L’un resta aux toilettes prétexant qu’il n’allait pas bien.
Son ami le nargua en lui disant qu’il ratait quelque chose et que c’était pas de chance.
Celui qui rejoignit Ulysse lui en voulut d’avoir commencé sans lui. Il était en train de s’amuser avec la poitrine de la victime qui ne réagissait pratiquement pas, à part quelques gémissements.
— Ça va, j’ai encore rien fait. Il est où l’autre ?
Dit-il pour se dédouaner.
— Laisse tomber, il a chopé une gastro ou un truc dans le genre.
— Tant pis pour lui. Tu veux commencer par quoi ?
— Hm… j’étais parti pour la tabasser d’abord. T’as dit que tu savais pas combien de temps ça durait les effets, non ?
— Exact.
— Si on la tabasse maintenant, si jamais elle reprend ses esprits, on sera tranquille. Puis ça nous défoulera un peu avant de nous vider les couilles…
— Pas con. J’ai prévu les capotes, au fait.
Dit-il en sortant une guirlande de préservatifs de sa poche.
— T’es le meilleur.
Dit-il en lui en tapant cinq.
— Ici, c’est pas ouf, on la déssape dans la douche ?
— J’ai une meilleure idée, on la tabasse sous la douche, et on s’occupera des fringues après.
Ils la traînèrent jusqu’au coin des douches et ils commencèrent à lui donner des baffes, des coups dans le ventre, dans les jambes. À lui cracher dessus, chacun leur tour.
— Putain ça m’excite grave, j’ai envie de lui éjaculer dessus.
— Bah vas-y, on la rincera après de toute facon.
Elle était recroquevillée sur elle-même, ne sachant pas si c’était de douleur ou juste à cause de l’impact des coups.
Elle avait toujours l’impression d’être dans du coton, tout était flou, les voix lointaines, elle devinait le sol en carrelage et reconnaissait vaguement les douches du vestiaire mais elle n’en était pas sûre.
Même les coups qu’on lui donnait semblaient être adressés à une autre personne, elle n’en ressentait presque pas la douleur. Cette douleur était vivace puis s’estompait comme tout autour d’elle.
Elle n’avait même pas la force de crier ou de parler.
Ils appuyèrent sur le bouton pour déclencher la douche et la laissa couler sur le corps presque inerte d’Hélène.
— Tu crois qu’elle peut se noyer ?
Demanda Ulysse, presque comme si c’était une blague.
— On va vite le savoir.
Répondit l’autre, sur le même ton.
Ils étaient là, spectateurs et amusés par ce qu’ils voyaient.
*
Celui qui était aux toilettes, attendit que son ami parte pour sortir et courir vers l’extérieur.
Il était terriblement mal à l’aise de cette situation et culpabilisait pour Hélène.
Il cherchait quelqu’un, désespérément, un adulte probablement.
Comme avait prévu Ulysse, ce jour-là et à cette heure-ci, les lieux étaient pratiquement vides.
Quelques élèves traînaient encore dans les couloirs pour discuter, mais la plupart étaient en train de rentrer chez eux.
Il essaya la salle des professeurs, avec un peu de chance il restait quelqu’un.
*
Alain était rentré chez lui, mais quelque chose clochait.
Hélène n’était pas là.
Il savait qu’elle devait être rentrée et qu’elle prévenait toujours si elle allait quelque part.
Les mots de son frère retentirent dans son esprit.
« Et s’ils s’en prenaient à Hélène ? »
L’angoisse l’envahit.
Ses chaussures n’étaient pas dans l’entrée.
Il l’interpela. Pas de réponse.
Il courut dans sa chambre, elle n’était pas là.
Il commença à paniquer.
Il s’inquiétait peut-être pour rien.
Si elle n’était pas à la maison, c’est qu’elle était peut-être restée à l’école. Il ne voulait pas inquiéter ses parents pour rien.
Il appela quand même Cean pour être sûr qu’elle n’était pas allée les voir, connaissant sa relation avec Aurore.
— Allô ? Cean ? C’est moi Alain.
Il appelait du fixe.
— Oui Alain ? Il y a quelque chose ?
Demanda t-il.
— Hélène est pas chez toi ?
— Euh non, pourquoi ?
— Pour rien… elle est pas rentrée à la maison, je… je suis un peu inquiet. Elle est peut-être encore à l’école. Je vais aller voir.
— Attends. T’es sûr que ça va ?
Demanda t-il, entendant la détresse dans sa voix.
— … Quelqu’un m’a enfermé dans ma salle de classe. J’espère qu’Hélène va bien. Je te laisse, je retourne à l’école.
— J’arrive. Je viens t’aider.
— Merci…
Lâcha t-il avant de raccrocher.
Cean raccrocha et s’adressa à Aurore qui était dans le salon.
— Je retourne à l’école, Alain a oublié quelque chose là-bas, je vais l’aider. Si maman ou papa rentre, tu leur diras ?
Mentit-il.
— D’accord.
Il avait promis à son demi-frère de ne rien dire.
*
Alain interrogea des élèves au hasard. Avec son tact légendaire, il essaya de se contrôler et être courtois.
Les groupes qu’il abordait ne semblaient pas être au courant.
Quand une personne à part entendit ses questions et l’interpela.
— Ta soeur, tu veux dire cheveux noirs longs bouclés et peau un peu mate ? À peu près de cette taille ?
Mima t-elle.
— Oui.
— Ça fait un moment, mais il me semble l’avoir vue avec un garçon, ils étaient en train de se diriger vers le gymnase. Ils ont dû repartir depuis…
Expliqua t-elle en tentant de se remémorer la scène.
— Merci !
Remercia t-il en courant jusqu’au gymnase.
Cean le suivait.
Comme elle l’avait prédit.
Le gymnase était vide.
— Merde… !
— Alain. Regarde ça.
Cean ramassa un bout de tissu qui ressemblait à une manche de chemise.
— Ça ressemble… à ce qu’elle portait. Ils sont où, putain ?!
S’énerva t-il. Sa voix résonnant dans tout le gymnase.
Après l’écho, le silence revint, mais un bruit de fond était presque imperceptible.
— Tu entends… ?
Demanda Cean.
— Quoi… ?
Alain et sa rage bouillonante l’empêchait de bien entendre, sa colère faisait qu’il n’entendait que les battements de son coeur contre sa tempe.
— Il y a un bruit…. d’eau… ? De douche ?
— Les vestiaires ! S’écria Alain.
Ils coururent jusqu’aux vestiaires et restèrent silencieux pour se diriger vers les douches.
Ils aperçurent les deux garçons en train de rire en regardant le corps d’Hélène sous le jet d’eau.
Alain vit rouge. Il se rua sur Ulysse pour lui asséner un coup de poing au visage, de toute sa force.
Les deux spectateurs se retournèrent et n’eurent pas le temps de se défendre.
— Putain, ils foutent quoi ici ?!
S’exprima Ulysse avant de se prendre le coup et tomber sur le carrelage.
Alain était en train de passer ses mains autour du cou tout en l’enjambant.
Son pantalon était défait et on pouvait voir son caleçon.
Il essaya de ne pas y penser mais l’idée lui traversa l’esprit, qu’il ait pu passer à l’acte sur sa soeur.
Cean donna un coup de poing à l’autre garçon qui essayait de s’enfuir. Il s’écroula sur le sol.
Il se dirigea ensuite sur Hélène pour la sortir de la douche et vérifier qu’elle était encore vivante.
Son corps était gelé, trempé, et ses cheveux étaient défaits et emmêlés devant son visage.
Il ne vit pas tout de suite le rouge à ses lèvres, et quelques boursoufflures sur le visage.
Il dut crier à Alain d’arrêter avant de tuer Ulysse, qui essayait de se défendre.
— Il faut qu’on s’occupe d’Hélène ! Arrête Alain !
La colère le rendait sourd et il avait l’impression que rien ne pouvait l’apaiser tant qu’Ulysse resterait en vie.
Une partie de sa rage était envers lui-même.
De n’avoir pas pris les avertissements de Cean au sérieux.
*
Il ne restait qu’Alexandra en train de ranger des piles de papier lorsque l’élève frappa et entra.
— Oui… ? En quoi puis je t’aider ?
— Madame… C’est grave, dans les vestiaires… il y a une agression…
Dit-il essouflé.
— Pardon ? Calme-toi. Comment ça, une agression ?
— Il faut que vous veniez, tout de suite… !
La pressa t-il.
Elle posa ce qu’elle avait dans ses mains et suivit l’élève avec hâte.
Le voyant essoufflé, elle n’osa pas l’interrompre pour qu’il lui explique les détails.
Elle entendit des bruits de lutte et en s’approchant elle fut prise d’horreur en voyant son fils en train d’essayer d’étrangler Ulysse au sol, et Hélène dans les bras de Cean, inerte.
— Maman… il faut arrêter Alain…
Dit Cean qui essayait de déplacer le corps de sa soeur en dehors de la douche.
Totalement trempée, rien qu’au toucher il sentait qu’elle avait quelques côtes cassées. Il n’était pas judicieux qu’il la porte mais il ne pouvait pas la laisser sur le carrelage humide et froid.
— Hélène… tu m’entends ?…
Demandait-il pour qu’elle donne un signe de vie.
Elle respirait encore mais elle avait probablement perdu connaissance.
Alexandra se précipita sur Alain pour le dégager de sa position. Il lâcha son emprise sur son cou, voyant sa mère, il se calma, mais donna tout de même un dernier coup de poing dans son visage, qui l’assomma sur le sol.
— Je ne sais pas ce qu’il s’est passé ici, mais ça demandera des explications.
Dit-elle en regardant les corps des garçons assommés.
Elle se tourna ensuite vers Hélène.
Elle ordonna à celui qui l’avait amenée ici, de prévenir l’infirmier pour ramener de quoi transporter quelqu’un en soin intensif.
— Quant à vous deux… il faut quelqu’un pour prévenir Gabriel de… tout ceci. Et j’ai besoin de détails…
Alain ne se sentait pas très à l’aise pour aller voir Gabriel et Cean se dévoua pour y aller.
Alexandra s’approcha du corps d’Hélène et fit les mêmes gestes que Cean auparavant, pour savoir si elle respirait encore, tâter son pouls, tâter le corps et vérifier qu’elle n’avait pas des blessures plus graves.
La tension de la découverte était retombée et elle voyait l’état déplorable de sa fille, elle ne put s’empêcher de retenir ses larmes.
— C-comment ça a pu arriver…. ?
Dit-elle en essuyant d’un revers ses yeux, en espérant que cela passerait inaperçu.
— Je suis désolé…
S’excusa Alain. Lui-même sous l’émotion voyant sa soeur dans cet état.
— Ce n’est pas toi qui l’a mise dans cet état, Alain. Tu n’as pas à te rendre coupable…
Dit-elle pour le rassurer.
— C’est ma faute si elle a été prise pour cible… parce qu’Ulysse avait une dent contre moi, à cause de la dernière fois…
— C’est inadmissible. Ce genre de représailles est inadmissible ici.
La colère s’était emparée d’Alexandra.
Il était rare de voir sa mère aussi remontée et il en eut des frissons dans le dos.
— Sache que cela ne restera pas impuni. Ne fais rien d’incensé et laisse-nous nous occuper de ça. Si tu fais du mal à ceux qui sont à l’origine de ceci, cela risque de se retourner contre toi.
— Oui, maman…
Il savait qu’il pouvait faire confiance à sa mère pour cela mais rien que ses mots lui inspiraient la peur.
— Cean a raison. Hélène est mal en point… ses côtes sont probablement brisées et il vaut mieux ne pas la déplacer plus. Il faut qu’on attende la civière.
Les deux garçons ici, ne vont pas tarder à reprendre connaissance. Est-ce que je peux te demander d’aller chercher ton père, déjà pour le mettre au courant de la situation, puis d’autre part pour qu’il prévienne les parents que leurs fils vont devoir répondre de leurs actes.
Elle passa sa main sur les cheveux de sa fille pour dégager son visage et elle remarqua l’étendu des dégâts.
Un autre pincement au coeur suivit.
— Que s’est-il passé… ?
Demanda t-elle dans le vide.
L’infirmier arriva avec l’autre élève qui resta là, à observer la scène, tremblant.
— Je…. je peux vous expliquer…
Avoua t-il.
Pendant que l’infirmier, avec l’aide d’Alexandra, installait Hélène sur la civière, il leur expliqua alors le plan d’Ulysse et qu’il n’avait pas assumé et s’était isolé pour pouvoir prévenir de ses agissements.
— Je… je sais que je suis fautif aussi, je suis terriblement désolé…
Alexandra posa sa main sur son épaule et le remercia de lui avoir raconté tout ce qu’il savait.
— Je ne vais pas te mentir, je ne sais pas quelles seront les sanctions, mais merci.
Est-ce que tu peux aider l’infirmier à emmener Hélène, s’il te plaît ?
Je vais embarquer ces deux-là, en cellule de détention…
Elle utilisa sa magie pour les soulever et lier leurs poignets et les chevilles puis les faire léviter pas loin d’elle.
Il en resta bouche bée.
Sa réputation n’était pas volée.
2020.04.12
« le rouge à ses levres »: lèvres avec l’accent
« qui l’assoma sur le sol »: assomma je crois ? j’ai un doute
le début m’a un peu surpris, surtout la froideur d’Ulysse. cette personne me semble très dangereuses. mais Alain est arrivé à temps. dieu sait ce qu’il se serait passé si cela n’avait pas été le cas.
Je devrais p’tre écrire une version où Alain n’arrive pas à temps… !
Oui, les personnes comme Ulysse sont très dangereuses.
tu fais comme tu veux, mais je suis pas chaud pour une version où Alain n’arrive pas à temps perso 🙂