enfin et lui expliquerait tout ceci.

— Non. Vous ne pouvez pas entrer. Elle a besoin de repos.
— On… voulait lui offrir quelque chose pour son rétablissement… c’est pas grand chose mais c’est une corbeille de fruits. Est-ce que vous pourrez…

— Oui oui. Merci pour elle.
Dit l’infirmier.

Le groupe d’élèves repartirent bredouille.

*

Alexandra avait mis en cellule de détention les deux élèves encore dans les vapes et retourna auprès de Gabriel.

Dans son bureau, Alain, Cean et Chris étaient également là.
Cean était en train d’expliquer ce qu’Alain voulait cacher à ses parents, au moment où Alexandra arriva.
Chris se dirigea vers son fils et le giffla. Puis le serrer dans ses bras.

— Pourquoi… ? Tu n’avais pas à nous le cacher…
Dit Chris, l’étreignant encore plus fort, l’émotion dans sa voix.

— … Je sais pas, Papa… je ne voulais pas vous inquiéter pour rien…
Pleurait-il. Soulagé de ne plus porter ce fardeau sur ses épaules.

— Depuis combien de temps… ?
Demanda Alexandra, également émue.

— … Depuis longtemps… à l’époque je venais d’entrer à l’école…
Dit Cean, qui se rappelait qu’il défendait Hélène et Alain.

— Intolérable… Qu’il y ait ce genre de discrimination, c’est intolérable… comment on a pu être aveugle a ce point… ?!
Gronda Gabriel.

Alexandra se dirigea vers Gabriel pour le calmer. Elle-même extrêmement touchée par ces révélations.
Chris relâcha son étreinte pour laisser Alain respirer et se remettre de ses émotions.

— Au début, c’était juste des petites piques… parfois de la jalousie des camarades…
Expliqua Cean, pour atténuer la gravité des brimades.

— Non, Cean. Ce n’est pas acceptable. Cela reste grave. Personne ne devrait à avoir à subir ce genre de comportement.
S’exprima Alexandra.

Le silence se fit dans la pièce.

— Comment va Hélène… ?
Demanda Cean.

— L’infirmier l’a emmenée en civière avec un élève. Celui qui m’a prévenue d’où vous étiez. Elle devrait être à l’infirmerie en ce moment.
J’ai mis en cellule les deux autres que vous avez assommés dans les vestiaires… Tant que tout n’est pas tiré au clair, je préfère ne pas m’exprimer. Une enquête va être ouverte. D’ici là, tenez-vous à carreaux. Cean et Alain, vous pouvez rentrer à la maison. Ne dites rien aux élèves, nous ferons une annonce et les détails ne les regardent pas. Est-ce que c’est clair ?

— Oui maman…
Dirent Alain et Cean en choeur.

— Est-ce que je peux aller voir comment va Hélène ?
Osa demander Alain.

— … je ne vais pas t’en empêcher, tant que tu ne gênes pas le médecin… après je ne te le recommande pas, parce que tu risques de te faire du mal… elle est…

Rien qu’en y repensant, l’émotion refit surface et elle ravala un sanglot.

— Pardon-…

Gabriel serra sa main dans la sienne pour lui signifier qu’il était là.

— Je comprends…
Le coeur d’Alain se ressera et il quitta la pièce. Suivi de Cean.

— Je suis désolé Alain…
— C’est moi qui suis désolé… tu avais raison… j’aurais dû en parler aux parents dès le départ…
— Tu ne pouvais pas savoir… puis maintenant c’est fini…
— … Peut-être… je tiens à aller voir Hélène…
— Moi aussi. Allons-y ensemble.

*

Alexandra essaya de retrouver son calme.
Gabriel, en voyant sa femme dans cet état, eut le coeur qui fit un tour dans sa poitrine.
Chris également.
Il la rejoint pour la serrer dans ses bras et ils se retrouvèrent lui et Gabriel à la consoler, ce qui la fit sourire.

— Merci… ça va aller.
Dit-elle en retirant quelques larmes du bout de ses doigts.

— Son état est si… ?
— Oui… Elle a probablement des côtes de brisées et son visage est déformé. Elle a été droguée… Il faut que je vous raconte ce que l’élève m’a dit…

Après son récit, la rage de Gabriel et de Chris était incommensurable.

— J’ouvre l’enquête dès maintenant pour savoir la vérité sur l’affaire. Qu’ils soient élèves n’empêchera pas la sanction d’être lourde ! N’importe quoi !!! Comment peut-on… ?!

Alexandra prit Gabriel dans ses bras.

— Calme toi…
— Tu ne peux pas me dire ça… c’est ta fille… je la considère comme ma propre fille… rien que d’imaginer ça sur Aurore… ‘Xandra… tu te rends compte… ?

Les larmes de rage montaient aux yeux de son mari.

— Je sais… moi aussi ça me met hors de moi. Mais pour l’instant on ne peut qu’attendre la vérité sur ce qu’il s’est passé. D’ailleurs, il va falloir prévenir les parents d’Ulysse et de son ami…

Chris bouillonnait de rage, que ses enfants soient traités en tant que paria le touchait déjà énormément. Que sa fille soit dans cet état et que des élèves aient pu manigancer ce traitement, il n’en revenait pas.
Ça le dégoutait presque d’être enseignant et de n’avoir rien vu venir, ni pu faire pour éviter cela.
Alexandra laissa Gabriel gérer l’enquête et se dirigea vers Chris, qui l’enlaça en la serrant très fort dans ses bras.

— Je suis tellement désolée…
Sanglota t-elle contre lui. Se sentant fautive d’avoir mis ses enfants dans cette situation.

— ‘Xandra… tu n’as rien fait de mal. Tu nous as donné de magnifiques enfants… moi… je m’en veux d’avoir été aveugle-

— Je suis aussi professeur, je te signale. Je t’interdis de rejeter la faute sur toi !
Je… je pensais que je pourrais peut-être leur éviter les brimades… j’ai été cible avec mon frère lorsque nous étions enfants… je me sens tellement inutile.

— Bon, vous deux là. Vous allez arrêter de dire n’importe quoi.
Gabriel s’exprima pour les gronder.

— Vous n’êtes pas fautifs, et Chris, je te laisse t’occuper de prévenir les parents des deux en cellules. Plus vite ça sera fait, plus vite on pourra aller voir comment se porte Hélène !

— Oui chef… je retourne auprès d’Hélène.
Dit Alexandra en sortant de la pièce.

— Tu crois que ça ira… ?
Demanda Chris. Inquiet.

— Elle est forte… tu parles d’Alexandra ?
S’assura Gabriel, continuant ses tâches pour préparer l’enquête.

— Oui… ma fille est entre de bonnes mains, j’ai confiance.

— Tu la connais… elle culpabilise certainement d’avoir créé cette différence de traitement entre ses enfants. Que les miens soient privilégiés par rapport aux tiens…

— C’est une excellente mère. Je l’ai vue donner énormement d’amour aux miens. Je vois pas en quoi elle devrait culpabiliser.
Défendit Chris.

— Je le sais, et je n’en doute pas, mais c’est Alexandra… elle le pense certainement. C’est à nous de la rassurer.
— C’est vrai… bon j’y vais.
— Essaye de rester diplomate. Je sais que tes enfants sont en jeux… mais garde ton calme. Tu sais ce que c’est d’être parents. Ils n’y sont pas forcément pour quelque chose dans les agissements de leurs enfants. Ils seront jugés en temps et en heure.

— Reçu…
Dit Chris, avec un petit sourire en coin, adressé à Gabriel.

Il avait toujours agi de manière professionnelle mais il savait que dans ce cas particulier, même Gabriel avait du mal à garder son sang froid.

2020.04.12

2 réflexions sur “Gifle

  1. james dit :

    « Chris se dirigea vers son fils et le giffla. « : gifla

    Gabriel qui a du mal à garder son sang froid, tu m’étonnes. j’aurais pas eu sa réserve. J’aurais été directement aller m’occuper d’Ulysse…

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